Impôts et prélèvements : les idées erronées de Nicolas Sarkozy
Avec l’annonce d’un nouveau durcissement de la politique de rigueur de son gouvernement, Nicolas Sarkozy n’en finit pas de tenir des propos marqués par des erreurs et des idées fausses qui continuent à structurer des choix politiques particulièrement injustes en matière fiscale.
Pour le Président de la République, il faut davantage d'impôts proportionnels ou de taxes que d'impôts progressifs, au risque de faire peser la charge fiscale principalement sur les classes moyennes et modestes…

Et dans ces maigres 18%, le taux est très faiblement progressif jusqu’au niveau des « classes moyennes » puis devient franchement régressif au sein des 5% les plus riches (soit 2,5 millions de personnes sur 50,4 millions), et surtout à l’intérieur des 1% les plus riches (soit 0,5 million de personnes).
Les Français travailleraient pour l’État du 1er janvier au 1er juillet = Faux
En déclarant que les Français travaillaient pour l’État du 1er janvier au 1er juillet, Nicolas Sarkozy reprend une idée véhiculée par des courants d'inspiration poujadistes qui suggèrent que les dépenses publiques, financées notamment par les prélèvements publics, disparaissent dans un trou noir et sont par nature économiquement inefficaces. Ce faisant, il commet une double erreur :
- Tous les prélèvements publics (impôts et cotisations sociales) ne vont pas à l’État. Ces prélèvements représentent près de 42% du produit intérieur brut, parmi lesquels 15% vont à l’État, 6% aux collectivités locales et 21% à la Sécurité sociale.
- Ces prélèvements sont réinjectés dans l'économie sous forme de : pensions de retraites, remboursements de dépenses de santé, indemnisations chômage (ces différentes formes de la redistribution sociale représentent 30% du revenu des ménages), services publics gratuits (écoles), dépenses d’investissement (réseaux de transport), subventions et aides...
Les fonctionnaires ne vivraient pas la crise = Faux
Selon Nicolas Sarkozy, les fonctionnaires ne subissent pas la crise. Or, les fonctionnaires ne vivent pas dans une bulle. Dans l'exercice de leurs fonctions ils sont au contact direct de la crise notamment lorsque les suppressions d’emplois dégradent leurs conditions de travail.
Au sein de la Direction générale des finances publiques par exemple, la très forte augmentation de l'accueil s'explique largement par la crise : les contribuables viennent demander en nombre des étalements de paiement, des remises gracieuses et la tension s’accroît du fait des difficultés sociales et de la forte affluence alors que les emplois manquent dans les services.
Enfin, dans leur famille, leurs amis, les fonctionnaires subissent les effets de la crise (les conjoints, enfants et amis ne sont pas tous fonctionnaires...).
La France serait le pays européen qui a les impôts les plus élevés = Faux
Toutes les données statistiques officielles le démontrent, la France n'est pas le pays européen qui a les « prélèvements obligatoires » les plus élevés. Selon Eurostat, en 2009 (dernière année disponible), le taux de « prélèvements obligatoires » par rapport au PIB s'élevait en France à 41,6%, derrière la Suède (46,9%), le Danemark (48,1%), la Belgique (43,5%), l’Italie (43,1%), la Finlande (43,1%) et l'Autriche (42,7%).
De fait la France n'est pas « première ». Mais encore faudrait-il comparer les contreparties : les prélèvements financent les services publics, la protection sociale, les aides publiques... Là où les prélèvements « publics » sont élevés, les contreparties sont importantes. Là où ils sont faibles, les contreparties sont faibles et il faut alors subir des prélèvements privés (assurances, fonds de pension) pour bénéficier de la même couverture que dans les pays à « prélèvements publics élevés ».
Seuls les impôts progressifs mettent en théorie davantage à contribution les plus aisés. Pour la France, il s'agit de l'impôt sur le revenu et de l'impôt de solidarité sur la fortune. Or, en France, l'impôt sur le revenu est le plus faible d'Europe. Même si l'on prend le total de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée, le niveau de l'imposition des revenus français représente 7,3% du PIB en France contre 26,5% au Danemark, 13,5% en Suède, 10,4% au Royaume-Uni ou encore 9,3% en Allemagne (données : 2009).
En outre, le taux le plus élevé du barème de l'impôt sur le revenu est également plus élevé dans de nombreux pays : il est de 41% en France contre 45% en Allemagne et 50% en Grande Bretagne par exemple... Enfin, le taux moyen d'imposition des plus riches en matière d'impôt sur le revenu est relativement faible en France (grâce à plus de 500 niches fiscales) : il se situe, selon le Conseil des prélèvements obligatoires, entre 15 et 20% pour le 1% de la population la plus aisée...
Au total, les niches fiscales représentent près de 75 milliards € de manque à gagner pour l'Etat. Une somme colossale, puisque supérieure au produit de l'impôt sur le revenu payé par les particuliers, qui était de 51,8 milliards € en 2008 !
Avant la crise, Nicolas Sarkozy et son premier Ministre François Fillon estimaient déjà qu'il fallait réduire les impôts progressifs et la place de l'action publique et de la protection sociale au risque d'alimenter la dynamique des inégalités.
Aujourd’hui, leur orientation n'a guère variée. Ce sont toujours les mêmes idées fausses. On préfère continuer à bricoler sur le plan fiscal et occulter ainsi la nécessité d’une grande réforme fiscale prévoyant notamment la taxation de tous les revenus sans distinction d’origine et la suppression de la plupart des déductions, abattements, exonérations, niches fiscales pour mieux lutter contre les déficits publics abyssaux…
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