Charlie-Hebdo n’aime pas la fête du cochon
C'est toujours difficile de dire du mal d'un grand malade. Comment faire des réflexions à un ami cancéreux, qui souffre et cherche encore quelques plaisirs dans le laps de temps qui lui reste à vivre ? L'hebdomadaire Charlie-hebdo entre dans cette catégorie, car il ne remettra jamais du massacre islamiste qui a décimé sa rédaction historique en 2015.
Depuis, Charlie qui était sur le point de fermer boutique avant l'attentat, faute de lecteurs partis vers d'autres horizons que le politiquement correct auquel étaient convertis Charb, Cabu et les autres, est devenu un symbole, une icone. Interdit de ne pas être Charlie, ou alors vous êtes contre la liberté d'expression, la dérision, l'humour satirique. Mais comme l'a si bien montré la philosophe Chantal Delsol, cet humour est à sens unique et destiné à se moquer de ceux qui pensent autrement, qui "complotent" par la réflexion et qui refusent la pensée unique libérale-libertaire. Etre Charlie, c'est cracher sur les croyances, la morale, les principes, voter écolo-LGBT, rire des autres et donner son argent à des gens qui se prennent pour des éveilleurs de peuple.
Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi. Votre narrateur fut un des premiers lecteurs du Charlie des années 1990, anar, anticonformiste, indépendant des partis. Philippe Val, rédacteur en chef à l'époque, nous offrait chaque semaine une bouffée d'oxygène dans un contexte ultralibéral après l'effondrement du communisme. Il n'y avait pas internet à l'époque, c'était la presse alternative ou TF1-M6 et autres rouleaux compresseurs de la pensée.
En assassinant Charb, l'irremplaçable Cabu, Bernard Maris, c'est-à-dire toute une équipe de gens drôles, cultivés et ouverts aux autres, les islamistes nous ont assommés. Ils ont tué le talent allié à l'intelligence. Celles et ceux qui ont pris la suite n'ont hélas pas le dixième du talent des vrais Charlies. Pire, ils ne valent pas mieux que le personnel de Libération et de France-dimanche. Ils sont hommes et femmes à parité, à gauche sans excès, sans imagination et pire, assistés dans la rédaction de leurs médiocres articles.
En témoigne une diatribe publiée recemment sur la cauchemar des bobos de gauche et des services de renseignement : la "nébuleuse d'extrême-droite". Grande famille : Eric Zemmour engrange des soutiens est une pige d'anthologie digne du bulletin de liaison de ce qui reste du PS. On y apprend que Zemmour est un méchant "facho", allié avec des aigris qui ont quitté l'ex-FN. Que synthèse nationale appelle à voter pour lui, que ce bidule est dirigé par un copain du regretté Jean-Pierre Stirbois, que Pierre Cassen (ancien cégétiste qui cotoya l'ancienne équipe de Charlie il y a vingt ans) et riposte laique sont des sous-marins anti-arabes, que tout ce petit monde s'est retrouvé en Bretagne pour manger du cochon grillé et appeler à militer pour Eric. Le tout organisé par l'ancien garde du coprs de Jean-Marie.
Bref, on n'apprend rien. Sinon que l'équipe du périodique fait campagne contre la droite ultra et développe des thèmes dans l'air du temps : la parité, le féminisme, l'écologie, la haine des religions, l'aide aux migrants sans distinction. Inutile de faire dans la satire pour déclamer son adoration du système, à moins de chercher à rabaisser les opposants : souverainistes, patriotes, gilets jaunes et aujourd'hui les antivax. Car il ne s'agit plus de comprendre et de dialoguer, mais de ridiculiser. Le professeur Choron, le dessinateur Dimitri, les anars de droite seraient refusés à l'entrée.
Une nouveauté cependant : vus les détails fournis sur les CV des uns et des autres (Roland Hélie, Pierre Cassen, etc.), il est évident que nos journalistes ont des informateurs qui ont des dossiers mis à jour. Quand on travaille avec le pouvoir, on ne peut se prétendre rebelle et anti-conformiste. Pourtant, les vilains "fachos" cités dans l'article n'ont jamais menacé ni violenté les charlies et compagnie. Ils ont les mêmes ennemis, les extrêmistes islamistes. Autant Philippe Val cherchait à discuter et échanger, autant ses descendants ne sont que des professionnels vendeurs de baratin.
Libre à eux de détester la viande de porc grillée. Libre à eux également de ne pas aimer Eric Zemmour. En revanche, travailler main dans la main avec les pouvoirs publics, contre les antivax par exemple, ce n'est pas très Charlie. Mais comme vous l'avez compris, tout dépend de quel Charlie on parle. Celui d'aujourd'hui ne s'attaque qu'aux dissidents, aux mauvais penseurs, à celles et ceux qui défendent le mariage hétéro, les frontières, l'ordre républicain ; ainsi qu'à ceux qui ne sont pas beaux, dont Eric Zemmour. Une illustration de l'excellent essai la haine du monde de Chantal Delsol : ils (et elles) ne valent pas mieux que les gens qu'ils (ou elles) raillent. Sans talent ni courage, on ne peut faire un périodique impertinent. Il ne faudrait pas que les vrais Charlies soient morts pour rien...
Complément :
La une d'un Charlie de juillet dernier. Hilarant, so funny, n'est-ce pas ? De quoi faire sourire dans les salons de thé de Saint Germain des près...
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