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Accueil du site > Actualités > Europe > Avis de tempête dans la relation franco-allemande

Avis de tempête dans la relation franco-allemande

Jamais depuis ces dernières semaines, l’idylle entre Helmut Kohl et François Mitterrand n’avait paru aussi loin. Elle est loin l’époque ou à peine élu le président Sarkozy courrait se jeter dans les bras d’Angela Merkel à Berlin …

Cette fois ci c’est officiel on ne se contente plus des portes qui claques en coulisse, les sourires et accolades de façade n’y changeront rien : Il y a bel et bien de l’orage entre Paris et Berlin. On ne se comprend plus, on ne discute sans doute pas assez.

Au premier semestre de cette année, le président Sarkozy, futur président du Conseil de l’Union Européenne, nous rabâchait les oreilles de l’exemple qu’il voulait suivre : la présidence allemande. Outre-Rhin Angela Merkel assurait à la France un soutien indéfectible pour le meilleur et pour le pire.

La présidence française démarre pourtant dans la douleur ; après le « non » irlandais du 12 juin au traité de Lisbonne, l’Union semblait devoir rester une fois de plus en pause. L’agression russe en Géorgie, le 8 août, puis le tsunami bancaire suivi du choc de la récession auraient dû, en bonne logique, diviser les Européens et rapprocher la France et l’Allemagne dans l’adversité. Ce n’est pas exactement ce qui s’est passé et le président français n’est pas étranger aux réussites de la présidence française et au coup de froid dans les relations franco-allemandes.

«  Ce qui empêche la prise de décision, c’est le manque de courage » [1], affirmait-il crânement devant le Parlement européen. Et pourtant les félicitations pleuvent à Bruxelles. Même Francis Wurtz, le président du groupe communiste du Parlement européen, a ainsi rendu hommage au « style assez inusité du Président » tandis que Martin Schulz, président du groupe socialiste, a salué « l’omni président »… Alors, que se passe t-il outre Rhin ?

Le style Sarkozy agace les Allemands

Mots couverts et coup fourrés, le volontarisme, l’agitation incontrôlée diront certains, de Nicolas Sarkozy n’est pas un simple effet d’affichage et en coulisse cela en agace plus d’un. L’Europe puissance du président français, se passe volontiers de l’avis des petits Etats. Et l’action tout feu tout flamme doit parfois écourter les négociations, la recherche d’un parfait consensus, si chère aux Allemands, si chère à Bruxelles.

Face à la crise bancaire et économique, les ondes se brouillent entre Paris et Berlin. Depuis que l’ouragan financier a atteint l’Union européenne, Berlin freine des quatre fers face à l’activisme déployé par Paris : après avoir refusé un plan d’action commun, lors du sommet des quatre pays européens du G8, le 5 octobre à Paris, elle ne s’y est ralliée que contrainte et forcée, surprise par l’ampleur de la crise, une semaine plus tard, le 12 octobre lors du sommet des chefs d’État et de gouvernement de la zone euro, toujours dans la capitale française.

Depuis, l’Allemagne d’Angela Merkel campe sur son refus d’un plan de relance économique européen pour faire face à la récession, préférant le chacun-pour-soi.

L’Allemagne prudente sur la gouvernance économique européenne

Le ministre allemand des finances Peer Steinbrück explique pourquoi il repousse l’idée de payer pour l’Europe en adoptant de nouvelles mesures de relance en Allemagne pour soutenir l’économie européenne : « Il n’y aura pas de gros plan de sauvetage », a-t-il déclaré dans un discours à l’issue du conseil des ministres franco-allemand [2]

Même refus allemand, d’un gouvernement économique de la zone euro que souhaite instaurer la France. Le 22 octobre, à Strasbourg, le chef de l’État français expliquait que « le vrai gouvernement économique de l’Eurogroupe, c’est un Eurogroupe qui se réunit au niveau des chefs d’État et de gouvernement » [3] Berlin a immédiatement fait savoir qu’il n’était pas question d’institutionnaliser cette instance : l’Eurogroupe, ce sont les ministres des finances de la zone euro réunis sous l’autorité de Jean-Claude Juncker, le premier ministre et grand argentier du Luxembourg, point.

Les partenaires européens de l’Allemagne ont multiplié ces derniers jours les appels pour qu’elle fasse un effort de relance plus important, arguant que son budget pratiquement à l’équilibre lui laissait une marge de manœuvre. Suivant les directives de l’Union européenne, l’Allemagne a fait de gros efforts pour assainir son budget, a rappelé M. Steinbrück devant un parterre de députés sociaux-démocrates.

Angela Merkel, les mains liées par les élections à venir

La méfiance allemande reste difficilement compréhensible à Paris, face à la gravité de la situation économique. Angela Merkel, désormais en campagne semble paralysée. Pour Berlin, Paris veut manifestement profiter des circonstances pour imposer un gouvernement économique, pour parasiter et concurrencer l’indépendance de la Banque centrale européenne (BCE). Qui plus est, l’Hexagone, fidèle à sa réputation de cigale, a laissé filer ses déficits et sa dette va atteindre des sommets inédits (70% du PIB en 2010).

Entre effets d’annonce et petites phrases assassines

Le ministre indigné, a rappelé à la France avec sévérité que l’Allemagne devait financer le quart de chacune des mesures adoptées au niveau européen. Bref, entre petite phrases assassines et effet d’annonce à grand renfort de tambours, les relations passent décidément bien mal entre Paris et Berlin Quand Berlin grince des dents, Paris s’agace. Cet agacement est perceptible à Paris où l’on joue désormais sans complexe la carte britannique ; Gordon Brown, le premier ministre, semblant davantage réceptif à une nécessaire coordination communautaire pour sauver ce qui peut l’être. Preuve que par son ampleur, la crise actuelle a bel et bien rebattu les cartes européennes.

Le président français paye là trois erreurs. L’entente, franco-allemande marche bien quand la concertation se fait avant et non après l’annonce de décisions unilatérales. Le volontarisme et l’hyper agitation médiatisée ne sont pas des gages de cohérence.

Un procès d’intention à l’égard de la chancelière allemande ?

Les observateurs français qui accusent Angela Merkel de « penser Allemagne plus qu’Europe » lui font un procès d’intention très…français. Certes elle a des élections en vue, elle doit tenir compte des contradictions internes de sa coalition et elle est prise au dépourvu par une crise qui défie toutes les prévisions, mais elle sait plus que quiconque que l’Europe est la dimension qui s’impose. Ce qu’elle ne veut pas, c’est engager son pays dans une voie qui reste mal définie et pourrait être coûteuse pour son économie. Une économie que les Français auraient tort de souhaiter plus faible…car c’est l’Allemagne qui prendra la part la plus lourde des 130 milliards d’euros que comptera le prochain budget européen…

A l’issue du dernier conseil européen, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, sous l’œil bienveillant de Jean Claude Juncker ont annoncé qu’ « il faut des mesures ciblées en faveur des couches les plus vulnérables de la population et de certains secteurs économiques, comme l’automobile. Les Allemands ont annoncé qu’ils supprimaient pour deux ans les taxes sur les automobiles neuves. »

Ce souffle d’air frais qui pourrait bien éloigner la tempête franco-allemande. Le nouveau vote en Irlande, la coordination économique européenne laisse présager de beaux jours Le temps n’est plus à « L’Allemagne paiera », il n’est pas non plus à un repli national comme pourrait laisser le penser l’attitude allemande. La mésentente entre Paris et Berlin ne serait donc qu’une affaire de météo ?


  • Illustration : Nicolas Sarkozy et Angela Merkel à Londres, le 29 janvier 2008
  • Source : Service Audiovisuel de la Commission européenne

[1] Voir le blog de Jean Quatremer.

[2] Voir le site de l’Express.

[3] Voir le site d’Euractiv.


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7 réactions à cet article    


  • Gzorg 26 décembre 2008 17:12

    Affolement du Torillon....


    Mon dieu mon dieu, la propagandatur Bruxelloise se retrouve face aux durs réalités du monde réel, celui ou aucun peuple ne se sent Européen, ou les états sont ce qu’ils sont et défendent leurs intérêts propres.

    article peu lut, car tout le monde se fout de l’habituel bal des faux culs, bien pensants, libéraux et dérégulateurs qui voudrait dissoudre nos cultures respectives dans un brouet infecte du "made in Europe".

    L’Allemagne et la France ne sont pas d’accord en temps de crise, mon dieu , mon dieu tout ceci est incroyable...l’histoire aurait donc un poids ?

    Ne reste plus qu’a mettre un lien vers l’inénarrable De Quatremer...ha bah si ils l’ont fait !

    Vivement les élections de 2009...même si une fois de plus cela ne servira a rien face à la dictature qui se met en place sur le continent.


    • Indépendance des Chercheurs Indépendance des Chercheurs 26 décembre 2008 23:37

      L’Union Européenne, cela fait un vingtaine d’années que les Français et bien d’autres européens connaissent. C’est pourquoi presque aucun gouvernement n’a osé envisager un référendum sur le Traité de Lisbonne. C’est évident que la "construction européenne" se fait contre la volonté de la majorité de la population de la plupart des pays membres.

      L’UE, c’est la logique de l’Organisation Mondiale du Commerce avec de surcroît un "grand marché européen de la main d’oeuvre" (manuelle comme intellectuelle) faussement "interne". C’est la plaque tournante des délocalisations à l’intérieur comme à l’extérieur de l’UE.

      L’UE est aussi la machine à généraliser le dumping social et à casser les standards sociaux de tous les pays membres, à démolir les droits civiques et le droit du travail, etc...

      Voir entre autres, dans notre blog La Science au XXI Siècle, les articles :

      Vers une délocalisation générale de la recherche scientifique française et européenne ?

      Création d’un Institut européen d’innovation et de technologie et casse programmée du CNRS français

      Délocalisations, recherche scientifique et propagande politique

      Laurent Fabius préconise la disparition de fait du CNRS dans le cadre de l’Union Européenne

      Recherche scientifique et technologique : où est la « guerre économique » ?

      Valérie Pécresse, CNRS, INSERM, Union Européenne, plateau de Saclay et « décloisonnement » de la recherche

      Le soutien du Parti Socialiste au Traité de Lisbonne, une mauvaise nouvelle pour la recherche française

      Nicolas Sarkozy, la recherche et l’Union Européenne (I)

      Europe, jeunesse, révolte, délocalisations, dumping

      Union Européenne, temps de travail et dumping social

      etc...

      Le Collectif Indépendance des Chercheurs (France)


    • E-fred E-fred 26 décembre 2008 17:42

      "Eurodistrict. Encore inconnu, il y a peu, du grand public ce terme n’en finit plus d’agiter les esprits dans la capitale strasbourgeoise. Deux raisons à cela. Tout d’abord, une déclaration officielle. Celle du 40ème anniversaire du Traité de l’Elysée, le 22 janvier 2003, dans lequel le Président Chirac et le Chancelier Schröder s’engagent à soutenir « la création d’un Eurodistrict [centre] Strasbourg-Kehl (...) "
      http://www.europeplusnet.com/article399.html 


      "A Strasbourg, Ries veut créer un eurodistrict sur le mode de Washington D.C. [ 17/03/08 - 18H41 - AFP ]
      Le vainqueur des municipales de dimanche à Strasbourg, le socialiste Roland Ries, a expliqué lundi qu’il allait tenter avec les maires des communes allemandes voisines de créer un "vrai eurodistrict" extraterritorial sur l’exemple de Washington D.C."...
      http://www.air-defense.net/Forum_AD/index.php?topic=10190.60 ;wap2 



      En e qui conccerne le nucléaire et les trains castor, tout va bien entre l’Allemagne et la France :
      http://www.hns-info.net/spip.php?article16057 

      Le Réseau "Sortir du nucléaire", de même que d’autres organisations comme le syndicat Sud-Rail, dénonce l’incarcération "préventive" de Cécile Lecomte, militante antinucléaire française vivant en Allemagne, et qui participe aux mobilisations contre le nucléaire en général et contre les transports de matières radioactives en particulier.

      Jeudi 6 novembre, une quinzaine de militants ont protesté entre Lunebourg et Wendisch Evern contre le trafic par rail de déchets nucléaires entre la France et l’Allemagne. Alors que tous les autres militants sont repartis libres après l’évacuation par les forces de l’ordre, les policiers ont "préventivement" placé Cécile Lecomte en garde à vue.

      Selon le juge, elle est connue comme "administrativement réfractaire" et c’est pour bloquer un "Réseau qui fonctionne bien" que Cécile est actuellement emprisonnée. Cette façon de procéder illustre clairement le fait que, par delà les frontières, le nucléaire nuit autant à la démocratie qu’à l’environnement et aux être vivants.


      • Yannick Harrel Yannick Harrel 26 décembre 2008 18:27

        Bonjour,

        J’avais aussi un temps envisagé de traiter ce sujet qui recèle une plus grande importance que sa maigre couverture médiatique ne pourrait le laisser paraître. Depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy, il est clair que les ondes entre Paris et Berlin sont souvent brouillées, et la crise n’arrange rien dans un contexte où tous les schèmes habituels de pensée sont bousculés sans ménagement.

        En revanche, je m’éloigne assez nettement de la conclusion car d’une part je ne vois pas en quoi le fait de faire revoter l’Irlande à dessein de faire ingurgiter de force un traité incompréhensible est un pas qualitativement positif (et si en plus les Irlandais revotent non comme ils risquent de le faire, ça sera le pompon) pour le couple franco-allemand. De plus, l’Union Européenne est malade depuis un moment mais le moteur franco-allemand évitait surtout de le laisser trop paraître, il sauvegardait principalement les apparences ou dans le meilleur des cas débloquait la situation in extremis. Le problème est encore plus profond que la bonne entente franco-allemande hélas.

        Cordialement


        • 26 décembre 2008 20:08

          "L’agression russe en Géorgie, le 8 août,(....)"

          Mwais...


          • wesson 27 décembre 2008 01:22

            Bonsoir l’auteur,

            cette fausse géguerre Merkel-Sarkozy n’est en fait que le cache sexe d’un malaise européen bien plus profond.

            Les intérêts de l’Allemagne ne coincident pas avec les intérêts Français. Et la crise n’a fait qu’aggraver cet état de fait.

            C’est la marque de l’échec de la construction européenne telle qu’elle est actuellement, qui s’est faite sur l’économie tout en tenant le peuple et son avis pour quantité négligeable. Avec la crise maintenant, la solidarité de façade a volée en éclat, et c’est du chacun pour soi et dieu (l’€) pour tous !

            mais ce n’est pas une vérité bonne à dire. Alors on préfère nous raconter une querelle de personne, pour ne pas évoquer l’échec d’un système et de ceux qui l’ont construit.

            Votre article politiquement correct et bien celui d’un pousse au jouir de l’Europe libérale.



            • non666 non666 27 décembre 2008 12:17

              La guerre Merkel-Sarkozy cache plusieurs chose.

              1) Le "m’a tu vu" de sarkozy.
              Certains tirent l couverture à eux....d’autres vous poussent carrement hors du lit !
              C’est le cas de Sarkozy qui a à plusieurs reprise "confisqué" du travail collectif dans la discretion des europeens pour en usurper la gloire.

              a) Dans l’affaire des infirmières bulgares ou le travail de fond , en particulier des allemands avait amené le dossier a maturité et ou Sarkozy et sa bonne femme de l’epoque ont joué au cowboy en pratiquant un "enlevement" avec violation du passeport diplomatique de la "première dame" .
              Cela a generé un grave precedent , un coup de force qui aurait très bien pu provoquer une aggravation des rapports avec la Lybie et que nous avons payé du ridicule de la tente de khadafi dans le parc de l’Elysée.
              Si tu m’humilie chez moi je te pisse à la gueule devant tes amis chez toi...

              b) Dans l’affaire du TCE bis, une fois de plus negocié par merkel en coulisse et dont Sarkozy s’est fait "l’inventeur" aux yeux du grand public, grace à la claque de ses copains de la presse qui l’ont mis au pouvoir.

              c) Dans l’affaire de l’Union pour la mediterranée dont personne en Europe ne veut autrement que comme une politique de "marche de l’Empire", de bon voisinnage avec les barbares qui vivent sur les Limes...
              Sarkozy tente de transformer cette politique en "backdoor" pour israel et la turquie pour renvoyer l’ascenbseur a ceux qui l’ont mis au pouvoir.

              2) Le fond du dossier.

              a) Depuis la guerre du golfe (episode 2) , les allemands croient sincerement à une Europe grande puissance. Ils ne sont pas encore pret a rompre avec les etats unis , mais ils ne sont plus disposer à continuer a agir en suivant servile de l’Otan sous commandement US.
              ils sont devenu paradoxalement les meilleurs defenseurs du "gaullisme europeen" au moment ou les français sous controle de sarkozy succedaient au Anglai dans le role de porte-parole des etats unis...

              b) L’incapacité des français sous direction socialiste (jospin) ou UMP (chirac/Sarkozy) a respecter leurs engagement europeens en matière monaitaire, d’equilibre financier ne les rends pas credible au moment ou Sarkozy joue les chefs de l’Europe.
              Il pretend encore une fois annoncer les bonnes nouvelles (un plan europeen de depense ...et demande aux allemands en substance de payr l’addition que nos finances ne nous permettent pas d’honorer...

              Les allemands n’aiment pas la mentalité du sentier et le comportement de sarkozy qui joue les riches et ne paie pas l’addition les agace au plus haut point.

              c) la mise "en concurrence" de l’Allemagne avec la grande bretagne, pour la direction de l’Europe, que Sarkozy a organisé pour sa propre gloire en violation de 40 ans de cooperation a blessé outre-rhin.
              les allemands savent que personne ne prendra la place de premier lieutenant des etats unis aux anglais et que personnne ne peut plus non plus contester la première place economique à l’Allemagne sur le vieux continent. En menaçant de changer de "monture" , Sarkozy a juste briser un tabou qui pourrait se retourner contre la france , vu notre situatuin economique et le fait que finalement, les allemands pourraient très bien eux meme , s’entendre DIRECTEMENT avec des anglais evenus un peu plus europeens...

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