Une crise pour rien
Aux Etats-Unis où les réductions d’impôts de George W. Bush ont favorisé les plus aisés, les salaires de Wall Street ont enregistré des quasi records en 2010 alors que les revenus des travailleurs moyens n’ont même pas augmenté de 2% sur la même période. Ces tendances se retrouvent du reste dans tous les pays aux économies développées car – reconnaissons-le – l’écart se creuse encore plus depuis deux ans entre le gros capital et les moins favorisés. Nous avons eu en fait une récession où les riches ont pu et su s’enrichir au détriment et à la barbe des pauvres et de la classe moyenne.
Contrairement aux espérances suscitées à la faveur d’une crise dont un des rares mérites aurait été de niveler par le haut les revenus exorbitants afin de les répartir un peu plus équitablement au sein de la société, le fossé entre nantis et laissés pour compte ne s’amenuisera pas. A cet égard, si les enseignements des tourmentes financières sont multiples, les pauvres ont appris à leur dépens que les gouvernements ne s’appliquent à renflouer que les riches. La conjoncture économique peut tanguer à volonté sans que ceux qui ont la chance d’être au sommet de la pyramide des revenus s’en aperçoivent le moins du monde. Car l’austérité est un terme inconnu parmi cette caste qui se prépare en 2011 à dépenser encore plus que l’an dernier, fusse au dépens de sa propre épargne. Et les pressions inflationnistes qui menacent de réduire comme une peau de chagrin le pouvoir d’achat de la classe moyenne glisseront sur les plus riches comme sur du téflon.
Cette crise du crédit n’était-elle pourtant pas supposée inaugurer une ère nouvelle faite de rigueur synonyme d’un secteur financier maintenu sous contrôle ? Les plus hauts revenus n’étaient-ils pas attendus au tournant d’une solidarité enfin retrouvée et ce pour le plus grand bonheur de l’intégralité des contribuables ? Les riches sont-ils donc à ce point bénis par une providence qui les condamne – par une sorte de mythe de Sisyphe à rebours - à un enrichissement éternel ? La réponse est et restera sans équivoque affirmative et ce tant que les gouvernants se dévoueront à renflouer, non un secteur industriel pourtant moribond, mais un monde de la finance qui emploie désormais les plus favorisés. Et tant mieux si ces injections de liquidités gonflent au passage les valorisations des marchés des actions et des matières premières, bénéficiant ainsi aux « hedge funds » ainsi qu’à tout le spectre des investisseurs…
Car la globalisation ne profite qu’aux plus riches, c’est-à-dire à ceux qui se détournent de leur économie nationale pour placer et parier sur les marchés émergents et autres investissements spéculatifs. C’est ainsi que le citoyen lambda se désole de dépenser toujours plus pour son plein d’essence pendant que le haut de l’échelle tire parti des fluctuations pétrolières sur les places internationales ou participe à des fusions-acquisitions ou à d’autres opérations fructueuses à l’autre bout du monde dans une indifférence royale pour les drames qui se jouent dans son pays, voire juste en face… Nous n’apprendrons décidément jamais rien et c’est dommage car la crise et son intensité dramatique des années 2008 et 2009 aurait pu nous rendre – non pas plus sages, ne rêvons pas – mais au moins un peu plus solidaires…
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