RGPP : et si on allait voir ce qui se cache derrière ?
De partout où il y a un mouvement social, on entend parler de la RGPP. Mais ça sort d’où ? Plutôt qu’une protestation frontale vouée à l’échec, puisque les intérêts financiers ont lavé le cerveau des Français pour qu’ils croient que les réformes c’est le bon sens, allons voir ce qui se cache derrière la RGPP pour attaquer le mal à la racine.
Vous avez cru que les suppressions de tribunaux, de postes d’enseignants, d’hôpitaux, de bases militaires, etc. étaient des réformes menées par le gouvernement ? Eh bien voilà encore un mythe qui tombe : les 336 mesures issues de la RGPP sont l’œuvre de la finance anglo-saxonne. Si « l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie » [1] était considérée pendant longtemps comme une condition de la liberté et de l’indépendance, nous nous devons de dénoncer aujourd’hui une oligarchie financière qui s’est immiscée jusque dans les cabinets de la République.
Dette et terreur budgétaire
D’après le ministère de la Fonction publique ainsi que les services du Premier Ministre, la Révision générale des politiques publiques (RGPP), lancée en juin 2007 par celui qui venait tout juste de prendre sa fonction de président de la République, émane directement des recommandations du rapport Pébereau sur la dette, commandé en 2005 par l’ancien PDG de l’Economie, Thierry Breton.
Vous vous rappelez sûrement de cette campagne de battage médiatique qui commença alors en décembre 2005, à 15 mois des élections présidentielles, et qui avait pour but de « préparer l’opinion à une sévère cure d’austérité », comme le disait sans gêne Le Figaro de l’époque.
Michel Pébereau n’est pas seulement le président de BNP-Paribas, mais il dirige aussi l’Institut Aspen (l’un des nombreux groupes de « réflexion » de l’oligarchie financière internationale) et l’Institut de l’Entreprise. Avec ce dernier ils avaient décidé en 2006 « d’intervenir dans l’agenda de l’élection présidentielle » en orchestrant une véritable terreur budgétaire grâce à laquelle tout débat sur l’avenir, les investissements publics et les grands projets, avait été exclu de la campagne (souvenez vous du fameux « chiffrage » des programmes).
Néanmoins, toute cette propagande reposait sur une fraude : la dette publique est à moitié constituée d’intérêts et ne correspond donc pas à des dépenses faramineuses dont on essaye de nous rendre coupables. Entre 1980 et 2006, la dette de l’Etat s’est accrue de 913 milliards d’euros, mais dans le même temps, la France a remboursé 1176 milliards d’intérêts [2] aux grandes banques françaises et internationales, dont la BNP-Paribas.
Les cost-killers débarquent
Consciencieux et scrupuleux, Michel Pébereau a pris à cœur d’être le coach de cette cure d’amaigrissement « slim fast ». Il siège aujourd’hui au comité de suivi de la RGPP, où les équipes procédant à l’audit de l’Etat doivent présenter leurs travaux. Et comme « il ne saurait exister de différence entre bonne gestion publique et bonne gestion privée » (tel que le président de BNP-Paribas aimait à le rappeler avec insistance lors de sa tournée de promo antidette pendant l’année 2006), quoi de plus naturel que de s’en remettre aux cabinets d’audit les plus prestigieux au monde pour aller fouiller « dans tous les coins et recoins » (dixit Eric Woerth) des ministères et de l’administration.
Les consultants de chez Deloitte, du Boston Consulting Group, de McKinsey, ou encore d’Accenture (un reliquat du géant feu Arthur Andersen, démantelé sur décision de justice en 2002 après le scandale Enron) ne sont pas dépaysés lorsqu’ils doivent rendre leurs comptes puisque le ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique, Eric Woerth, a été directeur associé chez Arthur Andersen pendant six ans. Soucieux de s’assurer que dans les ministères, l’action succède aux recommandations de ses anciens collègues, il a nommé à la tête de la Direction générale de la modernisation de l’Etat le polytechnicien François-Daniel Migeon, tout frais sorti de deux années chez McKinsey.
On se retrouve donc avec des inquisiteurs financiers travaillant pour le compte des plus gros intérêts économiques de la planète plein nos institutions, planifiant avec zèle la réorganisation de la Justice, du ministère de l’Intérieur ou de l’Armée française. Le cabinet international Roland Berger Strategy Consultants, qui conseille Rachida Dati, explique simplement que « le gouvernement est comme une entreprise, avec un DG – le Premier Ministre – et des patrons de "business units" – les ministres – qui recourent à nos méthodes, éprouvées dans les grandes firmes, pour faire mieux et moins cher ». Si on en déduit que les fonctionnaires sont donc les employés de cette entreprise France, est-on en train de nous expliquer que les Français servent de matière première ?
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Notes :
[1] Les jours heureux – Programme du Conseil national de la Résistance, adopté et publié dans la clandestinité le 15 mars 1944.
[2] Les dix plus gros mensonges sur l’économie, Philippe Derudder et André-Jacques Holbecq, Dangles, 2007
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