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L’accord nucléaire tripartite Iran-Turquie-Brésil est-il un coup d’épée dans l’eau ?

Quand les succès diplomatiques se muent en revers géopolitiques…
L’accord tripartite signé le lundi 17 mai à Téhéran entre l’Iran, la Turquie, et le Brésil, accord relatif à l’enrichissement d’uranium (1) hors frontière, est indéniablement, dans l’absolu, un succès, notamment si on le juge à l’aune de la réaction de trois des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies, Russie, France et Chine, qui en ont souligné le caractère « positif ». Trois pays ayant en commun d’être des riverains immédiats d’un nouveau et éventuel champ de bataille, surtout en cas de frappes nucléaires ; les États-Unis étant pour leur part, et par définition, loin des conséquences de leurs actes. De son côté, le Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon espérait que cet accord « ouvrirait la porte à un règlement négocié de la crise ouverte par les ambitions nucléaires de l’Iran  ».
 
Téhéran a montré à cette occasion et avec éclat qu’il n’était pas isolé au sein de la communauté internationale, administrant du même coup une preuve quant au dynamisme et à la pertinence de sa diplomatie, laquelle se déploie maintenant de la Péninsule arabique à l’Amérique latine via l’Afrique. Une attitude de « défi » à laquelle les É-U ne peuvent donc que vouloir mettre le holà, à ce stade leur « crédibilité » relevant du domaine des intérêts vitaux à défendre par tous les moyens. Ce faisant, Téhéran a donné à la Maison-Blanche une bonne raison et une belle occasion de rappeler qu’elle est encore le vrai donneur d’ordre.
 
Précisons que ce sont deux pays dits « émergents », et non des moindres, actuellement membres non permanents du Conseil de Sécurité, le Brésil tête de file du Mercosur (2) et pilier oriental de l’Otan, et la Turquie (laquelle fut jusqu’à 2003 l’un des plus solides relais de la politique américaine au Proche-Orient (3) et en outre, un allié stratégique de l’État hébreu), qui viennent à cette occasion de jouer ouvertement contre leur mentor nord-américain en ouvrant une brèche dans le diktat permanent servant de mortier aux relations entre les É-U et leurs « alliés », commensaux et tributaires.
 
Ankara, à qui l’entrée dans l’Union européenne avait été promise par Washington en rétribution de sa loyauté envers l’Amérique-monde, vient de facto de trahir une nouvelle fois (3) la cause atlantiste en s’associant à cet autre partenaire privilégié qu’est le Brésil. Cela au sein d’une sorte de conjuration clairement destinée à contrecarrer la volonté du Département d’État d’amener Téhéran à résipiscence sur son dossier nucléaire. La maîtrise du nucléaire avec la capacité de se doter de la « bombe », à tout moment et en un temps très court (option choisie par le Japon), étant un instrument politique que les États-Unis refusent catégoriquement à l’Iran et cela au point d’en faire un casus belli.
 
Une politique de force qui vise au bout du compte à limiter l’influence régionale de l’Iran, mais également lui interdire toute politique de souveraineté adossée à une capacité de dissuasion stratégique l’autorisant à prétendre, le cas échéant, se dérober aux pressions amicales ou aux oukases du parrain américain, lequel n’en est pas avare !
 
Nous savons par ailleurs que l’Iran détient de notables atouts géoéconomiques, en particulier énergétiques (l’Iran étant le détenteur en second des réserves gazières mondiales, soit 15%), des ressources à terme vitales pour le consortium euratlantique. Or, dans le contexte mondial d’exacerbation de la course aux ressources, l’ombre de l’hégémonie nord-américaine est, à n’en pas douter, destinée à planer encore un certain temps sur un monde toujours unipolaire en dépit du désir pressant des émergents de faire entendre leurs voix. Le Nouvel Ordre Mondial étant ce qu’il est, et appelé à le rester pour le futur immédiat, c’est-à-dire placé sous la coupe d’une Amérique-monde en constante expansion, il faut admettre que charbonnier ne sera plus jamais maître en sa demeure
 
Un coup d’épée dans l’eau !
 
Dans un tel contexte, l’accord tripartite irano-turco-brésilien très vite devrait s’avérer n’être qu’un coup d’épée dans l’eau et même plutôt carrément « catastrophique » ! Notons au passage que l’attitude de la Turquie et du Brésil est tout à fait inédite ; qu’elle constitue une « première » ! Mais cette fronde élégante, cette belle tentative de contournement de l’asphyxiant soft power (le pouvoir indirect) anglo-américain, est de toute évidence vouée à rester lettre morte. Alors se pose la question de savoir pour quelles raisons cette initiative inédite serait-elle aujourd’hui à la fois diplomatiquement positive et géopolitiquement négative quand bien même, par la suite, elle pourrait faire école ?
 
En effet, si l’accord vient contrarier, à première vue, la politique des Anglo-Américains (et plus encore de leurs alliés israéliens jusqu’au-boutistes) en vue d’un resserrement graduel des sanctions imposées à l’Iran, l’accord constitue avons-nous dit, une insupportable provocation pour les États-Unis et le plein exercice de leur leadership international. Défi qui est une occasion (voir infra) pour monter d’un cran dans le processus d’étranglement de l’Iran national-théocratique. Un « défi » dont l’exploitation avait été soigneusement préparée par l’Administration américaine qui après des mois de tractations et de marchandages, est parvenue à faire adopter par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, le mardi 18 mai, soit dès le lendemain de la signature à Téhéran de l’accord tripartite, un nouveau train de sanctions contre l’Iran. On ne peut qu’admirer la précision dans la succession calendaire des événements et en tirer toutes les conclusions utiles et nécessaires. Projet accepté donc par la Russie et la Chine (4), pourtant tous deux soutiens tacites de Téhéran qui généralement traînent des pieds lorsqu’il s’agit de sévir contre la mollahcratie.
 
Ce faisant Washington a rappelé qui est le premier donneur d’ordre, et que nul ne devrait ignorer qu’il est préférable de ne pas piétiner la queue du dragon sauf à disposer d’un glaive magique… À cette bronca, Washington a donc répondu de manière magistrale en considérant comme nul et non avenu l’accord signé la veille. Un camouflet pour la Turquie et le Brésil renvoyés à leur « juste » place (celle que leur assignent les Anglo-Américains dans les Affaires du monde) leur signifiant vertement qu’ils ne sont pas conviés à jouer dans la cour des grands.
 
Une audace qui se paiera d’une façon ou d’une autre.
 
Primo parce que la démarche turco-brésilienne ne prend pas suffisamment en compte le rapport de force réel existant entre les États-Unis toujours maîtres du jeu planétaire et le reste du monde (même si le jeu se complexifie en se diversifiant du fait de l’arrivée sur la scène internationale de nouveaux acteurs commençant à revendiquer une place).
 
Deusio parce que la punition ne se fera pas attendre longtemps tant les moyens de rétorsion des É-U sont nombreux (commerciaux en particuliers) et qu’ils ne sauraient manquer aucune occasion de faire payer cher leur audace aux imprudents. La France après 2003 et sa sortie au Conseil de Sécurité (intolérable du point de vue des partisans de l’annihilation de l’Irak), a souffert de la vindicte américaine au point d’amorcer dès 2004son retour - achevé aujourd’hui - dans le giron Atlantique (5).
 
Ceci étant dit, l’initiative triangulaire pour opportune qu’elle soit - ou qu’elle serait dans un monde où régneraient bonne foi et bonne volonté - est à l’arrivée un fiasco. Sans doute faut-il alors se résigner à ne pouvoir désamorcer une crise qui affecte pourtant l’équilibre de la planète toute entière ? Une crise qui, insistons sur ce point, se développe dans une atmosphère particulièrement méphitique en raison de son évidente artificialité… à savoir un procès d’intention dont les mobiles premiers ne sont jamais énoncés. Or comme ces enjeux véritables ne seront jamais posés de part et d’autre de la table (ce qui reviendrait à remettre en cause l’ordre du monde né à Yalta), l’actuel dialogue de sourd - plombé de lourdes arrières-pensées - se poursuivra avec le « pire » en perspective.
 
En résumé, l’initiative tripartite, opération éminemment louable du point de vue de la paix entre les nations, se révèle finalement « catastrophique » parce ce que non seulement elle n’a pas permis de squeezer les États-Unis, mais qu’elle leur offre la possibilité de déplacer ses pions sur le grand échiquier diplomatique plus vite que prévu. Car il va de soi que le projet de Résolution et auquel la grande presse a servi de caisse de résonance alors que l’accord tripartite était quasiment passé sous silence, avait été concocté et tenu au chaud justement pour, à point nommé, servir à enterrer le sommet de Téhéran en annulant d’un trait de plume la convention tripartite.
 
Un accident de parcours et une aubaine
 
Un accident de parcours par conséquent exploité de façon très dialectique (d’un « mal » faire naître un « bien ») pour progresser dans l’escalade alors même que le Nobel de la Paix Barak Obama signait l’ordre d’accroître la présence navale américaine dans le Golfe arabo-persique (6) (quatre porte-avions et leur groupe d’attaque, soit un ensemble de plusieurs centaines de bâtiments de guerre).
 
Alors quelles leçons tirer de cet accord turco-irano-brésilien qui a suscité le fugace espoir de voir s’engager une amorce de stabilisation régionale ? En premier lieu que le rapport du fort au faible n’offre que peu d’échappatoires. La Fontaine nous l’a autrefois enseigné : la rhétorique du « loup » ne tient aucun compte ni de la raison, ni du Droit, a fortiori du droit international, ni de la justice… Que le discours du « fort » subvertit en soi les valeurs en principe fondatrices des relations entre les individus d’abord, entre les sociétés ensuite. Or, au XXIe siècle, la ruse, enveloppée d’un brouillard verbal, prime sur l’immédiat exercice de la force brutale, mais elle l’annonce cependant tout comme la nuée porte l’orage.
 
Une sophistique consensuelle donnant une apparence de rationalité juridique à l’expression de l’imperium hégémonique, verbalisme de chancellerie qui n’est au demeurant qu’une transposition du dialogue au bord du ruisseau des deux animaux de la fable. L’Iran est de la même façon un coupable sui generis et doit par conséquent se soumettre inconditionnellement. S’il ne s’y résigne pas de son propre gré, il sera ramené manu militari dans le droit chemin démocratique et libéral.
 
De ce point de vue, la guerre (qui n’a pas grand chose à voir avec une quelconque fatalité plus ou moins inhérente à de supposées lois physiques de la nature géopolitique du monde) a toutes chances d’avoir lieu pour la simple et unique raison que des factions influentes d’ultras, à Washington, à Londres et à Tel-Aviv, la veulent avec ardeur et la préparent assidûment. Conflit dont il est à prévoir qu’il débordera rapidement hors du cadre régional comme l’en a averti le président russe, Dimitri Medvedev. Un conflit qui constituera, d’une façon ou d’une autre, une issue à la crise systémique globale : la guerre n’est-elle pas « Le » moyen de régulation par excellence (7) ?
 
Bien des naïfs (ou des personnalités trop imbues d’elles-mêmes) croyaient en décembre 1990 que la guerre du Koweït n’aurait pas lieu parce que des négociations allaient bon train entre Bagdad et Riyad ; parce qu’également le Raïs Saddam Hussein avait offert de se retirer selon certains délais lui permettant de « sauver la face ». La guerre a eu lieu. Elle a eu lieu pour l’unique raison que l’« on » voulait qu’elle eût lieu. Or la situation d’aujourd’hui offre de nombreuses similitudes avec celle de décembre 1990. Il ne manque plus au tableau qu’un prétexte plausible, une provocation intervenant n’importe où dans le monde mais suffisamment spectacularisable pour frapper les opinions de sidération, cela, le temps nécessaire à lancer les premières frappes qui enclencheront automatiquement l’escalade militaire.
 
L’accord tripartite est, à ce titre et en dernier ressort, une initiative « catastrophique », parce qu’elle procède d’une appréciation erronée de ce qu’est le monde aujourd’hui, des rapports de force qui y prévalent et qu’elle risque de fait de précipiter les « événements ». En réduisant la marge de manœuvre diplomatique des Anglo-américains, qu’elle ne les pousse à hâter leur décision d’intervenir directement sur le terrain. Cela également en raison d’une survalorisation non réaliste, hors d’un rapport de forces favorable, de la valeur en soi du droit international … Celui-ci n’étant en vérité, la plupart du temps, qu’un instrument ou un habillage variable selon les saisons, les lieux, les circonstances ou les besoins du moment.
 
Plus grave, une appréciation fausse du rapport de force global toujours en faveur des États-Unis comme en administre la preuve le ralliement volens nolens de la Russie et de la Chine au durcissement des sanctions. Une attitude de la part de ces deux grands qui ressemble à celles de ces navires qui fuient sous le vent pour tenter d’échapper à la tempête. Ici, les deux challengers eurasiatiques des É-U se trouvent littéralement aspirés par la volonté américaine de liquidation du régime iranien et d’inclusion de l’Iran dans sa sphère d’influence.
 
Les États-Unis - John Pitbull - n’en démordra pas, la chute du régime iranien n’est pas du domaine du négociable. Russes et Chinois le savent et leur comportement démontre qu’ils ne disposent pas de la monnaie d’échange susceptible d’infléchir le projet américain ; une ambition dont le succès à terme n’est d’ailleurs pas assuré comme les échecs des révolutions colorées géorgiennes et ukrainiennes en témoignent. De sorte que Moscou et Pékin peuvent-ils tout au plus jouer le rôle de ralentisseurs d’un processus qu’ils savent quasi inéluctable. Finalement l’épisode de l’initiative tripartite aura le vrai mérite de mettre les choses au point et de nous donner un cliché exact de l’état des lieux géostratégiques, c’est-à-dire en montrant le caractère (provisoirement) illusoire d’un rééquilibrage des pouvoirs dans un monde encore assez éloigné de la multipolarité.
 
Ce constat contredit - en dépit des différents conflits qui déchirent le Proche-Orient ces deux dernières décennies - l’idée que nous assisterions tendanciellement à un déclin de la puissance américaine aujourd’hui affaiblie par les deux fronts déjà ouverts, l’irakien et l’Afghan, tout aussi bien que par les conséquences économiques sociales d’une crise financière qu’elle est encore loin d’avoir complètement surmontée. À cet égard, écartons définitivement l’idée - laquelle ressort de la méthode Coué - qu’en raison de ses difficultés budgétaires, l’État fédéral américain n’aurait plus la capacité d’aller au bout de ses intentions belliqueuses. Une idée controuvée à l’heure de la guerre des drones de combat et des missiles de croisières intercontinentaux.
 
Enfin, last but not least, à l’appréciation erronée du poids relatif sur la scène internationale des « émergents » et de leur potentiel en matière de bargaining power (car il est nous est interdit de prendre nos désirs géopolitiques pour des réalités géostratégiques !) vient se surajouter une confiance excessive des dirigeants iraniens dans leur capacité à dissuader les israélo-anglo-américains de procéder à des frappes préventives… Ceux-ci seraient arrêtés dans leur élan guerrier par la crainte supposée d’un prix à payer trop élevé : les dirigeants iraniens croient en effet, dur comme fer, que l’importance des pertes induites chez l’agresseur lui rendent le coût du passage à l’acte tout à fait rédhibitoire…
 
C’est malheureusement ne rien comprendre à ce que sont les États-Unis et à leur duplicité géostratégique. Si l’on admet (avec les historiens) que les soldats tués à Pearl Harbor ont été délibérément sacrifiés, le gouvernement américain étant parfaitement informé de l’opération, pourquoi les machiavéliens (8) actuellement aux commandes dans l’ombre du président Obama, seraient-ils inférieurs aux cyniques d’hier ?
 
Quant aux mesures que prendrait l’Iran en cas de frappes préventives, elles sont déjà parties prenantes du script des opérations. Qu’une salve de missiles de croisières, avec ou sans tête nucléaire, tirée depuis les sous-marins vendus à Israël par l’Allemagne social-démocrate, touchent des centres vitaux iraniens, que la réplique en représailles de Téhéran sur des bases ou des navires américains déterminent des pertes significatives dans le corps expéditionnaire coalisé (du même ordre que lors de l’attaque de Pearl Harbor le 7 décembre 194, laquelle fit 2403 victimes, seuil psychologique comparable à celui atteint avec les destructions des Tours jumelles, préalable à l’assaut lancé contre le bastion afghan), la presse occidentale se déchaînera muselant une opinion publique occidentale tétanisée comme elle l’a été le 11 septembre 2001, nous entrerons alors dans l’engrenage infernal de la guerre sans limites.
 
Nous n’aborderons pas ici, l’hypothèse vraisemblable, de l’ouverture préalable d’un premier front au Liban, voire en Syrie alliée de l’Iran, afin de réduire la pression exercée par les tirs de missiles du Hezbollah sur le nord de l’État hébreu… Sans oublier le scénario de basse intensité comportant la fermeture du détroit d’Ormuz… mais à y regarder de plus près celle-ci ne ferait que retarder l’échéance d’une campagne (déjà planifiée) de frappes massives destinées à donner toutes ses chances aux forces intérieures œuvrant au renversement du régime. Le scénario « Ormuz » devant se révéler tout aussi impuissant à dissuader les attaquants potentiels, sauf dans l’imaginaire mystique des gardiens la Révolution islamique iranienne (un défaut de jugement qui ne se limite pas à l’aire islamique en ce qu’il a de la même façon causé la perte de la Fédération yougoslave en 1999 et la chute finale du régime baasiste laïque d’Irak en 2003).
 
L’artère jugulaire d’Ormuz par laquelle transitent près de 30% de la production mondiale des hydrocarbures nécessaires à faire tourner le moteur planétaire, fermée, un baril qui bondirait à 300$ serait une aubaine inespérée pour les « Sept sœurs » (le cartel des grandes Compagnies pétrolières) qui pourraient dès lors se lancer dans l’exploitation à haut coût des schistes et des sables bitumineux du Groenland et d’ailleurs.
 
Sauf à ce que l’initiative tripartite ne soit reprise par une large coalition conduite par la Russie et la Chine, ce qui semble peu probable dans la conjoncture présente, le scénario du pire, sous les deux versions qui viennent d’être évoquées - frappes préventives, représailles, fermeture d’Ormuz - est en fait le plus plausible. Et sauf une levée de bouclier internationale particulièrement nette et ferme, la guerre de Troie aura bien lieu parce que les dieux assoiffés de puissance qui siègent dans l’île de Manhattan et règnent sur la Cité de Londres en ont décidé ainsi.
 
le 24 mai 2010
 
Notes :
 
1 - L’accord intervenu le 17 mai à Téhéran entre l’Iran, le Brésil et la Turquie (signé par les ministres des Affaires étrangères des trois parties prenantes en présence des Présidents iranien Mahmoud Ahmadinejad, brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan), porte sur l’envoi en Turquie par l’Iran de 1200 kilos d’uranium enrichi à 3.5% pour y être ultérieurement échangé contre un combustible enrichi à 20% destiné à un réacteur de recherche médicale situé dans la capitale iranienne
 
2 - Le Marcosud ou Mercosur associe Brésil, l’Argentine, le Paraguay et l’Uruguay au sein d’une zone de coopération soutenue par une volonté collective de rapprochement politique ou juridique, un projet qui est donc assez éloigné de celui de l’ALÉNA (Accord de libre-échange nord-américain), simple zone de libre échange sans tarif extérieur commun. Formé en 1991 avec la signature du traité d’Asunción, le Marcosud constitue le troisième marché intégré au monde après l’UE et L’ALÉNA.
 
3- La première fois fut en 2003 lorsqu’Ankara refusa l’utilisation des bases américaines de son territoire – notamment Encirlik où les É-U entreposent des têtes nucléaires – et le survol de son territoire par les appareils de l’US Air Force, en soutien de l’assaut lancé depuis le Nord (et le Kurdistan) sur Bagdad.
 
4- La Secrétaire d’Etat américaine, Mme Hillary Clinton, a déclaré lundi 24 mai à Pékin que le « le projet de résolution sur lequel se sont mis d’accord tous les partenaires du groupe des 5+1 [constituait] un message clair à la direction iranienne : respectez vos obligations ou affrontez un isolement croissant et les conséquences[…]La perspective d’un Iran doté de l’arme nucléaire nous inquiète tous. Et pour résoudre cette menace, ensemble nous avons mené une double approche : engagement et pression, visant à encourager la direction iranienne à changer de voie ». Les États-Unis sont en effet parvenus à convaincre la Chine et la Russie de soutenir le projet de résolution du Conseil de sécurité des NU pour un quatrième train de sanctions contre l’Iran. Les cinq membres permanents (États-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne + l’Allemagne) constituent le groupe de six grandes puissances chargées du dossier nucléaire iranien. 
 
5 - L’infléchissement de la politique française vers un retour dans le giron atlantique, se fait sentir à partir du 2 septembre 2004 lorsque la France se rallie à la Résolution 1509 du Conseil de sécurité des NU, laquelle préconise le retrait syrien du Liban. Six mois après l’adoption de la R. 1509, l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri est assassiné le 15 février 2005. Le rapprochement de la France – son voyage à Canossa ! - et des É-U sera complet lorsque le Président Sarkozy revient officiellement en 2009 dans le commandement intégré de l’Otan (dont de Gaulle avait retiré la France en 1966), ce qui était déjà un état de fait des troupes françaises combattant depuis août 2003 en Afghanistan, sous la bannière de l’Otan et sous commandement américain.
 
6 - Alors que l’État hébreu se livrait à des manœuvres d’envergure pour contrer une éventuelle attaque de son territoire par des missiles, les É-U complétait leur dispositif offensif dans le Golfe et alentours. Carrier Strike Group 10, headed by the USS Harry S. Truman aircraft carrier, sails out of the US Navy base at Norfolk, Virginia Friday, May 21. On arrival, it will raise the number of US carriers off Iranian shores to two. Up until now, President Barack Obama kept just one aircraft carrier stationed off the coast of Iran, the USS Dwight D. Eisenhower in the Arabian Sea, in pursuit of his policy of diplomatic engagement with Tehran. For the first time, too, the US force opposite Iran will be joined by a German warship, the frigate FGS Hessen, operating under American command. It is also the first time that Obama, since taking office 14 months ago, is sending military reinforcements to the Persian Gulf. Our military sources have learned that the USS Truman is just the first element of the new buildup of US resources around Iran. It will take place over the next three months, reaching peak level in late July and early August. By then, the Pentagon plans to have at least 4 or 5 US aircraft carriers visible from Iranian shores.The USS Truman’s accompanying Strike Group includes Carrier Air Wing Three (Battle Axe) - which has 7 squadrons - 4 of F/A-18 Super Hornet and F/A-18 Hornet bomber jets, as well as spy planes and early warning E-2 Hawkeyes that can operate in all weather conditions ; the Electronic Attack Squadron 130 for disrupting enemy radar systems ; and Squadron 7 of helicopters for anti-submarine combat (In its big naval exercise last week, Iran exhibited the Velayat 89 long-range missile for striking US aircraft carriers and Israel warships from Iranian submarines.) Another four US warships will be making their way to the region to join the USS Truman and its Strike Group. They are the guided-missile cruiser USS Normandy and guided missile destroyers USS Winston S. Churchill, USS Oscar Austin and USS Ross.
 
7 - Georges Bataille « La part maudite  », essai d’économie générale – Paris 1949.
 
8 - « Les Machiavéliens » James Burnham. New-York 1943.
 
 
P.-S.
 

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5 réactions à cet article    


  • En.marge 3 juin 2010 16:33

    Voici une fort intéressante analyse - ce n’est pas si courant sur ce site !
    Votre prévision repose cependant sur la capacité des USA à déclencher et mener cette guerre, et sur votre certitude qu’ils en ont les moyens.
    Nombreux sont ceux, même au Pentagone, qui en doutent.
    Peut-être va-t-il falloir attendre que la crise s’aggrave encore ?
     


    • Tony Pirard 4 juin 2010 01:18

       Le titre de l’article devrait être....Brésil donne un tir dans le pied... ! Dernièrement,le Brésil a s’allié à ce qu’il ya de pire....Bolivie,Venézuela,Cuba,Iran.
       Nous ne savons si tout fait part d’une ingénuité de la diplomatie brésillienne ou Lula aime le danger. Mais,le Ministérie de Relations Extérieres brésillien n’a été des meilleurs dernièrement,car,à Honduras ils ont déjà... « mis le pied dans le plat ».

       Mais,cela ne represente la voix du peuple brésillien, et Oui...du parti de Lula que se trouve plus à gauche... ! L’intellectualité de Lula et leur Ministre Celso Amorin ce n’est pas des meilleurs,parfois,ils semblent ne savoir histoire et ni géopolitique.... !

       Ils ne peuvent oublier que le meilleur « partner » dans le marché brésillien est US que achetent pratiquement tout du Brésil et mantien un des meilleurs relations dans l’Amérique Latine.


      • jibe jibe 6 juin 2010 08:55

        Que de mots pour rien : vous auriez bien fait de vous demander auparavant si, techniquement, le Brésil et la Turquie étaient capables d’enrichir cette quantité d’uranium. Or la réponse est non, pour les deux. il ne s’agit pas d’un échafaudage diplomatique mais d’une histoire marseillaise


        • chat noir chat noir 6 juin 2010 09:26

          J’ai cru avoir fait un saut dans le temps. En me levant aujourd’hui, j’ai cru m’être réveillé en 2004 lorsque les républicains, dans leur lancée irakienne, pensaient qu’ils pouvaient se fumer l’Iran et que de bombardements massifs et d’invasion limitée de Khuzestan et de Hormuzgan étaient sur la table de George Walker avant qu’on lui dise que l’Irak sera un enfer à tenir ; mobilisant plus de 120.000 soldats (même nombre de contractor), attaqués quotidiennement par des groupes soutenus implicitement par l’Iran et qu’une autre aventure contre un pays de 70 million d’habitants autrement plus armé et plus puissant ne sera pas possible sans revenir à la conscription.

          Et puis, j’ai vu la date de votre article. 2010, j’ai fait donc un soupir de soulagement mais aussi de désolation pour vous Jean-Michel Vernochet. Désolation parce que vous idées et thèses sont dépassées.

          A vous croire, les troupes américains en Afghanistan s’en sortent à merveille avec les Taliban qui ne sont pas explicitement soutenu par l’Iran, l’Irak est un havre de paix démocratique où l’Iran ne peut pas agir librement, la Californie n’a pas envisagé de légaliser la vente de Canabis pour renflouer ses caisses, le prix du pétrole avoisine les 20$ donc on peut se permettre une autre guerre qui n’aura pas réellement impacte sur les prix, le monde occidental a une croissance économique positive à 2 chiffres,....

          La réalité est autre, les troupes de l’OTAN sont dépassés en Afghanistan par des pecnots armés au stricte minimum syndical (AK-47, Coran), l’année 2009 a été la plus sanglante depuis l’invasion et 2010 promet d’être un grand cru également, l’Irak est sous influence totale de l’Iran et depuis le retrait des soldats américains dans leur base, l’Iran agit librement dans le pays, la crise économique aux USA est telle que des projets militaires ont été annulé (EFV pour ne citer qu’un), que le budget militaire va être revue à la baisse, que certains états sont à la limite de la banqueroute, que la dette publique américaine dépasse aujourd’hui les 13 trilliards $, que la crise sociale en Europe ne permet pas de s’offrir le luxe d’un pétrole à 300$/baril même si que Total ou autre multinationale en profitent,

          Pour ce qui est de l’action militaire, on avait déjà tablé sur une agression étrangère qui sera l’élément déclencheur pour que l’opposition intérieure renverse le régime en place. C’était dans les années 80’ lorsqu’on avait armé et soutenu le dictateur irakien pour attaquer l’Iran, les plans prévoyaient une avancée rapide des troupes irakiennes au Khuzestan, un renversement du régime par les pro-occidentaux qui pendront haut et court leurs dirigeants. On a en plus mis toutes les chances de notre côté puisqu’on a pas hésité à soutenir le programme chimique et biologique de Saddam qui a couté la vie à 60.000 civils iraniens (A côté, les victimes de Sdérot c’est du pipi de chat noir ;) ). Résultat, le peuple s’est retrouvé soudé autour du régime qui n’a jamais été aussi fort qu’aujourd’hui, la guerre a durée 8 ans et a couté 1 Million en victime. Qu’est ce qui vous dit que ça marchera cette fois ? pouvez vous vous offrir le luxe d’un million de victime ?

          Vous voulez voir le monde de 2010 avec vos lunettes de la guerre froide et ses 5 puissances de la « communauté internationale », bien à vous, mais aujourd’hui il y a de plus en plus de puissance montante qui vont s’affirmer sur la scène internationale, que cela vous plaise ou pas.

          Bien à vous



          • mokhtar h 6 juin 2010 14:02

            A l’auteur
            Vous ne pouvez pas comprendre çà : en vous lisant, je mes suis rappelé les écrits des intellectuels et journalistes de service aux époques des années 50 et suite de la guerre froide. Depuis 60 ans, ou presque, les iraniens sont en train de foutre les anglais et les américains dehors. Régulièrement, ponctuellement, fidèles à leurs rendez vous.
            Je vais vous donner une information très sûre : c’est du solide. L’Iran, en cas de guerre, même vaincu, même détruit, ne se soumettra jamais. Comme les Irakiens, comme les Afghans : rien à faire, il faut absolument, que vous sortiez de la région. Parce que c’est dans les gènes de la haine : on peut subir une défaite très dure, mais on n’accepte jamais de se soumettre durablement chez les musulmans qui ne savent pas ce que c’est que la capitulation sans conditions, comme l’Amérique l’a imposée aux indiens au cours des siècles derniers, aux japonais et aux allemands à 2e guerre mondiale.
            Le reste, faites en ce que vous voulez, en particulier vos arguments sur les mesures de rétorsions Us sur les pays émergents qui auraient des velléités d’Indépendance. Cependant , on n’est plus dans les années 50, que diable ! Je ne sais pas si vous vous en êtes aperçu... L’Amérique latine a déjà bouté les américains dehors pour une bonne partie : on est bien loin de l’Amérique aux américains. Chine, Russie, Brésil, Vénézuela, Argentine, Afrique du Sud, et beaucoup de candidats à l’émergence dans moins d’une décennie auront tôt fait de raboter la morgue Us, si ce n’est déjà fait pour une bonne partie également. Le roi dollar des années 60 à 70 est aujourd’hui obligé d’accepter un petit conseil de régence extra américain. Pour cela, il eut fallu que l’Amérique ait encore la haute main sur tout l’argent, tout le pétrole gratuit et toutes les matières premières de la planète pour rien. Ce qui n’est plus le cas. L’Amérique a toujours le soutien des anglo-saxons Angleterre et Australie, et du soutien désarmé du Japon, mais cela n’est plus suffisant. Même beaucoup de pays de l’Otan rechignent à s’engager davantage en Afghanistan
            M. Obama, qui est quand même plus intelligent que Bush, s’est aperçu du coût de deux petites guerres en Irak et en Afghanistan, et réfléchira plus longuement avant de céder aux fauteurs de guerre banksters et autres sur le coût d’un troisième champ d’opérations sur la population américaine.
            Il reste encore deux choses que vous avez oubliées : en premier, il faudra aussi convaincre l’opinion américaine de la nécessité d’affecter 80 à 100 milliards de dollars par an (une moyenne pour la guerre d’Irak) pour une guerre de sables perdue d’avance.
            En deuxième lieu, ne comptez pas trop sur une petite frappe pour provoquer un montée de la contestation poulaire iranienne contre le pouvoir de M. Ahmadinedjad. Ce dernier a avit gagné les dernières élections haut la main , avec une majorité de 55% au moins, selon les propres aveux des services secrets occidentaux. Là aussi, c’est un argument destiné à la consommation intérieure occidentale. Ne croyez surtout pas çà, les services secrets Us vous riraient au nez.

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