Mollande, terre de mirages
Les vœux présidentiels ont été l’occasion de constater le gouffre béant qui s’est creusé entre les promesses et la réalité…
Des vœux en forme de mirage...
Le mirage est ce phénomène visuel qui fait que des objets que nous croyons voir s’éloignent au fur et à mesure que nous nous en approchons…tout comme les nouvelles promesses hollandaises.
En effet, en affichant une exaspération face à ces impôts qui nous envahissent chaque jour un peu plus, mais en appliquant dès le premier janvier un nouveau taux de taxe, l’indignation présidentielle a la couleur d’une provocation…d’autant que cette taxe devrait servir à financer la baisse des charges des entreprises. lien
Comment ne pas trouver contradictoire l’aveu du chef de l’Etat concernant « les impôts devenus lourds, trop lourds », tout en les conservant ?
Adepte de la méthode Coué, sachant bien que le chômage perdure, que le pouvoir d’achat est en berne, il n’hésite pas à déclarer : « les résultats sont forcément longs à apparaître… mais ils sont là »…mais où ?
Alors bien sur, contre toute attente, il continue de proposer : « moins de charges sur le travail…moins de contraintes sur les activités des entreprises », espérant « plus d’embauches et plus de dialogue social » (lien) mais quels seront les sacrifices que les travailleurs devront faire, afin d’obtenir des entrepreneurs « plus d’embauches, et plus de dialogue social » ?
Une enquête récente (le grand incendie/Le Monde) évoque qu’aujourd’hui, une personne se suicide par le feu tous les 15 jours en France, pour cause en grande partie de mal-être au travail. lien
C’était sur l’antenne de France Culture, le 1 janvier 2014, (les Matins) que l’on pouvait entendre le psychiatre Christophe Dejours, dans une émission consacrée à la souffrance dans le monde du travail. lien
Evoquant « l’évaluation individualisée des performances » qui s’est généralisée en quelques années, modifiant le rapport des individus entre eux, créant la concurrence entre des services, les différents départements de chaque entreprise, mais aussi directement entre collègues de travail, qui finalement se considèrent comme des adversaires, voire des ennemis, et qui, pour être les meilleurs, n’hésitent pas à brader la qualité de leur travail, au dépens de l’amitié entre confrères.
Il cite aussi l’exemple d’une chaîne de montage automobile ou l’ouvrier qui n’aurait pas signalé une erreur commise sera finalement retrouvé grâce à l’informatique.
Ce contrôle, autrefois mené par la hiérarchie, l’est maintenant par l’ordinateur, sorte de boite noire, de mouchard, mettant en place un système dans lequel la solidarité, la prévenance, ont fondu, installant dans le monde du travail, la solitude, et la peur.
Dans les « open space », les employés ne se parlent plus, et à quelques mètres les uns des autres, ils communiquent par mail…aujourd’hui, ils sont prêts à tout, quitte à disqualifier l’autre, afin de gravir les échelons, ce qui permet à la direction de contrôler isolément chaque individu, en cassant le collectif, mais aussi d’empêcher la coopération dans la lutte, l’éventuelle contestation.
Christophe Dejours explique aussi que, pour éviter la fragilisation d’un employé compétent devenu contremaitre, cette même direction préfère le remplacer par un énarque, ignorant tout du travail, seulement qualifié pour la gestion du travail, ajoutant, ce qui est mesuré aujourd’hui, dans le public, comme dans le privé, ce n’est plus la qualité du travail, mais le nombre de dossiers traités. lien
Mais revenons aux vœux présidentiels.
François Hollande évoque aussi de nécessaires économies, mais quid des rémunérations perçues dans les 38 cabinets ministériels en 2013 et qui se sont monté à près de 85 millions d’euros ? (lien) et ce n’est qu’une paille par rapport aux économies réalisables qui se montent au moins à 90 milliards. lien
Le moment peut-être de choisir une autre voie, sur les conseils d’Ariane Mnouchkine qui, lors de ses vœux a encouragé ses concitoyens à prendre les rênes du pouvoir, sur l’air de « l’Etat c’est nous ». lien
Devant une démocratie décidément en panne, puisque le pouvoir commande des rapports sans en tenir compte, consulte des experts, sans pour autant les écouter, n’est-il pas en effet le moment de contester des décisions injustes, comme le font déjà certains socialistes, (lien) et sur les conseils de Stéphane Hessel, de rentrer en résistance.
Entrer en résistance, c’est d’abord désobéir, une désobéissance éthique, légitime (lien) surtout lorsque les décisions prises par le gouvernement ne sont pas compatibles avec les exigences citoyennes. lien
Sur le chapitre des grands travaux inutiles, le chantier de la résistance à ceux-ci s’est ouvert et un petit livre noir a été édité en novembre 2013 afin d’en dresser la liste, les enjeux, et d’en exposer les critiques. lien
Du 1er au 4 mai 2014, aura lieu à Rosia Montana, en Roumanie, le 4ème forum contre les grands projets imposés inutiles. lien
A Notre-Dame-des-Landes, la mobilisation ne baisse pas les bras devant la décision stupide de lancer, dès le début de l’année, les travaux pour cet aéroport, qui se veut, sans logique, international. lien
Rendez vous est donné à tous les citoyens le 22 février, lors d’une grande manif à Nantes. lien
Dans le cadre du chantier Lyon-Turin, les opposants italiens et français ne baissent pas les bras non plus : en Italie, soutenus par le « mouvement 5 étoiles », largement implanté dans le pays grâce aux dernières élections, et maintenant rejoints par le « Mouvement des Fourches », les opposants n’ont pas dit leur dernier mot.
En France, la mobilisation a toujours été plus modeste, mais n’a pas pour autant baissé les bras, tant il est vrai que la logique n’est pas toujours portée par le plus grand nombre.
Récemment, plus de 1000 opposants français se sont cotisés afin de donner mandat à un avocat capable d’ester en Conseil d’Etat, afin de déclarer nulle et non advenue, la décision gouvernementale d’acter le projet.
Dans la même logique, 13 communes ont elles aussi choisi un avocat ayant les mêmes compétences.
Entre citoyens et élus, il fallait réunir 20 000 euros… c’est aujourd’hui chose faite, et le recours lancé est suspensif, bloquant l’ouverture du chantier tant que l’affaire n’aura pas été jugée en Conseil d’Etat. lien
L’affaire est d’importance, il s’agit d’empêcher le gaspillage de près de 30 milliards d’euros, s’appuyant sur le rapport Duron (mobilité 21) lequel préconisait de s’intéresser d’abord à la modernisation de l’existant, avant d’engager ce chantier pharaonique, conforté en cela par la Cour des Comptes elle-même, qui ne disait pas être chose, affirmant que les prévisions de trafic étaient surévaluées, et le cout du chantier largement sous-évalué. lien
Dans ses vœux 2014, Hollande a tenté de rassurer ses alliés verts en leur assurant qu’il allait lancer la « transition énergétique », mais comment le croire alors qu’en même temps, il va quémander des finances auprès des hommes d’affaire saoudiens, histoire justement de promouvoir les activités nucléaires du pays ? lien
Et puis, il ne cesse de faire à l’étranger la promotion de notre expérience en matière nucléaire (lien) tout comme son premier ministre lorsqu’il se rend en Chine. lien
D’ailleurs si on y regarde de plus près, et s’il faut en croire le président de l’ASN (autorité de sureté nucléaire), Pierre-Franck Chevet, il faut au moins 5 ans pour arrêter l’activité d’un réacteur, ce qui signifie qu’il parait difficile au Président de la République de tenir sa promesse de fermeture de Fessenheim d’ici à fin 2016.
Mais au début de cette nouvelle année, des voix s’élèvent en affirmant qu’il faut « positiver », que tout n’a pas été un échec, évoquant par exemple le mariage pour tous, ou la loi contre le cumul des mandats.
Cette loi promise par Hollande, va finalement l’emporter…le Sénat n’en a pas voulu, mais l’Assemblée nationale aura le dernier mot…sauf que cette loi n’entrera en vigueur qu’en ….2017.
On peut se poser légitimement la question : pourquoi voter une loi en 2014 qui ne sera appliquée qu’en 2017 ?
Il n’est pas impossible d’imaginer qu’à cette date, le pouvoir change de main, et que la loi ne soit finalement abandonnée.
Les bonnes nouvelles sont rares, et s’il est vrai que finalement la nouvelle taxe à 75% en guise de contribution exceptionnelle de solidarité, et l’abaissement du quotient familial ont été validés par le conseil constitutionnel, ce même conseil a retoqué diverses mesures : du plafonnement de l’ISF, à la modification de l’imposition des plus values enregistrées lors de la cession de terrains à bâtir, en passant par le régime fiscal dérogatoire appliqué aux corses... lien
Alors il reste bien sur, dans les vœux présidentiels, le « pacte de responsabilité avec les entreprises », mais quelle crédibilité peut-on lui accorder ?
2014 vient de commencer…la déception d’une grande majorité de français, à la hauteur des espérances que le discours du Bourget avait fait naître, n’est pas retombée, et comme dit mon vieil ami africain : « la nuit dure longtemps, mais le jour finit toujours par arriver ».
L’image illustrant l’article vient de ma page facebook
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
Ce court sketch de Raymond Devos est d’actualité
Articles anciens
La sauce hollandaise ne prend pas
Le discours du Bourget partie 1-partie 2
118 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON