Qui veut la peau du canal ?
Ce sont des millions de nos deniers publics qui sont sur le point d’être jetés dans la réalisation d’un projet absurde : la démolition à coups de tractopelles du canal de Nantes à Brest. Mais qui veut la peau du canal ? Bruxelles, paraît-il ! En fait, peut-être bien l’UMP locale et le lobby des pêcheurs.
"J’s’rai content quand tu s’ras mort vieux canal..." C’est le mauvais refrain que l’on entend en ce moment sur les ondes... du canal de Nantes à Brest. Commencé en 1811, l’aménagement de la rivière en canal fut assuré par des prisonniers de guerre espagnols, des bagnards, et des ouvriers sous-payés. La construction du canal s’est faite à moindre coût. Mais aujourd’hui, ce sont des millions d’euros qui seront nécessaires.
Pêche aux saumons et pêche aux voix
Le lobby de la pêche est puissant ; il vote à droite et les élections locales approchent... Alors tant pis si 30 millions d’euros ont été dépensés sur les trente dernières années pour aménager le canal, si en 2006 encore, le président du conseil général du Finistère aménageait une nouvelle voie navigable, aujourd’hui on veut tout démolir pour une somme astronomique ! C’est la "rupture" version locale en somme ! Et pour mettre en application la rupture - Nicolas le démontre chaque jour à coups de millions dépensés en com’ et en déplacements - toutes les dépenses sont permises.
Les pêcheurs se frottent déjà les mains. Selon eux, la suppression des écluses pourrait faire revenir jusqu’à 2 000 saumons. Une perspective réjouissante qui devrait grandement contribuer au retour à l’état naturel exigé par Bruxelles, mais aussi à choisir le bon bulletin de vote aux prochaines élections puisque la mesure préconisée émane du président UMP du comité de bassin de Loire-Bretagne.
Bruxelles veut-elle la mort du canal ?
Mais que dit Bruxelles ? Une directive cadre sur l’eau de 2000 fixe à 2015 le retour à un "bon état des eaux". Deux catégories de cours d’eau sont visés : les MEFM (masses d’eau fortement modifiées) et les MEN (masses d’eau naturelles). Le comité de bassin, chargé d’appliquer ce programme, a décidé de classer le canal de Nantes à Brest dans cette seconde catégorie, ce qui paraît non seulement arbitraire et contraire au bon sens mais qui entraînera le débarrage du canal. Le comité prétend que la pollution est liée aux barrages et que le débarrage remettra les eaux en leur état naturel. Ce point de vue est fortement contesté : il existe bien d’autres causes de pollution (agricoles, industrielles, ménagères) et les effets de cette mesure sont loin d’être prouvés. Pourtant, elle coûtera cher aux contribuables.
Le canal fait des vagues
Les quelque 170 veilleurs du canal s’inquiètent. Amoureux du canal de Nantes à Brest, ils arpentent chaque jour le chemin de halage pour ausculter - bénévolement - le canal et signaler tout problème. Les habitants du Centre-Bretagne s’opposent au projet, président du SMATAH (*) en tête. Le président du conseil général du Finistère, Pierre Maille, a écrit le 12 octobre à Ambroise Guellec, président du comité. Il juge la proposition inacceptable. "Je souhaite vivement que le comité de bassin classe en MEFM la partie canalisée de l’Aulne entre de l’Hyères et du Kergoat." Il soutient que l’objectif fixé par l’Europe pour 2005 est atteignable par d’autres moyens que la destruction des écluses. Outre le coût gigantesque de la destruction, les effets sur le tourisme et la navigation fluviale pourraient être sensibles à un moment où les péniches réinvestissent pourtant les cours d’eau.
Alors ? L’affaire n’est pas terminée et il se peut qu’un transfert de compétence se fasse vers la région qui pourrait trancher...
(*) SMATAH : Syndicat mixte d’aménagement touristique de l’Aulne et de l’Hyères
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