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Accueil du site > Actualités > Politique > L’absinthe remise à flots ou la revanche de la fée verte

L’absinthe remise à flots ou la revanche de la fée verte

Le 15 décembre 2010, le Parlement abrogeait la loi du 16 mars 1915 qui interdisait aux producteurs français d’utiliser l’étiquette «  absinthe » et leur imposait d’accoler sur leur produits « boisson spiritueuse aux plantes d’absinthe ». En 1862, L’Année scientifique et industrielle relatait les méfaits de l’absinthe et se faisait déjà l’écho d’une demande d’interdiction 50 ans avant sa mise en oeuvre effective.

Si le consommateur d'absinthe qui fait de cette boisson un usage habituel n'est pas forcément voué à une fin terrible, on peut affirmer qu'il est menacé d'une déchéance morale aussi désastreuse que les désordres physiques, car elle s'adresse à la meilleure partie de l'homme, à son intelligence, à son coeur, à sa volonté. Chez le buveur habituel de cette liqueur, l'intelligence s'affaisse et fait place à l'hébétude ; un égoïsme brutal remplace de justes affections ; sa volonté est maîtrisée par un irrésistible entraînement vers les dégradantes satisfactions de l'ivresse. L'homme qui se distinguait naguère par de brillantes facultés intellectuelles perd cette intelligence qui faisait sa force, et dont la possession intégrale était la condition de son existence et de celle de sa famille ; l'artisan boit dans la coupe de l'absinthe le poison qui doit le rendre impropre à gagner le pain de sa femme et de ses enfants , pendant qu'il délaisse son foyer pour le cabaret, la misère s'assied à la place qu'il abandonne. « Il faut plus d'argent, a dit Franklin, pour nourrir un vice que pour élever trois enfants ».

Absinthe BlanchePour arrêter les ravages qu'exerce autour de nous cette dangereuse liqueur, que faut-il faire ? Le temps est passé où, à Sparte, on enivrait des esclaves pour inspirer aux citoyens et aux enfants le dégoût de l'ivresse. D'un autre côté, une interdiction administrative serait certainement impuissante pour arrêter dans le public les progrès de ce fléau de notre époque. Le seul recours qui reste ici, c'est de multiplier les leçons et les conseils de l'hygiène populaire. Que le public soit bien prévenu des dangers aux-quels il s'expose ; que l'ouvrier puisse entendre souvent des voix amies et prudentes qui l'avertissent du danger et l'aident à l'écarter. C'est là un devoir que tout homme éclairé est appelé à remplir dans la mesure de ses forces. Et quel bonheur n'apporte pas l'accomplissement de ce devoir !

Quelques réflexions faites par le journal l'Akhbar sur le sujet qui vient de nous occuper ne seront pas lues sans intérêt : « On s'est ému avec raison des progrès de ce fléau, et le Sénat, dans sa dernière session, a été saisi d'une demande à fin d'interdiction de l'absinthe en France, produit qui contient les quantités alcooliques au titre le plus élevé, 70 à 72 degrés, et que l'on accuse, avec quelque raison, d'exercer l'influence la plus funeste sur l'organisme humain. Cette pétition a été prise en considération par le Sénat, et renvoyée à l'examen du ministre de l'intérieur.

« Aussitôt grand émoi parmi les partisans de ce breuvage et dans le monde industriel qui s'occupe tout spécialement de sa fabrication ; il semblait que déjà l'interdiction était décrétée ; on déplorait que les populations n'eussent plus le droit de s'empoisonner. Chacun sait que l'absinthe tue les plus robustes constitutions, énerve les plus mâles courages ; mais n'importe ; quand une fois on a porté à ses lèvres la coupe empoisonnée, on veut l'y porter encore jusqu'à ce qu'un tremblement nerveux saisisse la main coupable et lui ôte la possibilité de continuer ses fonctions meurtrières. On guérit de tout, excepté de la maladie de l'absinthe, dit la Feuille commerciale de Cette, qui répète que ce breuvage a tué en Afrique plus de soldats que les balles d'Abd-el-Kader. Aussi, dit-elle encore, c'est rendre un grand service à l'humanité que d'en interdire l'usage, si c'est possible.

« Quelques journaux se sont demandé si le pouvoir avait le droit d'interdire l'usage de l'absinthe ; nous le croyons et nous affirmons même que c'est pour lui un devoir en présence des ravages que cause cette liqueur : ravages qui proviennent non seulement des quantités alcooliques, mais des ingrédients qui entrent dans sa composition ou sa couleur, et qui en font trop souvent une détestable , drogue, près de laquelle l'acide sulfurique serait du sirop de sucre ».

© La France pittoresque
http://www.france-pittoresque.com
Facebook : http://bit.ly/gtwKCc


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11 réactions à cet article    


  • Ronald Thatcher rienafoutiste 20 décembre 2010 10:45

    quelle tartine... 
    papier écrit par un ancien alcoolique frustré ? pompé sur des journaux du début du XXème siècle ?
    c’est les pires les anciens... alcooliques ! la lie
    petit personnel lobotomisé aux calmants, zélé snipper...

    aller un petit pour la route, santé les frustrés du goulot...


    • FrancePittoresque FrancePittoresque 20 décembre 2010 12:01

      « Si le consommateur d’absinthe qui fait de cette boisson... » est précisément l’extrait de L’Année scientifique et industrielle, paru en 1862. Le propos, qui visait donc à rappeler que les « pourfendeurs » d’absinthe étaient déjà actifs 50 ans avant l’interdiction de 1915, ne se voulait absolument pas un plaidoyer pour ou contre l’absinthe.


    • Le Gros Caillou Le Gros Caillou 21 décembre 2010 09:53

      @ rienafoutiste

      Message creux dans une réponse pleine de mépris

      Du cynisme au ricanement, vous portez fièrement les couleurs de votre époque...


    • Nemo8 Sam Lawry 20 décembre 2010 10:52

      D’après ce que j’ai cru comprendre, l’absinthe ne fut pas interdite parce qu’elle contenait des plantes aux effets toxiques. Ses effets désastreux ne furent que ceux de l’alcoolisme.
      Le problème qui se posait, était qu’un verre d’absinthe coutait beaucoup moins cher qu’un verre de vin, menaçant de ruine la viticulture Française.
      Quand on considère le poids culturel et économique de cette corporation, la messe fut dite, au prix de ce semble être une grosse manipulation.
      Mais cette boisson ne devait pas disparaitre et initia une autre institution Française : l’anisette.

      Et puis comme disait un ancien poilu : « Ce qui a sauvé la France en 14, c’est le pinard ! »


      • Abderraouf 20 décembre 2010 12:39

        « la messe fut dite », je vois ça.

        Une messe noire sur l’autel Ambre et ébène dédié à Proserpine, qu’on aurait tort de confondre avec l’absinthe vierge, elle même n’ayant rien à voir avec la mère du nazaréen.

        Une messe noire donc pour lancer une malédiction sur l’absinthe blanche dite la fée verte qui vous fera gris voire noir mais qui (ah tout de même) donnerait des couleurs aux joues pales des peaux rouges.


      • frugeky 20 décembre 2010 11:35

        Aimer l’ivresse, Oui, oui, et oui.
        En faire la publicité, non, non, et non.


        • asterix asterix 20 décembre 2010 13:58

          S’envoyer en l’air avec de l’absinthe alors qu’on y arrive beaucoup plus vite au speed, c’est faire abstraction des données des temps modernes.
           


          • krolik krolik 20 décembre 2010 16:30

            Comme l’absinthe était sensé rendre fou dans les bars à Paris on pouvait commander :

            - Un direct
            - un aller-retour
            C’est à dire un billet directement pour l’asile d’aliénés de Charenton 
            Il y a une vingtaine d’années j’ai pu acheter de l’absinthe à Prague, mais elle ne titrait que 40° d’alcool, comme n’importe quel whisky ou cognac. Avec la libre circulation des biens en Europe, la loi de 1915 n’était plus tenable en France.
            Mais les dégâts de l’alcool ne sont pas spécifique à la France. 
            En Angleterre le gin est appelé aussi « mother’s ruins » la ruine de la mère de famille.. ils doivent considérer que le gin est plus bu par les femmes.. En tous les cas cela a conservé la santé de la Reine Mère qui a du arriver pratiquement centenaire en en tâtant régulièrement..
            @+

            • Shaytan666 Shaytan666 21 décembre 2010 10:40

              Avant sa « libération » en Belgique j’achetais mon absinthe au Portugal, maintenant on en trouve partout chez nous, le taux d’alcool est très différent, cela commence à 40% pour la moins alcoolisée et va juqu’à 80%, le prix varie selon la teneur en alcool, la moins cher (40) tourne autours de 25€ pour allez jusque 60€ pour la plus forte.
              Il est tout à fait idiot de continuer d’interdire l’absinthe en France, vu que pour les frontaliers un déplacement de quelques kilomètres suffit.
              Ceci étant dit, l’article ressemble à du Zola, on se croirait presque dans l’Assomoir, avec un peu d’imagination on s’imagine Coupeau et Gervaise attablé dans l’estaminet.


            • Jean d'Hôtaux Jean d’Hôtaux 20 décembre 2010 22:38

              Merci à l’auteur d’éveiller en moi ce brin de nostalgie ...


              C’est en Suisse dit-on, dans le Val-de-Travers, sur la route qui relie Pontarlier à Neuchâtel que se trouve le berceau de l’absinthe, la véritable ! Elle existe depuis 1792.

              La prohibition de l’absinthe en Suisse remonte à 1910 à la suite d’une votation populaire, ceci à la suite d’un horrible meurtre. En effet, un alcolique massacra sa famille à la hache.

              L’absinthe y a été à nouveau légalisée en 2005, toujours à la suite d’une votation populaire.

              La toxine responsable de la dangerosité du produit est une molécule appelée « thuyone ».

              En Suisse, depuis sa légalisation en 2005, l’absinthe ne doit pas excéder un certain taux de thuyone.

              Durant sa prohibition entre les années 1910 et 2005, l’absinthe a continué à être distillée en toute illégalité. Etant enfant et natif de la région d’origine, je me souviens qu’il y avait une bouteille d’absinthe dans tous les foyers et que ce produit se buvait couramment comme apéritif. C’était tout un cérémonial, le verre adéquat, la cuillère à absinthe sur laquelle on disposait le morceau de sucre et pour ceux - rares - qui en possédaient une, la fontaine à absinthe ...

              L’absinthe c’est toute une culture, presqu’un art de vivre !

              Si l’absinthe a fait tant de ravages dans les familles, c’est peut-être moins à cause de la présence de thuyone dans le breuvage, que le prix de celui-ci. C’était en effet l’apéritif le meilleur marché au début du XXème siècle.

              L’absinthe a été beaucoup évoquée, voire célébrée, par Baudelaire, Zola (L’Assommoir), autant que par les peintres, notamment Degas : l’Absinthe.

              Pour ceux qui veulent approfondir, il existe dans le berceau du produit, une fête de l’absinthe à Boveresse, un village du Val-de-Travers, ainsi qu’un musée de l’absinthe à Môtiers, un village voisin où vécut Jean-Jacques Roussau.

              Et pour ceux qui souhaiteraient approfondir le sujet, l’histoire de l’absinthe.

              Quelques affiches datant de la prohibition de l’absinthe en Suisse :

              http://fr.academic.ru/pictures/frwiki/65/Affiche_absinthe.jpg

              http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/19/Interdiction_absinthe_19 05.jpg




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