Pourquoi les médias français ratent le virage Internet
A l’exception de Skyrock qui a vraiment intégré la conversation du web au coeur de son développement (et du coup bien valorisé l’entreprise), les médias français restent très frileux sur leurs investissements sur le web en général, il ne s’agit souvent que d’essais modestes, de simple diffusion de leurs contenus actuels ou de compléments. Aucun grand groupe français n’a vraiment décidé d’en faire un axe stratégique de développement comme Rupert Murdoch avec MySpace aux Etats-Unis par exemple, qui l’avait acheté pour quelques centaines de millions de dollars et un après déjà rentabilisé avec un contrat publicitaire de deux milliards de dollars avec Google... Je me demande pourquoi ils ne bougent pas et n’ai pas la sensation qu’ils ne veulent pas, plutôt qu’ils ne savent pas vraiment comment s’y prendre d’une part et surtout comment le rentabiliser de l’autre, ce qui justifie leur immobilisme. Sauf que si l’on reste immobile sur le web, on n’existe pas.
C’est aussi la question que s’est posée David Targy, spécialiste des médias et de la publicité au cabinet d’études Precepta, il vient de publier une des études sectorielles ’les plus complètes sur les stratégies de développement des médias sur l’Internet’ d’après Libération et livre à Christophe Alix ses principaux enseignements.
En bref ce que j’en retiens : les médias français ne font presque rien et ont peu d’audience sur le web, donc peu de revenu. Pourquoi ? Parce que le marché publicitaire en ligne est trop étroit et capté par les grands Yahoo ! et MSN. Du coup pour rentabiliser certains lancent des offres payantes avec des résultats plutôt ’étroits’ ou des échecs.
C’est tout le problème, ’l’industrie du web’ ne fonctionne pas comme les médias aimeraient qu’elle fonctionne, c’est à dire avec une rentabilité rapide. Elle est basée sur une forte prise de risque financée par le capital risque ou des acquisitions courageuses et tout aussi risquées. Pas étonnant que les médias français aient du mal, leurs patrons ou actionnaires comme les grands industriels comme Bernard Arnault ou François Pinault ne se sont toujours pas remis des cendres de la bulle 1.0.
Résultat ? C’est un fonds de Capital Risque qui a racheté Skyrock, celui-ci finira d’ailleurs probablement dans des mains américaines prochainement alors que TF1 met timidement un doigt de pied dans l’eau avec un tout petit investissement dans over-blog (10% je crois) et une petite équipe (que je salue par ailleurs) dotée de peu de moyens à l’échelle de TF1 sur WAT. Chez les autres grands groupes français, c’est le calme plat.
Au lieu d’essayer de construire le moteur de la voiture génératrice des revenus de demain, on joue avec son porte-clef.
photo, Alexis, 15 ans et Cyril, 16 ans.
Mise à jour : Francis Pisani : "la mort des journaux c’est pour 2043", il reprend un article de The Economist qui annonce la fin des journaux : ’Newspapers have not yet started to shut down in large numbers, but it is only a matter of time. Over the next few decades half the rich world’s general papers may fold.’
On y trouve une excellente citation d’Arthur Miller en 1961 : ’un bon journal c’est une nation qui se parle à elle-même’.
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