Faut-il suivre Jean-Louis Borloo ?
La question à laquelle l’assemblée constituante de l’UDI n’aura pas répondu, et ne pouvait répondre, est celle de savoir à quoi servent les partis rabatteurs de voix. L’Union des Démocrates Indépendants, dont on sait à l’avance qu’elle est un allié de l’UMP et une réserve supplétive des voix pour l’ancien parti majoritaire, devra traîner cette question comme un boulet tout au long de son existence. Une existence dont la viabilité interroge, par ailleurs, lorsqu’on se penche sur la personnalité de ses principaux dirigeants et leur « penchant » pour l’UMP.
On pourra difficilement oublier le revirement du président de la nouvelle formation qui, après avoir promis d’aller jusqu’au bout dans la course à l’Elysée, jeta un trouble dans l’esprit des électeurs centristes en renonçant et en appelant à voter Nicolas Sarkozy. Quelle que fut la teneur de l’accord qu’il eût pu conclure avec l’ancien locataire de l’Elysée, le mal était fait. Il avait révélé une personnalité en manque d’assurance et susceptible de laisser ses troupes en rase campagne en échange d’un accord de circonstance.
L’autre personnalité de l’UDI, Hervé Morin, n’est guère plus préférable. Il avait, lui aussi, juré qu’il irait jusqu’au bout dans la course à l’Elysée. Un bon matin du 16 février, il jette l’éponge et appelle à voter Nicolas Sarkozy, l’homme qu’il s’était pourtant employé à étriller durement dans les médias et notamment dans son ouvrage intitulé « Arrêtez de mépriser les Français ». Le Président « brutal » au comportement de « petit garçon capricieux », tel que décrit dans l’ouvrage, devenait, tout d’un coup, le candidat idéal pour la France. Où est le sérieux ?
Quant à Rama Yade, on reste perplexe. On se demande en toute sincérité ce qu’elle apporte au débat politique. Propulsée par Nicolas Sarkozy au nom de l’ouverture sur la diversité de la société française, elle s’est surtout illustrée par des prises de position singulières et anecdotiques, comme sur la venue de Kadhafi en France, mais rien de profond sur le plan politique. Elle rejoint Jean-Louis Borloo dans l’espoir d’ « aller jusqu’au bout dans la course à l’Elysée » et se retrouve, comme tous ses camarades, abandonnée dans la nature lorsque son champion jette l’éponge et appelle à voter Sarkozy. Elle n’a pas le choix. Elle appelle, à son tour, à voter Nicolas Sarkozy, l’homme à qui elle avait pourtant définitivement tourné le dos. Et pourtant, c’est à l’homme de Neuilly qu’elle devait tout.
Tout ceci manque de constance et crée un malaise dans l’esprit des électeurs, du centre notamment.
On peut poursuivre la liste des principaux dirigeants de l’UDI et réaliser qu’ils ont, à quelques nuances près, le même « comportement ». Le pire s’est produit en 2007. Après avoir combattu le candidat Sarkozy aux côtés de François Bayrou, ils décident, dès l’élection de ce dernier assurée, de le rejoindre au grand désarroi de leur béarnais de chef qui ne s’est plus jamais remis d’une trahison aussi énorme. Juste pour décrocher quelques postes au gouvernement au nom de l’éphémère « Nouveau Centre ».
Lorsque Nicolas Sarkozy tombe en disgrâce dans l’opinion, on quitte le navire avec fracas et on découvre qu’il n’était pas le meilleur Président pour la France. Ah bon ?
La même aventure recommence avec l’UDI. On découvre et on dénonce la « droitisation » de l’UMP. Mais plus personne n’est dupe. On peut déjà ouvrir les paris pour 2017. Jean-Louis Borloo n’ira pas « jusqu’au bout » contre le candidat UMP (Copé ou Fillon) puisqu’il faudra « tout faire pour battre les socialistes ».
Tout ça pour ça !
Alors, disons clairement ce qu’il faut faire pour dépasser tout ce « cirque ». Il faut institutionnaliser le bipartisme PS/UMP, avec, bien entendu, des courants internes. Parce que le centre finit systématiquement avec l’UMP[1] et que les autres gauches rallient le Parti Socialiste, qu’est-ce qu’on attend pour être franc avec l’électeur ?
Nous nous rapprocherions du « modèle » américain (Républicains vs Démocrates) et gagnerions en lisibilité. L’électeur sera moins abusé en croyant voter « UDI » alors, qu’au final, il vote « UMP ». Le contribuable y gagnerait, également, puisqu’il n’aurait à financer que deux formations politiques.
En ce temps de crise, les économies sont à réaliser partout. Y compris du côté des politiques qui feignent de s’opposer les uns aux autres alors qu’ils finissent systématiquement « ensemble » dès la fermeture des bureaux de vote.
Boniface MUSAVULI
[1] Le Front National reste « hors-système » comme parti, mais ses électeurs sont absorbés par la droite du gouvernement au second tour. Il se produit globalement un ralliement de même nature pour les autres électeurs : ceux de Bayrou, de Mélenchon/FG, du NPA, de LO,…
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