La dernière bêtise de M. Trichet
M.Jean-Claude Trichet, ci-devant président de la BCE, a déclaré aujourd’hui – 20 février 2011 – qu’augmenter les salaires serait « la dernière bêtise à faire » en Europe.
« Augmenter les salaires serait la dernière bêtise à faire » Jean-Claude Trichet, président de la BCE le 20 février 2011
À l’appui de cette affirmation péremptoire, M. Trichet a mis en avant la santé prétendument « remarquable » de l’Allemagne, qui serait selon lui parvenue à réduire son chômage pendant la crise, en soulignant que « depuis la création de la zone euro », les salaires dans la fonction publique n’avaient augmenté que de 17% outre-Rhin, contre « environ 35 % » en moyenne en France et dans la zone euro ».
La fausse explication de M. Trichet
M. Trichet établit ainsi une corrélation entre la baisse du chômage et la rigueur salariale. Mais cette corrélation est parfaitement fallacieuse. Outre que les chiffres qu’il avance mériteraient d’être justifiés, il oublie de parler des taux d’inflation correspondants. À l’entendre, on pourrait presque croire que les Français ont vu leur pouvoir d’achat s’accroître de 35 % depuis 10 ans !!
En réalité, si le taux de chômage de l’Allemagne a diminué en 2010 aux alentours de 6,6 % de la population active, cette diminution est principalement liée à une cause sur laquelle M. Trichet garde le silence, à savoir la bonne tenue de la croissance allemande (qui a atteint le pourcentage assez remarquable de +3,6 % en 2010). Cette croissance est beaucoup plus élevée que dans la zone euro (+1,7 %) et qu’en France (elle n’a atteint chez nous qu’un très maigre +1,5 %, équivalant quasiment à une stagnation).
Cette bonne croissance allemande en 2010 a été principalement due aux bonnes performances à la grande exportation, notamment vers les pays en fort développement (Asie, etc.). Et ces bonnes performances tiennent à une caractéristique de l’économie allemande que l’on ne retrouve pas ailleurs, et notamment pas en France : les productions industrielles d’Outre-Rhin sont, depuis des décennies, traditionnellement très compétitives – et sont même parfois en situation de monopole mondial (comme pour certaines machines-outils).
Du coup, elles ne souffrent pas (ou elles ne souffrent que peu) du taux de change externe de l’euro, très élevé depuis plusieurs années (aux alentours de 1 euro pour 1,35 dollar).
Le chômage en France ne résulte pas de hausses de salaires inconsidérées mais de la politique de « mondialisation » et du taux de change externe de l’euro.
En revanche, et comme je le montre, graphiques à l’appui, dans ma conférence « FAUT-IL AVOIR PEUR DE SORTIR DE L’EURO ? », l’économie et l’industrie françaises sont très gravement handicapées par ce taux de change externe de la monnaie unique : le point d’équilibre de notre compétitivité nationale se situe autour de 1 euro pour 1 dollar. L’euro est donc environ 30 % trop cher pour nous permettre d’être compétitif sur les marchés à l’exportation.
Avec le démantèlement des réglementations aux échanges de capitaux décidé dans le cadre de la politique de « mondialisation inévitable » [sic], c’est la raison pour laquelle notre économie et notre industrie subissent une véritable hémorragie d’emplois.
Le chômage en France (et dans la zone euro de façon générale) ne résulte donc pas du tout de hausses de salaires inconsidérées. Les hausses de salaires n’ont d’ailleurs pas suffi à préserver le pouvoir d’achat des salariés français.
Le chômage résulte en revanche de facteurs que M. Trichet ne peut pas avouer, tout simplement parce qu’il en a été l’un des principaux acteurs et responsables depuis 20 ans : le chômage de masse en France résulte de la politique de mondialisation et du taux de change externe de l’euro, beaucoup trop élevé pour la plupart des économies de la zone, et notamment pour la France.
Comme tous les européistes, le président de la BCE refuse de reconnaître la responsabilité de l'euro dans le chômage de masse.
L’exemple suédois prouve la nocivité de l’euro
Le cas suédois est d’ailleurs là pour le prouver. Comme je le montre également dans ma conférence déjà citée, c’est le fait que la Suède ait gardé sa propre monnaie et sa propre politique monétaire qui a permis à son économie de rebondir de façon spectaculaire en 2010.
Grâce à une gestion dynamique de la couronne suédoise – que la Riksbank (banque centrale suédoise) a laissé se déprécier de près de 35% face au dollar fin 2008-début 2009, puis a fait se réapprécier plus encore au 2ème semestre 2010 -, l’économie suédoise a achevé l’année 2010 sur des taux de croissance « asiatiques », qui laisse l’Allemagne loin derrière (taux de croissance de + 4,8 % sur l’ensemble de l’année).
Si la France avait conservé son franc et une politique monétaire souveraine, la Banque de France aurait pu adopter une gestion dynamique « à la suédoise », relancer fortement la croissance et faire chuter le chômage en rétablissant un taux de change externe plus réaliste et moins handicapant pour notre compétitivité et notre industrie.
L’incroyable indécence de M. Trichet
Le discours de M. Trichet apparaît ainsi à l’examen comme doublement scandaleux :
1) — d’une part parce qu’il ose faire porter la responsabilité du chômage de masse en France sur de prétendues hausses de salaire inconsidérées alors que ce chômage résulte des choix induits par l’Union européenne,et tout spécialement les effets extrêmement nocifs de l’euro et les démantèlements de toutes les réglementations aux échanges de marchandises, de services et de capitaux.
2) — d’autre part parce qu’il ose s’indigner par avance de l’augmentation des tout petits salaires alors qu’il se sert lui-même des rémunérations de nababs pour un métier sans risque et où il ne rend de compte à personne.
Pour que les lecteurs mesurent toute l’indécence de M. Trichet, il faut savoir qu’en tant que Président du directoire de la Banque Centrale Européenne, son « traitement de base » était de 345 252 euros par an en 2007. Celui du vice-Président de la BCE, Lucas Papademos, était de 295 920 euros, et celui des quatre autres membres du directoire, de 246 588 euros chacun. Ils s’étaient d’ailleurs servi une augmentation de 2 % entre 2006 et 2007 et ce traitement est soumis à l’impôt communautaire, qui est très faible.
À ces sommes s’ajoutent « une indemnité de résidence et une indemnité pour frais de représentation. Pour ce qui concerne le président, un logement de fonction appartenant à la BCE est mis à sa disposition, à la place de l’indemnité de résidence ». Source : http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2008/03/combien-cote-un.html#more
Dans ces conditions, et compte tenu des hausses de salaires que ces messieurs de la BCE interdisent aux autres mais s’octroient sans état d’âme, on peut estimer que M. Trichet recevra un traitement d’environ 380 000 euros en 2011 (soit 31 600 euros par mois). À quoi il faut ajouter un luxueux appartement de fonction, une voiture de fonction et un chauffeur, des voyages en avion à discrétion, des indemnités discrètes et des cotisations d’assurance maladie accidents et retraites certainement très confortables.
Les dirigeants de la BCE sont ainsi décidément les garde-chiourmes implacables de la rigueur partout… sauf pour ce qui les concerne.
Omerta sur les dépenses pharaoniques du nouveau siège social de la BCE
Plus scandaleux encore si c’est possible, leur sagesse et leur sens de l’économie n’a pas dissuadé M. Trichet et ses collègues de décider la construction d’un nouveau siège social de la BCE à Francfort dont les proportions et le coût seront pharaoniques : une double tour de 185 mètres de haut, avec des places de rencontres et des patios intérieurs, et 2 fois plus de fonctionnaires qu’actuellement.
La première pierre de ce gratte-ciel colossal – et qui n’était pas indispensable du tout – a été posée en mai 2010 et cette monstruosité europoïde devrait être livrée en décembre 2013.
Le coût estimé n’a cessé d’augmenter au fur et à mesure de l’avancement du projet : au départ prévu aux alentours de 550 millions d’euros, il a été progressivement réévalué à 850 millions, puis 1 milliard et certaines sources évoquent désormais un coût final proprement astronomique de 1,4 milliard d’euros.
Naturellement, l’ensemble des médias français garde la plus extrême discrétion sur ce phénoménal gaspillage d’argent en temps de crise. Il est tellement important que les Français ne soient au courant de rien…
Le nouveau siège social de la BCE à Francfort sera monumental : une double tour de 185 mètres de haut, avec des patios intérieurs, et 2 fois plus de fonctionnaires qu'actuellement. Coût estimé : 1,4 milliard d'euros.
Conclusion : l’aveuglement de l’aristocratie euro-atlantiste
Tous ces rappels permettent de mesurer l’indécence sans limite des membres de cette aristocratie euro-atlantiste qui s’est emparée de tous les pouvoirs au nom de « la belle idée européenne ».
Non seulement ils vivent comme des nababs au milieu d’un appauvrissement général des populations dont leurs décisions sont la cause, mais ils ont en outre le culot de réclamer toujours plus de rigueur salariale… pour les autres !
M. Trichet, président de la BCE, recevant les directives du "socialiste" M. Strauss-Kahn, président du FMI : une même oligarchie qui vit coupée des peuples.
Si, pour M. Trichet, « la dernière bêtise à faire » serait d’augmenter les salaires, nous savons quant à nous ce que sera la première sagesse à faire lorsque l’UPR sera parvenue au pouvoir : sortir la France de l’euro immédiatement et faire perdre aussitôt son emploi à M. Trichet.
Devenu chômeur, il aura tout loisir de méditer sur les appels à toujours plus de rigueur salariale qu’il a l’audace et l’inhumanité de réclamer aujourd’hui.
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