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Accueil du site > Actualités > Médias > Pour LVMH, l’indépendance sera-t-elle un luxe ?

Pour LVMH, l’indépendance sera-t-elle un luxe ?

LVMH a gagné la partie et acheté au groupe du Financial Times le quotidien Les Echos. 240 millions d’euros auront donc suffi à Bernard Arnault pour devenir grand patron de presse. Au passage, le voilà obligé de se débarrasser de son autre titre économique, La Tribune. Ambiance...

L’homme le plus riche de France aura donc obtenu ce qu’il voulait malgré l’animosité d’une majorité des 500 personnes employées.
Pour pallier ces craintes, l’homme d’affaires a ajouté des clauses censées rassurer, comme la mise en place d’un comité de surveillance et le maintien de l’excellent Erik Izraelewicz. Une technique pas très convaincante puisque le journal, depuis, ne paraît plus.

Une double cession pour un seul bénéficiaire, voilà la situation pas banale mais absolument pas remise en cause qui se présente pour notre presse économique. Belle leçon de stratégie à disséquer dans nos grandes écoles de commerce quand l’ancien numéro 2 devient le nouveau numéro 1 tout en ayant le choix de son futur numéro 2.
Beau silence des politiques sur le sujet.

Sur le plan strictement économique, on ne peut que s’étonner de la somme avancée pour un titre au chiffre d’affaires de 125 millions d’euros environ pour 10 millions de bénéfices nets annuels.

Nul doute que la vraie raison de l’acquisition est à trouver ailleurs, du côté du poids politique du journal par exemple désormais aux mains d’un proche de Super Sarkozy.

Bernard Arnault prend ainsi la glorieuse suite des industriels détenteurs de médias et proches de l’Etat : Bouygues (TF1), Bolloré (Direct8, DirectMatin), Lagardère (Europe1) ou encore Dassault (Le Figaro). Quelle mainmise !

Outre la proximité du pouvoir, il s’agit de se demander comment la cinquantaine de marques de luxe qui composent LVMH seront "objectivement" traitées dans les colonnes de Bernard...

Ce roubaisien polytechnicien se lance dans une nouvelle carrière médiatique depuis l’entreprise BTP de papa à l’immobilier Férinel puis au textile via Boussac, entreprise à la dérive cédée par le gouvernement Fabius. En liquidant Boussac, il ne conserve que Christian Dior et s’ouvre les portes du luxe. Avec un patrimoine estimé aujourd’hui à plus de 21,5 milliards d’euros, l’homme n’a plus besoin de faire du chiffre mais comme beaucoup d’homme d’affaires ayant réussi, il a le sens de l’anticipation et des choix judicieux. D’ailleurs il était témoin du mariage de Nicolas Sarkozy et ce n’était pas pour faire plaisir à Cécilia...

Il n’en reste pas moins que notre paysage médiatique change et je le regrette. Le média dirigé par un industriel devient un produit à vendre.
Ce que j’attends d’un média ce n’est pas qu’il soit un produit formaté, une marque repère, un recueil quotidien de ce que je veux entendre ou lire. Non la force d’un média c’est son indépendance, sa liberté de ton, de traitement de l’information. Qu’il me surprenne, me dérange, m’interpelle... que la qualité journalistique m’éblouisse, m’impressionne, me séduise. Que chaque article m’apprenne, m’enrichisse, me nourrisse.

Là, avec Bernard Arnault, dit l’Ange exterminateur ou... le Colin froid, on en est bien loin. Certes il est amateur d’art mais il vient aussi de prendre 9% de parts dans Carrefour... de là à faire des Echos une marque de distributeur de bas de linéaire...

Thomas Jefferson au XVIIIe siècle disait que "Dans la presse, seules les publicités disent la vérité." Il ne croyait pas si bien dire, on y arrive !


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22 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 7 novembre 2007 10:16

    Il convient de remettre les choses à leur place.

    Le journal « les echos » n’a jamais été un journal d’information économique digne d’une démocratie mais un simple relais de groupes d’affaires et de bizness qui se contentaient de commenter des chiffres que les grands groupes communiquaient.

    Pas d’enquêtes d’investigations,pas de révélations,ni de dénonciations de scandales...bref,rien de cela à l’exception de ce discours réactionnaire anti-social primaire d’une autre époque.

    Il est curieux de voir ces représentants-journalistes du libéralisme contester ce qu’ils adorent pour les autres.

    Rappelons nous le discours qu’ils écrivaient sur les licenciements et les restructurations ou les fusions-acquisitions...toujours à dénoncer « le conservatisme » du français.

    Et bien aujourd’hui,nous voyons l’hypocrisie d’une presse digne d’un journal sous Pétain.

    Il manque en France,une vrai presse d’économie débarassée des groupes financiers et véritablement indépendantes



    • Vilain petit canard Vilain petit canard 7 novembre 2007 11:58

      lerma,

      Je suis encore d’accord avec vous, en plus nuancé cependant : il y a (parfois, souvent ?) dans les Echos un vrai travail journalistique, et je suis sûr que les rédacteurs se sentent assez intègres. Mais on se rejoint : chanter toute l’année les joies du libéralisme et de la privatisation, et se retrouver coincé par le système qu’on encense, ça doit être dur pour eux.

      Ils me font penser à Canal Plus à une époque : tout fiers d’être une entreprise « moderne » et « pas comme les autres » (le fameux « esprit Canal »), quand Meissier a commencé à dégraisser pour payer ses frasques, ils ont été nettement moins enthousiastes.

      Bah, ils pourront se reconvertir dans le presse people, avec toute notre actualité centrée sur le spectacle, Gala et Voici ne vont pas tarder à recruter...


      • ytty54 ytty54 7 novembre 2007 12:37

        je suis assez d’accord avec vous sur le fait que la ligne éditorale des Echos se mort la queue aujourd’hui avec ce qu’elle subit. Disons cependant qu’une lecture de ce journal vous apporte au final un contenu informatif riche indépendamment des prises d’opinions libérales. Mais on doit pouvoir vanter un certain libéralisme sans accepter les connivences politiques ou économiques. La nouvelle orientation risque tout de même d’accentuer ce décalage et renforce une tendance générale inquiétante de nos médias. Oui à l’indépendance d’un grand titre économique mais assurée (et financée) par qui ?


      • snoopy86 7 novembre 2007 19:17

        « chanter toute l’année les joies du libéralisme et de la privatisation, et se retrouver coincé par le système qu’on encense, ça doit être dur pour eux... »

        1) Quand on rentre dans ce journal on sait ce qui vous attend, et c’était vrai bien avant l’arrivée d’Arnault..

        2) Tous ces éminents journalistes ont beaucoup moins d’états d’âme quand le chèque de fin de mois arrive...


      • clairette 8 novembre 2007 13:51

        @ Ierma,

        Encore d’accord avec vous sur ce coup-là !

        @ Vilain Petit Canard :

        De tout coeur avec vos commentaires (comme c’est le cas la plupart du temps... en toute discrétion) mais c’est peut-être mieux que je vous le dise directement, j’aime beaucoup vos interventions... Vous dites très bien ce que je n’ai pas votre talent pour l’exprimer !

        Cordialement.


      • Vilain petit canard Vilain petit canard 9 novembre 2007 09:15

        lerma

        Eh eh eh vous allez finir plus à gauche que moi...

        clairette

        Je suis très touché par votre commentaire, d’autant que j’aime bien les vôtres aussi (surtout celui-là !! smiley). Passez donc par mon blog, et vous pourrez prendre contact directement avec moi, on pourra papoter.


      • Harald 7 novembre 2007 15:37

        En fait je ne comprends pas grand chose à ce rachat, même après la lecture de l’article qui me laisse sur ma faim.

        C’est certain, dit l’auteur, que l’opération est dénuée d’intérêt sur le plan financier.

        Il s’interroge alors : Nul doute que la vraie raison de l’acquisition est à trouver ailleurs, du côté du poids politique du journal (...).

        Quel poids politique, quelle crédibilité aura ce journal après ce rachat contre nature ? Aucun.

        Contrairement aux commentaires qui précèdent, je trouve que les Échos était un journal plus « libre », que, par exemple, le Figaro.

        Je pense que la manoeuvre consiste donc à éliminer un contradicteur de la politique économique du gouvernement.


        • tvargentine.com lerma 7 novembre 2007 16:38

          Rajoutons,que « les echos » ont souvent pratiqué la gratuité de son journal pour des entreprises afin de se constituer un monopole que s’apparente à une diffusion de la pensée unique dont les éditos de Favella sentaient le pétainisme.

          Plus d’une fois,j’ai eu l’occasion de voir dans des entreprises,des editions des « echos » même pas ouvert et mis directement au pilon.

          Je l’ai lu souvent,car par rapport au neant,il constituait une base,mais avec internet,il ne représente que l’interprétation de dépeches d’agences économiques et n’a jamais soulevé un scandale comme les 600 millions d’euros de caisse noire d’une certaine derive des « relations sociales » ou dénoncer les escroqueries comme « les startups » des années 2000.

          Il n’y a donc pas à pleurer sur « des journalistes » qui ne cherchent qu’à toucher un gros chéque pour négocier leur départ

          Rien de nouveau !


          • Forest Ent Forest Ent 7 novembre 2007 16:56

            L’intérêt d’avoir un journal, c’est de se vendre soi-même (ce qui est typique de LVMH), et d’avoir une influence politique et idéologique, permettant d’agir pour ses intérêts généraux. C’est pour cela que les marchands d’armes possèdent souvent des journaux, comme Zaharoff, qui y appellait à la guerre avec constance.

            Plus généralement, autour des journaux, il y a actuellement de grandes batailles concernant l’information financière, par exemple avec le rachat de WSJ par NewsCorp et la fusion Reuters/Thomson. L’info financière est « le nerf » de la finance.

            D’autres infos sur ces sujets sur « la forêt des médias » :

            http://forestent.free.fr/

            _


            • ytty54 ytty54 8 novembre 2007 00:41

              il n’y a qu’à voir le cirque autour des chiffres du chômage qui sont désormais protégés, gardés, (cachés ?) et diffusés qu’à une date choisie par les possédants. L’information financière dans un monde économique est une arme redoutable surtout avec un président qui saute tant du coq à l’âne. Suffit juste que les journaux traitent des sujets que lui veut aborder et le tour est joué...


            • haddock 7 novembre 2007 17:37

              Et que lui répondit l’ écho ?


              • Proudhon Proudhon 7 novembre 2007 18:59

                Il y a une solution très simple pour en finir avec tout ça, ne plus consulter ou acheter le journal « Les Echos » et lui préférer par exemple « Alternatives Economiques » http://www.alternatives-economiques.fr/

                C’est tellement simple !!


                • ytty54 ytty54 7 novembre 2007 19:05

                  Bonne remarque c’est ma référence depuis longtemps par la qualité de ses dossiers notamment !


                • farniente 7 novembre 2007 19:34

                  D’où la nécessité absolue de médias citoyens, sans bizutage svp.

                  Il reste quoi comme presse indépendante des grands groupes financiers ?

                  Même à 40 % de dépendance ?


                  • Forest Ent Forest Ent 7 novembre 2007 22:36

                    Le « canard enchaîné ».


                  • Vilain petit canard Vilain petit canard 8 novembre 2007 09:07

                    ... Et Charlie Hebdo !


                  • farniente 7 novembre 2007 22:40

                    « Enchaîné » , OUAAAAhhFff


                    • Thierry LEITZ 8 novembre 2007 03:37

                      Bernard Arnault pourrait vivre 1 million d’années rien qu’en dépensant ses avoirs... Alors se payer un journal à 240 millions, même peu rentable... On peut se faire plaisir, non ?

                      D’autant que Mr Arnault est mortel, comme nous. A sa fin, l’homme possède autant qu’a son arrivée : rien.

                      « Vanité et poursuite du vent », comme disait un roi (très) riche de l’antiquité, Salomon.

                      Un vent dans lequel NS se sent bien, entouré d’amis sûrs : dans les médias de masse, l’armement, le BTP, le nucléaire bientôt avec Martin entrant chez Areva, l’energie, etc...

                      Ce qui me choque le plus, c’est ce triptyque :

                      Mass-médias - Armement -¨Profits privés, autrement dit : Propagande - Dépense militaire (publique) - Profits de guerre (privés).

                      F. Bayrou a dénoncé courageusement ces connivences, un peu tard sans doute... A dessein ? On peut le penser...

                      Prôner la liberté et tout vouloir contrôler, ne serait-ce pas un peu schizophrène, çà ?

                      Encore du vent. Avec tout ce vent, c’est le pays qui va s’enrhumer ! Gare aux éternuements !


                      • fredebone fredebone 8 novembre 2007 07:07

                        Je ne suis pas d’accord avec Ierma le 1er commentaire. Ce journal était vraiment indépendant . Quand Françoise Fressoz disait que « les 15 milliards de cadeaux fiscaux de Sarkozy avaient coûté autant que les 35 h et même les promesses des socialistes de mai 81 », ce n’est pas un preuve d’indépendance ? La Tribune n’aurait jamais écrit çà

                        http://www.wmaker.net/mappemonde/


                        • Gilles Gilles 8 novembre 2007 11:12

                          Comme le font remarquer certains, si les personnes intéressées les détails techniques de l’actualité économique et financière doute de la fiabilité des informations techniques, ils peuvent aller voir ailleurs.

                          Ce qui est plus choquant, et encore plus choquant est le fait que ça fasse bien moins de bruit que cette histoire d’Echos, c’est que des media d’OPINION soient dans les mains des clones d’Arnault.

                          Là c’est grave car le lectorat, les téléspectateurs n’ont pas le même recul, esprit critique ni la même volonté de changer de media et donc la manipulation, ou plutôt la fabrique orientée de l’opinion, marche à donf, contre l’intérêt même de la nation et de la démocratie

                          Dassault possède le Figaro, grand journal d’opinion que le Canard aime ces temps-ci a prendre en flagrant délit de manipulation de l’information pilotée par le boss (quoique ces temps-ci il semble même qu’au fig on commence à critiquer Sarko)

                          Le Monde, Libé et même l’Humanité sont gangrénés en partie

                          Le groupe TF1....télé de divertissement cheap, OK, mais dont les informations (TF1, LCI...) sont diffusées et regardées par des millions de gens. Ils font l’opinion en quelque sorte et ne sont pas indépendants...

                          On pourrait continuer.....mais ce qu’il faut c’est surtout remettre en cause le fait que des media d’opinion puissent appartenir et servir des groupes industriels.

                          Il devrait juste pouvoir appartenir à des sociétés de presse dont l’indépendance est écrite dans les statuts ou être indépendant


                          • stephanemot stephanemot 8 novembre 2007 14:37

                            Les Echos ont toujours privilégié la forme sur le fond. Leur point fort c’est la consommabilité de l’information : 50% de l’info dans le titre, 75% en incluant le chapeau et 90% en incluant le premier paragraphe. On peut lire le canard encore plus rapidement que Metro en absorbant l’essentiel de ce qu’on veut bien nous faire avaler.

                            La Tribune n’est pas vraiment un support d’opinion non plus. Il compense par la masse d’information financière et la pub qui s’ensuit.

                            Ce qui ressort de l’opération, c’est le renforcement du numéro 1 et l’affaiblissement du numéro 2, avec la paupérisation de la diversité au global. L’espace francophone est de toute façon trop réduit pour un grand nombre de prédateurs sur un secteur en forte concentration. Le FT est d’ailleurs sur le point de céder son édition allemande.

                            Arnault a-t-il des ambitions internationales sur ce titre ? Cela ne collerait pas avec le portefeuille de DI, qui verrouille en revanche assez bien l’espace publicitaire de cibles à haute valeur en France (entrepreneurs, investisseurs, amateurs d’art et de musique classique...).

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