Le bilan accablant des politiques inspirées des travaux du GIEC
Dans cet article de synthèse, l’auteur de « la Servitude Climatique » conclut la série de quatre précédents articles publiés par Agoravox et dix articles publiés par l’Institut Turgot en tirant des conclusions générales sur les politiques françaises et européennes associées au risque climatique et fondées sur les conclusions du Groupe Intergouvernemental d’Experts pour le Changement climatique (GIEC). Une synthèse qui sonne comme un réquisitoire.
Les significations des sigles utilisés sont précisées en notes de fin d’article.
La source d’inspiration des politiques qui sont l’objet de mon propos est constituée essentiellement par les rapports du GIEC, parus successivement en 1990, 1996, 2001 et 2007. Il est donc nécessaire de commencer par une analyse des travaux de ce groupe d’expert et d’examiner s’ils constituent une base appropriée à la prise de décisions politiques.
A quoi sert le GIEC ?
Depuis près de vingt ans les responsables et élus publics, les ONG environnementales et les principaux médias accréditent la thèse d’une infaillibilité du GIEC dans son travail de collecte, d’analyse et de synthèse des informations scientifiques en vue d’apporter aux décideurs politiques les connaissances nécessaires à leurs choix, de nourrir le débat au sein des commissions internationales telles que la Convention-Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique, à offrir enfin aux chercheurs, aux économistes, aux politologues et aux médias une base de savoir nécessaire à l’accomplissement de leurs missions.
La méthodologie du GIEC
Pour ce faire, on a réuni environ 600 experts scientifiques et 300 économistes (et non le nombre de 2500 scientifiques comme trop souvent publié), répartis en trois groupes de travail chargés de faire respectivement le point de la connaissance scientifique, l’évaluation des conséquences pour l’environnement et les populations, les prévisions d’évolution du climat et de ses conséquences à moyen et long terme enfin. Il en résulte trois rapports d’environ 1000 pages chacun, qui font l’objet d’un résumé à l’usage des décideurs politiques d’une quarantaine de pages.
Les experts sont des bénévoles, choisis pour leur compétence, qui s’acquittent de leur tâche en marge de leur activité professionnelle. Ils sont souvent à la fois à la source des publications examinées, dans le cadre de leur activité de chercheurs et directeurs de recherche, et rédacteurs du GIEC, mais, bien entendu, ils n’analysent pas leurs propres contributions. Ils doivent se conformer à une méthode de travail précisément définie. D’abord, ils réunissent toute l’information disponible jusqu’à une date donnée, généralement antérieure de deux à trois ans à la publication des rapports, temps nécessaire à l’accomplissement de leurs tâches. Pour le Groupe 1 chargé du volet scientifique, Ils doivent sélectionner les seules contributions ayant été publiées dans des revues scientifiques opérant une sélection des articles après une procédure de révision par les pairs. Les experts font des synthèses des articles sélectionnés et leur texte est soumis alors à relecture par des responsables qualifiés. Le rapport du Groupe est rédigé, puis validé, après que rédacteurs et relecteurs se soient mis d’accord. Le Groupe 2 travaille suivant la même procédure de relecture, chaque membre analysant les productions du groupe 1 en y apportant sa propre expertise. Le Groupe 3 enfin établit ses prévisions à partir des travaux des deux autres groupes et de simulations faites à partir de modèles climatiques.
Ces procédures paraissent assurer une grande fiabilité aux productions du GIEC, dans la mesure où les travaux de recherches sélectionnés ont été accomplis par des spécialistes compétents et respectueux des règles épistémologiques en vigueur dans leurs disciplines, et également si les revues scientifiques obéissent à la déontologie propre à leur profession, notamment dans le choix des articles à publier et dans la procédure d’examen par les pairs. Les rédacteurs du GIEC doivent s’assurer que ces conditions sont bien remplies.
Biais, erreurs, laxisme et fraudes décrédibilisent le travail du GIEC.
Au cours des années 1990 à 2008, un certain nombre de critiques avaient, souvent à juste titre, pointé des erreurs ou des travers dans les productions du GIEC. Les détracteurs mettaient en évidence des erreurs de calcul ou d’analyse statistique, telles que celles ayant abouti à la courbe en crosse de hockey de Michael Mann, des jugements négatifs sur la validité des prévisions faites par recours à des modèles climatiques, la non prise en compte de résultats de travaux scientifiques n’allant pas dans le sens des conclusions des rapports, soit que ces travaux n’aient pas été acceptés par les revues scientifiques ou qu’ils aient été publiés après la date limite fixée par le GIEC, soit qu’ils n’aient pas retenu l’attention des experts du GIEC. On s’étonnait aussi de l’obstination du GIEC à se baser sur les seules mesures de température atmosphérique faites par des stations météorologiques au sol ou des bouées météorologiques en mer, alors que depuis 1979 on disposait de mesures faites par des satellites, qui étaient bien plus homogènes et couvraient mieux la surface du globe. On critiquait surtout le résumé pour les décideurs, qui tirait des conclusions péremptoires à partir des gros rapports des groupes qui, eux, faisaient mention de réserves et d’incertitudes sur les propositions qu’ils présentaient. Tout cela alimentait une vague de contestations chez ceux qu’on qualifiait de « climato-sceptiques », quand ce n’était pas de « négationnistes ». Mais le prestige du GIEC auprès des gouvernants, des autorités internationales et du public n’était guère affecté.
L’année 2009 remet fortement en question toutes ces certitudes.
Dans mes précédents articles, on a pu lire que les modèles mathématiques étaient programmés avec des paramètres contraires aux données recueillies par les mesures faites par satellites artificiels, et je citais notamment un article de juillet 2009, rédigé par Richard Lindzen et Yong-Sang Choi, et présentant un ensemble de graphiques qui montrait que les modèles étaient fautifs dans leur appréhension de l’impact des nuages dans les températures, ce qui aboutissait à surestimer fortement les élévations de température dues aux gaz à effets de serre. J’ai également cité la conférence et les travaux du Professeur Mojib Latif qui expliquait, au tout début de septembre, que les phénomènes océaniques connus sous le nom d’oscillations allaient provoquer dix à vingt années de refroidissement, ce qui, ajouté aux onze années écoulées depuis 1998 sans aucun réchauffement, portait à vingt ou trente années de stagnation ou de régression des températures, au lieu des 2/10ème de degrés d’augmentation par décennie prévus par les modèles. En octobre survenait l’annonce, faite par le directeur du Climatic Research Unit britannique que les résultats de mesures de températures faites depuis 1990 par trois milliers de stations avaient été « détruites ou perdues », ce qui aurait du avoir pour effet immédiat d’invalider tous les travaux faits à partir de ces données pour cause d’irréfutabilité.
Le 19 novembre 2009, dans une conférence organisée par l’Institut Turgot et Euro 92 dans les salons de l’Assemblée nationale, j’exprimai l’opinion que les incertitudes entachant les travaux du GIEC rendaient ceux-ci impropres à servir de base à des politiques coûteuses et dommageables tant pour l’économie que pour les libertés individuelles. Mon livre, la Servitude Climatique, alors à l’impression, développait largement mes arguments. Le surlendemain, le monde entier était informé du viol de la base de données du Climatic Research Unit et de la publication de son contenu. La révélation des courriels échangés par des scientifiques de grand renom retentissait comme un coup de tonnerre frappant le GIEC et la science climatique dans son ensemble. Trucages scientifiques et actes hostiles envers les scientifiques proposant des thèses opposées à celles du Groupe d’Experts étaient monnaie courante chez une vingtaine de spécialistes du climat très impliqués dans les travaux du GIEC. Cette fois, c’était l’intégrité même du Groupe d’Expert qui était mise en cause. Certes, tous les membres du Groupe de Travail numéro 1 n’étaient pas concernés, mais enfin, Jones, Wigley, Mann, Briffa, Trenberth, Santer et quelques autres sont des contributeurs essentiels de ce groupe de travail, et considérés comme des éminences scientifiques.
A elle seule, l’affaire du Climategate aurait du suffire à déclencher une suspension des processus politiques en cours dans l’appréhension et le traitement du risque climatique. Il n’en a rien été. Aucun des dirigeants occidentaux n’a tenu compte de cette affaire.
Le mois de janvier 2010 nous apporte un lot fourni de preuves nouvelles du « laxisme » du GIEC. Que l’on m’excuse, la liste est longue, et je ne développerai pas, mais je renverrai à des sources plus détaillées.
L’affaire de la fonte des glaciers de l’Himalaya :
Dans son rapport de 2007, le GIEC affirme que les glaciers de l’Himalaya auront disparu en 2035, entrainant des conséquences catastrophiques pour l’alimentation en eau des grands fleuves indo-pakistanais tels l’Indus, le Gange et le Brahmapoutre, avec des conséquences économiques et humaines désastreuses pour les populations concernées. Il est apparu que cette affirmation a pour source une publication du WWF de 2001, écrite par un militant écologiste, non révisée par des scientifiques, et n’ayant aucun caractère scientifique, publication se fondant sur les déclarations orales d’un russe, Kotliakov, interviewé au début des années 1990, et qui affirmait que l’ensemble des glaciers du monde auraient perdu les 4/5èmes de leur superficie…en l’an 2350. Le GIEC, reconnaissant son erreur, s’est publiquement excusé le 29 janvier. Par quels raccourcis le monde est-il devenu Himalaya, l’année 2350 est devenue 2035 et 4/5ème sont devenus 100% ? Et comment une telle bévue a-t-elle pu passer tous les cribles du GIEC ? On voudrait bien croire à une succession d’erreurs ou à de l’incompétence, mais les représentants indiens, très concernés par l’effet produit par de telles affirmations sur leur opinion publique, n’avaient cessé de protester, sans jamais être entendus. Pour plus d’information sur cette affaire, je conseille la lecture d’un article fort bien rédigé d’Objectif Liberté, qui lui-même renvoie à des sources anglophones nombreuses.
Certains, tel le journaliste Stéphane Foucart du Monde, ont minimisé l’affaire des glaciers himalayens en faisant valoir qu’il ne s’agissait que d’une seule erreur dans un rapport de 976 pages. C’est faux, le rapport 2007 comporte plusieurs erreurs de ce type. La perspicacité des censeurs qui passent désormais au peigne fin les écrits du GIEC nous apporte quelques autres belles perles.
La Forêt amazonienne, d’après le rapport 2007 du GIEC va perdre 40% de sa superficie, d’aujourd’hui à 2050, à cause du réchauffement climatique. Le Figaro publie un article sur le sujet : Ce quotidien semble depuis quelques jours disposé à informer objectivement sur le changement climatique. Le fait est nouveau et mérite d’être signalé. La source du GIEC est, à nouveau, une publication du WWF, elle aussi écrite par un militant, qui déclare que 10% de la forêt amazonienne (et non 40%) est plus sensible aux feux de forêt du fait de la sécheresse occasionnée par le réchauffement climatique. L’article, bien entendu, ne subit pas de révision par de scientifiques, et n’a aucune prétention scientifique.
D’importantes réductions de la surface des glaciers des Alpes, des Andes et d’Afrique sont attendues, d’après le GIEC (2007). Les deux sources de cette information : un article d’un guide de montagne dans une revue pour randonneurs, écrit après consultation de 80 de ses collègues, et une dissertation d’un étudiant en maîtrise de glaciologie, après consultations de guides de montagne également.
Au total, les journalistes du Telegraph, Richard Gray et Rebecca Lefort ont relevé, dans le rapport 2007, 16 utilisations de documents émanant du WWF, non révisés par des scientifiques. Voir aussi le site de l’Institut Heartland.
Deux importants rapports, publiés par le SPPI, viennent, en cette fin du mois de janvier 2010, apporter de très importantes contributions à l’évaluation des travaux du GIEC.
Le premier, paru le 20 janvier, est un document de 140 pages, signé John P Costella, « Climategate Analysis », qui cite et commente un nombre important des courriels échangés par les scientifiques impliqués dans l’affaire, avec les liens vers le texte des messages source. C’est le meilleur document paru à ce jour sur l’affaire, et bienvenu après la disparition du site francophone Skyfal.free.fr, qui avait entrepris le même travail, mais de façon bien moins exhaustive.
Le second, daté du 27 janvier, de Joseph d’Aleo et Anthony Watts, 110 pages, « Surface Temperatures Records : Policy Driven deception », montre que les mesures de température traitées par les deux autres contributeurs du GIEC, le GISS (NASA) et le NCDC (NOAA) sont aussi suspectes que celles fournies par le CRU britannique. Leur contribution conduit à penser que TOUTES les données de température fournies par les stations au sol et en mer ont été biaisées par les organismes chargés de les traiter.
Il est utile de rapprocher ces faits, que l’on découvre progressivement aujourd’hui, de l’enquête réalisée par Kesten C. Green et J. Scott Armtrong, présentée dans « la Servitude Climatique », pages 100 à 102. Leur investigation, menée auprès de scientifiques travaillant pour le GIEC, révèle 72 violations des principes méthodologiques communément admis en matière de prévisions, ce qui conduit les auteurs à considérer que les rapports du GIEC sont impropres à servir de base à des décisions politiques.
L’audit de Green et Armstrong, réalisée à leur initiative propre, a été tributaire de la coopération des scientifiques interrogés, et seule une minorité d’entre eux leur a transmis des réponses. Devant l’accumulation de preuves de défaillances méthodologiques de la part des rédacteurs et responsables du GIEC, il parait aujourd’hui souhaitable de diligenter une véritable enquête officielle et d’en charger une commission d’audit dont les conclusions doivent être rendues publiques.
Evaluation des politiques climatiques.
Il semble évident que, dans l’état actuel du dossier, les décisions politiques majeures doivent faire l’objet d’une remise en cause. Ces décisions n’auraient pas lieu d’être si les prévisions qui les ont fondées s’avéraient fausses. Tant que l’enquête réclamée ci-dessus n’aboutira pas à des conclusions précises, il est urgent d’attendre.
Supposons toutefois qu’une telle investigation conduise à la conclusion que les risques climatiques annoncés par le GIEC sont réels, ou plausibles, devrions-nous alors nous montrer satisfaits des mesures envisagées par la France, avec sa taxe carbone version 2010, ou par l’Union Européenne, avec le Paquet Energie-Climat ? Cela ne se pourrait que si ces législations conduisaient à un résultat global positif, c’est-à-dire une limitation de la concentration atmosphérique en gaz à effet de serre à un niveau tel que les hausses de température soient limitées, à disons +2° C pour la seconde moitié du XXIème siècle, puisque c’est là le niveau pour lequel les experts semblent s’accorder à dire que les conséquences climatiques seraient gérables sans dommages excessifs. Encore conviendrait-il de considérer l’étendue des sacrifices que ces mesures imposeraient dans le proche avenir aux économies et aux populations. Tout cela a été développé dans mes articles précédents et encore plus dans mon livre.
La première question à poser est la suivante : en quoi la taxe carbone actuellement envisagée contribuerait-elle à ce résultat, même en admettant qu’elle incite les autres pays européens à se doter d’une législation similaire ?
Cette question est à poser dans les mêmes termes pour le Paquet Energie Climat.
J’ai apporté la réponse à ces deux questions : les efforts consentis par les européens ne pourront aboutir à des résultats tangibles en terme de limitation des émissions de gaz à effet de serre, et donc de concentration de ces gaz dans l’atmosphère, que si tous les pays du monde qui émettent des quantités substantielles de ces gaz adoptent des mesures semblables. On sait qu’il n’est pas question, pour les pays en développement, qu’ils acceptent de limiter leur potentiel de croissance et d’industrialisation. Ces pays émettent actuellement 53% du CO produit globalement. Leur part ne cessera de croître, même en l’absence de limitations règlementaires de la part des pays développés. Nos mesures européennes ne changeront rien au bilan carbone, car une grande partie de la réduction de nos émissions résultera de transferts de production industrielle vers les pays non européens.
Il faut ajouter à cette analyse celle de la situation aux USA. Tout est suspendu, là bas, au sort du projet de loi Waxman Markey. Cette loi doit être examinée par le Sénat américain au cours de l’année 2010, et tout donne à penser que le vote des sénateurs lui sera défavorable. Le résultat était déjà très incertain avant la survenue du climategate et la conférence stérile de Copenhague, où le Président Obama a déçu et laissé une partie de son prestige. L’opinion publique américaine est maintenant majoritairement hostile aux mesures contraignantes de limitation des émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre, et ils sont 50% à ne plus croire au changement climatique. Les lobbies opposés à la politique climatique d’Obama montrent une pugnacité et une efficacité redoutables, que ne parviennent plus à endiguer les forces qui représentent les intérêts financiers considérables qui ont misé gros sur la politique promise par Obama. Ils exigent le retrait du projet de loi, des procès contre l’administration américaine (mise en cause de la procédure qui a abouti à considérer le CO2 comme un polluant), ils veulent la démission du Président du GIEC et des actions en justice contre les scientifiques compromis dans le scandale du climategate. De plus, les démocrates ont perdu leur siège du Massachussetts, et avec lui la majorité qualifiée qu’ils possédaient au Sénat, et d’ailleurs nombre de sénateurs démocrates représentent des états fortement industrialisés et consommateurs de charbon, où l’économie et l’emploi sont menacés par le projet de loi. Ces élus démocrates rechignent à suivre la ligne politique du parti. Je n’hésite pas à affirmer que le projet Waxman Markey sera refoulé, ou au moins tellement amendé qu’un retour devant le la Chambre des Représentants sera nécessaire, et là, les équilibres auront changé par rapport à la situation de juin 2009, où le vote de la chambre basse, obtenu par une courte majorité de 12 voix, avait été obtenu grâce à l’unanimité des démocrates.
L’échec prévisible de la politique environnementale d’Obama aura des répercussions considérables au plan géopolitique. Sur le continent Nord-américain, il devrait provoquer un véritable séisme financier au sein de la profession bancaire et surtout parmi les innombrables hedge funds qui se sont constitués pour attirer des capitaux à investir dans le risque climatique (voir « la Servitude Climatique, pages 223 à 227). Ces capitaux représentent plusieurs milliers de milliards de dollars (8000 milliards, d’après l’INCR) ! Les fonds de pension, les grandes fondations américaines, certains états des USA y ont massivement investi (certaines des banques françaises aussi, d’ailleurs). Comment le système bancaire américain, à peine convalescent de la crise des subprimes, supportera-t-il ce nouveau choc ? Tout cela devrait avoir de sérieuses conséquences économiques, porter un coup très dur à la popularité et à l’influence internationales du Président Obama, et faire chuter le poids des Etats-Unis dans les négociations environnementales internationales. Le pays fort apparait désormais être la Chine, dont on voit bien qu’elle est opposée à toute contrainte venant d’accords multilatéraux.
Dans ces conditions, il apparait que les Européens feraient cavaliers seuls dans la croisade anti-CO2. Ce serait absurde. A quoi rimerait une limitation de 20% à 30% de nos émissions, alors que l’Union européenne ne produit que 22% des émissions mondiales, et que les seules émissions des pays en développement auront augmenté de 50% à 90% entre aujourd’hui et 2020, faisant progresser le volume des émissions mondiales de 28% à 48%, tandis que les limitations européennes ne feraient baisser l’addition globale que de 5 à 6%. Ces chiffres tiennent compte d’une progression annuelle des émissions des pays en développement comparables à celles enregistrées au cours des années précédentes. Toutefois, la nouvelle crise américaine envisagée ci-dessus et une économie européenne pénalisée à la fois par la situation américaine et par les taxes carbone et autres paquets énergie-climat pourraient faire chuter considérablement les potentiels d’achat des pays développés à la Chine et aux autres pays en développement, précipitant le monde entier dans une dépression économique qui règlerait le problème carbone.
Conclusions
A l’énoncé des prévisions ci-dessus, on peut penser que nous avons le choix entre la peste et le choléra. Quoi qu’on fasse, il faudra payer l’addition de vingt années de dirigisme d’Etat en matière environnementale qui ont abouti à dilapider l’argent public et privé pour favoriser un business vert en partie inutile, et à faire croire aux investisseurs à de fabuleux pactoles à long terme. Comment nous prémunir, aujourd’hui ? D’abord, en différant toute décision concernant la taxe carbone et le paquet énergie-climat. Il faut au moins attendre que deux conditions soient réunies :
1 - que nous disposions d’un diagnostic scientifique sur, après audit des travaux du GIEC et de ses fournisseurs de ressources (notamment les trois fournisseurs de statistiques de température et la vingtaine de centres qui mettent en œuvre des modèles climatiques), et après que la science ait suffisamment progressé dans la connaissance du climat.
2- Qu’un accord sur des efforts communs aux pays développés et aux pays en développement devienne possible, si, bien sur, des risques climatiques venaient à être confirmés. Dans ces conditions, il faudrait alors déterminer si l’on doit procéder à des limitations censées contenir les températures au dessous d’un certain niveau, ou bien s’il vaut mieux chercher à s’adapter progressivement aux changements climatiques prévisibles. Il existe des conséquences positives dans les augmentations de température et dans celle de la concentration atmosphérique en CO2. Il en est ainsi des rendements agricoles en général (photosynthèse accrue), et de la possibilité d’étendre les surfaces cultivables vers le nord de l’Eurasie et de l’Amérique, ainsi qu’en Patagonie..ou au Groenland, comme au temps des Vikings ! Les inconvénients eux paraissent pouvoir être limités par des investissements judicieux (endiguement contre la montée éventuelle des eaux en certains lieux vulnérables, par exemple, ou lutte contre la sècheresse par de meilleures pratiques agricoles et par des investissements technologiques idoines, etc.). Voila des thèmes propres à nourrir une concertation internationale productive.
Il conviendra également de revoir les engagements de dépenses de l’Etat dans le soutien aux nouvelles technologies vertes. D’abord, il convient de déterminer ce que l’Etat peut soutenir efficacement, et ce que l’Etat doit s’abstenir d’aider. La recherche et le développement sont porteurs de fortes externalités, lorsqu’elles visent des innovations qui trouveront naturellement un marché dans l’avenir. Par contre, subventionner des productions agricoles, industrielles et des services marchands fausse la concurrence intersectorielle, car les budgets des contribuables-consommateurs étant déterminés, ce qui va à l’impôt n’est pas disponible pour la consommation, et ce qui est dépensé en faveur d’un secteur aidé manque à tous les autres secteurs. En second lieu, il faut tirer des conclusions sur certaines activités qui apparaissent comme inutiles ou non économiquement viables : les agro-carburants actuels (à l’exception, peut-être, de ceux tirés de la canne à sucre, voir note en fin d’article), les éoliennes dans la plupart des sites où on les installe, la séquestration du carbone, notamment. Par contre, les véhicules électriques ont de véritables atouts commerciaux avec le confort et la fiabilité mécanique qu’ils promettent ; les nanotechnologies offrent d’évidentes promesses pour la production de série de super-condensateurs rendant caducs les batteries actuels dans nombre de leurs applications ; la production de diester par l’alimentation en CO2 industriel de micro-algues offrent de bonnes perspectives ; l’isolation des bâtiments se justifie lorsque l’investissement offre plus de confort ou s’amortit suffisamment rapidement. Toutes ces innovations ont le mérite de concourir à la solution d’un problème autre que celui du CO2, et bien réel celui là : celui de l’hémorragie de capitaux que nous subissons lorsque le prix des hydrocarbures augmente, celui de la diversification des sources de carburants liquides, actuellement trop concentrées entre les mains des producteurs de l’OPEP, celui de la demande exponentielle des pays en développement en carburant… Dès lors, leur développement se justifie, non pas dans le cadre d’une politique environnementale, mais dans celle de la recherche d’une meilleure sécurité énergétique.
Les dirigeants européens seront-ils capables d’opérer une remise en cause aussi radicale de leur démarche ?
Notes :
sigles utilisés :
GIEC : Groupe Intergouvernemental d’Experts sur le Changement climatique.
GISS : Goddard Institute for Space Studies (une division de la NASA)
NCDC : National Climatic data Center.
NOAA : National Oceanic and Atmospheric Center.
SPPI : Science and Public Policy Institute.
INCR : Investor Network on Climate Risk
Agro-carburants tirés de la canne à sucre : le problème, pour la France, se situe principalement à l’Ile de la Réunion. La canne à sucre y est un exceptionnel « puits de carbone », qui absorbe environ 60 tonnes de CO2 l’hectare chaque année. L’exploitation sucrière est menacée par la fin des quotas de sucre européens en 2012, et la production d’alcool apparait comme une diversification salvatrice pour cette filière. L’alcool est extrait non seulement du jus sucré de la canne, mais également des résidus de broyages (la « bagasse ») qui sont ainsi valorisés. On peut même réserver le jus à la fabrication de sucre et de rhum, et n’utiliser que la bagasse pour faire de l’alcool. Le problème est assez comparable à celui résolu par le Brésil, il y a trente ans, lorsque la décision d’imposer un carburant automobile contenant 50% d’alcool a permis de réduire une production sucrière excédentaire et de stabiliser les cours du sucre. Le bilan économique est donc positif.
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