La démission de Nicolas Hulot
Il sera beaucoup question dans les Médias de la démission de Nicolas Hulot qui marque le premier échec réel du Président Macron. Et peut-être le premier signe de délitement de sa majorité.
En premier lieu on va gloser doctement dans les médias sur sa manière assez peu orthodoxe d’annoncer son retrait et le message qu’il faut y voir : cela sentait, il est vrai, l’improvisation (comme le Canada Dry ressemble à de l'alcool ?) mais sont-ce réellement les questions posées par ses interlocuteurs Léa Salamé et Nicolas Demorand qui lui ont ouvert les yeux, qui lui ont permis de découvrir que son chemin de Damas menait à une impasse, j’en doute car il laissait apparaître depuis de longs mois son désenchantement, il geignait sur ses illusions perdues (pour peu qu’il en eût eu en se lançant dans cette aventure) lui qui avait pourtant tant de fois refusé de répondre aux appels de Nicolas Sarkozy ou plus récemment de François Hollande.
Pouvait-il, décemment et en toute conscience des réalités, imaginer un seul instant que le banquier de chez Rothschild ait pu ouvrir à la France les portes du renouveau écologique quand toutes les activités financières et économiques tournent autour d’une exploitation sans limites des ressources naturelles et que les préoccupations environnementales ne sont jamais prises en compte que dans la mesure où elles s’inscrivent dans le processus d’accroissement des profits.
La marchandisation de l’environnement est justement ce qui en limite la prise en considération et qui fait que les belles paroles ne se transforment qu’exceptionnellement en actes concrets et encore convient-il de gratter le vernis pour voir ce qui se dissimule sous la couche des bons sentiments.
Quoiqu’il en soit et bien que j’aie de la peine à croire à un geste spontané plutôt qu’à un acte dûment réfléchi, je fais crédit à Mr Hulot de son geste qui devrait en appeler d’autres : il devrait maintenant rejoindre ceux qui s'opposent réellement aux dommages collatéraux ou directs du productivisme.
Il ne serait pas seul dans ce combat où Jean-Luc Mélenchon, pour sa part productiviste repenti, a, il y a plus de dix ans déjà, jeté les bases de l’écosocialisme et de l’intérêt qu’il y aurait à changer de fond en comble les priorités de la société et d’abord les conditions de la vie sociale.
La précarité aussi bien écologique que sociale est sciemment sinon organisée du moins maintenue en l’état pour continuer à semer les germes de la discorde dans le corps social : les pauvres qui combattent d’autres pauvres – parce qu’ils sont d’une autre religion ou simplement immigrés - ouvrent toutes grandes les portes du profit pour ceux qui assistent, amusés, à la dispersion des énergies dans des luttes picrocholines.
L’émergence du Front National devenu Rassemblement National n’est rien d’autre qu’une partie de ce calcul sordide mais bien pensé qui, favorisé par une presse aux ordres du grand capital, a bâti une opposition incolore et insipide et en tout cas nullement contraire à ses desseins.
Outre que ce parti agit comme un repoussoir qui ramène finalement au bercail les brebis égarées, même son éventuel passage au pouvoir ne pourrait constituer en aucune manière un frein aux ambitions effrénées de la ploutocratie.
On le voit en Italie ou, mises à part les éructations ridicules de Salvini, élu grotesque et inculte porté au pouvoir par une partie des dégoûtés, le gouvernement est incapable de mettre en œuvre le dixième de ce qu’il proposait au choix des Italiens.
Je ne sais pas si les Italiens se contenteront longtemps de la chasse au sorcières qui leur est proposée que ce soit l’Europe communautaire ou les malheureux qui échouent sur leurs côtes après avoir échappé à mille morts.
L’écosocialisme est le fruit d’une réflexion qui a pris ses racines dans l’appel du Club de Rome en 1972, fruit d’une étude de chercheurs du MIT et sobrement intitulé « Halte à la croissance ».
Il a d’abord irrigué naturellement les associations de défense de l’environnement comme les « Amis de la terre » pour ensuite s’étendre à la société tout entière et présider à la naissance de partis écologistes un peu partout en Europe et même sur la planète. Le capitalisme – jamais en retard d’une pensée innovante – s’est aussitôt saisi de cette problématique qui voit aujourd’hui des pollueurs patentés usurper des instruments de dépollution pour tirer profit à la fois de leurs activités coupables et des moyens d’y apporter remède.
Nicolas Hulot était un homme et comme tel pas exempt de contradictions comme en est pétrie d’ailleurs la lutte pour l’écologie politique qui nous a trop souvent présenté des gens qui se sont saisis de l’argument écologique par opportunisme et qui abandonnent fort souvent leurs convictions déclarées pour le plat de lentilles que sait leur offrir le système.
C’est au moins un reproche que je ne ferai pas à Nicolas Hulot qui, assailli de questions auxquelles on ne lui permettait pas d’apporter des réponses, abandonne le confort relatif d’un ministère pour essayer de redevenir ce qu’il était : une conscience.
Et ce sera là son plus difficile combat : faire oublier ses renoncements.
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