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Accueil du site > Actualités > International > Pour un nouveau traité de non-prolifération nucléaire

Pour un nouveau traité de non-prolifération nucléaire

Le Traité de non-prolifération nucléaire actuel est de moins en moins efficace. Il faut le remplacer par un nouveau traité plus juste et plus efficace. Je propose les grandes lignes de ce qu’il pourrait être.

Le président Sarkozy vient de rappeler que la France considère que l’armement nucléaire ne doit avoir qu’un rôle de dissuasion. Il en tire la conclusion que les armes de courtes et moyennes portées devraient être interdites et qu’il serait souhaitable que les puissances nucléaires affichent la nature et la quantité de leur armement. Il s’agit-là de propositions très intéressantes, mais qui ne résoudront pas, à elles seules, les problèmes que va poser la prolifération nucléaire dans les années à venir ; les cas de l’Iran, de l’Irak, de la Libye, de la Corée du Nord, du Pakistan, de l’Inde et d’Israël risquent bien d’être suivis de nombreux autres.

Il est surprenant que ces cas n’aient pas conduit à une remise en cause de l’efficacité du traité actuel de non-prolifération nucléaire (TNP) ? Comment ce traité pourrait-il être « durable », alors qu’il est profondément inégalitaire ?

Un traité inégalitaire

Comment justifier à long terme que, parmi les signataires du traité, seuls les 5 "Grands" continuent à avoir le monopole légal de l’armement atomique ? En fait, des non-signataires, Inde, Pakistan, Israël ont réussi à développer, non seulement leur armement atomique, mais, aussi, leur nucléaire civil, démontrant ainsi les limites du caractère dissuasif du traité. En dehors d’un embargo bien peu dissuasif sur les matériels et les technologies nucléaires, quels sont les moyens dont dispose la communauté internationale pour empêcher les Etats signataires de développer un programme militaire plus ou moins secret ? Les Etats-Unis sont-ils seuls qualifiés pour juger et punir ?

En signant le TNP, les grandes puissances s’étaient engagées à désarmer. Cet engagement est resté lettre morte car chacune pense que c’est prendre un trop grand risque que de désarmer unilatéralement. Malheureusement, on peut rester sceptique sur l’efficacité des déclarations en faveur de ce désarmement par l’ancien secrétaire d’Etat Schultz et d’autres éminentes personnalités américaines.

La plupart (sinon tous) des Etats intéressés par un armement nucléaire recherchent uniquement un effet de dissuasion. Nombreux sont ceux qui ont estimé que si Saddam Hussein avait possédé l’arme atomique il n’aurait pas été attaqué. Il est tentant pour certains de tirer les conséquences d’une telle analyse.

Pour un nouveau traité basé sur la transparence et le contrôle

Il est temps de redéfinir la philosophie même du TNP ? Les principes de transparence et de contrôle qui ont présidé à l’élaboration du Plan Baruch sous l’influence des scientifiques réunis dans le Bulletin of Atomic Scientists, peuvent servir de référence, tout en prenant acte de la multiplication des Etats disposant de la technologie nucléaire militaire.

C’est ainsi qu’un nouveau traité pourrait :

  • accepter le droit pour tout Etat signataire de développer un armement nucléaire "dissuasif" ;
  • interdire les armes "prêtes à l’emploi" : sous-marins lanceurs d’engins, avions en vol et satellites armés de bombes nucléaires, missiles équipés d’une tête nucléaire ;
  • prévoir le stockage des têtes nucléaires en des lieux spécifiques sous contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique(AIEA) ;
  • imposer l’inspection de tous les sites nucléaires militaires par les inspecteurs de l’AIEA ;
  • mettre fin au secret nucléaire militaire ;
  • interdire les armes de première frappe permettant, par leur précision et leur puissance de pénétration, de cibler particulièrement les armements nucléaires d’un éventuel adversaire ;
  • donner la possibilité à un Etat s’estimant menacé de recourir à l’état de sauvegarde lui permettant, après un délai à fixer et pendant une période délimitée, de mettre ses forces nucléaires en état d’alerte.

De la sorte, chaque Etat, qui se sentirait éventuellement menacé, pourrait recourir à la dissuasion atomique en cas de menace vitale, avec un préavis suffisant pour laisser la diplomatie agir. Les 5 Grands pourraient accepter une limitation de l’usage de leur arsenal atomique en échange d’une limitation importante des risques de la prolifération. La surveillance exercée par les inspecteurs de l’IAEA pourrait aussi être très dissuasive vis-à-vis des détournements par des organisations terroristes.

La relative pacification des relations entre les Grands aussi bien qu’entre des Etats comme le Pakistan et l’Inde, de même que l’inquiétude soulevée par la perspective d’une prolifération incontrôlée, offre une occasion unique de remettre à plat le Traité de non-prolifération.


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13 réactions à cet article    


  • aurelien aurelien 26 mars 2008 18:32

    Très intéressant, mais comme vous le voyez, les citoyens moyens lecteurs d’Agora Vox ne semblent pas intéressés par cette problématique, pourtant très grave et sérieuse.

    Une grande partie de la population est d’ailleurs complice de cet état de fait et des nations nucléaires. La majorité d’entre eux ayant leur esprit voué et conditionné au nationalisme patriotique ou communautaire.


    • aurelien aurelien 26 mars 2008 18:36

      Ayant lu trop vite vos propositions, je ne peux qu’exprimer mon désaccord, l’enjeu n’étant pas bien sûr de développer un armement même dissuasif, mais de "montrer l’exemple" et de supprimer totalement et complètement tout armement de ce type.

      C’était d’ailleurs la position d’un scientifique comme Frédéric Juliot Curie qui n’a cessé jusqu’à la fin de sa vie, après avoir travaillé sur la radioactivité, de militer pour le désarmement nucléaire total, au niveau international.


    • aurelien aurelien 26 mars 2008 18:42

      Cela dit il n’y a qu’à voir la mise en garde à vue du président de l’association "Sortons du nucléaire" pour s’apercevoir que le lobby militaro-industriel français est à mille lieux de s’engager dans des voies de réduction de l’armement nucléaire, un quatrième sous-marin complètement inutile venant compléter la gamme des objets moribonds et guerriers de ce pays, béni en grande pompe le 21 mars à Cherbourg par le chanoine Sarkozy grand apôtre de la paix dans le monde.


    • aurelien aurelien 26 mars 2008 20:17

      que dis-je ? Frédéric Joliot-Curie qui a lancé l’appel de Stockholm pour supprimer la bombe atomique serait une référence ?

      Tout le monde sait qu’il s’agissait d’un affreux communiste, comme l’atteste Wikipédia :

      Quelqu’un enregistré au « Parti » ne peut être que suspect !


    • Hervé Nifenecker Hervé Nifenecker 29 mars 2008 17:06

      L’ambition d’un désarmement nucléaire total est tout à fait noble. En mon temps j’ai manifesté contre la force de frappe. Toute la gauche aussi. Puis, après 1981, la gauche socialiste, bien sûr, mais aussi communiste, s’y est ralliée. Continuer à réclamer le désarmement nucléaire total a le mérite de donner bonne conscience mais ne semble avoir aucune conséquence pratique.

      On peut d’ailleurs se demander pourquoi se limiter à un désarmement nucléaire et ne pas l’étendre à tous les armements. Là encore on aurait une posture juste mais encore plus inefficace. Par contre les actions limitées contre les armes chimiques, les armes anti-personnelles les armes biologiques semblent avoir eu des conséquences intéressantes. Je crois qu’il est temps que l’opinion publique se saississe à nouveau de la question nucléaire avec des propositions pragmatiques ayant des chances d’être adoptées parce que de type "Gagnant gagnant".

      Joliot certes, accepta la présidence du Mouvement de la Paix et ne cessa pas de militer pour le désarmement. Malheureusement chacun sait que le Mouvement de la Paix était un instrument entre les mains de Staline et qu’il resta bien silencieux sur la bombe soviétique.

      Je pense que le traité actuel n’est pas du tout adapté à la nouvelle situation géostratégique où les anciens grands (URSS et USA) n’ont plus les moyens d’imposer la discipline aux pays de leur camp. Le nouveau rapport des forces géostratégiques peut déboucher sur une situation chaotique et imprévisible, particulièrement dangereuse en ce qui concerne les armes nucléaires. C’est pourquoi je pense qu’il faut un nouveau traité acceptable par tous. En soi mes propositions doivent surtout servir à inspirer un débat sur ce sujet aussi crucial que le réchauffement climatique pour notre avenir.


    • rafale f3 26 mars 2008 22:15

      L’idée d’un traité est quasi inappplicable, il serait immediatement contourné par de nouvelles armes ou de nouvelles strategies encore plus destructrice, de plus, les antagonistes ne le veulent pas, compte tenu des intérêts geo politique des uns et des autres, le status quo et donc de mise.

      Mais la guerre d’irak et les ABM américain en pologne ont rompus l’equilibre, c’est un jeu très dangereux des americains, ca equivaut a installer des missiles a cuba, quand à l’efficacité de l’ABM, elle est nulle, le reseau américain aegis est plus efficace.

      Les russes en represaille ont repointées leur missiles sur les pays europeens qui sont une menace directe pour la russie, logique, on vient leur chercher des poux dans la tete, quand à l’ABM, il pourra être détruit facilement par des bombardiers. Ils ont aussi modernisé leur bombardier strategique TU-160, qui n’a plus rien a voir avec l’ancien coucou.

      Sarkozy avait annoncé, une reduction de 20 mirage 2000-N sur les 60 que compose la force nucleaire, mais les rafale peuvent très bien en embarquer deux, et on peut doubler très rapidement le potentiel nucleaire, il faut savoir que le sous marin le terrible aura bientot 16 M-51, chaque M51 pouvant accueillir de 1 à 8 mini nuke de differentes puissance, 8*16, ca fait 48 tete nucleaire, contre 20.

      Avec les pays emergents, ayant de structures politiques instable, ca a malheureusement relancé les armements nucleaire, les ABM, ont fait repartir la course aux armements. Il est malheureusement impossible de desarmer.

      Les iraniens travaillent sur un missile qui fait actuellement 500km, ils cherchent a augmenter à tout prix la portée à 2000 km, c’est à dire l’europe. C’est pour mettre du sucre dedans.

      Tant que les grands se mettront pas d’accord ensemble aux Nations Unis, Les usa, Les russes, les chinois, pour imposer aux petits d’arreter, mais vu les transferts de technolgies, c’est très mal parti.

      Il faut s’attendre à des conflits nucleaire localisés, inde/pakistan, iran/israel/usa, coré du nord a voir.

      Pour l’europe la France et l’angleterre doivent conserver leur moyen de riposte, pour info, l’angleterre va developper avec la France son nouveau missile pour renouveller son potentiel de disuasion.

      Non, la paix sur terre, c’est pas pour demain, de nouvelles guerres sont à venir, pour l’energie, l’eau, le fait meme d’exister et de vivre.

       

       

       


      • Hervé Nifenecker Hervé Nifenecker 29 mars 2008 17:15

        C’est précisément parce que je crois que ceux qui l’ont ne renonceront pas à l’armement nucléaire et que d’autres l’acquierront que je pense qu’il faut penser à un nouveau traité qui empêche le mieux possible les erreurs de calcul qui pourraient déboucher sur des conflits locaux. Je suis convaincu que ceux qui ont un armement nucléaire lui accorde une importance dissuasive, bien plus qu’offensive. Le point est précisément de s’assurer du caractère dissuuasif des systèmes d’armes. 


      • Asp Explorer Asp Explorer 27 mars 2008 07:43

        Ce qui est étonnant, c’est que personne ne se pose la bonne question : "pourquoi réduire les armements nucléaires ?" Après tout, depuis leur invention, les bombes atomiques ont fait incomparablement moins de mort que les préhistoriques massues et machetes.


        • yoda yoda 27 mars 2008 11:06

          Quitte a jouer le jeu de la dissuasion jusqu’au bout et que tous soient sur un meme pied d’egalite, il faudrait que chaque citoyen aie sa bombe nucleaire.

          Ainsi, tous ensemble, nous nous respecterons et nous aimerons au risque sinon de se prendre une bombe sur la gueule...

           Non ? 


          • E-fred E-fred 27 mars 2008 21:32

            Bonsoir. je viens copier-coller un commentaire d’un de mes article.

            Une bombe, c’est fait pour exploser, non ?

            Sarkozy fait un peu plus que de la dissuasion, moi j’appelle ça des menaces.

            Le président Sarkozy, dans son discours d’inauguration du lancement de notre nouveau sous-marin nucléaire "Le terrible" ( vendredi 21 mars 2008), a parlé de l’attentat de Karachi en saluant la mémoire des 11 français tués, pour ensuite dire : "Je pense en particulier à l’Iran. L’iran accroït la pertée de ses missiles, alors que de graves soupçons pèsent sur son programme nucléaire. C’est bien la sécuritée de l’Europe qui est en jeu...Mais nous devons aussi être prêts à faire face à d’autres risques que la prolifération. L’imagination de nos agresseurs potentiels est sans limites...Et demain, les progrès technologiques peuvent créer de nouvelles menaces...Notre dissuasion nucléaire mous protège de toute agression d’origine étatique contre nos intérêts vitaux- d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la forme".

            Et plus loin : "Nous ne pouvons exclure qu’un adversaire se méprenne sur la délimitation de nos intérêts vitaux, ou sur notre détermination à les sauvegarder. Dans le cadre de l’exercice de la dissuasion, il serait alors possible de procéder à un avertissement nucléaire, qui marquerait notre détermination. Il serait destiné à rétablir la dissuasion".

            "Tous ceux qui menaceraient de s’en prendre à nos intérêts vitaux s’exposeraient à une riposte nucléaire sévère, entraînant des dommages inacceptables pour eux, hors de proportions de leurs objectifs".

            Ceci me fait penser à l’article du Monde : "Le représentant américain à l’ONU, John Bolton, trahit les véritables préoccupations de George W. Bush en qualifiant l’Iran de "menace globale".


            • rafale f3 28 mars 2008 20:10

              Pour ma part ce n’est pas une menace, mais un avertissement en vue d’une menace, les iraniens travaillent d’arrache pied sur leur lanceur moyenne portée (2000km).

              Ca ne leurre personne, la reponse est clair.


              • millesime 11 mai 2008 15:42

                La politique de non-prolifération nucléaire établie après 1945 est obsolète. C’est la fin de l’ordre établi. La crise actuelle Iran/USA est une confrontation entre deux logiques archaïques ; celles des dirigeants iraniens qui ignorent l’intérêt collectif mondial pour se focaliser sur leurs intérêts ationaux à court terme et celle des dirigeants des Etats-Unis qui identifient leurs intérêts propres avec ceux du reste du monde.

                La crie Iran/USA ne peut être traitée comme un cas particulier, elle doit être gére en l’inscrivant dans une vision de long terme, fondée dur de nouvelles méthodes adaptées aux réalités du XXIè siècle.

                L’UE peut jouer un rôle de proposition très utile pour aboutir à une vraie stratégie internationale destinée à rassembler tous les acteurs à maitriser plus efficacement le risque nucléaire dans le monde, en lançant la réforme du traité de non prolifération nucléaire.


                • Guillaume Guillaume 8 octobre 2008 14:27

                  @l’auteur : J’imagine qu’en tant qu’expert du domaine (n’est pas qui veut Docteur es Sciences ou Physicien au CEA) vous connaissez les ouvrages de Dominique Lorentz ?

                  Ne le prenez pas mal si je parle de ’naiveté’ meme si le terme est un peu fort. Le Nucléaire et la prolifération atomique ne sont pas juste des questions d’énergie mais surtout des instruments de géopolitique. Il ne faut pas oublier que depuis les années 40, allez, disons 50, le nucléaire est un enjeu de la guerre froide et une arme que les américains ont su utiliser pour leur relations politiques et stratégiques et maintenir leur hégémonie sur la partie ’occidentale’ de la planète.

                  Madame Lorentz, dans son ouvrage : ’Affaires Atomiques’ décrit par le menu la réalité des accords nucléaires internationaux depuis les années 50.
                  Et oui, il se trouve que longtemps, seul les américains avaient le droit de décider qui avait le droit ou non aux réacteurs nucléaires. Bien sur, en champion de la Non-Prolifération, ils n’étaient pas les maitres d’oeuvres des installations nucléaires par exemple Israeliennes, sud Africaines, brésiliennes, Argentines, ou chinoises (et bien d’autres) mais ils avaient toujours un allié obéissant (france ou Allemagne par exemple) pour livrer la commande...

                  Les centrales ou réacteurs de recherches vendu par la France étaient tout simplement des réacteur Westinghouse, marque américaine, concédé contractuellement, au coup par coup par le gouvernement américain... Ce qui veut dire que quand la France ou l’Allemagne vendait un réacteur, cela ne se faisait pas sans l’accord des USA....

                  Bref... Pour tous ceux qui ne connaissent pas, je conseille la lecture de Dominique Lorentz :
                   - Une guerre — une enquete sur les relation franco iranienne sur fond de nucléaire et de terrorisme d’Etat
                   - Affaires Atomiques — une bible sur la prolifération nucléaire mondiale
                   - Sujets Interdits. — le récit de la galère de l’auteur depuis l’écriture de sa premiere enquete jusqu’à son embauche à la défense Nationale pour rédiger la doctrine de contre-prolifération francaise et puis son éviction après intervention des services secrets pour le motif officieux qu’elle avait travaillé sur des ’Sujets Interdits’...


                  Bonne lecture.

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