Les chiffres de la croissance (négative) de la France viennent d’être publiés et il me semblait intéressant de revenir sur l’action de notre ministre des finances. Son rôle, rappelons-le, est entre autres d’anticiper et de s’adapter lorsque le pays est en crise (surtout économique). Voyons ce qu’il en est.
Avant tout, réglons le débat qui est de savoir si la France résiste mieux ou non que les autres pays. Je dirais que cela dépend des indicateurs économiques que l’on utilise et des pays auxquels on se compare. Ceux qui veulent dire que l’on résiste mieux citeront des indices et des pays qui font moins bien et ceux qui disent le contraire en citeront d’autres. On connait la musique. Tout le monde s’accorde pour dire que le modèle social de la France sert d’amortisseur et ce modèle s’est construit en plusieurs décennies, donc le gouvernement actuel ne peut le revendiquer.
Alors revenons à la capacité d’adaptation et d’anticipation de ce gouvernement qui « n’a fait aucune erreur depuis le début de la crise » (dixit Sarkozy). Rappelons que le budget 2008, élaboré à Bercy à l’automne 2007, tablait sur une croissance de 2,25%. Une grande partie des économistes disaient que si nous faisions une croissance positive (en dessous de 1%), nous nous en tirerions bien. Ceux-ci avaient été moqués par Sarkozy et traités avec la condescendance qui est d’usage lorsque l’on est en désaccord avec lui. Les résultats définitifs tombent aujourd’hui : 0,3% ! Alors oui la crise, mais le rôle d’un gouvernement n’est-il pas d’anticiper, de prendre des mesures visant à diminuer l’impact de celle-ci sur son économie réelle ? Pour être capable de le faire, encore faut-il avoir une lecture juste de la situation. Et c’est là que le bas blesse. Rappelons-nous quelques déclarations de Madame Lagarde :
17 Août 2007 en conférence de presse : « l’économie française repose sur des fondamentaux qui sont solides (…) Je ne conçois pas aujourd’hui de contamination à l’économie mondiale »
5 novembre 2007 sur Europe 1 : « La crise de l’immobilier et la crise financière de semblent pas avoir d’effet sur l’économie réelle américaine. Il n’y a pas de raison de penser qu’on aura un effet sur l’économie réelle française »
18 décembre 2007 sur France Inter : « Nous aurons certainement des effets collatéraux, à mon sens mesurés. Il est largement excessif de conclure que nous sommes à la veille d’une grande crise économique »
Quelle analyse ! L’histoire nous montre combien elle se trompait. N’importe quel responsable économique ou financier dans n’importe quelle entreprise se ferait virer (avec un parachute doré certes) pour faute lourde. Et aujourd’hui Fillion nous dit sans rougir que la France résiste mieux à cause des mesures prises…. sur la base de ces excellentes prédictions. Alors oui nous avons des tonnes d’excuses pour nous expliquer pourquoi notre lecture était mauvaise. Mais enfin ! Nous ne sommes pas à la météo ici ! Cette science qui nous permet d’expliquer le temps qu’il aurait du faire. Nous parlons d’économie et cette incompétence a des répercussions dramatiques sur des millions de personnes. Une dernière citation :
10 février 2008 au G7 au Japon : « nous ne prévoyons pas de récession dans le cas de L’Europe »
Notez la date, nous sommes en 2008 et notre ministre n’a toujours pas compris ce que toute la planète voit. Les quatre trimestres qui suivront seront négatifs ! C’est historique !
Alors quelques mois plus tard, on se dit, ça y est, nous sommes à l’automne 2008, ils ont du comprendre maintenant. Et rebelote ! On nous construit un budget 2009 basé sur une croissance positive. On sait à présent qu’elle sera largement négative (- 3%). Et d’autres analyses de Madame la ministre :
16 septembre 2008 en conférence de presse : « La crise aura des effets sur l’emploi et le chômage pour l’heure ni avérés ni chiffrables »
20 septembre 2008 : « Le gros risque systémique qui était craint par les places financières et qui les a amenés à beaucoup baisser au cours des derniers jours est derrière nous ».
Par pitié ! Que quelqu’un nous en débarrasse !
Certains pourraient dire à raison qu’elle n’est qu’une marionnette et on sait qui tire les ficelles. Celui-là même qui base l’augmentation du pouvoir d’achat sur la loi TEPA (Travail-Emploi-Pouvoir d’Achat ou paquet fiscal).
Alors la question qui est de savoir s’il faut virer Christine Lagarde pour faute lourde se pose. Je pense que l’incapacité de ce gouvernement à anticiper et à s’ajuster est criante mais la ministre doit-elle payer toute seule ? Le débat est ouvert !