Il y a quelques mois nous écrivions "quand l’Amérique tousse, le monde s’enrhume". Certains aujourd’hui disent que nous étions trop mesurés. Depuis un siècle déjà, la planète vit au rythme des hauts et des bas américains. Pourtant, beaucoup de dirigeants européens continuent, et encore récemment, à prendre l’économie américaine pour modèle. Faut-il leur rappeler que, depuis la construction de l’Union européenne, les Etats-Unis ne sont plus que la deuxième économie mondiale, même s’ils demeurent encore, pour vingt ou trente ans, largement devant la Chine !
Faut-il aussi leur rappeler que, déjà en 1929, la crise mondiale avait pris naissance outre-Atlantique. Aujourd’hui, bis repetita placent ! Alors, on entend ici et là, mais surtout en France, les dirigeants appeler médiatiquement de leurs vœux une réunion immédiate du G8. Pourquoi un G8 et non pas un G27, réunissant les 27 membres de l’Union européenne ? La France préside aujourd’hui le premier ensemble économique de la planète. Beaucoup attendent d’elle qu’elle prenne une véritable initiative, factuelle et non politicienne. Cette initiative, très concrète, devrait entreprendre de poser les bases visant à faire de l’Union européenne un modèle s’affranchissant de la toute-puissance américaine et une Union européenne à même d’édicter, en propre, des normes prudentielles bancaires, comptables et financières.
Faut-il rappeler encore, que les récentes normes internationales de reporting financier et de prudence bancaire, les fameuses IFRS (International financial reporting standards) et ratios Mac Donough, sont d’inspirations américaines et ont, ensuite, été avalisées par l’Europe. On en voit aujourd’hui la pertinence limitée, même s’il ne faut pas jeter le bébé avec toute l’eau du bain !
Cette crise est vraiment une chance pour nous Européens ! Pas sûr qu’elle se représente avant longtemps. Encore faut-il que nos politiques pensent à la saisir, plutôt qu’à parader émotionnellement devant les caméras. Ils doivent avoir à l’esprit que s’ils ne le font pas ou tardent à le faire, d’autres profiteront demain de ce manque d’initiative. Le bloc Asie, autour de la Chine notamment, est vraiment bien placé et croule sous les liquidités internationales. En quelques jours, et pour quelques centaines de milliards de $US, la Chine peut très bien racheter certaines banques américaines et européennes en difficulté. Elle peut, aujourd’hui, jouer le coup du siècle ! Si elle le fait, alors exit les Etats-Unis et exit aussi l’Europe, du leadership mondial. Durablement ! L’Histoire dira un jour, comme elle l’a fait pour l’Empire d’Alexandre, l’Egypte, la Grèce, la Rome antique… et plus récemment pour le bloc communiste, que l’Europe et les Etats-Unis n’étaient finalement que des colosses aux pieds d’argile et, de surcroît, trop imbus d’eux-mêmes. Ces failles, dira l’Histoire, furent à la base de leur perte dès les premières décennies du troisième millénaire !
L’Histoire n’a jamais repassé les plats. L’Union européenne doit impérativement savoir ce qu’elle veut aujourd’hui, pour le confort économique de l’ensemble de ses peuples, demain. Si cela la préoccupe toujours... ? Elle doit occuper la place qui lui revient ou être, pour quelque temps de plus, le supplétif des Etats-Unis, avant de sombrer comme le énième wagon d’un train tiré par les locomotives de l’Asie. C’est aujourd’hui et maintenant que de telles questions doivent être posées.
Alors, un G8 pour la parade, peut-être !
Mais, c’est surtout un G27 qu’il faut et très rapidement ! On pourrait imaginer qu’il s’organise à l’initiative de la présidence de l’Union européenne, la France. La France aurait pour tâche essentielle d’y convier l’ensemble des 27 pays membres ainsi que les présidents des diverses institutions européennes, dont la BCE, naturellement indispensable.
La fenêtre pour que l’Union européenne prenne les bonnes décisions est très largement ouverte. Et, elle le restera pour au moins six mois, jusqu’en mars/avril 2009. Fin de crise internationale et élection américaine obligent, avec prise de poste pour la nouvelle administration démocrate ou... républicaine.
Face à ce constat, on peut penser que certains dirigeants européens sont déjà au travail, en secret, et pas mécontents de voir que d’autres se pavanent à longueur de journée devant les médias, laissant croire qu’ils vont sauver le monde. Ils savent, eux, que le travail discret paie toujours, même si ses fruits ne se récoltent qu’à moyen et long terme. Le court terme étant quant à lui trop souvent mêlé d’émotionnel.
C’est maintenant que doit se construire l’Europe forte du XXIe siècle.
Ainsi, il faut que la France saisisse l’opportunité que le destin lui offre de marquer de manière spectaculaire sa présidence en organisant prochainement un G27 à Paris. A l’Elysée, naturellement !