L’impôt, c’est le nerf de la solidarité !
Comme l’argent est le nerf de la guerre, l’impôt est le nerf de la solidarité. L’impôt direct principalement, parce ce qu’il est plus juste que la TVA, impôt indirect qui frappe tout le monde sans distinction du niveau des revenus et à des taux parfois arbitraires. Or, le président Sarkozy a porté deux coups à cet impôt, d’abord avec le bouclier fiscal qui exonère les riches d’une part de leur impôt sur le revenu, ensuite avec l’annonce de la suppression de la taxe professionnelle.
La taxe professionnelle serait certes remplacée par une taxe carbone, mais le principe change : à la place de la solidarité nationale, c’est une pénalité qui est instaurée et donc l’esprit n’est pas du tout le même.
L’exonération de la taxe professionnelle est un nouveau cadeau au patronat et la satisfaction d’une exigence répétée de la présidente du Medef. En mai 2008, Mme Parisot demandait en effet que l’on exonère de taxe professionnelle tous les investissements futurs. Elle réitéra à plusieurs reprises cette exigence du patronat, déclarant à la radio : "Concernant la réforme de la taxe professionnelle, aucun autre pays ne taxe les investissements. C’est une priorité d’aller jusqu’au bout : oui il faut la supprimer."
Pour faire passer la réforme auprès du grand public, l’argument de la lutte contre les délocalisations a été utilisé par le chef de l’Etat. Pure démagogie ! En effet, une étude de l’Insee de 2005 montre que les délocalisations ne représentaient que 10% des emplois détruits dans l’année. Mais l’on sait que l’usage de cette image forte en ce moment dans l’opinion permet de jouer sur l’émotion et de donner le sentiment de lutte contre l’injustice. Par aileurs, cet argument tiré d’une prétendue faible attractivité de la France, est fallacieux. La France serait aujourd’hui la 2ème ou la 3ème destination mondiale pour les investissements directs étrangers. On compte 22.000 filiales étrangères, employant 2,8 millions de salariés. Récemment encore, Microsoft a décidé de construire un centre de recherche à Issy-les-Moulineaux et Ikéa a choisi Fos-sur-Mer pour installer sa nouvelle plateforme logistique pour le sud de l’Europe.
L’économiste Olivier Bouba-Olga, interrogé par Libération, à la suite de l’intervention présidentielle de jeudi, déclare que la fiscalité, et en particulier la taxe professionnelle, ne joue qu’à la marge sur les choix de localisation. L’Agence française pour les investissements internationaux (Afii) nous apprend aussi que les entreprises viennent s’installer en France au vu d’autres facteurs plus déterminants comme le savoir-faire, les compétences, le tissu économique, les infrastructures, les services publics locaux, la "french way of life"...
L’économiste conclut en disant que la suppression de la taxe professionnelle n’est pas une mesure si efficace sur l’attractivité, d’autant que dans certains cas, les délocalisations sont parfaitement inévitables. Bien entendu, cela n’est pas populaire à admettre et Jospin l’apprit à ses dépens... C’est pourquoi, Sarkozy préfère mimer son volontarisme même s’il n’a aucune influence sur le cours réel des choses. Il faut reconnaître qu’il est particulièrement doué pour cet exercice. Pour les délocalisations inévitables, il vaut mieux, plutôt que de feindre l’omnipotence sur les évènements, "accompagner les gens qui perdent leur emploi. Il faut insister sur la formation et la mobilité géographique des travailleurs."
Résumons ! La suppression annoncée de la taxe professionnelle réduit davantage encore le principe de solidarité nationale par l’impôt (direct surtout) déjà très écorné par le paquet fiscal. C’est un cadeau au patronat qui ne fait pas le moindre effort de contrepartie en plafonnant les revenus exorbitants des pdg ni en remettant en cause en aucune façon le paquet fiscal. La mesure sera peu efficace et ne se justifie pas vraiment. Enfin, cela va déstabiliser les collectivités locales pour qui le produit de la taxe est la garantie du financement de leurs actions notamment de leurs services publics.
La solidarité nationale repose sur le principe de la répartition par l’impôt et elle exige un financement durable. Or, la taxe sur le carbone sera fluctuante et aléatoire. Son produit diminuera au fur et à mesure que les entreprises réduiront leurs actions polluantes sur l’environnement. Mais, surtout, rappelons-le, ce principe de pénalité ne fait plus référence à la nécessaire solidarité nationale. Solidarité nationale aujourd’hui oubliée !
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