Sarkozy est élu et la BCE augmente son taux : pourquoi ?
La BCE (Banque centrale européenne) vient d’annoncer qu’à partir du 1er juin 2007 son taux directeur allait encore augmenter et passerait de 3,75 à 4 %. Cette annonce est faite seulement quelques jours après l’élection présidentielle française, alors que le président nouvellement élu, Nicolas Sarkozy, venait de promettre qu’il allait rapidement s’intéresser de très près au problème de l’euro fort et accessoirement à celui de la BCE. L’avis du président de la France ne compte-t-il pas ? Pourquoi ?
Chacun sait que la qualité d’une monnaie est en fait le reflet de la qualité de la zone économique qu’elle irrigue. L’euro est la monnaie des treize pays qui composent la zone euro, dite Euroland. Si l’euro est fort c’est que l’économie de l’Euroland est saine et que ses fondamentaux - croissance, inflation, emploi et balance commerciale - sont globalement bons. Cela s’apprécie naturellement sur la moyenne pondérée de ces quatre agrégats. Si trois d’entre eux sont bons et que le quatrième l’est moins - l’emploi par exemple - mais se redresse, on en déduit quand même que l’économie est globalement saine. Dans douze des treize pays de l’Euroland, l’économie est donc structurellement de qualité.
Pour preuve, avec la même monnaie que la France, l’Irlande bat des records de croissance et d’emploi. L’Allemagne dispose d’une des meilleures économies exportatrices du monde avec un excédent de 100 milliards d’euros en 2006. Et l’Espagne voit son économie très dynamique. Douze pays de l’Euroland trouvent les ressorts nécessaires pour travailler efficacement avec un euro fort car leur économie est forte et ils croient en elle. C’est la magie du cercle vertueux des économies qui bâtissent leur force sur la puissance de leur monnaie et savent en profiter.
Dans cet univers de dynamisme économique et de foi en soi, notre pays occupe désormais la dernière et la treizième place de l’Euroland. Mais... là où d’autres feraient une bonne cure d’introspection, nous, nous crions haro sur la monnaie et l’autorité qui en a la charge. Exactement comme s’il s’agissait de trouver ailleurs les intrinsèques maux qui nous rongent.
Un peu d’objectivité, que diable ! La campagne électorale est terminée et l’incantatoire aussi. Il convient maintenant d’être sérieux pour agir sérieux et de façon pérenne dans une logique d’alignement de notre stratégie de développement avec les croissances qui nous entourent : l’européenne et la mondiale. Le futur gouvernent du président Sarkozy ne doit pas consommer du temps et l’argent des contribuables à rechercher à l’extérieur des explications qui ne sont finalement qu’internes à notre pays.
Bien sûr la BCE sait tout cela ! Et, c’est la raison pour laquelle, fort heureusement, elle est sourde aux injonctions politiques, voire politiciennes, qui essaient de la faire dévier du mandant d’indépendance qui lui a été conféré par Maastricht.
Les cris harotiques lancés par la France contre la Banque, son président et "sa" monnaie, mettent parfaitement bien en lumière la grande sagesse des rédacteurs de ses statuts. Ils ont voulu mettre la Banque centrale hors de portée du champ politique et politicien, notamment lors de la rédaction de l’article 105 : "L’objectif principal du système européen des banques centrales est la stabilité des prix".
Voila pourquoi, grâce à ce mandat, la BCE peut annoncer le jour où elle le désire, fusse celui de l’avènement d’un président élu, une variation de son taux directeur.
En son âme et conscience, la BCE estime que cette variation doit se traduire par une hausse de 0,25% le 1er juin prochain. Elle justifie cela par une lecture de l’économie eurolandaise qu’elle juge bonne et suffisamment dynamique. Dans le même temps, avec la hausse modérée de juin, elle garde cette économie sous total contrôle.
Indifférente aux cris de tel ou tel pays, la BCE agit donc pour le compte et le bien de tous.
En réglant finement, par les taux, la quantité de monnaie - l’agrégat M3 de masse monétaire - dans la zone euro, la BCE est exactement dans son rôle. Mais il est d’importance ! Mettre dans l’économie la bonne quantité de monnaie au bon moment, sans se soucier de telle ou telle élection locale, en France ou ailleurs dans l’Euroland, c’est là une véritable force. Régalienne, dirons certains. Souvent les mêmes qui ...
En fait, aurions-nous vraiment voulu qu’il en soit différemment ? Aurions-nous voulu que notre Banque centrale, à Francfort sur le Main, soit ballottée au gré des multiples élections dans ses treize pays mandants ? Ballottée au gré de la puissance de tel ou tel personnage politique ? Non, certainement pas ! Et le président Sarkozy le sait ! Il connaît trop bien l’introspection.
Vous incarnez maintenant la France, monsieur le président. Alors, la BCE et l’Euro sont-ils vraiment la cause des maux dont souffre notre pays ? Vous avez la réponse. Il suffit de la dire au pays. Nous pouvons l’entendre. La poursuite de la construction européenne acceptée et comprise par tous passe aussi par là !
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