J’aime mon patron
Ben oui j'aime mon patron…J'en suis à ma troisième tequila glacée, certes et il est deux heures du matin. Elle se retourne vers moi en me dévisageant bizarrement…
"On apprécie son patron, on respecte son patron… dans le meilleur des cas, mais comment pouvez aimer un patron ? Au mieux pourriez vous le haïr ! "
C'est étrange comme on réserve ainsi le verbe aimer à sa sphère privée. je n'ai pas le droit d'aimer mon patron ? Et celui-ci ne peut il pas me le rendre ? On aime le gratin dauphinois, la tarte à la praline et on n'aurait pas le droit d'aimer son patron ? Est-ce réservé dans le monde du travail à tout ce qui touche à la promotion canapé ou autres droits aujourd'hui sur le devant de la scène ? Et bien c'est mon luxe à moi depuis le début, je ne peux travailler qu'avec un chef que j'aime. Et quand je n'aime plus, je romps et c'est rare parce que je suis fidèle. Que les tristes journées grises et blafardes deviennent lumineuses, que les bruits sourds se transforment en mélodies, que les odeurs d'huile rancie des machines se transmutent en parfum délicieux lorsqu'on travaille pour un patron aimé !
"Vous ne seriez pas un peu fayot, vous par hasard ?"
Manifestement la femme accoudée sur le zinc du bar à mes côtés me prend pour un illuminé… et ne doit pas adhérer au MEDEF ! Voilà , le mot est lâché…comme à l'école , impossible de se mettre au premier rang parce qu'on kiffait la maîtresse, sans se faire traiter de fayot ! Faut-il user de circonvolutions, de lâches litotes pour dire simplement qu'on aime son job, d'abord et avant tout parce qu'on aime son patron ? Quel meilleur gage de réussite pour l'équipe qui chérit son chef et quand celui-ci leur rend au centuple ?
Vous vous rendez compte que s'il fallait aimer son patron pour bosser, le monde du travail serait sinistré ? Vous venez directement du monde des bisounours, vous ?
Je la regarde, je n'avais pas vu qu'elle était si jolie avec ses mèches brunes sur les yeux… je pourrais facilement l'aimer elle aussi…
Allez une autre Tequila ! cul sec, le pub vacille autour de moi…d'un seul coup j'aime la terre entière, j'adore le tabouret rouge du bar, la grosse serveuse, le rideau doré, et un nain de jardin qui me fixe amoureusement, lui aussi… et je finis par m'écrouler sur le comptoir…
Et là du fond de mon brouillard j'entends le serveur qui explique à ma jolie voisine que je suis en gros progrès, parce que ce soir c'était seulement à la troisième téquila que j'avais déclamé tout mon amour à mon patron chéri…
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