Le changement immobile
9 mois après l’élection présidentielle, l’accouchement du changement met du temps à se produire.
Les français s’impatientent, et comment ne pas les comprendre ?
S’il est louable de défendre « le mariage pour tous », il est temps de s’interroger sur les priorités mises en place par ce nouveau gouvernement.
L’urgence n’est-elle pas pour les français le chômage, le mal logement, les écarts excessifs entre les hauts et les bas revenus ?
Ce président qui « n’aime pas les riches » ne se presse pas trop pour en faire la démonstration, et si la taxe à 75% des plus riches d’entre nous, retoquée par le Sénat, sera représentée bientôt devant l’Assemblée Nationale, elle n’est pour autant qu’une action assez symbolique ; les experts estimant qu’elle ne représente qu’1 petit milliard d’euros, alors que l’exil fiscal concernerait 800 français par an (lien) et que les estimations sur les sommes planquées dans les « paradis fiscaux » fluctuent entre 50 et 60 milliards.
On se souvient d’Hervé Falciani, cet employé de la banque HSBC, qui avait remis à la justice une liste de 6963 noms d’exilés fiscaux pour sa seule banque, la Suisse n’étant qu’un paradis fiscal parmi tant d’autres. lien
Au-delà des sanctions qui pourraient être prises, et qui représenteraient 50 milliards, il ne faut pas oublier que l’exilé fiscal garde en France une partie de son patrimoine, et si 8000 d’entre eux pourraient être soumis à l’ISF pour ces patrimoines, ils sont 7300 à bénéficier d’une niche fiscale qui les exonère de cet impôt. lien
Ce président ne devrait-il pas sanctionner d’une part les exilés, et d’autre part, supprimer cette niche fiscale ?
On essaye de comprendre les conseillers présidentiels semblant faire peu de cas des experts en économie qui disent « pour relancer la croissance, il faut augmenter le pouvoir d’achat du plus grand nombre des français, et diminuer les taxes qui amputent celui-ci ».
Joseph Stiglitz, pour qui l’austérité est la « mauvaise bonne solution », est scandalisé par le niveau inacceptable du chômage des jeunes, lesquels, lorsqu’ils trouvent enfin un emploi, c’est pour un salaire de misère. lien
Or, ce gouvernement fait le contraire, le SMIC n’a connu qu’une augmentation si dérisoire qu’il vaut mieux éviter d’en donner le montant (lien), et n’a rien fait pour empêcher la prise de bonus dans les grandes entreprises, dans lesquelles il a pourtant son mot à dire.
Tout au plus, Hollande a enfin réussi à baisser de 30% son salaire, (lien) et celui de ses ministres…mais quid de celui des députés ? des sénateurs ? Quid du CES (conseil économique et social) que beaucoup jugent inutile ? lien
Quid des sanctions appliquées aux entreprises qui délocalisent après avoir bénéficié de subventions d’état ?
C’était une promesse de campagne du candidat Hollande, et ce sont des milliards qui échappent à l’Etat, et autant de milliards pris dans les porte-monnaie déjà bien vides des citoyens lambda.
Et puis cette baisse de salaire du président et de ses ministres a largement été compensée par la décision qu’Hollande a pris de s’entourer de 31 conseillers à l’Elysée.
René Dosière, l’infatigable trublion, a pris sa calculette : 117 152,51 euros économisés chaque mois, mais 357 594,3 € mensuels seront dépensés pour payer ces 31 conseillers. lien
Si, contrairement à une rumeur, la « commission rénovation et déontologie de la vie publique » a bien travaillé bénévolement, comme l’a assuré le président de la commission Lionel Jospin (lien), il n’en reste pas moins que, s’il faut en croire le magazine Challenges, cette commission a couté aux contribuables près de 50 000 euros.
Roselyne Bachelot, célèbre pour avoir gaspillé 3 milliards d’euros pour des vaccins inutiles, a participé aux travaux de cette commission. lien
Sur la question de l’environnement, on en est toujours aux effets d’annonce, et si l’on compare la situation de la France à l’Allemagne, on ne peut que constater le gouffre qui s’est créé en 10 ans entre les 2 pays
En Allemagne, la transition énergétique est déjà largement engagée, et elle commence a produire ses premiers fruits, notamment par la création de déjà 400 000 emplois contre 40 000 emplois détruits, (lien), et alors qu’elle coutera moins de 7 milliards d’euros, (lien) à comparer avec les 10 milliards minimum que coutera l’EPR français de Flamanville (lien), et aux 50 milliards investis pour la rénovation des autres centrales nucléaires. lien
En Espagne, les éoliennes dépassent maintenant le nucléaire sur le terrain de la production énergétique. lien
En France, le nouveau président en reste aux atermoiements sur la seule centrale nucléaire qui serait fermée, celle de Fessenheim, affirmant qu’elle ne pose pas de problème de sûreté, mais qu’il serait toujours décidé à la fermer. lien
Dans son discours du Bourget, elle devait l’être immédiatement, et aujourd’hui, il évoque 2016, 2017… prenant comme argument, entre autres, le risque sismique et l’âge de la centrale.
Pourrait-il faire machine arrière sous la pression de quelques 200 ouvriers cégétistes ? lien
En tout cas, Delphine Batho et Arnaud Montebourg, la main dans la main, ont affirmé que l’atome continuerait à jouer un rôle important en France. lien
N’ont-ils pas récemment joué les VRP du nucléaire en annonçant la création d’un fonds de modernisation des entreprises nucléaires à hauteur de 133 millions d’euros ? lien
Delphine nous mènerait-elle en bateau ?
Un autre problème est crucial, celui du logement, et devant les 133 000 sans abris, dont le nombre ne cesse d’augmenter, on pourrait s’interroger sur les lenteurs que met la ministre Cécile Duflot à organiser les réquisitions.
Elle est en poste depuis mai 2012, et ce n’est que fin octobre qu’elle s’est décidée à agir, à quelques semaines des grands froids de l’hiver, n’ignorant pas que de telles mesures prennent du temps. lien
Elle prétend que les formalités sont en cours, et qu’entre les lettres recommandées envoyées aux propriétaires d’appartements vides, et le temps des décisions de justice, s’écoulent fatalement de longs mois, sauf que de nombreux bâtiments vides appartiennent à l’Etat, et que dans ce cas, il suffit à celui-ci, sans lettre recommandée, d’accepter les sans abri.
Au-delà de ça, d’après la fondation « Abbé Pierre », il y aurait 3,6 millions de personnes en situation de grande précarité, non, ou mal, logées. lien
De plus, le nombre de familles monoparentales ne cesse d’augmenter, et si en octobre 2011 elles représentaient 16 000 personnes, elles étaient 19 000 au début de l’hiver 2012. lien
Quand aux logements manquants, au-delà des polémiques qui tentent de faire la différence entre les 800 000 personnes qui manquent de logements et le nombre réel de manque de logements, il n’en reste pas moins que le problème existe. lien
Il est dû en partie aux montants prohibitifs de certains loyers provoquant leur vacance.
Le gouvernement Hollande aurait toute latitude pour agir sur celui-ci, d’une part en multipliant le nombre de logements sociaux, et d’autre part, en regardant de plus près ceux qui les occupent.
On sait que certains privilégiés, bénéficiant de bons salaires, occupent pourtant des appartements HLM.
Il y aurait 380 000 logements sociaux occupés par des nantis. lien
L’ex-président en avait conscience, il n’a rien fait et son successeur ne semble pas envisager d’agir. lien
Aujourd’hui, les permis de construire et les mises en chantier de logements neufs sont toujours en chute libre baissant de près de 20% en 2012 par rapport à l’année précédente. lien
Ce n’est pas anodin, car chacun sait que les logements neufs peuvent être une source importante, non seulement de création d’emplois, mais aussi, de baisse de la consommation d’énergie, puisque les normes actuelles imposent des isolations performantes, lesquelles génèrent de sérieuses économies d’énergie. lien
C’était l’une des grandes priorités du quinquennat de François Hollande : il avait promis de lancer la rénovation thermique d’un million de logements par an : la première année de mandat finit dans 3 petits mois, et il semble que rien ne soit encore engagé. lien
On attend toujours des nouvelles de la loi contre les licenciements boursiers, (lien) et aujourd’hui, on a seulement eu droit à une réforme du marché du travail, laquelle n’a pas fait l’unanimité, loin s’en faut, critiquée par la Cour des Comptes (lien), par F.O. et la CGT. lien
Ne parlons pas des milliards qui pourraient être bientôt gaspillés pour les grands projets inutiles comme le Lyon-Turin (30 milliards) l’Ayrault-port de Nantes (4 milliards) et d’autres projets. lien
Mais les préoccupations du nouveau président sont manifestement assez éloignées des promesses essentielles de campagne qu’il avait présentées lors de son discours du Bourget.
Aujourd’hui, c’est le « mariage pour tous », la guerre au Mali, dont la justification a des raisons économiques évidentes. lien
Demain ça sera « le cumul des mandats », ou la suppression des éthylotest obligatoires, le droit de vote des étrangers dans des élections locales, réformes bienvenues, mais loin d’être la priorité des français.
Comme dit parfois mon vieil ami africain : « quand les idiots dirigent des aveugles, ça finit souvent par un accident ».
L’image illustrant l’article provient de « impots-economie.com »
Merci aux internautes de leur aide précieuse.
Olivier Cabanel
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