Si petits et si insignifiants, sommes-nous uniques ?
Sommes-nous uniques ? Ce n'est peut-être pas le titre que j'aurais donné à ce film de Franck Courchamp et Clément Morin, mais plutôt Insignifiance et inconscience humaine ou quelque chose d'approchant.
Je n'ai pas l'habitude de chroniquer un reportage, et encore, peut-on appeler ce document ainsi ? C'est un coup de poing, un choc, un miroir absolu. Il commence d'une façon presque anodine en resituant la planète au milieu de l'univers « Il y a autant d'étoiles dans l'univers observable que de gouttes d'eau dans tous les océans de la Terre, que de grains de sable sur nos plages et dans nos déserts, et ce n'est que ce que nos télescopes peuvent voir, car l'univers est bien plus grand encore », et on commence à sentir monter la pression, nous petit organisme, qui sommes-nous, sommes-nous prévalents ?
Les images magnifiques nous tiennent en haleine, nous subjuguent au point de nous laisser embarquer par ce qui était au début de la curiosité, vite transformée presque en hypnose. Les questions s'enchaînent sur nos croyances, comment nous, au milieu d'un univers où le nombre de planètes possède tant de zéros qu'il nous est impossible de le lire, pouvons-nous dire que nous sommes la seule planète habitée ? La seule forme d'intelligence au milieu de ce que nous appelons « espace » ?
Les chapitres se suivent, posant tous des questions que nous connaissons déjà, mais qui prennent une autre nature devant l'urgence écologique, et encore, ce mot est faible, je dirais plus la poudrière sur laquelle nous vivons. « L’Homme, si supérieur, semble bel et bien perdu dans un océan cosmique en perpétuel mouvement […] Les êtres humains n’ont pas la moindre idée de leur place dans l’univers. Sont-ils seuls, ou simplement insignifiants ? »
« Si l'histoire de la Terre était un livre de 1000 pages, la présence de l'Homme ne serait que quelques lignes de la dernière page. » Les dinosaures arrivent à la page 960… Et c'est nous qui allons faire refermer ce livre ?
Chaque nouvelle information nous renvoie à nous-mêmes, à ce que nous sommes et à ce que nous avons fait, en si peu de temps.
Le film continue ainsi, comparant notre intelligence à celle de toutes les espèces terriennes, à nos créations qui pour beaucoup ne ressemblent qu'à de pâles imitations, à nos performances tant de fois dépassées par tant d'autres… « Ainsi, 99,9 % des espèces ayant évolué sur terre ont aujourd’hui disparu, alors que l’évolution du genre homo sapiens ne représente que 0,004 % de l’histoire de la terre. Si homo sapiens se distingue, ce sera peut-être par la brièveté de son existence, à peine deux centaines de milliers d’années, contre plusieurs millions d’années pour beaucoup d’autres espèces. En effet, depuis que sapiens a commencé à coloniser les continents, il n’a cessé de faire croître son emprise sur l’environnement, avec une accélération marquée depuis que les hydrocarbures sont devenus sa principale source d’énergie. »
Un immense merci à Franck Courchamp et Clément Mori qui nous permettent en premier lieu de relativiser la présence des êtres humains au milieu de l’univers et même de notre planète, de remettre en perspective cet ego démesuré de certains, cette arrogance et ce mépris tant répandus. Mais le message le plus fort, c'est le cri d'alarme non pas qu'ils poussent, mais que le spectateur pousse de lui-même lorsqu'il regarde ces images, images magnifiques, surprenantes, précises…
À l'heure où nous serons très bientôt dans l'œil du cyclone, que des populations entières seront chassées de chez elles par la montée des eaux ou la désertification totale, que d'autres, certains de leurs jours sans lendemains se transformeront en hordes déchaînées n'ayant plus rien à perdre, à l'heure où nous ne savons pas s'il est trop tard, à l'heure où tous les décideurs, spéculateurs, financiers, patrons d'industries et chefs d'État ne font strictement rien et nous bercent de mensonge, que faisons-nous, que fais-je ?
Si ce film vous tire des larmes du plus profond de vous-même, ne soyez pas étonné, il est beau et terrible à la fois, il pose les questions existentielles les plus profondes et réelles, celles de notre présence sur Terre. Il ne répond pas à pourquoi sommes-nous là ?, mais à qu'avons-nous fait ?, où voulons-nous aller ?
Alors, oui, ce film est à montrer d'urgence, à partager, à projeter partout, de l'école à l'ehpad, traduit dans toutes les langues pour que chaque terrien n'ait plus le droit de dire… je ne savais pas.
Un immense merci à ceux qui ont permis que ce film existe et qu'il soit vu, même s'il n'aurait jamais dû exister.
Résumé d'Arte : De l’infiniment grand à l’infiniment petit, cette série d’animation observe l’humanité à la loupe et replace l’Homme dans un univers dont il n’a jamais été le centre. De l’univers aux gènes, des écosystèmes au corps humain, chaque épisode nous permet d’appréhender des grandeurs et concepts difficilement imaginables par notre cerveau. Prenez quelques minutes pour contempler l’univers de l’extérieur de notre nombril !
Une espèce à part, une série documentaire de Franck Courchamp et Clément Morin.
© Arte, photos copies d'écran.
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