Aspartam : où sont les excès ?
La polémique a enflé Outre-Atlantique sans atteindre vraiment l’Europe malgré une forte diffusion via internet. L’Aspartam est-il dangereux pour la santé ? La réponse officielle reste non, mais... un complément d’enquête a été récemment demandé par plusieurs agences de sécurité alimentaires européennes et américaines, dont l’Afssa.
L’histoire tourmentée de cet édulcorant, recalé à plusieurs reprises par la FDA, est révélatrice de la suspicion qui flotte désormais sur les produits de synthèse qui entrent dorénavant dans notre alimentation. Justifiée ou non, elle a le mérite de poser certaines questions.
Alors, qu’en est-il de l’Aspartam aujourd’hui ? D’après l’Avis du Comité scientifique sur l’alimentation appartenant à la Direction générale de la santé et de la protection des consommateurs de la Commission européenne, publié en décembre 2002, cette molécule ne présente pas de risques pour la santé. L’étude s’appuyait sur les nombreux travaux menés et qui ont déterminé la stabilité du produit incriminé dans différentes situations de température et de pH.
Après absorption, l’Aspartam est très vite dégradé en deux acides aminés, l’acide aspartique et la phénylalanine, et en méthanol. Le méthanol est toxique pour la vue et le système nerveux central, mais ne le serait qu’à des doses équivalentes à ce que produirait l’ingestion de 100 litres de boissons "light". Même un gros consommateur ne peut atteindre de telles doses journalières. L’apport d’acide aspartique, métabolisé dans l’intestin, ne modifie pas les concentrations sanguines de cet acide aminé.
La phénylalanine pose le problème des personnes atteintes de phénylcétonurie (PCU). Mais deux cas distincts se présentent : la PCU partielle, lorsqu’un gène sur deux est touché et déficient, la PCU totale lorsque les deux gènes sont déficients. Dans ce denier cas, la personne atteinte ne peut pas métaboliser la phénylalanine qui s’accumule dans les tissus et devient toxique. Lors d’une atteinte partielle, le patient est un « porteur sain » qui n’exprime pas les symptômes de la maladie. Dans ce cas, aucun effet n’a été constaté lors de consommations d’Aspartam. Pour ceux atteints de la maladie, l’Aspartam fait partie des produits dont la consommation est réglementée par un régime strict limitant les protéines.
Autre substance sur le banc des accusés, la dicétopipérazine, dérivée de l’Aspartam, a fait elle aussi l’objet d’études approfondies qui ont démontré qu’il n’existait aucune corrélation entre l’absorption de ce dérivé de l’Aspartam qui se forme en milieu hydraté à une température supérieure à 30°C et l’apparition de cancers.
Au bout du compte, les études cinétiques et épidémiologiques menées alors sur l’édulcorant le plus répandu dans notre alimentation l’ont réhabilité. Mais le 14 juillet 2005, la Fondation Ramazzini de Bologne publiait une étude qui allait relancer l’affaire.
Coincés entre des enjeux économiques colossaux et le principe de précaution, les agences de sécurité des aliments ont donc réagi en demandant un approfondissement des recherches, sans pour autant interdire son utilisation.
Car ce qui est certain, c’est que l’Aspartam a fait la fortune de la société qui l’a mis sur le marché, le laboratoire Searle. Un laboratoire qui, après avoir embauché un certain Donald Rumsfeld, a obtenu deux ans plus tard l’autorisation de mise sur le marché de l’Aspartam. Cette autorisation concorda avec l’éviction du Président de la FDA, décidé par Ronald Reagan. Depuis, le laboratoire Searle a été racheté par Monsanto, le géant américain des semences.
Comme toute substance issue de l’industrie chimique, l’Aspartam aurait dû rester un produit de consommation marginale, répondant à des situations spécifiques comme le diabète ou l’obésité. Utilisé comme produit de confort moral, il permet de consommer des produits au goût sucré en ayant l’impression de surveiller sa ligne. Pou résoudre les problèmes de surpoids des populations occidentales, il eût été préférable de limiter l’addiction au sucre des jeunes enfants, mais cela n’est pas économiquement rentable pour les industriels de l’agro-alimentaire.
Face aux études contradictoires qui continuent à décrier cet édulcorant, la sagesse populaire voudrait que l’on s’abstienne de consommer des produits "light" contenant de l’Aspartam, surtout chez les jeunes et les femmes enceintes. La Terre n’a pas attendu l’Aspartam pour tourner.
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