Atatürk et Robespierre, des dictateurs utiles...
Mustafa Kemal Atatürk a son portrait accroché dans toutes les entreprises et les institutions turques. C’est un devoir librement consenti qui a même son texte dans le code civil et militaire.
AtaTürk, ancêtre du peuple turc que l’on traduit maladroitement par « Père des Turcs » est le fondateur et le héros de la première république démocratique du plateau anatolien.
Les années 1915-1920, c’est l’époque où l’empire Ottoman, allié de l’Allemagne dans la première guerre mondiale doit faire face au démembrement que le traité de Sèvres lui inflige en guise de punition. Il installe sur son territoire les forces françaises, italiennes et anglaises. Mais un groupe de cadres militaires, révolutionnaires de longue date, n’acceptent pas le compromis avec « les envahisseurs ». D’Ankara, l’actuel capitale de
En 1923, contre toute attente, créant même la surprise dans son propre camp, il fonde la première république démocratique turque. Il crée officiellement son premier parti CHP (Cumhurriyet halk partisi) dont le drapeau est traversé par six flèches symbolisant le républicanisme, le nationalisme, le laïcisme, l’étatisme, le réformisme et le populisme.
Il occupa quatre mandats de président durant lesquels la révolution kémaliste transforma la société civile de fond en comble. Le sultan et sa famille furent chassés du territoire pour trahison envers la nation. Il devint plus autoritaire encore quand il s’aperçut que l’opposition avait tenté de reprendre le contrôle du pays. Jugeant la république trop fragile pour être livrée à elle-même, syndicats et partis d’opposition furent rapidement interdits. Son parti unique choisirait désormais les députés à l’assemblée.
La dictature kémaliste est à présent apte à façonner la nation.
Atatürk a souhaité avant tout mettre la nation au cœur du processus décisionnel. Et il y est parvenu…
Nous, qui sommes Européens avec tout ce que cela induit en terme de réflexe culturel, nous ne comprendrons jamais assez ce que le laïcisme d’Atatürk impliquait dans une culture califienne vieille de 700 ans. L’empire ottoman était le leader du monde musulman. Et la laïcité prônée par le « Gazi » fut considérée comme un objet extraterrestre.
C’est pourtant un des axes le plus directionnel de sa politique, parce qu’en écartant la religion, il élargit considérablement le champ de ses réformes. D’emblée, cette laïcité rendait possible le droit des femmes puis leur accès aux postes gouvernementaux.
C’est le plus court que l’on puisse faire pour dire en quelques lignes ce que ce personnage a de singulier dans l’histoire des conquêtes…Et il conviendrait de réanimer les nombreux articles détaillés qui lui sont consacrés afin de rendre compte aux yeux des européens d’aujourd’hui, d’une société turque qu’ils méconnaissent parce qu’ils ne l’abordent essentiellement voire exclusivement qu’au travers du prisme de la question grecque, kurde et arménienne.
Je songe en ce moment précis au pire et au meilleur de l’opinion. Maximilien Robespierre et Mustafa Kemal Atatürk sont ce genre de fanatiques que l’humanité produit peu. L’humanisme qui les caractérise ne fait aucun doute et pourtant il est terni par des événements qui les dépassent mais dont ils sont bien malgré eux les investigateurs. L’œuvre de Robespierre est une œuvre que l’on apprécie mieux encore aujourd’hui car son discours portait en lui les germes d’un socialisme pour lequel la société française tel un muscle, vibre de toutes ses fibres…
Au 18ème, c’était un discours de sage dans une cour d’enragés mais nous ne sommes pas assez ingrats pour ne pas saluer son intégrité. Et même si elle le conduit vers un compromis sans retour, elle reste un modèle du genre pour tous ceux qui sont en manque d’inspiration…
La dictature est un outil politique que l’humaniste utilise parfois à contre cœur au risque de ne plus l’être.
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