La bourse ou la vie
Ou comprendre le concept de la maximalisation des profits en un temps réduit, ce principe qui se substitue à tout autre dans la société libérale mondialisée.
Privatisation de l’eau et dégâts collatéraux
Manille, capitale des Philippines, dut, sous la pression de la Banque mondiale (BM) et du Fonds monétaire international (FMI), privatiser l’alimentation civile de l’eau en 1997. Aujourd’hui, les Philippins doivent se procurer une carte prépayée (de type GSM) pour que l’eau puisse couler du robinet. A l’instar des téléphones portables, l’approvisionnement s’arrête quand le crédit est épuisé. Pas d’argent, pas d’eau !
La raison de cette privatisation imposée tenait dans l’impossibilité du gestionnaire public à assurer l’approvisionnement des deux millions de ménages de la capitale. Mais aujourd’hui, suite à la privatisation, le service n’est pas meilleur. Faible pression au robinet lors des maigres heures d’approvisionnement quotidien. Frais de fonctionnement énormes, mauvaise gestion et inefficacité caractérisent la privatisation de l’eau à Manille. Un échec catastrophique pour près d’un million de personnes aux revenus modestes. C’est encore une fois la rapacité sans limite des créanciers du Nord qui dicte qui peut vivre et qui est sacrifié sur l’autel des profits.
« Le contrat de concession a été amendé en octobre 2001, suite à une énorme pression de la part de Maynilad-Ondeo (la Lyonnaise des eaux) et la complicité des responsables officiels du bureau des régulations. Les amendements autorisaient une série d’augmentation des prix afin de couvrir les pertes financières enregistrées par Maynilad-Ondeo à la suite de la crise financière asiatique de 1997-1998 et la dévaluation du peso philippin de 100% par rapport au dollar américain. Les objectifs d’extension du réseau d’eau, les objectifs de qualités ont été revus à la baisse (une épidémie de gastro-entérite et de choléra s’est déclarée en novembre 2003 dans le quartier de Tondo, géré par le consortium. Elle a fait sept morts et sept cents blessés.)
En d’autres termes, les paramètres du contrat original ont été complètement altérés. Maynilad-Ondeo a été autorisé à augmenter le prix de l’eau tout en réduisant les services. La famille Lopez et Suez/Ondeo ont refusé de faire les investissements nécessaires et de payer les dettes, préférant recourir à une dramatique hausse des prix pour soutenir leur situation financière.
Le prix de base de l’eau dans le secteur géré par Maynilad-Ondéo est aujourd’hui de 19,92 pesos par mètre cube, soit supérieur de 500% par rapport à 1997. Et ce sans compter les charges prélevées spécialement pour couvrir les pertes de change de 8,28 pesos par mètres cube. Une famille moyenne consomme environ 20 mètres cubes d’eau par mois et paie 600 pesos. 40 % de ce montant n’est pas affecté à leur consommation d’eau réelle mais aux charges extracontractuelles. »
Mme Carla Montemayor, Bantay Tubig [1], Manille.
Le directeur de Nestlé, Peter Brabeck, quant à lui condamne ceux qu’il appelle les extrémistes des ONG et autres altermondialistes, et qui s’opposent à ce type de privatisation pour des raisons biens compréhensibles. Alors que sa multinationale est accusée de monopoliser les ressources de cet or bleu dont personne ne peut se passer. [2]
Plus proche et bien plus dramatique ; la directive REACH [7]
0.09 %, notre vie ne vaut pas 0.09 % du chiffre d’affaires de l’industrie chimique européenne. C’est en tout cas ce qui ressort de l’échec de cette directive élaborée pour remplacer la commercialisation de produits dits « très préoccupants », c’est-à-dire :
Les CMR =>> cancérogènes, mutagènes et toxiques pour le système reproductif
Les PBT =>> persistantes, bioaccumulables et toxiques
Les vPvB =>> très persistantes et très bioaccumulables
Les substances ayant des effets graves et irréversibles sur l’être humain et l’environnement.
Malgré les risques évidents que font courir ces substances sur la santé de la population mondiale. L’UE a laissé filer l’occasion d’une alternative écologique majeure et vitale, en amendant Reach de telle façon que de nombreux produits incriminés ne seront pas soumis à un contrôle en vue de leur substitution.
Il est donc grand temps de comprendre que le libéralisme et l’environnement sont définitivement inconciliables. Qu’aucun directeur de société ne risquera de se voir licencié pour avoir réduit les profits de ses actionnaires pour aider les populations défavorisées. Que si nous voulons éviter le réchauffement planétaire baigné de substances toxiques et nucléaires, il est absolument nécessaire de prendre le virage altermondialiste. Puisque aucune autre voie n’est envisageable.
Le pacte de N. Hulot est un leurre, puisque ses sponsors sont des multinationales dont le seul but est la maximalisation des profits en un temps réduit. C’est un concept qu’il faut garder à l’esprit en permanence quand on parle écologie avec un capitaliste. Car qui va renoncer à de plantureux profits pour le bien-être commun ?
Pas les semenciers non plus, puisque ceux-ci s’allient avec les constructeurs automobiles (grands consommateurs de substances toxiques énumérées plus haut) ainsi qu’avec les transnationales pétrolières. Connus pour leur humanisme proverbial, Monsanto (de l’agent orange à la semence « Terminator » en passant par la production de PCB, de pesticides et herbicides hautement toxiques, d’hormones de croissance cancérigènes et d’organismes génétiquement modifiés (OGM), a recherché les profits les plus grands en fabriquant les produits les plus nocifs. Tout en affirmant le contraire et en prétendant promouvoir les sciences de la vie et nourrir l’humanité... ! ) [3] Ford ("Quand vous pensez à Ford, vous pensez au baseball ou aux donuts. Vous ne pensez pas au portrait d’Henry Ford qu’Hitler avait accroché dans son bureau.") [4] et Total (la junte Birmane lui dit merci) [5] s’allient pour la production d’agrocarburants dans les pays du Sud. Le bilan environnemental et social de cette joint-venture fait froid dans le dos car les répercussions mondiales seront catastrophiques. [6]
Voilà les gens que le libéralisme porte à bout de bras. Voilà pourquoi une alternative devient urgente. Car il est impensable que ces nababs hyperpuissants réfrènent leur avidité pour un quelconque virage humaniste et écologique. Ils sont les maîtres du monde et nous allons en mourir ! L’alternative altermondialiste n’est pas née d’une envie soudaine de tout casser, mais bien d’une folle envie de survivre à la dictature des marchés.
La directive Reach entre en "vigueur" ce premier juin 2007. Contactez les associations environnementalistes pour montrez que vous ne voulez pas laisser faire.
De nombreux autres exemples existent, mais sont-ils nécessaires ? Il n’y a pire sourd...
[1] Le réseau Bantay Tubig mène des campagnes d’information du public des politiques à travers des actions de plaidoyer et recherche des solutions alternatives à la gestion de l’eau, notamment à travers la gestion publique et communautaire.
[2] http://www.leregional.ch/www/article/article.php?rub=2&id=951®ion=44
[3] Raoul Marc JENNAR chercheur auprès du mouvement social URFIG/Fondation Copernic
[4] http://www.lariposte.com/Ford-General-Motors-et-le-Troisieme-Reich-une-239.html
[5] http://www.geocities.com/rainbowendsfr/karen/angesgar.htm
[6] http://www.kokopelli.asso.fr/actu/new_news.cgi?id_news=90.
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