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Vins de Californie : le point sur le 4e producteur mondial

Eh oui, après les trois pays de la « vieille Europe » (Italie, France, Espagne), la Californie, avec plus de 200.000 hectares, est incontournable dans la production du vin. Pour en parler, on en parle. Un bon nombre de « confrères », la plupart anglo-saxons (ceci expliquant peut-être cela) ne manquent pas d’arguments pour vanter la qualité des vins californiens. Alors, où en est-on ?

D’abord, il faut situer l’entité. Le pays est grand et les conditions climatiques ne sont donc pas les mêmes à San Diego, au sud, ou à Mendocino, au nord. Pour mieux comprendre les vignobles californiens, il faut savoir que le pays possède deux importantes particularités géographiques :

- La première, c’est l’influence constante de l’océan Pacifique, dont les eaux côtières sont très froides (il est toujours étonnant de regarder les dizaines d’otaries dans la baie de San Francisco). Pourtant, la Californie se situe très au sud, à la même latitude que l’Espagne ou l’Afrique du Nord. Le soleil frappe jour après jour, chauffant l’air comme dans un sauna. Cependant, vers midi, une brume marine se lève à l’horizon pour rapidement se transformer en un banc de brouillard s’avançant dans la baie de San Francisco, comme aspiré par quelque force invisible.

Par temps chaud, le brouillard touche toutes les vallées montagneuses donnant sur la baie de San Francisco. L’air se réchauffe et s’élève, créant un vide qui aspire l’air froid du Pacifique, et avec lui, le brouillard formé au large par le soleil matinal. Dans la chaude Californie, sans ce moyen de rafraîchir le raisin, il serait impossible de prolonger la période de mûrissement et donc de produire de bons vins.

Aussi, toutes les régions produisant de bons vins (à l’exception de deux zones où l’altitude remplit le même rôle) sont-elles situées là où une brèche dans la chaîne côtière crée un entonnoir dans lequel s’engouffre cette couverture d’air froid. Et, curieusement, plus on va vers le sud, plus ce froid devient vif.

Les vignobles les plus septentrionaux du comté de Mendocino sont considérablement plus chauds que ceux de la vallée de Salinas, à 160 kilomètres au sud de San Francisco. L’effet d’entonnoir y est aussi violent qu’un coup de vent hivernal. D’ailleurs, on y laisse souvent les raisins mûrir jusqu’en novembre. 160 kilomètres plus au sud, vers Los Angeles, dans la vallée de Santa Maria, le raisin mûrit difficilement et doit lutter pour recevoir un peu de soleil à travers la nappe de brouillard.

- La seconde particularité géographique de la Californie consiste en une chaîne montagneuse nommée la Chaîne côtière. Lorsqu’il n’existe pas de brèche créant un effet d’entonnoir, les vallées situées en arrière de cette chaîne s’avèrent de véritables fournaises. Bien qu’un climat aride et brûlant rende impossible la production de bon vin (à l’exception des ersatz de “portos” et de “xérès”), l’irrigation (on s’en doute) permet d’obtenir une énorme quantité de raisins, qui mûrissent très rapidement et, grâce à la sécheresse de l’air, ne sont pratiquement pas attaqués par les pourritures sévissant dans les vignobles les plus humides. La Vallée centrale s’étend sur 640 kilomètres, pratiquement jusqu’à Los Angeles. De Sacramento à Bakersfield, sur 200 kilomètres de large se trouve concentré le plus gros de la production californienne.

L’irrigation est un des facteurs qui me laissent perplexe : sous prétexte qu’il fait trop chaud, faut-il arroser ou irriguer ? Sur ce principe, pourquoi ne pas faire pousser de la vigne sous serre, ou, mieux encore, carrément en laboratoire ? Je vous laisse réfléchir à cela.

Les régions

* North Coast
- Le Napa County s’étend le long de la vallée de Napa, de Carneros, sur la baie, jusqu’aux chaudes sources thermales de calistoga, dans le Nord. Il comprend de petits zones des vallées de Chilse et de la Pope à l’est, d’Howell Mountain au nord, et de certains contreforts escarpés des Mayacamas Monutains, à l’est. De bons vignobles, dont les deux tiers sont plantés de variétés françaises classiques ainsi que d’une bonne quantité de Johannisberg Riesling et de Zinfandel.

Carneros (“moutons”, en espagnol), est rafraîchi par les brises et brouillards de la baie. Au premier abord, le paysage, avec ses petites collines herbeuses et ondulantes, fait plutôt penser à une région de pâturages (ce qu’elle était). Les cépages sont le pinot, le chardonnay et le sauvignon, rien de moins excentrique.

Au nord de la petite ville de Napa, le fond plat de la vallée disparaît sous les vignes, tandis que de chaque côté les versants montent graduellement vers les arbres et les rocs des montagnes. D’Oakville à Saint Helena, le climat se réchauffe progressivement jusqu’à devenir une région II. On trouve ici une bande d’alluvions, le Rutherford Bench, d’où, selon les commentateurs de la région, la plupart des meilleurs rouges de cabernet-sauvignon de Californie tirent leur origine.

Le haut de la vallée, autour de Calistoga, est une région chaude, mais sujette aux gelées de printemps. Bien qu’on y produise du bon Zinfandel, les meilleures exploitations utilisent surtout les raisins plus frais du sud de Napa, ou sont installées, dans la fraîcheur des montagnes.

- Le Sonoma County, plus diffus, couvre neuf AVA différentes.

Mordant également sur le territoire de Carneros au sud, lui aussi possède quelques vignobles cachés dans la montagne. La plupart des meilleures exploitations de Sonoma, relativement nouvelles, tentent encore de se bâtir une réputation. Jusqu’aux années 70, le vin de Sonoma était généralement vendu pour servir aux coupages, mais au cours des vingt dernières années le vignoble y a triplé et les plantations de cabernet-sauvignon, de pinot noir, de sauvignon et de chardonnay s’y sont multipliées par quinze. On ne plaisante pas.

La vallée de Sonoma traverse un panachage de terres agricoles, de banlieues et de vignobles jusqu’à Santa Rosa. De là, au nord de Cloverdale, s’étend le groupe le plus concentré d’AVA de la Sonoma. Green Valley, à l’ouest, est une des régions les plus fraîches de Californie. Chalk Hill, à l’est, possède de nombreuses exploitations importantes.

Les trois principales AVA de Sonoma sont Russian River, Dry Creedk et Alexander Valley. Russian River était à l’origine connue pour son vin en vrac et son mousseux , et l’on commence à y trouver des blancs intéressants, notamment de sauvignon.

Tout au nord, la plus grande partie de la région de Mendocino, étonnamment tempérée, est classée région III ; la chaîne côtière y est continue. Les meilleurs vins proviennent du Zinfandel (c’est l’un des meilleurs cépages, remarquable en Afrique du Sud, notamment), voire des mousseux.

*Central Coast

La région est comprise entre la baie de San Francisco et San Luis Obispo.

L’Alameda County comprend la Livermore Valley, qui avec Napa Valley, fut l’aire d’origine des vins de qualité de la Californie.

Le Santa Cruz County couvre peu de vignobles, mais certaines des meilleurs exploitations vinicoles de Californie sont perchées dans la montagne, entre San José et la mer.

Le Santa Clara County et le Monterey County, sont des régions intéressantes, la dernière ayant ses meilleurs vignobles dans l’AVA Arroyo Seco.

Le San Luis Obispo County a également évolué d’une manière phénoménale, en superficie, passant de quelques petites centaines d’hectares à des milliers d’hectares de vignobles, en moins de vingt ans. Ici aussi la brise rafraîchissante est de première importance, particulièrement dans l’AVA Edna Valley où le chardonnay mûrit très lentement jusqu’à l’automne.

L’AVA Paso Robles, plus chaude, est cependant rafraîchie par l’altitude ; cela donne au Zinfandel et au cabernet une réelle intensité.

Le Santa Barbara County, plus au sud, comprend l’AVA Santa Maria Valley, trop froide, et l’AVA Santa Ynez Valley, un peu plus chaude. Firestone et Sanford produisent de bons vins blancs de sauvignon et de chardonnay.

*Central Valley
C’est la région des entreprises titanesques. Pas grand chose à retenir.

*Sierra Foothills
C’est la région même de la célèbre ruée vers l’or, au nord-est de San Francisco. Elle est centrée sur le comté d’Amador. Le meilleur vin est une nouvelle fois le Zinfandel, ce qui prouve qu’il est certainement préférable de planter ce type de cépage plutôt que de ne planter que des cépages à la mode comme le merlot ou le chardonnay (voir plus haut).

*Southern Coast
Deux sous-régions, San Bernardino et Riverside, où j’ai rarement dégusté des vins qui méritent de rester en mémoire.

Les cépages

N’en déplaise à certains, je pense que, en Californie comme n’importe où, il faut, pour accèder à une reconnaissance, planter des cépages qui « collent » aux sols. Il est donc tout aussi ridicule de planter du gewurztraminer en Languedoc (si, si, on l’a fait) que du chenin au fin fond de la Sonoma Valley, sous prétexte que ces cépages sont bons et donnent d’excellents résultats ailleurs (en l’espèce, respectivement en Alsace et en Loire). D’autant plus qu’il faut savoir de quels clones on parle, et que bien peu soient réellement comparables...

Il aurait donc peut-être fallu « créer » des cépages typiquement californiens ici (l’exemple du Zinfandel s’en rapproche), plutôt que de se contenter de prendre le meilleur ailleurs. Là encore, on revient à l’ancienneté historique en la matière, que l’on retrouve aussi bien en France qu’en Italie.

Merlot
Le merlot de Californie est régulièrement assez séduisant (c’est un cépage « facile »), avec une robe allant de grenat à rouge foncé, un arôme fruité et un bouquet aux nuances d’herbe, de groseille et de cerise. Un ajout trop important de goût « boisé » peut néanmoins vite le déstabiliser.

Cabernet-sauvignon
Il se cultive dans un sol bien drainé et un climat tempéré, et ses rendements sont de 7,5 à 12 tonnes à l’hectare. Le cabernet-sauvignon de Californie possède un arôme ample et une structure assez ferme, où l’on perçoit les tanins et une certaine âpreté. Là encore, attention à la surmaturation ou au boisage (certains sont à la limite de l’écœurement comme nos « vins de garage » bordelais), sinon, on en trouve d’excellents.

Zinfandel
Je n’ai jamais été emballé par le Zinfandel rosé. Par contre, c’est certainement avec les rouges provenant de ce cépage que l’on a vraiment l’impression de découvrir un nouveau style de vin ici. Il produit un vin parfumé, intense, rond et ample en bouche.

Pinot noir
Il est surtout cultivé sur les régions côtières (Carneros, Monterey, Santa Barbara...). Les rendements sont de 5 à 7,5 tonnes à l’hectare en moyenne, ce qui n’est pas rien. Souvent plus colorés que nos rouges bourguignons (précision : la couleur na rien à voir avec la qualité), ils sont assez séduisants mais souvent courts en bouche.

Chardonnay
Un cépage très planté en Californie (il se comporte pourtant mieux dans les régions côtières), et ses rendements sont de 5 tonnes à l’hectare pour une bonne année. Attention à certains vins trop « gras » (manque d’acidité).

Chenin blanc
Ou French Colombard. Plus de 80% sont concentrés dans la chaude vallée centrale où le raisin est vinifié en vin de table bon marché.

Sauvignon
Le sauvignon blanc, connu aussi sous le nom de fumé blanc, fut introduit en Californie il y a plus de cent ans dans les sols graveleux autour de la baie de San Francisco. Quelques-uns sont savoureux.

Les appellations

Il ne faut pas comparer les appellations californiennes à celles de la France, de l’Allemagne ou de l’Italie, beaucoup plus rigoureuses.

1/. “Californie”, où 100% du raisin dans un vin doit provenir de l’État de Californie. Les vins portant cette appellation sont souvent issus d’un mélange provenant de différentes régions de l’État et peuvent avoir également un millésime.

2/. Une subdivision politique, le comté. Par exemple, le comté de Mendocino. Un minimum de 75% du raisin doit provenir du comté.

Les appellations multi-comtés sont permises si les pourcentages de raisins récoltés dans chaque comté sont indiqués sur l’étiquette.

3/. L’AVA (American Viticultural Area), une subdivision géographique : un minimum de 75% du raisin doit provenir de cette zone.

4/. Le nom de vignobles individuels où 95% du raisin de tels vins doit provenir de ce vignoble.

Les vins

Après la mode des désastreux wine coolers (un mélange de vin, de jus de fruit et d’eau gazeuse), le pays a tenté de résorber l’excédent de sa production de raisin de la Vallée centrale en lançant une politique vinicole de grande envergure, autrement dit, à “l’américaine”.

Hélas, la plupart des vins courants californiens sont vendus sous une simple appellation de marque ou sous un nom générique, sans se gêner (on a vu le terme de « chablis » par ex.). Faute d’une réelle politique d’encépagement, les vins de qualité sont tous pratiquement issus des mêmes cépages internationaux, et (un hasard, sûrement), typiquement français. Vous imaginez un vin de Bourgogne, un autre de Provence, un autre du Jura, de la Loire ou du Sud-Ouest, tous provenant du même cépage ?

En réalité, le problème des “nouveaux” pays du vin est toujours le même : faute de références historiques et gastronomiques, on fait du vin qui marche, avec les cépages qui sont bons, ailleurs, et spécialement en France.

En Californie (idem pour l’Australie, d’ailleurs), le vin, c’est une industrie et l’on met à profit tout ce que l’on peut pour en faire : les producteurs ont le droit, par exemple, de désalcooliser leurs vins en y ajoutant de l’eau (vous lisez bien) et l’usage des copeaux de bois est une pratique courante.

On y fait donc du vin, faute de territoire pour légitimiser une appellation ou une particularité, comme on le peut (veut ?). Ici, pas de poésie ni d’alliance avec les mets, que du pragmatisme et du marketing (confer mes articles sur AgoraVox : Lutter contre l’uniformisation du goût ou Vers une éthique du vin français).

Comprenons-nous bien : la qualité intrinsèque n’est pas en cause puisqu’il y a, bien sûr, de très bons vins californiens (et très chers), mais aussi de bons produits plus attirants que des vins français « sans âme, ni vert ». C’est l’originalité qui manque (vous avez compris pourquoi), associée à la diversité, le fruit, la fraîcheur, l’expression d’un territoire.


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3 réactions à cet article    


  • Cris Wilkinson Cris Wilkinson 5 février 2007 11:04

    Il y a une grande différence entre les vins américains et les européens, c’est que celui de l’oncle Sam est fait par le marketing pour « plaire » au plus grand nombre, alors que celui d’Europe est fait selon le terroir.

    Le seul avantage du vin américains et des nouveaux mondes, c’est que leur puissance commerciale va permettre de diffuser le vin dans tous les coins de la planète. Et que parmi tout les gens qui vont le découvrir de cette façon, il y en a certains qui voudront parmi « autre chose » et qui se tourneront vers le vin européen, pour trouver des goûts et des saveurs que les autres vins ne pourront jamais leurs donner.


    • Jojo2 (---.---.222.117) 5 février 2007 12:06

      On pourrait dire que le vin Européen préexiste au consommateur (dans le sens de la consommation de masse) alors que les vins Californiens, mais aussi Australiens, d’Afrique du Sud etc...ont été calibrés pour ça. Ils n’ont pas d’histoire.

      Les vins français de consommation de masse (le picrate languedocien à 10,5° qui désaltérait les moissonneurs) ont quasiment disparu car ils ne correspondaient plus aux besoins des employés de bureau. smiley


    • alex (---.---.220.11) 6 février 2007 11:49

      je reviens sur le commentaires des vins sud africains. Il faut savoir que les premiers vins vinifies en Afrique du Sud datent d’environ de 1680. 1685, le domaine de Klein Constantia vinifie le Vin de Constance. Un vin liquoreux d’une grande finesse. 1688, arrivee des huguenots Francais et leur installation dans la vallee de Franschoek.

      Donc on ne peux pas vraiment dire que les vins sud africains sont des nouveaux vins. Mais il faut se reporter a leur histoire, l’apartheid. Nous avons fait des embargos sur les produits provenant de la RSA pendant longtemps, ce qui ne leur a pas permis de distribuer leurs vins. Pour y avoir passer 6 semaines, j’y ai goute des tres belles choses, comme a Klein Constantia ou Laibach. Et de tres mauvaise comme a la Grande Provence, ou acheter en supermarche afin de faire l’experience.

      Ne nous y trompons pas, l’explication donnée est general, et ne pas tout confondre a tout pris. Aujourd’hui il y a des vins du vieux monde quii deviennent des vins du nouveau monde, comme les vins italiens. Mais cela est du a une prise de conscience sur la qualite du vin. De meme que les vins sud africain deviennent de mieux en mieux, et qui en font depuis 1650. Bref, le terroir c’est une chose, le marketing une autre. Comme partout il y a des vendeurs de masse comme la marque LISTEL, rebaptisee Pink Flamingo et qui cartonne dans les hyper. Les US font du marketing, nous en faisons aussi. C’est vins sont industriels, et pourtant les francais en achetent.

      Alors arretons de cracher dans la soupe et sur les autres. Nous ne consommons plus comme avant en France. La majeur partie des grand vins, des bons vins s’exportent. Les vins de milieu de gamme et bas de gamme reste ici. Soyez lucides, M. Dussert-Gerber est l’exemple meme du fouineur. Maintenant, il faut jouer au « chercheur d’or » pour denicher les bonnes bouteilles a des prix raisonnable. Car ne nous y trompons pas, le budget c’est le nerf de la guerre.

      Perso, vendredi dernier je me suis offert un Chateau Chasse-Spleen de 1984. tout le monde ne peux pas le faire. Question de budget. Et je m’offre aussi des vins issus du domaine LA MOTTE en afrique du sud. 10 fois moins cher que le chasse-spleen. C’est pas comparable, mais pour beaucoup c’est une question de prix.

      Enfin, meme si les vins californiens se vendent bien, nous avons toujours (et pour longtemps) les vins les plus chers du monde.

      Save water, drink wine !!

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