Nous avions De Gaulle, Pompidou, Giscard, Chirac, dit de droite ( ?) et Mitterrand dit de gauche. L’inter mondialité de l’économie, le libre échange, avaient progressivement gommé les différences apparentes.
Faut-il rappeler, comme le fit Maurice Allais dans Marianne (1), seul prix Nobel d’économie français, que depuis 1974, l’Etat s’est interdit de créer de la monnaie et donc, d’emprunter auprès de la banque centrale. Cela a comme conséquence de payer beaucoup plus cher tout ce dont l’Etat a besoin et qui est désormais financé par le crédit qui enrichit les banques. (2)
Cette affaire de création monétaire nous coûte plus de 80 milliards par an d’intérêts pour la France, dont plus de 40 milliards à payer par l’Etat. C’est le libre échange soutenu par la droite qui conduit à cette conséquence.
C’est ainsi que prisonnier, Lionel Jospin signe le traité de Lisbonne qui consacre la disparition du service public à la française ; Chirac s’élève contre la fracture sociale en mangeant des pommes. Ont-ils le choix ?
Ce nivellement des différences, accompagné d’un langage feutré qui nous fait regretter les coups de gueules de Georges Marchais, dilue la politique dans un conglomérat mollasson du consensus rédempteur.
La conclusion pour les Français, devenait évidente. Tous pareils ! Elle fonda les discours et surtout les beaux jours de l’extrême droite qui se retrouva propulsée au deuxième tour des élections présidentielles en 2002. Fallait-il s’en étonner ? Pourtant, la recherche d’un consensus entre le capitalisme et le socialisme poursuivit sa dérive, laissant croire, que la social-démocratie fut, peut être, la réponse. En 2007, à l’élection Présidentielle, la gauche ne sachant plus trop ce que gauche ou droite voulait dire -Ségolène Royal allant même chanter sous le balcon de François Bayrou- les Français choisirent celui qui parlait le plus clair, celui qui avait les plus fortes convictions.
C’est ainsi que vint l’apparition de celui qui fait de la politique autrement ! Le premier geste est tout à l’image de son camp : « Tous au Fouquet » etc. ! Il ne sert plus à rien d’épiloguer sur ce qu’il fait ou ce qu’il ne fait pas.
Il est en fait un homme providentiel, non pas pour la France, mais pour la droite. La vraie, celle qu’on avait oublié. La droite mercantile. Celle qui privilégie l’individu à l’intérêt collectif. Celle qui préfère les taxes à l’impôt, l’assurance individuelle à la solidarité. Celle qui oppose l’entreprise privée au service public. Celle qui préfère les fonds de pensions aux retraites par répartition. Celle qui veut que l’individu soit placé au centre de tout, non pour faire société, mais pour assurer seul son propre développement, sans s’attarder sur ceux qui ne peuvent pas le suivre, etc., etc. L’homme de droite, riche, n’interdit à personne de s’enrichir et n’accepte pas que l’Etat puisse lui prendre « son argent » pour payer :
- les fainéants, entendez chômeurs ;
- les parasites de la société, entendez les handicapés, les émigrés, même les syndicalistes ;
- les étrangers, entendez tous ceux qui ne sont pas comme eux, noirs, musulmans, immigrés, les dangereux gauchistes, etc., etc.
C’est ainsi que naissent les lois sur le « travailler plus pour gagner plus », le bouclier fiscal, les exonérations, le débat sur l’identité nationale, etc., etc. C’est ainsi que toutes les solidarités explosent, du fait d’un Etat qui ne joue plus son rôle de régulateur, mais qui, au contraire, aiguise l’individualisme. C’est ainsi que le slogan conscient ou inconscient des électeurs de droite est : Moi d’abord !
Le Président de la République en est le parfait exemple et se trouve tout naturellement porte parole de la majorité de ceux qui pensent comme lui, ou du moins, de ceux qui pensaient que la gauche et la droite, c’était la même chose.
La crise est venue rappeler combien il fallait remettre du sens dans l’économie qui est devenue, par les hommes de droite libres échangistes, non pas un moyen d’échange entre les hommes, mais un moyen de profit pour quelques uns. Les plus adroits, les plus affairés, les biens nés, s’en sortiront. Les autres ne sont pas la préoccupation de la droite.
Dans le même temps 400.000 chômeurs sont en fin de droits en 2010 sans aucune ressource, les solidarités sont sacrifiées (sécurité sociale, indemnisation des chômeurs, retraite) ; les soupapes sociales sont négligées (syndicats, associations) ; les jeunes sont abandonnés ; les petits patrons, les artisans, les petits commerçants, ceux qui veulent vivre de la terre, sont broyés par les règles du marché ; les salariés sont méprisés, placés en face d’objectifs inaccessibles et toujours réévalués, dans le seul but de faire triompher le profit et la finance.
La gauche c’est quoi ? Ce n‘est pas la droite ! Cette lapalissade est pourtant une réalité incontournable. C’est le contraire de tout ce qui précède.
C’est l’épanouissement de l’individu dans la société. Si ces mots ne vous parlent pas ou vous semblent ringards, on peut les changer par d’autres.
La gauche, c’est une plus juste répartition des richesses et des revenus :
- entre le travail, la rente et le capital ;
- entre les salariés, l’employeur et l’entreprise ;
- entre les citoyens qui font société.
Allons plus loin. C’est donner à chaque individu naissant les mêmes chances. Nous ne seront jamais égaux, parce que la nature l’a voulu ainsi. Mais l’homme faisant société ne doit pas aggraver les inégalités de naissance par des injustices sociales. La société, pour ne pas dire la France, ou l’Homme, ou la République, mais philosophiquement la société, doit être organisée autour de ses membres, les hommes, pour permettre à l’excellence de triompher sans négliger aucun des siens.
Utopie, utopie, crient effectivement ceux qui n’ont besoin que de s’enrichir encore. Et l’argent ? Où allez-vous trouver l’argent pour payer les chômeurs ? Les retraités ? Les malades ? Les fonctionnaires ? Les vieux ? , etc., etc.
La gestion récente de la crise amène quelques solutions que nous ne pouvions pas imaginer avant qu’elle n’arrive. Nous ne pouvions un seul instant imaginer que des milliards virtuels pouvaient naître d’une décision politique. Nous pensions que l’argent, la monnaie représentait quelque chose de réel. La France était soi-disant en faillite. Elle a pu dégager des marges pour renflouer les banques qui annoncent aujourd’hui une santé florissante. Il n’est pas absurde de penser que le même type de marges pourrait naître d’une prochaine crise sociale. Mais à plus long terme, pour la gauche, les solidarités seront les seules réponses durables.
Illustrons : l’Etat vient de « donner » les autoroutes au secteur privé. Résultat : hausse des tarifs, suppression d’emplois par l’automatisation des péages. Il en est ainsi de l’eau, du gaz, de l’électricité, du téléphone, et la gangrène s’étend à l’hôpital, à la justice, à l’enseignement, à la recherche, etc. etc.
Citoyens, ou consommateurs ? Là se pose la frontière entre la droite et la gauche à laquelle s’ajoutent, des niches fiscales et sociales d’un côté, par nature pour quelques uns, et des hausses d’impôts pour les autres.
La France, pays riche, a les moyens de ses solidarités. Par exemple, la cour des comptes note 140 milliards d’exonérations de charges (3), auxquels s’ajoutent 20 milliards de niches fiscales, (4) etc., etc.
Qui profitent de ces sommes ? L’emploi ? Pensez-vous !
140 milliards par an, c’est l’équivalent de 8 millions de SMIC annuels, charges comprises ! C’est-à-dire que la France a les moyens de payer 8 millions de salariés au smic charges comprises, sans que cela ne coûte un centime de plus au contribuable !
Ce n’est pas le choix de la droite.
Etre de gauche, c’est penser que la richesse produite peut être répartie différemment.
Oui c’est vrai, tant qu’il y aura des déficits, des efforts seront nécessaires pour préserver l’essentiel des solidarités. Mais il faut une juste répartition de ces derniers et là encore, la droite reste figée, convaincue de sa bonne doctrine symbolisée par le bouclier fiscal et le refus officiel de toute augmentation des impôts. Le résultat est là et la crise n’explique pas tout, loin de là.
Lorsque les équilibres seront rétablis -rappelons qu’en 2002 la sécurité sociale était en excédent- une véritable politique d’une société solidaire et reconnaissante pourra naitre de la gauche. Tout est question d’équilibre entre la richesse produite par les entreprises et la part qui peut revenir à la société.
Il serait trop long de présenter toutes les dispositions possibles à mettre en place pour atteindre ces objectifs, mais il est certain que les solidarités doivent remplacer les profits financiers.
Alors de droite ? De gauche ? Aucune différence ?
La droite est désormais identifiée par la doctrine de son Président et de son parti. Les années qui viennent doivent permettre d’identifier la gauche.
D-GARDARIST
Pour vous informer davantage :
- http://etienne.chouard.free.fr/Europe/2009-12-05-Maurice_Allais-Marianne.pdf
- http://www.lemonde.fr/europe/chat/2007/12/10/le-traite-europeen-de-lisbonne-est-il-fondamentalement-different-de-celui-rejete-en-2005_987730_3214_1.html
- http://www.marianne2.fr/La-Cour-des-comptes-debusque-140-milliards-de-niches-fiscales_a185059.html
- http://veilleur.blog.lemonde.fr/2010/02/10/les-derapages-de-la-mega-niche-fiscale-de-bercy/