Peu importe la fin du pétrole, les problèmes ne sont pas là
Aujourd’hui la consommation
mondiale de pétrole est de 30 milliards de barils/an, soit 13 milliards de litres/jour
(5200 piscines olympiques).
Mais peu importe qu’il ne nous reste que 44 à 105 ans de pétrole. Ceci est un faux problème, qui pourrait bien nous écarter des vrais.

Aujourd’hui la consommation mondiale de pétrole est de 30 milliards de barils/an, soit 13 milliard de litres/jour (5200 piscines olympiques).
Le niveau de production de pétrole est structurellement très proche du niveau de consommation, car les capacités mondiales de raffinage sont saturées. Ceci nous indique que la montée actuelle du prix du pétrole résultent des tensions dans les capacités d’approvisionnement, et non encore vraiment d’un manque dû au dépassement du pic mondial de production. Spéculation quand tu nous tiens…
Bref, pour parler plutôt en termes d’énergie, puisqu’au final c’est bien ça qui nous intéresse pour vivre, nous chauffer, nous déplacer, nous nourrir, la consommation/production mondiale de pétrole se chiffre à 3.89 milliards de tep/an (ou 3.89Gtep/an).
[Sachant que 1 tonne d'équivalent pétrole (tep) = 7,33 barils de pétrole (équivalence conventionnelle du point de vue énergétique)]
BP Statistical Review of World Energy 2009 (chiffres 2008)
http://www.unctad.org/infocomm/francais/petrole/filiere.htm
Mais qu’est-ce que cela représente vraiment ? par rapport à toute l’énergie que nous consommons ? par rapport à toute l’énergie fossile disponible ? par rapport à toute l’énergie renouvelable annuellement ?
Mettons les chiffres en face les uns des autres pour nous rendre compte :
La consommation d’énergie mondiale est de 8,2 Gtep/an (sous forme finale, c'est-à-dire tenant compte des pertes de rendement dues à la production). Ainsi la production d’énergie mondiale qui correspond à l’ensemble de ce l’on consomme est, elle, de 11,3 Gtep/an. Key World Energy Statistics 2009. Cette production se décompose en :
· Pétrole 3,9 Gtep/an (44 ans prouvées, 105 ans supposées)
· Gaz naturel 2,9 Gtep/an (64 ans)
· Charbon 3,2 Gtep/an (183 ans)
· Uranium 0,62 Gtep/an (48 ans de réserves prouvées, 105 ans supposées)
· Hydraulique 0.72 Gtep/an
· Eolien 0.03 Gtep/an
· Solaire 0.0007 Gtep/an
Premièrement nous constatons que, en l’état actuel des choses, nous avons environ 85 ans de réserves d’énergie prouvées, 109 ans supposées, dont 80% sont d’origine fossiles.
Ensuite nous pouvons voir aussi la faiblesse des réserves d'uranium : son exploitation s’arrêtera en même temps que le pétrole, alors que nous en consommons 6,3 fois moins par an. Celui-ci n’a donc aucune chance d’être une alternative au pétrole (à moins de développer la surégénération ?).
Par ailleurs, concernant la production actuelle d’énergies d’origine renouvelable, nous voyons aussi le très faible apport des énergies solaire et éolienne. Seule l’énergie hydraulique fournit une quantité appréciable d’énergie au global, légèrement supérieure à ce que fournit l’uranium chaque année.
Mais en l’état, de toutes façons, la somme de l’énergie produite aujourd’hui de manière renouvelable est extrêmement faible par rapport à notre consommation.
Je n’aborderai pas ici la question « est-ce bien raisonnable de consommer autant d’énergie ? », car ce n’est pas le propos de mon article. Et vous allez comprendre pourquoi tout de suite.
Si nous regardons, toujours de manière annuelle, ce que la Nature nous offre potentiellement comme quantité d’énergie renouvelable (je n’ai pas dit gratuite, quoique…) :
· Solaire 92000 Gtep/an
· Biomasses 70 Gtep /an
· Géothermie 1,92 Gtep/an
http://www.geothermal-energy.org/314,what_is_geothermal_energy.html
· Hydraulique 2,7 Gtep/an
· Eolien 8,8 Gtep/an
[Pour rappel les biomasses désignent l’ensemble des organismes vivants sur Terre. Dans le cas de la production d’énergie à partir de végétaux, de microorganismes ou encore d’algues, les composés utilisés sont les parties lignocellulosiques (bois, branches) valorisables par conversion thermochimique, les parties glucidiques (sucres) valorisables par conversion biochimique (comme pour l’éthanol), et les parties oléagineuses (huiles) valorisables directement après extraction (comme pour les diesels végétaux).]
Que constate-t-on ?
Tout d’abord rappelons-nous que nous consommons au global sur toute la planète et aujourd’hui 11,3 Gtep/an d’énergie. Le pétrole à lui seul en représente 3,9Gtep/an.
L'énergie solaire reçue chaque jour par notre planète est immense, 92000 Gtep/an, plus de 8000 fois notre consommation annuelle actuelle !
Ensuite l’énergie potentiellement accessible par la valorisation des biomasses atteint 70Gtep/an, renouvelable chaque année bien sûr ! Rien que cela dépasse de 18 fois ce que nous consommons de pétrole par an, et de plus de 6 fois ce que nous consommons d’énergie totale par an !!!
Autant dire que nous n’avons vraiment, mais alors vraiment aucun risque de manquer d’énergie à l’avenir.
La question est plutôt que faisons-nous pour s’affranchir de notre dépendance aux sources d’énergie non-renouvelables ? Le lobby du pétrole est puissant, tout comme ceux qui ont intérêt à spéculer sur les matières premières rares et non-renouvelables. Mais ne nous trompons pas : le pétrole s’arrêtera bien de couler. La Terre, elle, ne s’arrêtera pas de tourner. Et les efforts mondiaux actuels de R&D conditionnent directement la quantité d’énergie dont nous disposerons dans le futur.
Je disais donc tout à l’heure que l’objet de cet article ne portait pas sur le raisonnable de notre niveau de consommation énergétique. Et pour cause ! Le gaspillage est détestable quand d’autres manquent ; isoler correctement son habitation, réduire son empreinte carbone en se déplaçant moins en voiture ou en avion, ne pas faire venir des produits de l’autre bout de la planète, ne pas produire à contre-saison... Mais aujourd’hui, je ne suis plus aussi sûr que les vrais problèmes ne soient que là. Car avec de l’énergie disponible à foison, finalement, il ne reste comme problèmes que la pollution et l’exploitation de l’homme par l’homme.
Beau programme : nous ne sommes donc quand même pas sortis de l’auberge. Mais je prends, et cela n’engage que moi, cet exemple pour symptomatique et représentatif du (dis)fonctionnement des médias et des gouvernants, qui nous écartent des questions sur les vrais problèmes de la vie, en voulant nous faire croire à un prochain manque d’énergie.
C’est là que l’on voit que les questions environnementales sont indissociables de nos choix de société, car l’analyse de ces questions conditionne les solutions à mettre en face. Cet article est une analyse qui vaut ce qu'elle vaut, et à mon sens les problèmes de la pollution et de la place du travail dans la vie, dus à nos modes de production et de consommation désinvoltes, sont donc bien plus importants.
Alors informons-nous, indignons-nous, et votons.
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