Il y a 100 ans : la révolte des Penn Sardin

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En cette année 1925, les conserveries de Douarnenez (Finistère) employaient des milliers de sardinières – les Penn Sardin – à des tâches très dures exécutées dans des conditions souvent indignes à des cadences infernales. Pour des salaires de misère, la plupart de ces ouvrières d’usine vivaient dans la précarité, voire la grande pauvreté. Vint alors le temps de la révolte…

Depuis le 19^e siècle, les Penn Sardin avaient déjà mené des grèves pour tenter d’améliorer leurs conditions de vie. En 1905, les sardinières – pour la plupart d’entre elles employées dans les conserveries depuis leur sortie de la petite enfance – avaient même obtenu de n’être plus payées au rendement, mais à l’heure. Bien qu’il se soit agi d’un progrès notable, elles n’en continuaient pas moins de vivre dans la misère.

Le 21 novembre 1924, un vent de récolte souffle sur Douarnenez et s’insinue dans les conserveries du port finistérien. 3000 Penn Sardin cessent le travail en réclamant une hausse de leurs salaires. Les patrons d’usine observent ce mouvement avec arrogance, voire mépris, persuadés que la faim et le dénuement ramèneront les sardinières à la raison. Ces messieurs se trompent : les jours, puis les semaines passent...

Un grand mouvement de solidarité se met en place. En parallèle des meetings et des défilés sur les quais au bruit des sabots, des soupes populaires permettent à ces femmes courageuses de survivre en maintenant la pression sur le patronat. Très vite, les Penn Sardin reçoivent le soutien des « rouges » au plan local. À Paris, le quotidien L’Humanité rend compte de leur combat en donnant à leur lutte un retentissement national.

C’en est trop pour les patrons des conserveries. Le 1^er janvier 1925, ils envoient des briseurs de grève pour mettre fin à la lutte en intimidant les sardinières qui battent le pavé au bruit de leurs sabots. Ce jour-là, les nervis des usiniers blessent à coups de feu Daniel Le Flañchec, le maire communiste de Douarnenez. Mal leur en prend : cette tentative d’assassinat provoque dans la population une forte émotion doublée d’une vive colère.

Une semaine plus tard, la colère n’est pas retombée. Au terme de 48 jours de grève, les patrons des sardineries, vaincus, sont contraints d’augmenter le salaire horaire des Penn Sardin : il passe de 80 cts à 1 franc ! Autre conséquence de ce mouvement : l’une des meneuses de cette grève historique, une femme au fort caractère dénommée Joséphine Pencalet est élue le 25 mai 1925 au Conseil municipal de Douarnenez*.

Que ce soit durant les moments de lutte ou à leur poste dans les conserveries, les Penn Sardin ont toujours chanté. Pour se soutenir entre elles. Pour se donner du courage. Pour affronter les conditions de travail éprouvantes. En souvenir de ces femmes, 2500 personnes se sont réunies le samedi 23 novembre à Douarnenez pour écouter un chœur de 600 voix interpréter les chants qui avaient cours dans les usines à cette époque.

Ce n’est toutefois pas l’un de ces chants qui, de nos jours, est associé à cette lutte, mais Penn Sardin, une chanson écrite en 2005 par Claude Michel, ancienne enseignante et militante féministe concarnoise, sur une musique composée par Jean-Pierre Dovilliers. À l’instar d’un autre chant de lutte (cf. Du Chant des déportés allemands à l’Hymne des femmes) repris par les Gilets jaunes, elle est régulièrement interprétée lors des conflits sociaux.

Écoutez l’bruit d’leurs sabots,

Ce sont les ouvrières d’usine ;

Écoutez l’bruit d’leurs sabots,

Voilà qu’arrivent les Penn Sardin...

* En cette année 1925, le Parti communiste, profitant de l’imprécision du code électoral, présente des femmes aux Municipales dans différentes communes de France, et cela bien qu’elles ne disposent pas elles-mêmes du Droit de vote. Dix sont élues. Parmi elles, Joséphine Pencalet à Douarnenez. Toutes seront invalidées par le Conseil d’État quelques mois plus tard.

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