Vers un nouveau Bad Godesberg ? socialismes et Socialisme
A l’aube d’échéances électorales cruciales pour l’avenir de notre pays, l’anarchie des courants et la bataille des sensibilités au sein du Parti socialiste semblent laisser place à un apaisement, que d’aucuns qualifieront d’hypocrite.
Les querelles des éléphants, qui expliquent pour partie l’échec de 2007, devaient cesser : un retour à l’union est une condition nécessaire à toute esquisse de victoire électorale nationale.
Ainsi, Reims a officiellement sonné le glas du bal des egos. Deux années se sont écoulées, et les guerres intra partisanes ont été éclipsées en faveur d’une unité de façade.
S’est mise en œuvre, à travers le regard complaisant des forces de droite, une farce somme toute baroque qui, sous le prétexte -louable- d’épargner un semblant de paix au sein des rangs socialistes, a contribué à la déliquescence du message porté par le Parti.
L’épisode des retraites l’a récemment illustré, aile droite et aile gauche s’affrontant à coups de petites phrases assassines, et ce, par médias interposés.
Au final, ce n’est pas tant la déliquescence du message du Parti que l’émiettement de l’essence même de l’idéal socialiste qu’il convient de craindre ou de déplorer.
Il est vrai que le libéralisme a de nos jours cette étrange faculté de s’ériger comme le mètre-étalon de tout débat économique aspirant au sérieux entre esprits autorisés.
De ceux qui poussent aux extrêmes les limites du jeu de l’offre et de la demande à ceux qui ambitionnent de moraliser ou de réguler la donne capitaliste, le libéralisme apparaît bel et bien comme seul horizon et horizon indépassable pour tout économiste un tant soit peu rigoureux.
Certaines voix au sein même de la famille socialiste envisagent l’avenir économique à l’aune de ce concept tendant à l’universel. Et par ce biais, tendent à oublier qu’entre un marxisme aux contours flottants et abstraits, et un libéralisme sauvage et déshumanisant existe une troisième voie : celle du socialisme.
Le socialisme, voie par laquelle, sans faire impasse sur la réalité des mécanismes actuels liant les économies nationales au marché mondial, est modelée l’adéquation entre facteurs capitalistique et humain, pour une économie placée au service de l’Homme, orientée sans cesse vers la recherche et l’établissement d’une plus grande justice sociale.
Marchant dans les pas des Saint-Simon, Bourgeois, Jaurès, Mendès et autres grands penseurs de la gauche républicaine, c’est aussi le pari que font au quotidien nombre de militants de gauche et le message que des millions de manifestants et grévistes français ont adressé au gouvernement en cette fin de rentrée sociale. Dans cette passe d’armes, l’UMP a fait le choix de l’autisme, aidée en cela par la pénible lecture réalisée par l’opinion du message équivoque des forces d’opposition.
Il ne s’agit pas ici de céder aux sirènes de la démagogie, de rouvrir de vieilles blessures et de précipiter le centre de synergie des forces de l’Opposition actuelle vers de nouvelles luttes intestines. Entendons-nous bien, une chasse aux sorcières, premier pas vers un retour au règne de la pensée unique, n’a pas lieu d’être. Serait d’ailleurs politiquement inopportune la tentation de distribuer des « labels » ou autre « bon point de conduite en socialisme » à tel ou tel candidat aux primaires.
Il ne s’agit pas d’adopter un raisonnement binaire ou de verser dans un manichéisme primaire afin de prétendre débusquer les « bons » des « mauvais » socialistes parmi les vecteurs opposés des cercles dirigeants du Parti.
Il s’agit plutôt de considérer avec lucidité l’exigence et le devoir de vérité dus aux français, à savoir la responsabilité qui est nôtre de s’affirmer et d’agir comme socialistes, en adéquation avec le sens du combat politique du parti éponyme.
Jamais ne sera assez répété l’impératif de démocratie interne et le souci louable de libre parole, libre pensée et libre expression au sein du Parti socialiste.
Dans la vie de tout parti démocratique, l’abondance de sensibilités est le marqueur de la vitalité et le gage de la richesse intellectuelle espérées.
Mais si, en démocratie, la défense et l’expression des idées de chacun est permise tout au long de l’échiquier politique, chaque idéologie trouve sa place dans un espace délimité du spectre partisan.
Ainsi, s’il ne fallait donner qu’un seul et unique exemple, la démocratie garantit à chacun la liberté de concevoir, de défendre et de promouvoir l’idée d’un abandon pur et simple par la France de sa force atomique, mais cette idée s’inscrit arbitrairement dans le champ de pensée des forces partisanes écologistes, communistes ou socialistes, et en aucun cas dans le corpus de pensée centriste, gaulliste, souverainiste ou frontiste.
A chacun et pour chaque idée, dans les limites prévues par les lois de la République, la possibilité de s’exprimer librement sur tout sujet et l’exigence subséquente de formuler et de défendre ses convictions au sein d’un corps partisan délimité.
Il en va de même de tout concept ou idée politique, au premier rang desquels se trouve le libéralisme économique. La défense d’une ligne libérale est un droit et une liberté pour ceux qui en font le choix, à l’UMP ou ailleurs, mais n’a pas lieu d’être portée à débat au sein de la gauche, au sein du Parti socialiste, au risque de créditer les tenants d’un amalgame grossier entre gauche et droite, perçues comme « bonnet blanc et blanc bonnet » ; au risque, finalement, de ne conserver de socialiste que le simple nom d’un parti, vidé de son essence, de son histoire et évidé de ses propres réalités.
Qui a jamais songé ou acté en faveur d’arrangements, petits ou grands avec le libéralisme économique, a cessé de facto d’être socialiste.
Cette dernière observation sera critiquée, pour autant, elle ne prétend constituer en rien une vérité mais la conclusion d’une succession de convictions et d’idées.
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