La Qatarstrophe
Un pays minuscule, tenu d’une main de fer par un émir...robolant, accueille un évènement mondial dont finalement quelques-uns s’indignent… tardivement.
L’émir pèse, d’après le magazine Forbes, 2,5 milliards de dollars, et il est le 6ème souverain le plus riche du monde. Lien
L’argent permet presque tout, y compris le pire, cacher sous le joli gazon vert des stades monumentaux plusieurs milliers de morts, tués à la tâche... mais lorsque ce même pays détient des quantités monstrueuses de carburant, au moment où la guerre en Ukraine nous prive du gaz russe, comment ne pas expliquer le silence quasi complice européen sur la question humanitaire ?
À noter tout de même que la Russie a finalement été exclue du mondial de foot…ce qui était la moindre des choses lorsque ce pays a envahi l’Ukraine sous des prétextes peu recevables…
Ce qui a fâché Dejan Lovren, ce croate, ex-capitaine du Zénith St Petersbourg, passé par la suite à l’OL. lien
Au-delà de la polémique, boycott, ou pas, c’est sur le sens même de l’évènement dit sportif qu’il faut se pencher, d’autant que l’Arabie Saoudite a été désignée pour accueillir les jeux asiatiques d’hiver en 2029. lien
Avons-nous déjà oublié que la Russie de Poutine avait hérité en son temps des jeux olympiques de 2014 ?…
Avons-nous aussi oublié que les J.O. 2022 ont été accordés à la Chine, ce pays où les droits de l’homme ne sont pas une priorité, le moins qu’on puisse dire ?…
Ce qui n’a pas empêché « France 24 » de titrer : « des jeux sans accrocs pour la Chine malgré un « contexte difficile » »
...Malgré la mise sous cloche de la problématique Ouïghour, que le CIO a tenté de faire oublier en confiant l’allumage de la vasque olympique à la skieuse de fond Ouïghour Dinigeer Yilamujiang. Lien
En remontant plus dans le temps, avons-nous déjà aussi oublié un mondial de foot dans le cœur d’un Brésil en pleine dictature militaire ? lien
La liste des silences diplomatiques pourrait s’allonger indéfiniment si l’on songe à la COP 27 qui s’est tenue en Égypte, ce pays si peu démocratique, dans lequel des milliers de prisonniers politiques sont détenus... estimés entre 60 000 et 100 000 mais un silence pudique s’est imposé sur la COP, une COP de plus pour pas grand-chose, avec comme sponsor une boisson gazeuse à base de cola, et comme participants majoritaires tous les lobbys pétroliers. lien
Rassurons-nous, le CIO, les COP, et les autres, auront encore du grain à moudre, car la liste des dictatures est loin d’être close : Entre le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Kazakhstan, le Tadjikistan, jusqu’à la Corée du Nord, en passant par la Biélorussie, la Hongrie, le Vénézuela, le Congo, le Tchad d’Idriss Déby, qui a quitté ce bas monde en 2021, remplacé depuis par son fils, l’Érythrée, la Birmanie, Brunei, le Burundi, le Cambodge, la république centrafricaine, le Cameroun.. .et tant d’autres. lien
Certes, les profits énormes générés par le pétrole ou le gaz sont des armes puissantes pour postuler aux jeux olympiques, mais ce serait oublier l’uranium…
Ainsi le Kazakhstan, l’un des principaux producteur d’uranium dans le monde, s’était porté candidat en 2022 pour les J.O…lien
Les candidatures de pays ayant « les mains sales » se multiplient, à se demander si le CIO n’a pas pudiquement fermé les yeux sur les principes fondamentaux de l’Olympisme comme par exemple : « mettre le sport au service du développement de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine ». lien
Un principe qu’a probablement oublié maître Gims, qui a confirmé qu’il allait se produire pour la finale du mondial de foot au Qatar, d’autant que ce Congolais connaît bien les dictatures. Lien
à l’instar du petit président français, et de sa cour, il doit penser qu’il faut séparer le sport de la politique... « il ne faut pas politiser le sport » a-t-il récemment déclare. lien
Analyse un peu simpliste que ne partagent pas de nombreux intellectuels, ou même politiques, tels Jacques Chirac, qui lors de la coupe du monde de 1998 prônait l’avènement d’une société « black blanc beur »...lien
Plus avant un certain Nelson Mandela avait utilisé la coupe de monde de rugby de 1995 comme occasion d’unification entre noirs et blancs. Lien
Encore plus loin, avons-nous oublié le « onze de l’indépendance » fondée en avril 58 composée de joueurs professionnels évoluant en France Métropolitaine, lesquels à la fin du championnat avaient rejoint le FLN au Maghreb... ce qui n’a pas empêché cette équipe de signer une tournée mondiale de 80 rencontres pour défendre la cause de l’indépendance algérienne. lien
Même le cyclisme a été touché par ces pratiques, telle l’équipe basque Euskatel Euskadi qui glorifiait toutes ses victoires face à l’Espagne. lien
N’écartons pas le domaine de la boxe en rappelant le rôle qu’a joué Muhammad Ali, l’ex-Cassius Clay, lequel a acquis une véritable rôle politique pendant sa carrière sportive. Lien
Le ping-pong n’échappe pas à la règle, si l’on veut bien se souvenir de la rencontre en l’américain Cowan et le chinois Zedong, qui ont permis un début de normalisation des relations sino-américaines, avec comme point d’orgue la poignée de main entre Nixon et Mao en 1972. lien
Et quid du nazisme porté par le dictateur teuton qui écrivait dans son vieux « Mein Kampf » : « des millions de corps entraînés au sport, imprégnés d’amour pour la patrie et repris d’esprit offensif pourraient se transformer en l’espace de 2 ans en une armée » ? lien
Mussolini n’a pas fait mieux en 1934 se félicitant de la victoire de son pays lors de la coupe du monde de foot : « c’est au nom de Mussolini que notre équipe s’est battue (…) pour la conquête du titre mondial ». lien
D’ailleurs « d’une manière générale l’attribution des grandes manifestations sportives est toujours le fruit d’un choix politique » comme l’écrit l’internaute Cvita10X1000 sur son site « sportetmondialisation ». lien
Finalement la posture macroniste qui tente en vain de justifier sa probable venue au Qatar, en tentant de dépolitiser ce mondial de foot, tombe un peu à plat, car comme dit mon vieil ami africain : « le conciliateur c’est quelqu’un qui nourrit un crocodile en espérant être le dernier à être mangé ».
le dessin illustrant l’article est de Ben Jennings
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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