Affaire Mitterrand : la nouvelle relativité générale
Einstein avait tout bon, jusqu’à plus ample informé sa théorie de la relativité générale est compatible avec les observations. Tant qu’on n’a pas mieux c’est la meilleure théorie. Mais Einstein n’avait pas prévu que, dans les années 2000, une version sociologique de sa théorie soit mise en oeuvre, sans que les acteurs eux-mêmes ne s’en rendent totalement compte. C’est ce point que je vais essayer d’éclairer.
Certains les appellent l’élite médiatique, terme trop péjorativement connoté pour moi. Terme qui, en plus, pourrait être interpréter par eux comme un compliment. Pourtant il s’agit d’une élite 100% auto-proclamée, formée par connivence, influence, donnants-donnants et la simple vie de tous les jours comme pour tout être humain. Seuls les politiques et les journalistes d’investigation, ainsi que quelques artistes réellement populaires, ont quelque légitimité. Mais c’est eux qu’on entend le moins.
Donc, les personnalités. Je donne en annexe quelques commentaires qui me semblent significatifs de l’application de la "relativité générale" dans la classe sociale des personnalités. Tous ces commentaires sont sidérants de sophismes, de non-prise-en-compte des faits, de déformation des faits ou d’inférences erronées, bref j’irai jusqu’à dire qu’ils procèdent d’une certaine malformation du raisonnement, lequel n’est plus basé sur les faits mais sur le sentiment qui oriente les analogies trompeuses servant de soutènement à l’élaboration de leur dogme. Les éléments bassement matériels ne semblent plus être qu’un paramètre parmi d’autres, à peine esquissés dans la chorégraphie relativiste où par exemple les filles de 13 ans en font 18.
A toutes ces objections, cris au loup "internet", raisonnements vaseux, je vais répondre globalement.
1er point. Qu’est-ce qui touche tant les gens dans cette affaire ?
Réponse : deux choses, le sentiment justifié que Polanski a été défendu de manière provocante par un Ministre de la République, et que l’expression du propre comportement de ce dernier, redécouvert à l’occasion, est de nature à remettre en cause la légitimité de sa récente prise de responsabilité ministérielle. En outre, une troisième affaire remet une couche, cette recommandation dans une affaire de viol aggravé avec proposition de stage et mentionnant un écart pour parler de la "chose". Un écart grave, mais un écart tout de même.
2ème point. Quels sont les appréciations erronées qui sont faites par des membres représentatifs de la classe des personnalités ?
En voici une liste incomplète avec mes objections :
- des internautes/gens attaqueraient Mitterrand par homophobie
Faux, je n’ai vu aucun écrit homophobe, les quelques plaisanteries graveleuses mais non-homo-centrées font référence au tourisme sexuel, qu’il n’est pas interdit de tourner en dérision, ne serait-ce que pour souligner la molle application de la loi à ce sujet.
- des internautes/gens traiteraient Polanski de pédophile
Vrai. Quelquefois. Mais le plus souvent en réponse à des désinformations manifestes de ses défenseurs.
- le fait de traiter Polanski de pédophile serait erroné ou injuste.
Vrai et faux. Faux si on parle de définition formelle : 13 ans est trop vieux pour un vrai pédophile. Vrai si on parle de sens commun, en effet, un homme de 43 ans qui fait venir une fille de 13 ans dans une maison isolée en la faisant boire et en lui donnant des somnifères est non seulement un violeur mais aussi un pédophile, du moins est-ce une caractéristique assez objective de sens commun pour qui a des enfants, des neveux ou des élèves.
- des internautes/gens traiteraient injustement Polanski de violeur
C’est indéterminé puisque la justice n’a pas encore tranché. Mais dans le sens commun, c’est vrai, le témoignage de la victime n’ayant pas été remis en cause. En fait, c’est un abus sexuel que Polanski a reconnu suite à une tractation avec le juge pour qu’il avoue. Certains de ses défenseurs disent qu’il est diffamatoire de parler de viol selon une jurisprudence qui a été interrompue, ce qui est une façon de jeter une grenade dans un feu de joie.
- des internautes évoqueraient la pédophilie au sujet de Mitterrand
C’est faux. Il a surtout été évoqué les mots "jeunes", "éphèbes", "garçons" et "étudiants" ainsi que le fond d’attirance sexuelle vers la jeunesse d’un livre qui fût présenté comme autobiographique par l’auteur et son éditeur, ainsi que par la grande majorité des médias qui l’ont évoqué. Rien à voir avec la pédophilie, il s’agit plutôt de tourisme sexuel avec attirance vers la jeunesse, ce que je qualifierais d’« ado-philie ». Point seulement moral me direz-vous, OK sauf si on passe à l’acte. Le tourisme sexuel au Vietnam n’est pas fait pour rencontrer des boxeurs de 40 ans, mais plutôt des jeunes entre 15 et 20 ans. C’est çà le problème. C’est aussi un problème de loi.
- des internautes se déchaîneraient (hallali, loups sauvages, lynchage) sur le pauvre Mitterand (resp. pauvre Polanski)
Vrai et faux. Vrai : il y a certes de nombreuses critiques, mais l’avalanche de critiques ne signifie pas que les internautes crient plus fort mais simplement qu’ils sont nombreux à le faire. Si vous trouvez indécent que de nombreuses personnes aient plus de poids que quelques-unes, OK, mais alors arrêtez de parler de principes démocratiques et admettez que votre vision politique est non républicaine - droit variable selon les prévenus - et non-démocratique : mépris de la "meute", qui ne sont que des gens, dès qu’elle parle d’un mécontentement justifié qui ne vous convient pas.
Conclusion.
Les personnalités dans leur strass et leurs paillettes, copains-copains dès qu’ils partagent un dîner de 100 personnes où qu’ils passent chez Drucker, ne lisent absolument pas les arguments qui sont présentés par les gens qui sont outrés du comportement de Monsieur Mitterrand, et inventent, avec une imagination maladive, toute une cohorte de procès d’intention tels que ceux que j’ai énuméré plus haut. Pour eux les faits n’ont plus d’importance. Is n’ont plus les pieds sur Terre : le tourisme sexuel basé sur la prostitution de jeunes de 16 à 20 ans n’est pas un problème pour eux. Il sont entrés dans le domaine de la relativité générale : tout est relatif, et leurs copinages finissent par primer sur tout le reste, loi française comprise. On peut aussi parler d’hyper-relativisme, terme peut-être plus approprié.
Au final, je pense que vivre dans une République et dans une démocratie, çà se mérite. Si on ne veille pas au grain, la classe sociale des personnalités médiatiques aura tôt fait de transformer notre beau pays en oligarchie à leur botte, foulant des pieds nos principes les plus chers. Procédons à un exercice mental : si on inverse 3 valeurs essentielles de notre beau pays : Liberté, Egalité, Fraternité, on obtient :
Coercition, Inégalité, Chacun pour soi. Détaillons...
Coercition. Hadopi, taxe carbone, les historiettes de castration sexuelle de Lefèbvre, etc. La seule vraie liberté est donnée aux entreprises industrielles et financières, qui doivent selon le dogme du MEDEF être entièrement libres. Ce qui se fait naturellement au dépend du citoyen, qui n’a même plus le droit de critiquer une entreprise commerciale sans risquer d’être attaqué en diffamation.
Inégalité. Il y a la pire, l’inégalité de la justice, bien illustrée par les cris du coeur de Mitterrand, Kouchner, BHL, et tant d’autres, envers la situation certes délicate de Polanski. Et la plus douloureuse, l’inégalité économique, qui progresse constamment dans l’indifférence générale des personnalités médiatiques.
Chacun pour soi. Pillage et destruction des services publics (sous prétexte de réforme - que je ne critique pas -), "travailler plus pour gagner plus", monde dominé non par les plus intelligents ou les plus forts, mais par ceux qui par leur pouvoir économique vivent dans un environnement totalement différent du commun des mortels.
Cerise sur le gâteau, la totale vassalisation et alignement de la présidence française sur les positions des néoconservateurs américains, au point que la France est largement plus à droite que le pauvre Obama, qui doit, maintenant qu’il est Nobelisé, montrer ses qualités malgré la gangue administrativo-lobbyiste qui pour l’instant le paralyse.
Ah elle est belle la France !
Je suis désolé mais j’ai mal à la France. Et pourtant, je ne suis pas du tout FN. Je pense que depuis cette affaire le paysage politique a explosé, que les politiques sont quasi-tous désorientés, et qu’il est apparu un nouveau clivage, type Grand Canyon, entre la classe médiatique dans sa presque totalité et les français en général, qui - rappelons-le - sont ceux qui postent sur Internet.
Evidemment la classe médiatique est très mal, si elle n’arrive pas à imposer son rêve d’oligarchie sous couvert de notre faiblarde démocratie, elle sait qu’elle sera ba-lay-ée dans les élections. C’est pourquoi ils contre-attaquent si violemment. Tous derrière Val : le net est diabolique ! Ils ne se rendent même pas compte que Mitterrand, dont je reconnais la personnalité intéressante mais farcie d’auto-apitoiement, les entraîne tous à la queue-leu-leu dans le caveau sombre et humide que son estime-de-soi a artificiellement créé. Etre Ministre lui permet d’effacer son douloureux passé comprenez-vous. Pourquoi le harceler comme on le fait, disent-ils, cherchant ainsi à faire taire tous les internautes qui ne partagent pas leur incroyable vision des choses. Cette affaire est me semble-t-il une mine d’information pour une étude psychologique et comportementale sur la classe médiatiques.
Quelques liens pour les personnalités à qui il resterait une once de compassion après leurs jérémiades envers Polanski et Mitterrand qui se savent pas ce qu’est le tourisme sexuel :
http://insiderescortsecrets.com/wordpress/news/vietnam-renews-effort-fight-prostitution/
http://graceloveandpolitics.wordpress.com/2009/03/26/528/
http://www.huffingtonpost.com/2008/12/09/vietnamese-brothel-kept-w_n_149504.html : une rescapée témoigne que 10 filles ayant voulu s’échapper ont fait l’objet de tortures et ont été enfermées dans des cages à chiens, loin de la réalité des paillettes de chez Drucker où Mitterrand servit ce dimanche la soupe au bon peuple avec l’aide d’Anne Roumanoff.
Annexe.
Benichou (Europe 1) : "Rien ne ressemble plus à une fille de 18 ans qu’une fille de 13 ans".
Ivan LEVAI sur France Inter : "l’affaire Mitterrand semble se calmer et c’est bien ainsi car ces attaques étaient répugnantes"
Harlem Désir (Le Monde) : "En politique, tous les coups ne sont pas permis". Il dénonce une "chasse à l’homme". Nous combattons avec la plus grande rigueur le tourisme sexuel et la pédophilie", mais "nous n’avons pas à pratiquer l’amalgame et la calomnie".
Martine Aubry (Le Monde) : elle souhaite que l’on évite "de faire des amalgames". (Le JDD) "Je n’imagine pas un seul instant, je ne peux pas imaginer que Frédéric Mitterrand ait pu faire l’apologie du tourisme sexuel". Commentaire : comme si c’était la question.
Jean-Luc Mélenchon (Le JDD) : il a jugé dimanche "la polémique infâme" précisant qu’il n’avait pourtant "pas la moindre complaisance" pour le ministre de la Culture. "On sort ça quatre ans après la sortie du livre, et c’est inacceptable, on ne regarde même pas ce qu’il a réellement écrit", a insisté le fondateur du Parti de gauche (PG) lors du Grand Rendez-Vous Europe1-Le Parisien, précisant qu’il ne fallait "pas accepter le pilori. La justice n’est pas la vengeance." Commentaire : c’est quoi cette histoire de pilori ? Ou il a vu çà ?
Xavier Bertrand : “On n’est pas obligé d’utiliser la vie privée des gens à des fins politiciennes”. http://carnet.causeur.fr/antidote/quand-la-corde-bertrand-soutient-le-pendu-mitterrand,00419 explique intelligemment qu’alors on n’en fait pas un roman autobiographique, et que si c’est de la vie privé pourquoi dire que c’est faux...
Anne Roumanoff (le JDD) : "Frédéric Mitterrand me fait penser à un cerf à bout de souffle qui court pour échapper à ses poursuivants. Faut-il déchiqueter son cadavre et le jeter en pâture à cette horde de loups sauvages pour qu’ils s’en pourlèchent les babines ?"
Besson (AFP) : "Il ne faut pas confondre homosexualité et pédophilie", a encore déclaré Eric Besson, jugeant que Frédéric Mitterrand avait "bien fait" de ne pas démissionner malgré la polémique."
Caroline Fourest (Le Monde) : "En citant un extrait de La Mauvaise Vie, de Frédéric Mitterrand, pour exiger sa tête, Marine Le Pen a commis un réquisitoire empoisonné, qui feint de tout mélanger : le viol et la prostitution, la pédophilie et l’homosexualité."
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