• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Politique > Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de (...)

Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de crabes

Le large échec présidentiel de Ségolène Royal du 6 mai 2007 a plongé le Parti socialiste une nouvelle fois dans un vide de leadership étonnant pour un parti de gouvernement. Un congrès tentera de répondre à cet enjeu historique.


 

Le futur congrès du PS qui se déroulera à Reims du 14 au 16 novembre 2008 aura pour but de choisir un nouveau premier secrétaire. L’actuel, François Hollande, en place depuis 1997, soit plus d’une décennie, ce qui est le record de longévité à ce poste depuis la création du PS (voir en fin d’article), a annoncé en 2007 qu’il quitterait ses fonctions après les municipales de 2008 et a tout fait pour retarder le congrès à l’automne.


Un parti de comités Théodule

Diriger le Parti socialiste est un épouvantable travail, car il est composé de nombreux courants idéologiquement très antagonistes (comme a pu le montrer la campagne référendaire de 2005), mais aussi de nombreuses écuries ou sous-écuries présidentielles.

Un parti prétendument laïc qui regorgerait de mille et une chapelles, comme c’est étrange !

Car le PS compte en effet des myriades de chapelles dont Wikipédia cite la principales : 17-Novembre, Réformisme et rénovation, Gauche socialiste, Nouvelle voix, Réformer, Socialisme et démocratie, Utopia, Nouveau parti socialiste, Nouvelle gauche, Alternative socialiste, Renouveau socialiste européen, Agir pour l’égalité, Sauvons le parti socialiste, Trait d’union, Ambition socialiste, Pour rassembler la gauche (issu de feu Jean Poperen), Rénover maintenant, Forces militantes, Démocratie et socialisme (chapelle différente de Socialisme et démocratie)…

Une étape dans la préservation de l’unité du PS a été franchie avec l’adoption du projet de nouvelle déclaration de principes, une sorte de charte des valeurs qui ne tranche sur aucun enjeu important et qui reste résolument tournée vers le passé et la tradition historique du socialisme français.


Le rôle du futur premier secrétaire : coach ou leader ?

La première question qui revient sans cesse est : le future premier secrétaire du PS sera-t-il obligatoirement le prochain candidat socialiste en 2012 contre probablement de nouveau Nicolas Sarkozy et François Bayrou ?

De la réponse à la première question déterminera le choix de la personnalité qui dirigera le PS. La plupart des éléphants et des sous-éléphants du PS répondent généralement non, ce qui leur permettrait de gagner du temps (une course de lenteur qui a déjà montré ses preuves en 2007).


Ségolène Royal se met à nu

Forte de ses 16 790 440 voix obtenues le 6 mai 2007 (un record pour un candidat socialiste, François Mitterrand n’avait fait que 16 704 279 voix le 8 mai 1988, mais très insuffisant pour gagner), Ségolène Royal a annoncé le 16 mai 2008 sa candidature au poste de premier secrétaire du PS et sa prochaine candidature à l’élection présidentielle de 2012.

En ce sens, elle a eu raison. Elle a pris ainsi tous les éléphants de vitesse, et plus particulièrement Bertrand Delanoë, qui a le vent en poupe au sein des militants socialistes, lui qui sort justement un bouquin ce 22 mai 2008 et réunira ses laudateurs le 24 mai 2008. De plus, elle se prévaut du soutien de 25 fédérations départementales.

Elle a eu raison car en annonçant ses nouvelles ambitions, elle est cohérente avec la logique de transparence. Elle imite en cela Nicolas Sarkozy qui a fait de même en 2004. Enfin, elle a raison de son point de vue car l’incapacité à obtenir l’engagement massif de l’appareil du PS (portant dirigé par son ex-compagnon) derrière elle l’avait beaucoup handicapée en 2007.


Un avenir très incertain…

Beaucoup de ses proches l’avaient toutefois dissuadée d’aller trop vite, craignant un échec qui stopperait définitivement sa lancée pour 2012.

Car, selon toute vraisemblance, l’hypothèse Bertrand Delanoë (qui n’a encore pas confirmé sa candidature) a le vent en poupe et son but serait justement de faire barrage à Ségolène Royal à la tête du PS, quitte à choisir quelqu’un d’autre pour la candidature de 2012 (selon certains de ses soutiens, Bertrand Delanoë, bien trop maire de Paris, n’aurait qu’une faible légitimité et crédibilité nationales pour prétendre participer à l’élection présidentielle).

Les autres hypothèses, c’est de faire comme Lionel Jospin en 1997 : mettre à la tête du PS un "petit jeune" pour éviter de voir un rival l’enquiquiner. Au départ, il avait songé à son ami Daniel Vaillant, mais comme ce dernier tenait beaucoup à être ministre, il l’a donc remplacé par François Hollande.

Les réactions à la sortie du bois de Ségolène Royal (qui, pourtant, l’avant-veille, le 14 au 2008, expliquait : « Je ne dirai pas que je suis candidate au poste de premier secrétaire. Ce serait me ramener dans le chaudron des candidats. ») ont été très négatives.

Quelques exemples :


Jean-Christophe Cambadélis : « On est en train de transformer le Parti socialiste en une pétaudière. »

François Lamy (proche de Martine Aubry) : « Tout ceci me semble un peu désordonné, un peu incohérent. »

Jack Lang : « On aimerait que l’heure soit davantage à l’effervescence intellectuelle et à l’imagination collective plutôt qu’à l’affrontement des ego. »

Ou encore Pierre Moscovici qui considère que le PS « ne doit pas désigner son candidat à la présidentielle ou le pré-désigner dès 2008 ».

Alors, reprenons un peu les choses.


Qui sont les éléphants encore en course ?

Ségolène Royal, bien sûr, Bertrand Delanoë, mais aussi Martine Aubry, redevenue populaire avec sa belle victoire à Lille en mars 2008, Laurent Fabius qui y pense depuis 1984, François Hollande qui se voyait déjà Premier ministre en juin 2002, et Dominique Strauss-Kahn.

Bien que directeur général du FMI jusqu’en 2012 et, donc, très éloigné des aléas de la vie politique française, ce dernier a réaffirmé ce 18 mai 2008 ses ambitions à tout hasard. Notons que son prédécesseur au FMI (du 1er mai 2000 au 4 mars 2004), Horst Köhler, devenait le 1er juillet 2004 le président de la République fédérale d’Allemagne.

Jack Lang (soumis à la tentation sarkozyenne) et Henri Emmanuelli ne semblent plus envisager de concourir.


Qui sont les éléphanteaux qui souhaiteraient entrer dans le panier de crabes ?

On les dit jeunes, mais, généralement, ils sont proches de la cinquantaine (voire plus) et ont déjà une bonne vingtaine d’années d’activités politiques derrière eux… ce qui est "neuf" par rapport aux éléphants, bien sûr. Et aucune femme à l’horizon.

Le premier à avoir montré ses crocs est le député-maire d’Évry, Manuel Valls, jospiniste, qui, dès le 6 mai 2007, a estimé qu’il fallait changer de direction au PS. Considéré comme un socialiste de droite car ayant fait de la sécurité dans sa ville une priorité, Manuels Valls paraissait une bien rare voix dans l’opposition au début du mandat de Nicolas Sarkozy.

Un autre qui roule pour lui et qui s’est émancipé de Ségolène Royal, Julien Dray, connaît très bien l’appareil et n’hésite plus à montrer ses ambitions.

Beaucoup d’autres seconds couteaux sont envisageables, mais surtout pour tenir la place chaude à leur mentor (ou pas) : Pierre Moscovici, Jean-Marie Le Guen ou Jean-Christophe Cambadélis pour Dominique Strauss-Kahn, Claude Bartolone pour Laurent Fabius, Benoît Hamon ou Vincent Peillon, Arnaud Montebourg, Jean-Luc Mélenchon…


Un jeu triangulaire

Pourtant, le paysage se clarifie petit à petit : « les scenarii à 22 bandes se réduisent ».

Trois pôles se dessineraient dans la préparation du congrès : celui mené par Ségolène Royal, celui autour de Bertrand Delanoë et, enfin, tous ceux qui commencent à s’inquiéter que le débat soit uniquement focalisé sur la rivalité tant médiatisée entre les deux premiers.

Des personnes comme Benoît Hamon craignent en effet le pire de la rivalité Royal-Delanoë : « Deux trains sont lancés à pleine vitesse, deux écuries veulent prendre le PS. Il y a un vrai risque qu’il n’y ait pas de différence de ligne », craignant un « congrès de déchirure ».

Les strauss-kahniens ont décidé de sortir de cette logique le 18 mai 2008 en faisant préparer par Pierre Moscovici une motion à laquelle seront associés les proches d’Arnaud Montebourg et ceux de Martine Aubry. L’ex-rocardien Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d’Île-de-France, explique ainsi : « On y va. On se compte avec Aubry et Montebourg et on n’exclut pas de contacter Fabius ». Ils vaudraient à la bourse socialiste environ 30 %, de quoi être incontournables.


Le scénario probable

Il y aura sans doute trois principaux candidats pour le poste de premier secrétaire du PS.

Bertrand Delanoë, le favori, qui aurait tort de ne pas en profiter, Ségolène Royal dont la popularité fluctue, mais qui a déjà fait ses preuves (Lionel Jospin a fait nettement moins bien qu’elle à l’élection présidentielle) et sans doute Martine Aubry qui préfigurerait la candidature de Dominique Strauss-Kahn à l’élection présidentielle.

Dans la dernière hypothèse (Martine Aubry première secrétaire et Dominique Strauss-Kahn candidat), ce serait la victoire des héritiers de Lionel Jospin face entre autres à l’ami fidèle de Lionel Jospin. En quelque sorte, le jospinisme resterait la valeur la plus sûre du TSS : "tout sauf Ségolène".

Dans tout cela, que deviendront François Hollande, Laurent Fabius voire Jean-Luc Mélenchon ?

Là, franchement, je donne ma langue au chat.

L’élection du premier secrétaire du PS est prévue le 20 novembre 2008.

Rendez-vous dans six mois.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (22 mai 2008)


Pour aller plus loin :

Les réformes en cours du fonctionnement interne du PS (10 mai 2008).

Calendrier du congrès ordinaire du PS à Reims (21 mai 2008).


Succession des secrétaires généraux de la SFIO depuis la création de la SFIO :

1905 : Louis Dubreuilh.
1918 : Ludovic-Oscar Frossard.
1920 : Paul Faure (jusqu’à 1940).
1943 : Daniel Mayer.
1946 : Guy Mollet (jusqu’à 1969).

Succession des premiers secrétaires du PS depuis la création du PS :

1969 : Alain Savary.
1971 : François Mitterrand.
1981 : Lionel Jospin.
1988 : Pierre Mauroy.
1992 : Laurent Fabius.
1993 : Michel Rocard.
1994 : Henri Emmanuelli.
1995 : Lionel Jospin.
1997 : François Hollande.
2008 : XY







Documents joints à cet article

Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de crabes Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de crabes Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de crabes Parti théorique français (3) : quand les éléphants pondent dans un nid de crabes

Moyenne des avis sur cet article :  4.5/5   (8 votes)




Réagissez à l'article

11 réactions à cet article    


  • tvargentine.com lerma 22 mai 2008 19:18

    Tiens,mon article sur Ségolene ROYAL n’a pas été publié ?


    • Laurent_K 23 mai 2008 14:28

      Parce que Sarkozy arrive à inverser la tendance ? Première nouvelle.


    • Aube Aube 22 mai 2008 22:24

      Vous avez rédigé un excellent article et je vous en remercie.


      • cybitnap cybitnap 22 mai 2008 23:38

        Le PS est bien mal barré. Ce parti aurait dû se réformer bien plus tôt y a 10 ans et surtout arrêter de propager une idéologie d’un autre âge. A trop vouloir faire le grand écart en essayant de contenter de manière démagogique tout le monde, il se retrouve aujourd’hui dans une situation très inconfortable.

        A trop faire copain-copain avec les extremistes de gauche, le PS a désormais un Besancenot qui monte en puissance. Et de l’autre côté, y a une aile social-libérale plus réaliste qui emerge avec à sa droite un Bayrou qui compte bien attirer les réformistes de Gauche.


        • jaja jaja 23 mai 2008 11:55

          @ cybitnap,

          "A trop faire copain-copain avec les extremistes de gauche, le PS a désormais un Besancenot qui monte en puissance."

          Le PS a surtout fait copain-copain avec les forces du capital financier jusqu’à déléguer l’un des siens, Strauss-Kanh, à la tête du FMI, cette force de frappe meurtrière qui a affamé les peuples du Sud au profit des puissances occidentales menées par l’impérialisme américain...

          Le PS n’est pas un parti de gauche... Qu’il se revendique aujourd’hui du libéralisme par la bouche d’un Delanoé, par exemple, n’est qu’une clarification tardive...

          Espérons que de moins en moins de gens ne leur serviront de gogos en votant pour eux... La nature a horreur du vide et inévitablement une nouvelle gauche verra le jour...

          Anticapitaliste et pour l’égalité sociale entre toutes et tous...


          • Laurent_K 23 mai 2008 14:31

            Il est clair que le PS est le meilleur soutien de Sarkozy avec ses querelles sans intérêt. Ils se battent pour des détail -la pseudo réforme constitutinnelle- mais laisse passer voire votent des énormité -la constitution européenne:traité de Lisbonne-.

            Aucune chance que je revote pour ces types.


          • Laurent_K 23 mai 2008 14:42

            Au fait, vous savez quel était le parti qui a gagné les dernières élections ?

            Celui de l’abstention.

            Le grand perdant est l’UMPS sauf qu’il continue de détenir tous les leviers du pouvoir. Et ne fait rien pour changer. Ni à l’Union des Malhonnêtes au Pouvoir, ni au Parti des Saligauds.

            La France va de plus en plus ressembler à une cocotte minute qu’on chauffe en s’assurant bien qu’il n’y ait aucun moyen de faire sortir la pression. Elle est solide la cocotte mais ça ne durera pas éternellement.

            Désespérant et inquiétant.

             


          • dom y loulou dom 23 mai 2008 13:36

            bien dit jaja... et très bon article...

            qu’ont-ils donc à croire leurs visages plus importants que leurs idées ? Car au milieu de tout ce tintamarre... comptent-ils ne rien dire et ne rien faire jusqu’en 2012 ?

            Et ils espèrent ainsi gagner la présidentielle ? Pour quoi faire ?

            Pour ne rien dire et ne rien faire ? 


            • jaja jaja 23 mai 2008 14:21

              @ Hihan,

              "Vous auriez choisit dsk la gauche serait au pouvoir parceque la droite lui aurrait fait confiance"

              Dans cette phrase vous avez fait deux fautes (je ne parle pas d’orthographe)

              1) Si DSK était au pouvoir, la droite serait au pouvoir !

              2) La droite lui a déja fait confiance en lui accordant la direction du FMI, inutile d’utiliser le conditionnel...

               

              "jaja et toi n avez pas compris la realite du monde..." "je viens voir votre etat mental tous les jours et ca m amuse, car vous etes des clowns"

              Je doute qu’un attardé y comprenne quoi que ce soit en psychopathologie. L’idiot se moque toujours des idées des autres que, bien sûr, il ne comprend pas. Que lui répondre qu’il puisse entendre ?

               

               

               


              • Laurent_K 23 mai 2008 15:35

                "dsk de droite ...vous l avez mis au courant au moins ?"

                Il doit déjà être au courant vous savez. Ce sont les sympathisants socialistes qui ne l’ont pas encore forcément accepté (ou les gens de droite qui le trouvent très bien et s’étonnent que les mêmes raisons qui le leur font trouver très bien le fassent détester par les gens de gauche).


              • Voltaire Voltaire 25 mai 2008 23:30

                Le jeu de poker menteur qui se déroule actuellement à la tête du PS est loin d’être terminé. François Holande pèsera de tout son poids pour qu’un candidat de second rang devienne premier secrétaire, afin de pouvoir se présenter en 2012. A ce petit jeu, Moscovici est bien placé, mais manque de réseaux, ce qui pourrait plutôt profiter à Dray. Le risque pour le PS est de se retrouver en Novembre avec trois motions de poids égales, celles de Royal, Delanoë et Dray ou d’un autre challenger, à moins qu’il en reste plus d’un. Dans ce cas, le futur leader sera sans légitimité et la guerre des chefs se poursuivra jusqu’en 2011.

                De toute façon, le problème du PS est son hétérogénéité idéologique. Tout compromis est forcémment bancale et « mou », et en peut apparaitre comme une vision alternative claire pour les citoyens ; Faute de clarification, le PS ne peut compter que sur un échec du pouvoir en place pour gagner. Pire, faute de trancher dans le vif, le PS donne à Nicolas Sarkozy le pouvoir d’influencer le choix de son futur opposant, par média interposé, comme il l’avait fait en faveur de Ségolène Royal en 2007. Car en l’absence d’une personalité qui se dégage franchement, ce seront bien les média qui pourront faire pencher la balance du petit plus nécessaire pour l’emporter. Si cet échec est confirmé pour le PS, il ouvrira la route à une réélection du présdent actuel, sauf si l’écueil Bayrou se présente de nouveau de façon crédible.

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès