TVA géniale, TVA chérie, TVA à réformer
Ces jours-ci, la TVA est mise en vedette.
Elle représente, en sa configuration actuelle, 50% des recettes nettes de l'Etat alors que l'IR ne lui rapporte que 17 % et que l'IS (impôt sur les sociétés) ne lui rapporte que 18%. Les 15% restant provenant d'autres sortes de taxes dont la TIPP (sur les carburants)
La TVA est donc très importante en montant.
Pourtant, son mécanisme est tel que chacun de nous, tant de son point de vue de salarié que de son point de vue de contribuable que de son point de vue de consommateur, la voit peu, en a peu conscience. Nous la payons tous (à proportion de notre consommation) mais nous ne nous en rendons pas trop compte. Du coup, ceux d'entre nous qui n'ont pas d'entreprise à gérer, la connaissent mal. Je me propose d'en parler tant d'un point de vue volumique, que d'un point de vue de justice, que d'un point de vue d'efficacité, que d'un point de vue philosophique.
Etant entendu que j'aborderai comment et pourquoi la réformer à l'aune des déclarations récentes de Nicolas Sarkozy.
Commençons avec un peu d’Impôt annuel sur le Revenu.
Dans l'Histoire du Monde, il a parfois existé un principe d'impôt égal en valeur absolue pour tous. 1000 € d'impôt pour un paysan et 1000 € aussi pour l'empereur.
Mais plus généralement, c'est un principe d'impôt proportionnel aux revenus des individus et à taux unique qui a prévalu. Par exemple 20% pour tous (et cela frappait généralement le foyer, non ses membres pris séparément). Bien des gens auront trouvé ça juste ou équitable puisqu’à coeff égal pour tous, le montant de l’impôt est proportionnel aux revenus. Plus on est riche, plus on paie cher. Ce principe de taux unique ou flat tax est encore très répandu dans le Monde et bien des peuples le réclament en considérant que ce serait un progrès.
Cependant, ici et là, en France par exemple, il a été considéré qu'il serait encore plus juste et plus social que ce pourcentage d'IR augmente avec la richesse. D'où le principe d'un taux d'imposition faible pour les faibles revenus et d'un taux fort pour les forts revenus. Ce concept, qu'on appelle ici impôt progressif et qu’on pourrait appeler exponentiel, propose, sur le papier, une augmentation progressive du pourcentage. Taux de 5% pour les petits revenus, mais taux de 20% pour les revenus moyens, et taux de 50% pour les hauts revenus.
Dans les faits, malgré ce principe théoriquement exponentiel qui se voulait fortement social, on se retrouve en France avec des très riches qui paient 5 % sur leurs revenus quand des gens de la classe moyenne paient 20 %. Quant aux dealers, ils ne paient aucun IR (mais ils paient la TVA sur ce qu'ils consomment).
Cette hétérotélie où l’on a voulu du très social pour se retrouver avec de l’antisocial, est essentiellement due au fait que l’IR est déclaratif, qu'il s'est créé une foultitude de niches d'exonération et que la mondialisation et les domiciliations indéfinies permettent mille esquives.
Voilà pour l'IR
Passons à l'Impôt sur les Sociétés
Alors qu'il pourrait être progressif, alors qu’il serait plus facile à contrôler que l’IR, il a été décidé non progressif, non exponentiel. Bénéfices géants des méga entreprises ou petits bénéfices des TPE, sont frappées du même taux (Il existe bien deux taux mais c’est clopinettes en termes de progressivité). L’IS n’a pas voulu soulager les petites entreprises à petits bénefs.
Un détail dynamique : Lorsque l’IS est fort, par exemple 50%, les entrepreneurs considèrent que chaque € investi -qui réduit leur bénéfice d’autant- ne leur coûte que 0,5 €. Du coup ils sont fortement incités à augmenter leurs investissements. Et lorsque l’IS est faible, comme en ce moment, les entrepreneurs sont moins incités à poursuivre leur course en avant.
Venons-en à l'IC, à l'impôt sur la consommation qu'on appelle TVA.
Relevons au passage qu'un budget d'état pourrait ne provenir que d'IR+IS ou que d'IC mais que nous avons choisi, depuis un siècle, de prélever sur tous les tableaux IR+IS+IC et même sur ce qui reste puisqu’on est maintenant imposé sur la fortune. C’est là que s’était glissé le concept de bouclier fiscal posant qu’en tout état de cause, tous impôts confondus, ils ne devaient pas dépasser un certain pourcentage global.
Le concept de TVA date de 1954. Cette taxe dite sur la valeur ajoutée, correspond en réalité à une taxe sur la consommation. Il a déjà existé des taxes à peu près comparables. C’était celles liées aux déplacements de marchandise. On transportait du vin free tax vers Paris et à l’entrée, fallait payer l’octroi (c’est pour s’y soustraire qu’ont surgi les ginguettes en amont de Paris). Les gabelles sur les différents produits étaient aussi des sortes de taxe à la consommation.
Notre TVA est très intelligente ou diabolique, selon les préférences de chacun. Car pour la première fois, toutes les entreprises deviennent perceptrices et se retrouvent liées les unes aux autres par leurs déclarations. Dans une chaîne de production de 6 entreprises, chacune inscrit des comptes de celle amont et de celle aval dans ses livres. Disons qu’en contrôlant l’entreprise B et D, le fisc voit tout de l’entreprise C (aux multipartenariats près).
Les montants de TVA circulent d’une part de chaque niveau qui a touché au produit (dont le consommateur final) vers le niveau amont et chaque niveau amont envoie sa part vers le fisc. Le circuit est donc complexe, implique tout le monde, impose des facturations, lie tous les niveaux mais curieusement, dans les faits, ce n’est pas si dur que ça à gérer, surtout depuis l’informatisation. Au lieu de faire deux chèques, un du montant HT + un de la TVA, chaque niveau ne fait qu’un seul chèque TTC à son niveau aval, la TVA est à verser à un seul endroit, en un seul chèque global mensuel et ce n’est pas très difficile à gérer.
Chaque entreprise de la chaîne paie certes une TVA sur la valeur ajoutée qu'elle a produite mais elle lui est remboursée par l'entreprise aval qui lui achète sa production intermédiaire. Seul le consommateur final, qui ne revend le produit à personne, n'est pas remboursé de la TVA qu'il a payée à la dernière entreprise de la chaîne. Comme la TVA ne frappe pas du tout les entreprises, elles n'y sont pas allergiques et consentent sans trop de réticences à la collecter pour l'Etat.
Cette taxe à payer une fois par mois est donc géniale et son système permet de faire remonter mensuellement des millions de données économiques vers l’Etat et l’INSEE. Chaque mois, ou plus exactement chaque année, avec les autres indications que fournissent les colonnes des bilans, l’Etat peut savoir combien il s’est consommé de vis de 4 x 40 inox importées de Chine en chaque endroit de notre pays, à 10 mètres près.
Une entreprise qui marche bien, qui produit et vend de la valeur ajoutée, verse chaque mois de la TVA. Comme elle peut vendre moins et donc verser moins de TVA pendant deux ou trois mois, l’Etat peut immédiatement supposer qu’elle souffre. Si un Janvier l’Etat perçoit une chute de TVA de la part des ostréiculteurs d’Oléron, il peut et doit comprendre immédiatement qu’il y a eu un problème. En recoupant ses différentes données, il pourrait savoir s’il s’agit d’un problème de production, de main-d’œuvre, de transport ou de mévente.
J’ignore si l’Etat fait tourner de bons algorithmes ou logiciels d’analyse sur ces montagnes de données mais par exemple en cas de guerre, il serait capital de le faire. TVA + bilans des entreprises apportent donc à l’état énormément d'argent et de renseignements économiques.
Ce nouveau rôle étatique a conduit les entreprises à devenir capitales. C’est cela qui a fait la technocratie dont celle de Bruxelles. Avant c’étaient les shoguns qui formaient l’assise et l'oreille de l’empereur. Maintenant c’est les Sony et les Suzuki. Autrefois on se lançait dans des guerres si les financiers et les barrons se disaient intéressés et prêts. Depuis 1900, on ne s’y lance que si les financiers et les capitaines d’entreprises se disent intéressés et prêts. (A signaler alors que bien des entreprises ont toutefois été forcées de se convertir à la production de guerre, y compris en Amérique où même les pianos Steinway durent fabriquer des planeurs. Au fait, il n'y a pas de TVA aux EU. Il y a une taxe finale)
L’IR n’apporte à l’Etat français que 17% de ses recettes nettes. Les entreprises apportent l’IS + la TVA, 18 % + 50 % soit 68% de ses recettes nettes. Pour peu qu’on considère que les 15% de la TIPP sont également apportés par les entreprises pétrolières, l’Etat dépend des entreprises pour 83% de ses recettes. Et il perçoit ces milliards sans avoir mobilisé le moindre fonctionnaire pour les collecter. Même les frais de timbre pour lui envoyer les chèques sont à la charge des entreprises.
Suivant le principe qui avait motivé les concepteurs de l'IR progressif, la TVA a également été parfois un peu progressive selon le niveau de luxe du produit. Selon les moments, il y a eu plusieurs taux de TVA. Mais au lieu de considérer des niveaux de luxe au sein d'un même type de produit, par exemple entre les différentes classes de pains, on a plutôt considéré qu'il y avait des types de produits indispensables et d'autres qui étaient luxueux.
On a donc frappé tous les pains d'une faible taxe, même ceux que vendait Poilâne, et tous les disques vinyles ont été frappés d'une forte taxe dite de luxe (33,33%).
Actuellement, il y a bien trois taux : 2,1% ; 5,5% et 19,6% et ils semblent marquer comme trois niveaux de luxe. En réalité, le taux de 5,5% s'applique à toute l'alimentation. Aussi bien sur une tablette de chocolat basique que sur des chocolats de chez Le Nôtre. Aussi bien sur des nouilles basiques que sur les homards, truffes et fraises de Fauchon. Le caviar est quasiment le seul produit alimentaire à être taxé au même taux que le PQ, 19,6%
Alors que Liliane Bettancourt parvient à ne payer qu'un petit taux d'IR, tout ce qu'elle consomme de luxueux est frappé aux taux communs (2,1% pour ses médocs et journaux ; 5,5 % pour la bouffe, 19,6% pour le reste) qui frappent pareillement les plus pauvres.
A taux égal, plus le produit est cher HT, plus le montant de la taxe est élevée en valeur absolue. Il y a donc toujours une certaine justice à ce que Liliane paie 5,5 % de taxes sur un pain à 120 € HT. Mais on ne socialiserait fortement que si l'on augmentait le taux d'IC ou de TVA selon le degré de luxe de ce produit. Il serait plus social qu’un pain particulièrement luxueux soit taxé à 70%.
Actuellement, non seulement le taux de TVA sur un yatch est le même que sur un T-shirt soit 19,6 % mais contrairement au T-Shirt, il existe tellement de combines et d'exonérations que la plupart des proprios de yachts n'ont payé aucune TVA. (Rien que le fait d'acheter un yacht en leasing exonère déjà de 50% de la TVA)
Nonobstant son éventuelle augmentation globale pour nous désendetter, il y a un trésor de rééquilibrage social à trouver dans la modification des taux d'IC. Parce que les riches consomment toujours plus que les pauvres, une TVA à taux progressif serait socialement très efficace.
Si la TVA était vraiment appliquée et si sur une Ferrari ou une Bentley elle était de 70 % tout milliardaire ou dealer qui voudrait s’acheter ces voitures devraient payer 70% de taxes en plus. On peut gruger sur l'IR, pas sur l’acquittement de la TVA. (Il y a des pays où les taxes sur les voitures ou tracteurs, parce qu’ils ne sont qu’importés, atteignent des taux supérieurs à 100% et il y a quand même des gens pour en acheter)
Acheter une voiture de luxe à l'étranger où règnerait une TVA plus faible ne permettrait pas de s'exonérer. Elle sera détaxée à l'exportation et retaxée à l'entrée en France. Et la France veillera alors de près aux immatriculations dites de transit.
Bien entendu, si seule la France mettait en place une TVA vraiment exponentielle, il y aura des passages de produits en douce à nos frontières (Cigares, Rolex, qui seraient très taxés ici, entreront alors en fraude). L’importation clandestine de produits de luxe se fera par deux biais. Soit c’est l’utilisateur lui-même qui passera la frontière et je doute que les riches trouvent intéressant de risquer un scandale, soit ce sont des passeurs qui rentreront ces produits en quantité pour les revendre ensuite aux riches et je doute que ces derniers apprécient de se retrouver liés avec des malfrats.
Enfin, autant il est facile de détaxer un produit italien quand on le retaxe à l'entrée en France, l'opération étant officielle et limpide, autant il est difficile de l'obtenir détaxé en Italie si on ne le présente pas aux douanes en l'introduisant en France.
Le trafic restera donc marginal avec un contrôle douanier renforcé et on insistera auprès de nos partenaires européens pour qu’ils adoptent cette TVA très sociale car visant le luxe.
Autant il est facile de tricher sur l'IR parce qu'il est déclaratif, autant il est difficile de tricher sur la TVA car elle est installée selon un procédé de contrôle mutuel par tous. Si l'Etat cesse d'accorder des exonérations, elle sera incontournable
Ceux qui ont essayé d'acheter un costume HT chez quelque confectionneur du Sentier auront vite compris que shunter le circuit complet du commerce est difficile.
Un confectionneur de fringues s'est dédié à la fabrication et à la vente en gros. Quand il a acheté ses 1000 m de tissu, il a payé une TVA à son fournisseur (TVA qu'il va récupérer quand il va vendre plus cher ses costumes aux boutiquiers) Avec 1000 m de tissu, il va pouvoir confectionner 500 costumes. Le fisc le sait. Il doit donc vendre 500 costumes aux boutiquiers. Le fisc voit très facilement ces chiffres. Le confectionneur n'a aucun intérêt à vendre sous la table, hors taxes, un costume à monsieur Bidochon car d'une part, ne pouvant pas le facturer officiellement il ne pourra pas récupérer la TVA qu'il avait acquittée en achetant le tissu afférent et d'autre part le fisc verra qu'il n'a vendu que 499 costumes aux boutiquiers.
Pour qu'un confectionneur puisse vendre des costards au black, sans TVA, il doit acheter du tissu au black. Toute la chaîne doit passer au black. Des confectionneurs le font quand même parce que ça leur procure des revenus en espèces non déclarées, mais il ne leur est pas facile de maintenir le secret et ils risquent de fortes pénalités.
Ajoutons que si un confectionneur vendait trop de costumes HT à des Bidochons, ça se saurait dans le métier. Il serait grillé auprès des boutiquiers et ses collègues le dénonceront.
Ainsi, les ventes de produits sous la table, sont en France et dans tous les pays à chaîne de TVA, très marginales (sauf en Italie). C'est ce qui fait que seules quelques professions peuvent contourner assez massivement la TVA. L'exemple le plus simple tourne autour des restaurants et services à la personne (plombiers, coiffeurs). Dans ces secteurs il se pratique deux escroqueries principales :
- La première consiste à vendre vraiment HT donc nettement moins cher que la concurrence. Le client final économise 19,6 % mais il ne bénéficie d'aucune garantie. L'artisan a l'avantage d'avoir beaucoup de clients et il encaisse des espèces qu'il ne déclare pas (pas d'IS ni d'IR)
- La seconde, la pire, consiste à faire payer la TVA au client mais à ne pas la reverser à l'Etat. Le commerçant gagne sur deux tableaux, non seulement il ne déclare pas son bénéfice (donc pas d'IS, pas d'IR,) mais il garde pour lui la TVA de 19,6% que les clients lui ont versé et qu'en principe il aurait dû renvoyer à l'Etat. C'est ce que font certains importateurs de voitures qui se volatilisent chaque semaine (Si le fisc découvre cette combine, il réclame la TVA aux acheteurs qui devront donc la payer une seconde fois)
Nonobstant quelques cas d'escroquerie formant une perte de 50 milliards pour l'Europe entière, le principe de la TVA est génial car il fonctionne selon un jeu de contrôle ou d'obligations mutuelles sur toute la chaîne de fabrication d'un produit et même les consommateurs en sont les contrôleurs quand ils exigent une facture et paient avec trace. Seules les chaînes ultra courtes peuvent la contourner. Un cultivateur peut mettre 1000 kilos de patates de côté et les vendre sur le marché sans rien déclarer mais à condition qu'il déclare tout de même une autre masse de produits par ailleurs. Disons qu'il peut gruger sur 10% de son CA.
Les artistes aussi peuvent très facilement vendre directement aux clients finaux sans aucune sorte de déclaration ou alors selon une facture très sous estimée.
La TVA est globalement un impôt incontournable, surtout pour les produits complexes qu'adorent les riches. Il est donc très important de concentrer nos efforts dessus et de la peaufiner.
Concernant l'épithète "Social" qui est accolé à TVA depuis quelques jours, n'en faisons pas un plat. On sait tous qu'il faut soit baisser les dépenses de l'Etat pour le désendetter (avec un gel des grands chantiers afférents) soit augmenter les impôts, soit les deux à la fois. Quel que soit le joli nom qu'on donnera à une nouvelle taxe, ce sera une taxe point.
Cependant, chaque fois qu'un Président joue au malin en attribuant une épithète démagogique comme "Social" à un nouvel impôt, il faut le prendre au mot et récupérer tout ce qu'on peut de ce "Social" qu'il invoque. Il faut donc féliciter Sarkozy pour son souci social mais lui dire que tant qu'à faire, il faut la rendre fortement et directement sociale cette TVA.
Certes, monsieur le Président, les rentrées supplémentaires que vous tirerez de l'augmentation de la TVA rempliront les caisses de l'Etat ce qui pourra alléger un autre prélèvement, par exemple les charges des entreprises, ce qui aura peut-être un effet social. Mais il serait beaucoup plus sûr et plus directement répartiteur que la TVA soit d’abord-aussi réformée pour devenir nettement plus progressive selon des critères de luxe des produits qu'elle frappe. Un pain simple devrait être frappé d'un taux de TVA minuscule et un pain de très grand luxe devrait être frappé d'un taux de TVA élevé.
Monsieur le Président, alors que la TVA constitue la plus grande recette fiscale, refuser qu'elle soit progressive selon un indice de luxe des produits qu'elle frappe, c'est montrer que concernant l'IR et même l'IS, vous refusez la progressivité. Ca veut dire que malgré l'apparente et faible progressivité de l'IR, vous n'êtes pas du tout fâché qu'il existe mille moyens de le contourner. Ca veut dire que concernant toutes les sortes de taxes, vous ne voulez pas que les riches subissent des taux supérieurs aux pauvres. Ca veut dire que vous verriez bien que nous soyons tous taxés au même taux, par exemple 10%.
Votre conception est probablement égalitariste, libérale, égoïste et agressive mais n’est certainement pas sociale, humaniste, partageuse et réparatrice.
(C'est pourtant le principe de taxe unique à taux unique que réclament actuellement bien des peuples)
Les charges sociales de nos entreprises les rendent non compétitives ? La productivité française est pourtant au top. Excellente productivité mais mauvaise compétitivité ? Est-ce possible ?
Oui. On peut se retrouver dans un pays où 1 000 000 d’avocats produisent 1000 milliards de CA, ce qui, selon le rapport PIB / Actifs, donnera une productivité prodigieuse pendant que 10 millions d’ouvriers seront au chômage.
Par ailleurs, ces 1000 milliards de CA formeront un superbe PIB, mais il n’y aura eu aucune exportation. Et comme aucun ouvrier n’aura travaillé, 100% des biens seront importés. Merveilleuse productivité mais compétitivité désastreuse, déficit commercial abyssal donc monnaie de singe, donc importations de plus en plus chères donc famine (Une monnaie faible favorise les exportations mais à condition qu’il y ait quelque production à exporter)
Cela posé, il est étrange que ces charges salariales soient si élevées, si coûteuses en valeur relative et absolue alors qu'on n'en perçoit pas, à même hauteur, le bénéfice tiré par les employés. Il y a à réformer l'usine à gaz qui gère tant de prélèvements pour ne distribuer que si peu en retour. Si l'on ne remet pas en cause la compétitivité des administrations qui gèrent cet énorme prélèvement salarial, elles pourront réclamer toujours plus pour redistribuer toujours moins.
Il n'est pas logique que concernant des sommes en jeu au niveau des salaires, il ne soit exigé de compétitivité qu'aux entreprises qui gèrent les 45% de ce salaire et pas aux administrations qui en gèrent pourtant les 55%.
Les entreprises sont sous la coupe des entrepreneurs et les administrations sous celle du Président. Si les administrations ne sont pas compétitives, si elles dévorent 55% des charges pour ne livrer en retour que des services minuscules, c'est que le Président les gère mal.
A l'époque paternaliste où les charges salariales étaient de 3 %, où les Présidents de la République ne faisaient qu’inaugurer des ponts et foires, les entrepreneurs géraient quasiment tout, le logement, la bouffe, la santé, la retraite, les accidents et on n'avait pas trop à se soucier de l'efficacité de l'Administration qui gérait ces 3%. Mais à notre époque post coloniale et paternaliste où l'Administration gère 55% des salaires, il serait logique qu'elle soit la première à devoir rendre des comptes en matière de compétitivité.
Cela rappelé, Monsieur Sarkozy, si vous voulez soulager les prélèvements sociaux sur les salaires donc le coût de la MO en France, en prélevant un montant équivalent sur une TVA majorée pourquoi pas. Mais tant qu'à faire de la modifier, autant la rendre progressive selon un indice de luxe. Et ce seront ainsi ceux qui consommeront le plus de produits de luxe qui participeront le plus au soulagement de nos entreprises.
Concernant un taux de TVA progressif selon le niveau de luxe des produits et services, mettons que l'on crée 5 niveaux.
Il ne faudrait pas prétendre que 5 taux de TVA ne créeraient pas de complications. Mais nous vivons déjà avec 3 taux de TVA (très mal répartis) et l'informatique nous aide à opérer des tris et calculs automatiques.
Prenons donc un marchand de gaufres qui vend 5 sortes de gaufres des plus simples aux plus luxueuses. Il peut sembler compliqué pour lui de facturer à ses clients selon divers taux de TVA. En fait il vend chaque jour la même gamme de gaufres et n'a donc à faire ses calculs de prix qu'une seule fois par an. En début de saison, il fait ses approvisionnements : farine simple, lait simple, confiture simple, confiture semi luxe, confiture luxe. Chacun de ses fournisseurs lui aura facturé ces différents ingrédients selon les divers taux de TVA. Grâce aux tags et à l'informatique, ces divers taux sont automatiquement retranscrits dans ses livres. Ca ne présente aucune difficulté de facturer 5 gaufres de niveau de luxes différents selon 5 taux de TVA.
Il y aura dans les livres comptables, 5 colonnes de TVA au lieu de trois actuellement.
La plus grande difficulté résidera dans la détermination, par les services fiscaux, du niveau de luxe des produits. A quel niveau de luxe, doit-on classer la Nutella ? Les embarras ne se situeront que là. On se retrouvera alors avec les débats similaires à ceux qu'il y avait eu sur les disques vinyles à l'époque où ils étaient considérés "luxe" mais d'un point de vue générique (tous les disques étaient classés luxe, ceux de Charden comme ceux de Karajan)
De nos jours, nous aurions à classer non pas de manière générique en posant que tous les téléviseurs sont luxueux mais en classant les produits entre eux au sein d'un même genre Il y aura donc 5 classes de téléviseurs, 5 classes de vélos, 5 classes de produits à fumer, 5 classes de montres...
Et je pense qu'il faudra 5 couleurs d'étiquettes de prix afin que les clients sachent bien où ils mettent les pieds.
Si l'on ne veut pas s'embêter avec les classements ni avec 5 taux différents, il est possible de procéder selon un autre principe.
Nous pourrions poser que tous les produits et services soient frappés du même taux de TVA mais appliqué au prix HT de la pièce, du kilo, du litre ou de l'heure, prix qui serait élevé au carré
Par exemple 1 % du prix HT (au kilo, au litre, à l'heure, à la pièce) élevé au carré
Prenons trois pains de classes différentes. Ils sont certes vendus à la pièce mais ils peuvent sans problème être rapportés au kilo (les magasins affichant déjà des millions de produits en prix rapporté au kilo ou au litre)
Le premier, très simple, vaut 20 € HT le kilo, le second, semi luxueux, vaut 50 € HT le kilo, le troisième, très luxueux, vaut 80 € HT le kilo
TVA du premier = 1% de 20² soit 4 € par kilo Ici, la TVA représente 20% du prix HT
TVA du second = 1% de 50² soit 25 € par kilo Ici, la TVA représente 50% du prix HT
TVA du troisième = 1% de 80² soit 64 € par kilo Ici, la TVA représente 80 % du prix HT
Ainsi, sans s'être cassé la tête avec plusieurs taux, sans avoir eu à débattre du classement des pains, on se retrouve bien avec des proportions de taxes plus élevées sur les pains chers au kilo donc luxueux.
Alors que le chiffre de 1% semble convenir dans le domaine des pains, il faudra peut-être le passer à 0,8% dans le domaine des voitures
Les différences de classes de fortune posent des problèmes complexes. A part les gagnants du Loto, ceux qui ont beaucoup d’argent ont aussi beaucoup de pouvoirs. On ne peut pas lisser ou résoudre les différences sociales protéiformes et complexes en appliquant une formule de calcul d'impôt trop simple.
Dans l’urgence, le cerveau humain préfère les formules simples à calculer, à expliquer, à justifier, à rhétoriser. Du coup, nous en sommes venus à adorer les formules linéaires en % simple. Nous avons longtemps réfléchi, discuté et ferraillé en articulant autour de % simples
Il serait temps de calculer notre justice sociale et écologique en gambergeant en fonctions exponentielles car les milliardaires, les banquiers en particulier, nous y soumettent déjà depuis un siècle. Nos découverts et agios ne sont pas frappés de formules linéaires mais bel et bien exponentielles.
Arrêtons avec le lissage linéaire tellement dépassé qu'on se croirait encore aux chiffres et opérations romaines d'avant Fibonacci et passons au lissage exponentiel. La TVA, la taxe foncière, la taxe d'habitation, les droits de succession, la vignette, l'IR, l'IS, toutes les taxes doivent passer à des formules exponentielles. Les fortunes et pouvoirs s’acquièrent désormais à des vitesses exponentielles, il faut donc que les taux d’imposition soient exponentiels. (Le magazine Forbes sait classer les niveaux de fortune mais ne sais pas classer les niveaux de pouvoir)
J'évoque les exponentielles mais c'est à prendre de manière intuitive. Tout le monde n'étant pas familier avec elles, je vais en raconter une certaine réalité afin que chacun ait une idée de ce qu'elles sont. Graphiquement parlant, les progressions linéaires se traduisent par une ligne droite plus ou moins inclinée du genre y = Ax et les progressions exponentielles par une courbe qui ressemble aux paraboles du genre y = x².
Concernant la puissance des sons, alors qu'avec nos oreilles nous classerions volontiers trois sons de puissances différentes en disant que le son C est deux fois plus puissant que le son B qui est lui-même deux fois plus puissant que le son A, leur puissance, selon la réalité physique, serait plutôt dans une progression exponentielle. Disons qu'il faut qu'un haut-parleur secoue l'air 300 fois plus puissamment pour que notre oreille ait l'impression d'un son seulement deux fois plus puissant.
Il se produit donc un effet d'amortisseur très important dans notre processus de perception auditive. Et il en va de même pour tous nos sens. Même pour un coup de bâton sur la tête ou pour un parfum.
Et concernant la perception que nous avons des écarts sociaux, c'est similaire. Nous percevons des écarts de richesses et pouvoirs linéaires alors qu'ils sont en réalité exponentiels.
Même Dany Boon, qui ne raisonnait que de manière linéaire, accumule soudainement, le jour de son succès, une fortune de manière exponentielle grâce au phénomène de bouche à oreille, grâce à l'effet de "l'avion" ou pyramide de Ponzi. Chaque spectateur satisfait en parle à 4 personnes qui en feront autant et en un mois, buz faisant, 13 millions de places sont vendues.
Parfois par hasard, certains d'entre nous ont accédé au pouvoir et à la fortune de manière exponentielle. Et alors qu'ils s'habituent à ne plus raisonner qu'en exponentielles, la masse des quidams, pourtant largement dotée de bacheliers, en reste aux raisonnements et calculs linéaires.
Le lissage des inégalités par des formules d'impôt linéaire était encore à peu près valable jusqu'en 1800 car il n'y avait quasiment personne, à part quelque Richelieu pour être infiniment riche d'argent et de pouvoir. Mais depuis 1800, ces formules linéaires sont tellement dépassées qu'on se retrouve avec des exp-milliardaires qui crient "Au secours, imposez-moi davantage, je ne sais plus quoi en faire de mes milliards exponentiels"
L'énergie cinétique d'un véhicule est proportionnelle non à sa vitesse mais au carré de sa vitesse. Pour le freiner, il faut donc que le frein développe une contre énergie progressant elle aussi en puissance au carré. C'est ce que font à la fois nos muscles de la jambe mais aussi nos systèmes d'assistance au freinage. Les véhicules du futur comporteront de plus en plus de calculateurs qui tiendront compte de la vitesse pour offrir, à pression égale sur la pédale, un freinage progressant en V².
Les croissances vont désormais si vite qu'un individu pourrait démarrer une entreprise en Janvier et devenir maître du Monde en Novembre. Lorsque sa feuille d'imposition lui parviendra, il la foulera à ses pieds en lâchant un "Vae victis"
Pour freiner le développement de la puissance exponentielle des riches, individuels ou en groupes, (Cf. MSF, Google, Facebook), il faut des freins à puissance exponentielle.
En l'occurrence, la TVA, bien qu'elle représente la plus grande part de nos recette fiscales, bien qu'elle frappe la consommation et bien que la consommation des riches soit pantagruélique, ne peut à elle seule freiner les enrichissements exponentiels.
C'est l'ensemble de nos mesures sociales donc l'ensemble de nos discours sociaux qui doivent passer du modèle linéaire au modèle exponentiel.
Si l'on est effrayé par l'inconnu que représente la rhétorique exponentielle, on pourrait proposer de mettre en place des dispositifs interdisant tout début de processus exponentiel. On contiendrait ainsi le Monde au linéaire plus simple à manier.
Autant rêver d'interdire le bouche à oreille, la rumeur, le scandale, les hystéries collectives, les catharsis.
Car la nature est bourrée de x², de ex et de ln. La mécanique céleste, la course des étoiles, les orbites, la gravitation universelle, les réactions en chaîne, le développement microbien, même un pet, tout est régi selon des mécaniques linéaires et exponentielles. Il serait donc plus réaliste d'équiper nos régulateurs sociaux de principes exponentiels et de réfléchir exponentiel.
La TVA étant la plus grande source de recettes fiscales, celle-ci pouvant très logiquement et facilement devenir très sociale grâce à 5 taux, il est regrettable qu’elle soit soumise aux contraintes européennes, à l’harmonisation.
La directive 2006/112/CE de Bruxelles laissant à chaque état une latitude de TVA entre 5 et 25 %, faisons avec. Posons un taux minimum de 5% sur les produits basiques, un taux maximum de 25% sur les produits les plus luxueux et trois autres taux intermédiaires
(Le taux particulier de 2,1% que nous avons en ce moment sur les médicaments et les journaux ne pourra probablement pas être étendu à l’alimentation de base. Quant aux taux Corses, eux seuls y ont droit)
Il ne s’agit pas de cracher sur la « TVA sociale » de Sarkozy. Il ne s’agit même pas de refuser le transfert d’une partie des charges salariales sur la TVA, ces histoires de vases communicants devraient nous laisser froids.
Ce qui importe c’est de profiter qu’il veuille tripoter la TVA et qu’il invoque le « social » pour le prendre au mot et le conduire à réformer la TVA pour qu’il y ait plusieurs taux selon le niveau de luxe de ce qu’on consomme.
J’aurais bien aimé faire plus court mais il y avait tant de choses à dire sur cette TVA que tout le monde paie 30 fois par jours, que peu connaissent et dont il va être fortement questions dans les semaines qui viennent.
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