L’Europe de la Défense en ordre de marche
Depuis le début de l’année 2007, ils sont pleinement opérationnels. C’est en ces termes que la présidence allemande du Conseil de l’Union européenne se félicitait, il y a quelques mois de cela, de l’achèvement de la mise en place des groupements tactiques de combat de l’Union européenne qui composent la force de réaction rapide européenne.
Qui sont ces groupements tactiques (en anglais Battlegroups) européens, de qui se composent-ils et à quoi peuvent-ils servir alors que les Etats membres disposent dans leur majorité de forces de défense nationale coordonnées autour de l’OTAN ? Il faut remonter au 4 février 2003 et ce fameux rendez-vous franco-anglais au Touquet pour trouver la trace d’une volonté de création de moyens de défense européenne. L’idée était alors de trouver des plans d’action alternatifs à ceux déployés sous l’égide des Nations Unies en Afrique pour répondre plus rapidement aux crises et offrir un instrument militaire mieux adapté, capable d’être mobilisé dans des délais restreints selon les besoins. L’expérience de l’opération Artemis au Congo pendant l’été 2003 fut à ce titre prise en considération et montra l’efficacité de petites structures militaires, certes modestes en effectifs, mais particulièrement mobiles et facilement mobilisables. Le 12 juillet 2004, les ministres de la Défense des Etats membres adoptaient le principe de la création d’une Agence européenne de la Défense, chargée de coordonner l’action et la mise en œuvre de cette capacité de réaction européenne avec les Etats membres. Et c’est en novembre 2004 que le Conseil de l’Union européenne détaillait enfin les objectifs concrets du projet : 13 groupements tactiques de bataille, composés de 1 500 hommes chacun et déployables partout dans le monde dans un délai maximum de 15 jours. Le tout devant être opérationnel en 2007.
Parmi les 13 groupes tactiques, 4 sont aujourd’hui uniquement composés d’effectifs nationaux (Espagne, France, Italie, Royaume-Uni). Les 9 autres se voient affectés des effectifs mêlés provenant de 2 voire plusieurs autres Etats. Ainsi par exemple, un groupe tactique Nord Baltique rassemble des soldats Finlandais, Estoniens, Irlandais et Norvégiens (!). Quelques groupes tactiques sont également à l’étude, notamment celui des Balkans qui réunirait des forces de Bulgarie, Roumanie et Chypre.
La liste des groupes tactiques se trouve ici : http://en.wikipedia.org/wiki/European_Union_Battlegroups
Quelle est la finalité de cet exercice ? Devant la soudaineté et parfois la violence des crises régionales et locales à travers le monde, les armées conventionnelles ne disposent pas des capacités de réaction suffisantes pour déployer des hommes rapidement sur place. Par ailleurs, l’OTAN rassemblant toujours plus de membres en son sein, il devient de plus en plus difficile de trouver les compromis nécessaires à la prise de décision pour la mobilisation et l’envoi de troupes. Or, les intérêts des Européens peuvent être menacés à tout instant. Les groupements tactiques peuvent trouver à cet égard leur raison d’être et une place privilégiée pour agir promptement si les dirigeants européens décident l’utilité d’une intervention rapide.
Aujourd’hui, alors que les 13 groupes tactiques sont opérationnels, l’Union européenne planche sur des problématiques logistiques. L’idée force sur laquelle travaillent les ministères de la Défense des Etats membres est de "développer des mécanismes efficaces visant à mettre en place des forces chargées de la réaction rapide en cas de crise en réunissant des éléments issus de toutes les armées" européennes. Ce plan vise à réaliser un catalogue des contributions des forces armées par Etat membre et de répartir ces forces en vue de faciliter leur mobilisation et leur interactivité sur le terrain, en tenant compte notamment des affinités linguistiques.
Le plan de développement des capacités sera l’une des tâches dévolues à l’Agence européenne de Défense, afin d’améliorer la capacité de réaction rapide européenne. Mais pas seulement. Face à la diversité des matériels utilisés au sein des armées des Etats membres, il deviendra vite indispensable de favoriser l’harmonisation progressive des productions d’armement dans l’Union européenne. Pour assurer la disponibilité opérationnelle des forces armées européennes, l’industrie de l’armement se doit d’être performante et fiable. L’Agence européenne de Défense devra ainsi réfléchir au cours de ces prochains mois aux moyens de rendre la base industrielle et technologique de défense de l’Union européenne plus homogène et compétitive à l’avenir.
Que peut-on attendre à l’avenir de cette initiative d’envergure communautaire ? Pour Hervé Morin, ministre français de la Défense, "la création de l’Agence en 2004 a constitué une avancée majeure pour l’Europe de la Défense. Elle joue aujourd’hui un rôle moteur dans les domaines des capacités, de l’armement, de la recherche et de l’industrie de défense européenne. La construction de l’Europe de la Défense passe par le succès de ses nombreuses initiatives en cours." L’avenir nous dira si les Etats conviennent d’utiliser ces forces et si les mécanismes mis en place sont réellement efficaces. Il faudra pour cela multiplier les exercices de coopération sur le terrain et prévenir les potentielles méprises liées à la diversité linguistique entre soldats. En attendant l’harmonisation réelle des armes et des matériels militaires. Nous n’en sommes pas encore là.
Pour en savoir plus :
European Defence Agency
Ministère de la Défense français : sur la PESD
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