Curieuse époque que la nôtre où tout semble vouloir bouger même en recherche historique mais où, paradoxalement, c’est la repentance qui prévaut et le négationisme. Dans les domaines que j’étudie sans pouvoir débattre à armes égales, c’est l’affirmation absurde d’une Gaule qui n’aurait jamais existé sur le plan historique ; c’est la négation de l’ancien Israël telle que son histoire est relatée dans le Pentateuque.
Exemple type de débats impossibles : le refus de mon Atlantide en Gaule à cause du mot « île », alors qu’entouré d’eau et de hautes montagnes, notre vaste territoire gaulois comparé à la Grèce mérite tout à fait le sens d’isolement que le latin donne au mot « insula » , de même que probablement le grec http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/l-atlantide-engloutie-suite-et-fin-68905.
Et voilà maintenant qu’après avoir rabaissé les évangiles au niveau de légendes populaires et le personnage de Jésus à un simple homme quoique philosophe, voilà dis-je, que certains réfutent l’islam historique des textes musulmans sous prétexte qu’ils ne seraient pas suffisamment corroborés - comme les évangiles d’ailleurs - par des témoignages écrits extérieurs.
Voyons les hypothèses que je propose.
Première hypothèse : une histoire de conseils.
Que dire de l’homme moderne si imbu de ses connaissances et qui n’a pas encore compris que l’histoire d’Adam est une allégorie ? Comment diable voulez-vous que l’homme ancien raconte - poétiquement - l’histoire de la naissance de sa cité sinon par analogie avec l’histoire du couple humain ? Eve est une population/femme et Adam est le conseil/époux de sept membres qui la dirige, c’est on ne peut plus évident. Sept parce qu’il y a sept étoiles dans la constellation de l’étoile polaire. Entre les deux, sauf accidents, une histoire d’amour. Tout cela, je l’ai expliqué en long et en large dans mes ouvrages.
Que dire de l’historien diplômé qui croit encore qu’Abraham a mis sa femme dans le lit du pharaon pour s’attirer ses bonnes grâces ? Abraham est un conseil qui a vécu 175 ans - biblia dixit - et la belle Sarah est une troupe militaire d’élite qui a failli se faire supplanter dans le coeur de son époux par la non moins belle Hagar, la troupe supplétive égyptienne qui donna naissance au conseil Ismaël. De là date la scission entre la branche de Jacob/Israël qui fructifia en Palestine et celle d’Ismaël qui avait conservé, ce qui est assez extraordinaire, son arbre généalogique jusqu’à Mahomet.
Car le conseil Mahomet descend bien d’Abraham par Ismaël, mais il fallait comprendre qu’il s’agissait d’une descendance par l’esprit et non par la chair, autrement dit : une succession dynastique de conseils décidée par le destin, par Dieu ou par les hommes.
Dans cette optique, sachant que la mère de Mahomet était de Zurah (Yathrib/Médine), cela signifie que son père/conseil/clan est allé choisir dans cette tribu sept hommes pour en faire un conseil/fils. Cela signifie que Mahomet, génétiquement parlant, était médinois. Ainsi s’explique les appuis qu’il a trouvés dans cette tribu.
Deuxième hypothèse : c’est du peuple et du conseil élu que doit sortir le désigné.
Qu’y a-t-il de plus logique que cette idée ? Dès lors qu’on l’accepte, les textes évangéliques deviennent d’une clarté aveuglante. La conviction que Yahvé animait le peuple d’Israël, entraînait ipso facto la croyance qu’il y agissait, et plus précisément, dans les conseils saints des communautés saintes (alias esséniennes). Cette conviction entraînait également l’espérance que de l’un d’eux, ou mieux, du conseil suprême dit de Dieu des textes de Qumrân, un fils par excellence surgisse. Ainsi s’est écrite, en schématisant, l’histoire d’un Jésus "Christ/signe de Dieu incarné" qui s’est manifesté - non encore révélé - au sein de quatre conseils évangéliques mais qui - énorme déception pour certains - n’est pas apparu en gloire. Tout cela, je l’ai expliqué dans mes ouvrages.

L’histoire de Mahomet s’inscrit dans cette logique, mais il n’est pas demandé à Dieu de venir sur terre mais d’y faire seulement descendre sa parole et de la répandre par l’intermédiaire d’un messager. Ce messager n’est qu’un homme et cet homme est porté par un conseil de très certainement sept individus. Or, il apparaît dans Tabari, comme je l’ai expliqué dans mon précédent article sur la bataille d’Ohod, qu’il y a eu beaucoup de morts dans cette bataille du côté musulman et que le conseil n’a pas été épargné. A supposer qu’il y eut déjà un désigné au sein de ce conseil, le livre de Tabari laisse toutefois entendre qu’il a perdu la vie mais qu’il fut aussitôt remplacé. C’est ce qu’on peut appeler une stratégie intelligente de "résurrection" qui permettait ainsi d’éviter la vacance du pouvoir et d’aller jusqu’au terme de la mission.
http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/l-islam-en-question-troisieme-et-84059
Troisième hypothèse : un islam qui vient de Syrie ?
Curieusement, dans ses récents ouvrages sur les origines de l’islam, le père Edouard-Marie Gallez ne voit pas dans les moines de Bahîrâ l’important soutien syrien que, pour ma part, j’y vois. En revanche, en s’appuyant notamment sur l’étymologie des noms de lieux, il fait l’hypothèse d’un foyer originel koréischite en Syrie, dont l’histoire aurait été écrite en la délocalisant à la Mecque actuelle.
Je serais assez d’accord avec l’idée d’un pré-islam de Syrie mais comme je raisonne en ancien militaire et en termes de colonisation, je préfèrerais l’hypothèse d’un expatriement koréischite en Arabie d’où aurait pu être lancée la reconquête abrahamique de la Terre qu’évoque E.M. Gallez (et donc depuis un désert, celui d’Arabie).
Que la région relativement fertile de Médine, de Taïef ou autre, ait été le point de chute d’Hagar et d’Ismaël, cela me semblerait assez logique (et pourquoi pas un marabout isolé à l’emplacement de ce qui deviendra La Mecque ?). Que, postérieurement, Médine ait poussé à la Mecque une colonie, cela s’explique parfaitement par la nécessité d’encadrer les populations nomades de la région dont le sport favori était de piller caravanes et voyageurs. Dans cette optique, et suivant mon hypothèse, on comprend les détachements de sept hommes que ces caravanes et populations venaient chercher à la Mecque, condition
sine qua non pour une sécurité effective et dissuasive. On comprend, en retour, comment La Mecque pouvait se nourrir.
http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/l-islam-en-question-deuxieme-83902
Quatrième hypothèse : comment expliquer la fraicheur et la clarté du livre de Tabari ?
Une fraicheur qui contraste avec les difficultés de déchiffrement et d’interprétation des autres textes fondateurs de l’islam, ce qui est très étonnant. Constatation d’autant plus étonnante qu’à la mort de Mahomet, cela faisait déjà plusieurs siècles que les écrits évangéliques étaient parus et qu’eux ne posaient aucun problème grave de lecture. Comment expliquer enfin que dans cet islam que l’on dit cultivé, qu’il faille attendre le livre d’Ibn Hichâm qui date du IX ème siècle pour y voir clair. Cet ouvrage, je l’ai lu très attentivement dans son édition publiée en librairie mais je n’y vois pas les possibilités d’interprétation allégorique que je trouve chez Tabari. Il y a là une faille qui demande des explications. La seule explication que je puisse proposer est que le récit de Tabari pourrait être une oeuvre originale que j’attribuerais aux moines de Bahirâ, une oeuvre dans laquelle on n’a pas vu les sens cachés qui s’y trouvaient. Ces moines qui avaient désigné, conseillé et guidé Mahomet par l’intermédiaire de l’ange Gabriel, suivant ma thèse, étaient détenteurs de livres, ce qui signifie qu’ils étaient également capables d’en écrire un pour guider les successeurs du Prophète et cela un peu dans le même style hermétique dans lequel les évangiles ont été rédigés.
Cinquième hypothèse : pourquoi la source s’est-elle tarie après la mort de Mahomet ?
Certains disent qu’elle ne se serait tarie qu’après la mort d’Omar, il faudrait vérifier. Mais quand on se rappelle que dans le grand conseil (quand il se mettait à l’écoute de Dieu), c’est Omar qui avait la meilleure inspiration, la déduction qui s’impose est que le successeur d’Abou Becker était encore plus ou moins en contact avec l’ange Gabriel. En revanche, il semble bien que les ponts aient été coupés dès l’avènement d’Othman, le troisième calife. Et cela pose le problème de la rédaction du Coran. Ce problème est d’autant plus sérieux qu’il apparaît que c’est à partir d’Othman que le Livre a reçu sa forme définitive.
Note : Je prends mes références dans le livre du musulman Tabari "Mohammed, sceau des prophètes", éditions Sindbad, 1980, traduction de Hermaan Zotenberg. Je considère ce texte comme le plus ancien et le plus authentique qui relate la vie - la Sîra - du Prophète mais avec une réserve : Tabari est-il historiquement fiable sur tout ? Probablement pas !