Flagrant déni de mort ?!
Récupérer le sperme de son mari décédé, ou l’extraction de semence post-mortem, est-ce la même chose ?
Que dit l’actu sur l’insémination post-mortem ?
Le 23 septembre 2009, le tribunal de Rennes examinait la demande de Fabienne Justel, qui veut récupérer le sperme de son mari décédé. La loi de 1994 l’interdit. Dans l’édition d’Ouest-France du 24 septembre 2009, on pouvait lire :
« Fabienne Justel et son avocat Me Collard répondent aux journalistes à la sortie de l’audience du tribunal de Rennes. Le conjoint, malade, avait fait des dépôts avant sa mort, en 2007. Sa femme veut, à présent,récupérer les gamètes pour se faire inséminer. Jugement le 15 octobre. Fabienne Justel s’est contentée d’une brève déclaration, hier matin, à la sortie du tribunal. Cette Lannionnaise de 39 ans a perdu son mari, en septembre 2008. Aujourd’hui, elle veut se faire inséminer avec les spermatozoïdes que son époux avait déposés, pour une éventuelle insémination, au Centre d’études et de conservation des oeufs et du sperme (Cecos) de Rennes. La loi l’interdit. Le Cecos a donc refusé.
La veuve a saisi le tribunal de grande instance de Rennes, en référé (procédure d’urgence). Hier, à l’audience, Cécile Vivien, vice-procureur, a souhaité le rejet de la demande, estimant qu’’il n’y a pas de trouble manifestement illicite’ qui justifierait que le tribunal se prononce en référé. Le tribunal rendra sa décision le 15 octobre.
’L’épouse ne figure pas au contrat’
’J’irai jusqu’au bout, s’est indignée la veuve. Je me bats pour cet enfant. Je ne perds pas espoir et j’encourage aujourd’hui le tourisme reproductif.’ Pour Me Gilbert Collard, son avocat, ’il y avait un contrat entre le Cecos et les époux Justel. L’engagement de l’époux est valable pour les deux.’
’Le document a été signé entre le Cecos et le mari, rétorque Me Michel Poignard. Son épouse ne figure pas au contrat.’ L’avocat du Cecos rappelle que les dépôts de sperme ont été réalisés alors que le couple vivait encore en concubinage. Ils datent de 2006 ; le mariage a été prononcé en juin 2008.
’La mort du mari met fin au contrat, insiste la représentante du parquet. La veuve souhaite la restitution des gamètes pour contourner la loi.’ Me Collard ne s’en cache pas. Il met en garde : ’Les gens vont aller à l’étranger pour se faire inséminer.’ Aucune dérogation n’a encore été accordée dans l’Hexagone. Me Collard reproche au Cecos de ne pas avoir prévenu les époux Justel de l’interdiction.
’Environ 2 500 hommes viennent chaque année déposer du sperme’, répond plus sereinement le professeur Le Lannou, responsable du Cecos de Rennes. Souvent, c’est par précaution, comme Dominique Justel, qui devait suivre un traitement médical lourd. ’Est-ce la peine d’insister sur leur diagnostic vital et de leur casser le moral ?’, s’interroge le scientifique.
Au printemps 2010, le Parlement débattra du sujet lors de la révision de la loi bioéthique. Le Cecos de Rennes s’est engagé à conserver jusque-là les gamètes réclamées par Fabienne Justel. » (Source)
Mais qu’est-ce donc que l’extraction de sperme post-mortem ?!
Aux Etats-Unis, En 1993, en Floride, Pam et Manny Maresca, étaient mariés depuis quelques semaines au moment du décès de Manny dans un accident de moto ; la veuve obtient que du sperme soit extrait du corps mort de son mari. Une de ses préoccupations a été de faire accepeter son choix par l’église catholique (source)
En Espagne, en mars 2007, un institut de fertilité a réalisé à Valence la première fécondation in vitro d’une femme dont le mari était décédé un an plus tôt. Le mari avait auparavant indiqué par écrit qu’il autorisait un prélèvement de semence en cas de décès afin que sa femme puisse avoir un enfant. (source)
Petit décryptage de ces cas de procréation post-mortem, dans le cadre des révisions des lois bioéthiques à horizon 2010 ...
Dans son livre "Le coeur réparé", paru aux Editions Robert Laffont en 1999, le Professeur Daniel Loisance, qui dirige le service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire à l’hôpital Henri-Mondor, Créteil, écrit :
Shortly afterward, Dr. Rothman got a call from a Boston lawyer whose 15-year-old brother had been shot in the head and was in a hospital that was a three-hour drive from Los Angeles. The boy was the family’s only male heir. No one at the hospital would remove his sperm — they said they thought it would be unethical. And so, the sister asked, would Dr. Rothman do it ?
By the time Dr. Rothman drove to the hospital, the boy had died. He removed the sperm and drove with it back to his hospital in Los Angeles. The family followed him. When Dr. Rothman arrived at his laboratory, he looked under a microscope at the sperm and saw that it was moving.
’’The mother smiled,’’ Dr. Rothman said. ’’There were tears in her eyes. She leaned over, gave me a kiss on the cheek, and tipped me $20.’’
But, he added, ’’to my knowledge, she never used the sperm.’’" (source)
Si l’on procède au cas par cas, un nouveau problème va apparaître, celui du ’droit à l’enfant’ et du ’droit de l’enfant’.
Le problème se pose déjà. Une femme qui a stocké des paillettes en Belgique et vient accoucher de son enfant en France se retrouve avec un enfant considéré comme orphelin alors que du point de vue affectif l’enfant a bien un père ! Dans la législation française, un enfant qui naît plus de neuf mois après la mort du père n’est pas reconnu comme son enfant légitime. Cela pose un problème de filiation et de transmission du patrimoine. Si nous nous orientons vers une autorisation de l’insémination post-mortem, il faudra modifier le droit sur ces points là.
Cela fait plus d’un an que Fabienne Justel a entamé un parcours juridique. Pourra-t-elle obtenir gain de cause ?
Pour être honnête, je ne le pense pas. Mais elle a eu le mérite de soulever le débat. Il faut toujours des cas particuliers pour que des sujets aussi importants soient débattus dans les hautes sphères. Il y a de nombreuses questions fondamentales et quotidiennes qui ne sont pas assez évoquées, bien qu’elles concernent des milliers de personnes : l’euthanasie, l’évolution du consentement dans le don d’organe... Madame Justel bénéficiera très certainement d’un dédommagement pour ’déficit d’information’ mais cela ne lui donnera pas l’enfant qu’elle et son mari ont tant désiré."
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