Martine Aubry, le retour
Portée par sa large victoire à Lille (66 % au second tour), Martine Aubry réinvestit la scène nationale. L’ancien ministre du Travail veut tirer la substantifique moelle du laboratoire lillois pour en faire un mode de gouvernance applicable au niveau national. Sorti de sa torpeur, le rouleau compresseur Aubry est en marche. Le PS est prévenu, il va falloir compter avec elle.
A l’occasion de l’émission Le Franc-parler (FranceInter/I-télé/LeMonde) lundi 17 mars, les auditeurs et surtout les spectateurs ont pu découvrir une Martine Aubry new look, à la féminité beaucoup plus soignée, qui n’est pas sans rappeler... une certaine Ségolène Royal.
Passé la forme, c’est sur le fond que l’ancien ministre surprend le plus. Personnalité controversée, ne donnant pas dans la dentelle, la maire de Lille a invité le PS à jouer collectif et à travailler. “Nos valeurs n’ont jamais été autant d’actualité, même si certains en ont douté. Nous devons nous mettre autour de la table, remonter nos manches, et quand nous aurons préparé notre projet, notre intelligence collective choisira le meilleur ou la meilleure. Je le dis non pas parce que j’ai des ambitions cachées, mais parce que (mon avenir au PS), je n’en sais rien”.
Lorsqu’elle déclare donner la priorité au “projet” des socialistes plutôt qu’au choix d’un dirigeant, jugeant que se déclarer candidate à la succession de François Hollande serait aujourd’hui “la pire des choses”, c’est immanquablement le contraire que l’on retient.
Pour Martine Aubry, l’échec du PS aux dernières présidentielles est avant tout lié à l’absence de mise en avant des valeurs fondamentales de la gauche : “Nous avons eu l’impression qu’il valait mieux suivre les Français dans ce qui pouvait leur plaire plutôt que de leur proposer une vision de notre société. Et, par moment, nous avons eu des doutes sur le fait que nos valeurs étaient vraiment ce qu’on attendait”.
Sans le dire ouvertement, c’est une attaque en règle contre Ségolène Royal qui avait fait le pari inverse en s’exonérant à de multiples reprises des clivages traditionnels gauche-droite. “La stratégie qui était la sienne, à l’évidence, n’est pas celle qui a convaincu les Français”, n’a pu s’empêcher de glisser Mme Aubry.
Un mauvais choix répété selon elle pour les municipales avec la proposition de Ségolène Royal d’alliance systématique avec le MoDem. “Je n’étais pas d’accord pour qu’on envisage systématiquement l’alliance avec le MoDem.” “Je ne l’aurais jamais fait avec le MoDem à Bordeaux, sans doute avec difficulté à Paris (...)”. Reprenant l’exemple lillois, Martine Aubry a expliqué que son alliance locale avec le parti de François Bayrou avait été permise par des prises de positions de celui-ci antérieures aux élections.
Grisée par sa victoire aux municipales, Martine Aubry voit la vie en Lille. L’édile a mis en avant la “Lille touch”, un art de vivre à la lilloise marqué par un dynamisme et une volonté de vivre ensemble.
La fille de Jacques Delors voit dans les collectivités locales un contrepouvoir qui doit amortir la dureté de la vie à l’image de la disposition prise par sa commune de diviser par deux le prix des cantines municipales. Concernant la politique du gouvernement, elle s’est déclarée choquée par les propos de François Fillon selon lesquels les Français veulent plus de réformes. “Les Français veulent des réformes sous réserves qu’elles soient justes et acceptées”, a-t-elle rétorqué.
Martine Aubry a cependant été rattrapée par son vieux travers de donneuse de leçons. Celle qu’au PS les mauvaises langues surnommaient la “mèremptoire” a indiqué “qu’il faut plus de justice et une autre façon de faire de la politique”. La mère des 35 heures a opposé la politique politicienne à “une politique de terrain ou plutôt de conviction”. Autrement dit, la sienne.
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