Finissez vos assiettes !
La faim dans le Monde n’est pas une nouveauté, et si elle est dénoncée régulièrement par les ONG, il faudrait aussi s’interroger sur nos habitudes de consommation, générant un gaspillage épouvantable, lequel pourrait théoriquement faire cesser le scandale de la faim dans le monde, à condition que nous prenions les bonnes décisions.

C’est la F.A.O, cette organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, qui, le 11 septembre 2013, a de nouveau poussé un cri d’alarme, en publiant un rapport accablant concernant nos pratiques alimentaires.
Constatant que notre gaspillage alimentaire génère dans le monde une perte annuelle de 750 milliards de dollars, l’organisation des Nations Unies, ajoute qu’il porte atteinte au climat, aux terres et à la biodiversité.
En effet, la quantité de nourriture produite sans être consommée s’élève à 1,3 milliards de tonnes de nourriture, soit le tiers de la production mondiale, et provoque un gaspillage d’eau équivalent à 3 fois la quantité d’eau du Lac Léman, ou au début annuel de la Volga, provoquant une émission de gaz à effet de serre considérable de 3,3 gigatonnes.
José Graziano da Silva, directeur général de la F.A.O ajoute : « nous ne pouvons tout simplement pas permettre qu’un tiers de toute la nourriture que nous produisons soit gaspillée, ou perdue, à cause de pratiques inadéquates lorsque 870 millions d’être humains sont affamés chaque jour ».
En 2008, toutes les 5 secondes un enfant mourait de faim dans le monde, soit 6 millions de morts par an (lien), et la situation ne s’est pas arrangée depuis.
Au printemps 2008 des émeutes de la faim secouaient 35 pays dans le monde, et il ne semble pas que ça ait ému grand monde. lien
Achim Steiner, secrétaire général adjoint de l’ONU, et directeur exécutif du PNUE (programme des nations unies pour l’environnement), emboitant les pas de la FAO a déclaré : « le PNUE et la FAO ont reconnu les pertes et gaspillages alimentaires comme une grande occasion pour les économies du monde entier d’effectuer la transition vers une économie verte inclusive, sobre en carbone et reposant sur une utilisation rationnelle de ressources ».
Il a donc lancé un défi « Faim Zéro », avec comme slogan « pensez, Mangez, Préservez, réduisez votre empreinte ».
Alors que c’est en Asie que les pertes de céréales, concernant surtout le riz, sont les plus élevées, c’est dans les pays a revenus élevés et en Amérique du sud que le gaspillage de viande est le plus catastrophique, atteignant le chiffre effarant de 67%.
Quant au gaspillage de fruits et légumes, il touche principalement l’Europe, mais aussi l’Asie et l’Amérique latine.
On peut tout de même s’étonner que ce rapport ne mentionne pas dans sa liste les Etats Unis, pourtant selon la revue scientifique PLOS One, 40% de l’alimentation disponible aux Etats-Unis est jetée, ce qui représente depuis le premier janvier près de 23 milliards d’euros, soit en moyenne 32,5 milliards annuels, (35 millions de tonnes annuels) ce qui correspond aux besoins de 500 millions d’humains. lien
Les experts de la FAO ont analysé dans leur rapport les causes de ce gaspillage, pointant du doigt les critères esthétiques concernant les fruits et légumes, lesquels poussent les commerçants à se débarrasser de grande quantité d’aliments parfaitement comestibles, mais moins beaux.
Ils ont aussi critiqué les règles trop rigides appliquées à nos aliments notamment sur les dates limites d’utilisation optimale.
Ils dénoncent la pratique des consommateurs qui achètent trop, incapables de planifier leurs courses, piégés par les techniques commerciales des grandes surfaces, qui les poussent à acheter ce qu’ils n’avaient pas prévus. lien
A coup de promotions, du style un produit gratuit pour deux achetés, à coup de têtes de gondoles, de modifications de l’emplacement des produits, poussant le consommateur a faire le tour du magasin, et plaçant habilement bonbons et chocolats près des caisses, sachant que les enfants impatients dans la file d’attente, pousseront les parents à en acheter, tout est mis en place pour encourager le client à dépasser largement la liste de ce qu’il avait décidé d’acheter.
L’organisation alimentaire a donc édité un guide pour une meilleure consommation portant sur 3 niveaux d’action :
D’abord améliorer l’adéquation de la production et de la demande afin de ne pas produire des quantités de nourriture non nécessaires, tout en optimisant les pratiques des producteurs.
Si, malgré tout, il y a production excédentaire, il y est préconisé de trouver des débouchés secondaire ou de faire don aux plus démunis des surplus, encourageant aussi à l’utiliser pour l’alimentation animale, si elle n’est plus adaptée à la consommation humaine.
Si ces aucune de ces deux solutions ne sont possibles, la FAO propose d’opter pour le recyclage et la récupération, en produisant de l’énergie afin de récupérer d’énormes quantités de méthane, gaz à effet de serre 23 fois plus polluant que le Co².
Ce méthane, une fois transformé en carburant, permettra en achetant moins de pétrole, de rééquilibrer la balance économique de nombreux pays : ce qui ne serait pas « méthanisable » pouvant faire l’objet de compostage.
En effet, la production des denrées non consommées produisent autant de gaz à effet de serre que produisent en 6 mois les Etats Unis ou la Chine.
Le rapport rentre dans le détail en conseillant aux commerçants de ne pas exposer en rayon un trop gros volume de nourriture, ceux-ci étant convaincus que ça booste les ventes, et leur demande de ne pas jeter la nourriture dès qu’elle approche la date limite de consommation.
Le rapport constate aussi que les agriculteurs jettent entre 20 et 40 % de leurs produits frais, pour ne pas être sanctionnés par leurs acheteurs.
Constatant que déjà certaines grandes surfaces vendent à prix plus bas des fruits et légumes de moins bonne apparence, les rapporteurs de l’organisation, encouragent les autres à emprunter ce logique chemin.
De gros progrès pourraient aussi être faits, notamment concernant la nourriture redistribuée aux banques alimentaires, qui n’est qu’une maigre partie de ce qui sera jeté. La FAO préconise donc de songer à une hausse des taxes appliquée aux produits mis en décharge, afin d’encourager les commerçants au don aux plus démunis. lien
Les experts de la FAO conseille aussi aux consommateurs de revoir leurs habitudes, en préparant des menus hebdomadaire, en achetant des fruits et légumes « imparfaits », en apprenant à mieux accommoder les restes.
D’ailleurs, de nombreux ouvrages ont été publiés sur la question des restes, certains proposant même d’aller plus loin en cuisinant les épluchures !...
Sonia Ezgulian a publié aux éditions de l’épure, un livret d’une quinzaine de pages, proposant 10 façons d’accommoder les épluchures : des cosses de petits pois farcies, en passant par les tuiles de caramel à la peau de pêche, crème de pépins de courgettes au curry, la morue au fumet de noyaux d’olives, les écorces de melon vinaigrées aux oignons grelots, jusqu’au gaspacho de peaux de tomates et de poivrons rouges, elle ne manque pas d’imagination.
Ce petit livre, proclamé meilleure série de livres de cuisine de l’année 2009 pour la France, par le jury des Gourmands World Cookbook Awards, vous coutera 6,65 € (plus le port) si vous voulez l’acquérir (lien), ce qui est une bonne affaire puisque ce petit livre culte se négocie en occasion jusqu’à 45 €. lien
Cette cuisinière lyonnaise est lucide, expliquant que « acheter des aliments de bonne qualité consommés à 98% est plus rentable que de se procurer des produits de qualité moyenne qui finiront pour moitie à la poubelle ».
Elle est donc très attentive à la qualité de ces produits, et tient à être certaine de leurs origines, afin de savoir s’ils ont subi des traitements, ce qui serait dangereux. lien
Et puis elle ajoute que la peau des fruits et légumes abritent souvent une grosse partie des vitamines et des fibres, d’où l’intérêt d’acheter des produits qui n’ont pas subi de traitements chimiques. lien
Voici une recette de son livre, celle du Gaspacho :
Mixer les peaux et pépins de 8 tomates, celles de 6 poivrons rouges, un concombre non épluché coupé en petits morceaux, 2 échalotes épluchées taillées en 4, un piment oiseau, du concentré de tomate, et passez au chinois.
Servez ce gaspacho très frais, après en avoir rectifié l’assaisonnement, accompagné de dés de légumes (courgettes, carottes, asperges, voire même avocats), et bon appétit.
Si les hasards d’un voyage vous mènent à Lyon, elle y a ouvert un restaurant, Oxalis, 23 rue de l’arbre-sec, à coté de l’Hôtel de ville, dans le 1er, signalé par Gault et Millau. lien
Pour revenir au rapport de la FAO, on ne sait pas quel sera le sort que nos dirigeants lui réserveront, mais nous pouvons déjà, sans attendre leurs décisions, l’appliquer chaque jour.
Comme dit mon vieil africain : « Le fou est l’échelle du sage ».
L’image illustrant l’article vient de « cassoulek.canalblog.com »
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
Articles anciens
32 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON