Pour Barroso, Hitler plutôt qu’un Front Populaire ?
On se frotte encore les yeux pour y croire. Le président de la commission européenne déclare, lors d’un point presse du 24 juin, que les « souverainistes de gauche ont exactement le même discours que l’extrême droite » . Ainsi affirme-t-il que toutes les oppositions à la politique financière qu’il entend mener se valent et sont à ranger dans le même sac, celui du fascisme. Donc, pour José Manuel Barroso :
- la sécurité sociale c’est du fascisme !
- La retraite par répartition c’est du fascisme !
- Le droit du travail c’est du fascisme !
- Le service public de santé c’est du fascisme !
- Le service public d’éducation c’est du fascisme !
- Une télévision publique c’est du fascisme !
- Un smic européen décent c’est du fascisme !
- Une politique industrielle écologique favorisant l’emploi plutôt que les actionnaires c’est du fascisme !
Mais cessons là l’énumération. Et n’insultons pas d’avantage l’intelligence José Manuel Barroso. Ne croyons pas qu’il assimile réellement Blum à Hitler. Mais voyons bien plus comment il manipule les concepts politiques dans le seul et unique but de se protéger lui, ses amis, son système.
Les extrêmes droites d’Europe sont nationalistes et xénophobes. Les gauches alternatives européennes sont internationalistes et ouvertes au monde. Ce détail échapperait-il à José Manuel Barroso ? Certainement pas. Il sent bien, José Manuel Barroso, le souffle populaire qui n’en peux plus de son Europe libérale et financière où tout devient marchand, à commencer par les hommes eux mêmes. Il sait que ce souffle peut donner un Front des Peuples. Une grande contestation populaire, progressiste qui ferait s’écrouler son monde et avec lui ses alliés de Goldman Sachs dont le président et ami de la BCE, Mario Draghi, est un pur produit. Alors il ne faut surtout pas que les esprits critiques, les classes moyennes, les classes supérieures se mettent à douter, se mettent à envisager d’épouser la cause de la solidarité internationale des peuples d’Europe. Il convient d’ériger la digue suprême, la digue absolue. Affirmer que l’opposition à sa politique est nécessairement, obligatoirement, indéniablement l’expression d’un fascisme larvé. Ainsi, vous vous levez un matin convaincu d’être un socialiste qui marche dans les pas de Blum, et vous voilà le soir venu être un adepte d’Hitler. Il cherche ainsi à vous faire marcher droit dans ses pas à lui, c’est tout de même moins grave. La technique culpabilisante qu’utilise José Manuel Barroso n’est pas qu’insultante. Elle jette dans les bras du fascisme la contestation à sa politique puisque finalement Blum c’est Hitler, Hitler c’est Blum. Avec sa propagande sortie des devinettes carambar, le fascisme n’est pas la détestation absolue. Le fascisme n’est qu’une autre politique possible parmi d’autres. Il perd son caractère funeste.
Barroso, en assimilant Hitler à Blum, fait la promotion d’Hitler. Ce détail échapperait-il à José Manuel Barroso ? Certainement pas. Car il devine qu’au bout du bout les mouvements socialistes mettent à mal les intérêts des oligarques financiers. Alors que les dictateurs fascistes en sont toujours les ardents défenseurs. Devons nous en faire une liste ? Pinochet, Franco, pas vraiment des amis du peuple, mais toujours amis fidèles de la finance. Et que dire de l’Estado Novo, politique fasciste et dictatoriale que soutenaient activement les riches propriétaires, les riches banquiers et les riches industriels portugais. Visiblement, pour José Manuel Barroso, Salazar était l’équivalent de ces femmes et de ces hommes qui feront la révolution des œillets et provoqueront sa chute. Cette histoire, José Manuel Barroso la connait, nécessairement, obligatoirement, indéniablement. Il est le fruit de cette libération portugaise contre le fascisme portugais. Autre preuve donc qu’il instrumentalise le fascisme pour faire la propagande de son Europe marchande.
En France, le véritable bénéficiaire de ses propos provocateurs ne sera pas le Front de Gauche mais le Front National. Et il le sait. Il fait mine de renvoyer dos à dos deux nationalismes en évoquant un souverainisme de gauche. Mais il ne peut pas y avoir de souverainisme à gauche. Parce qu’à gauche on déteste les souverains et toutes notions de souverainismes. Il s’adresse donc à celles et ceux tentés par le souverainisme d’extrême droite en leur signifiant qu’il n’est pas moins respectable que le socialisme. Il sait que derrière les leaders souverainistes nationalistes d’extrême droite français se cachent toujours de fervents admirateurs du capitalisme sauvage, de la dérégulation, du libre échangisme sans loi. Il sait que ces leaders d’extrême droite vivent dans de riches châteaux et qu’ils se transmettent le pouvoir de père en fille, de fille en nièce, d’épouse à époux. Il sait qu’avec eux il n’a rien à craindre. Il sait qu’avec eux les valises remplies d’argent en quête d’évasion continueront à se balader de banques en banques.
En réalité Barroso sait que Blum n’a strictement rien à voir avec Hitler. Mais il a tout intérêt à faire croire que c’est pareil. Parce que pour le monde de la finance, une bonne dictature sera toujours préférable à une vieille démocratie en Europe. Parce que pour José Manuel Barroso un Hitler sera toujours préférable à un Front Populaire.
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