Le client est roi, l’usager n’est rien
Il est de ces lieux où chacun doit régulièrement entrer, attendre, échanger quelques mots - souvent vainement courtois- puis sortir avec le soulagement de la tâche accomplie. Les bureaux de La Poste, puisqu’il s’agit d’eux, ont récemment évolué, mais pas nécessairement dans le bon sens. Tels ceux de la Poste située rue d’Alésia (Paris 14e).
Alors que l’entrée se faisait selon un cérémonial consistant à retirer son petit numéro, puis à attendre, en le froissant et défroissant sur une chaise, que celui-ci soit appelé, il a probablement semblé aux personnels de La Poste que le motif principal d’insatisfaction venait d’une attente trop longue pour la plupart des clients. Et pour cause, les classiques vingt minutes d’attente pour le retrait d’une lettre recommandée ou du colissimo qui n’a pas daigné tout seul prendre l’ascenseur pour monter au deuxième étage alors que vous l’y attendiez semblent parfois irriter le bedeau.
Qu’à cela ne tienne, La Poste a donc trouvé la solution afin de le satisfaire : fluidifier l’attente. Parfait, semblerait-il !
Ainsi, quelques paneaux laconiques indiquent une modification apportée afin de "fluidifier l’attente par l’installation de guide-file" : le concept de fluidification du trafic semble emprunté à d’autres (...). Retirons les chaises, cela les fera courir ou les dissuadera de venir, ont dû cogiter les receveurs des bureaux de poste. Remplaçons-les par des guides-files qui n’ont plus rien à envier à ceux du Big Mountain de Disneyland. Peu efficaces, semble-t-il, puisque les vingt minutes d’attente assise se sont commutées en vingt minutes d’attente en station verticale*. Les aspects bénéfiques, puisqu’il y en a, sont la diminution dès l’entrée du mécontentement du client : celui-ci savait auparavant qu’il devait attendre vingt minutes, puisque son petit ticket le lui indiquait. Plus de ticket, plus de temps annoncé. Cet effet semble toutefois de très courte durée, à en lire les cahiers de doléances disponibles à chaque guichet (cela sous-entend que l’usager a finalement réussi à atteindre ledit guichet) : les messages les moins insultants sont d’une virulence rare à l’égard de La Poste.
Que l’on se rassure, les cahiers d’écolier bien remplis seront lus, a ainsi affirmé la guichetière, voulant persuader que ces cahiers étaient le point d’orgue d’une communication parfaite entre un service public et ses usagers.
Dommage, parfois on souhaiterait juste être son client.
Pascal
* Quelques chaises ont été conservées toutefois pour les personnes supportant mal la station debout, mais hors du guide-file. Risquent de faire la queue longtemps...
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