Pour une nouvelle gouvernance des entreprises
Le système des stock options est largement mis en cause. Il a le défaut rédhibitoire de mesurer le succès des dirigeants à l’aune de critères purement financiers reflétant plus la spéculation que l’évolution de la valeur réelle des entreprises. Je propose un système liant la rémunération des dirigeants au développement réel, économique et social de leurs entreprises.
Il est maintenant reconnu que la pratique des stock options a largement contribué au dérèglement actuel de la finance mondiale. En effet les managers ont intérêt, non pas à augmenter le chiffre d’affaire, ni même les bénéfices de leurs entreprises, mais à ce que leur valorisation boursière soit aussi élevée que possible lors de la réalisation de leurs options d’achat. De plus, cette pratique pousse à emprunter à court terme pour lever l’option d’achat des actions, une pratique qui a eu une grande responsabilité dans le crack financier de l’automne 2008. Bien entendu, les actionnaires rejoignirent les managers pour compter davantage sur la valorisation de leurs actions en bourse que sur la valeur des dividendes, celle-ci devenant essentiellement un facteur, parmi d’autres, dans la spéculation boursière. De ce fait, les marchés boursiers ressemblent de plus en plus à un casino dans lequel les enjeux n’ont plus grand chose à voir avec la création ou la destruction de richesses réelles et non virtuelles.
Est-il possible de changer les règles du jeu pour qu’il reflète la réalité de la production de richesse ?
Sans être nécessairement marxiste, il faut rappeler ici que la production de richesse est la combination d’un facteur travail et d’un facteur de capital matériel. Encore faut-il, évidemment, que la richesse produite trouve acquéreur sur le marché, autrement dit qu’elle soit commercialement utile.
A cet égard la valeur des bénéfices de l’entreprise (hors transactions financières) reflète bien son activité commerciale. Les bénéfices distribués sont donc une mesure de la qualité de la direction de l’entreprise et devrait donc mesurer la satisfaction de l’actionnariat. Autrement dit c’est bien ce critère qui devrait être retenu pour la rémunération des dirigeants, et non une valeur de capitalisation boursière qui n’y est que très indirectement liée.
Il reste que le facteur travail n’est pas pris en compte de manière sataisfaisante dans cette pratique, somme toute classique, du capitalisme industriel (et non financier). Les allocations chômage éventuelles, consécutives à une réduction d’effectif sont prises en charge par la collectivité publique, ce qui n’encourage ni les actionnaires ni les dirigeants à prendre en compte les coûts et bénéfices sociaux de leurs politiques.
C’est pourquoi je propose que la politique salariale des entreprises soit prise en compte sous forme d’un système de bonus-malus appliqué à l’impôt prélevé sur les dividendes distribués aux actionnaires. Une baisse de la masse salariale s’accompagnant d’un malus, c’est à dire à une augmentation du prélèvement fiscal, et une hausse d’un bonus, c’est à dire à une diminution du prélèvement fiscal.
De même la rémunération variable des dirigeants serait fonction non des dividendes bruts distribués mais des dividendes nets, après application du bonus malus.
Dans le même état d’esprit, les commissions de rémunération des dirigeants devraient avoir une composition paritaire entre représentants des actionnaires (avec une place prépondérante donnée aux représentants des petits actionnaires) et représentants des salariés.
Comment devrait on calculer la valeur du bonus malus ? Une piste serait de retenir pour chaque poste créé ou supprimé le coût annuel encouru par la collectivité publique pour l’entretien d’un chômeur, ou, encore, le coût annuel moyen d’un salarié de l’entreprise.
J’avais déjà proposé l’usage d’un bonus malus sur les dividendes à l’époque où le gouvernement socialiste avait dû faire face à des licenciements boursiers. Les ministres de l’époque se contentèrent de m’envoyer poliment une fin de non recevoir. La grave crise que nous traversons permettra-t-elle de faire comprendre que le revenu des actionnaires doit être aussi fonction des coûts externes (ou des profits externes) des politiques menées par leurs entreprises aussi bien dans le domaine social que dans le domaine environnemental (que je n’ai pas abordé ici, mais qui est susceptible d’un traitement similaire). Ainsi l’intérêt rejoindrait-il la morale...
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