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L’histoire de la violence

Nos enfants ont tout ce qu’ils souhaitent, mais lorsque la violence est en embuscade à chaque tournant, tout le monde peut être la prochaine victime. Ne dites pas « cela n’arrivera pas à mon enfant », mais faites tout ce que vous pouvez pour changer la situation.

Une jeep noire s’arrête dans un grincement de pneu devant l’une des maisons du quartier. Il en sort plusieurs jeunes qui se dirigent rapidement vers une autre bande qui les attendait de pied ferme. Insultes et cris, en quelques secondes l’altercation se transforme en bagarre. Soudain le rayon des couteaux et crans d’arrêts luisent, l’affaire dégénère. Trois adolescents sont poignardés, l’un d’entre eux est grièvement blessé, il essaye de s’enfuir, mais il est en train de perdre tout son sang, quelques secondes après il tombe sous le coup des blessures et reste affalé sur le sol, mort. La bande responsable du meurtre remonte dans la jeep et s’enfuit en trombe du lieu de l’incident.

Sur le terrain de sport abandonné pas très loin ils brûlent leurs vêtements, nettoie les lieux et disparaissent en campagne jusqu’à ce que les choses se calment. Ils vérifient la concordance de leurs versions afin que les policiers ne puissent pas les soupçonner.

Fin de l’histoire, cela ressemble à un extrait de film américain, à notre grand regret, ce tragique événement fait bien partie du réel. La raison au meurtre était une dispute à propos d’une fille et un adolescent, qui n’était en rien impliqué dans le différend, s’est retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment, ce qui lui coûta la vie.

Le principal suspect

L’identité des assassins ne sera pas révélée, cependant le profil du principal suspect du meurtre est des plus surprenantes, lequel ne correspond pas à ce à quoi nous sommes habitués dans de tel cas. Un jeune de 18 ans, calme, ouvert sur le monde. Fils de bonne famille qui a grandi dans un quartier chic d’une ville de banlieue, ayant fait sport étude dans un des meilleurs lycées du pays, et sur le point de démarrer un parcours universitaire, en bref, un enfant tout à fait normal à première vue. C’est ce qui fait vraiment peur dans toute l’histoire. Qu’est-ce qui a poussé ce jeune à commettre un tel acte ? Et de quels moyens disposent les parents pour ne pas avoir besoin d’être continuellement sur leurs gardes lorsque leurs enfants sortent ?

Ce genre de faits divers est de plus en plus courant. Il y a quelques jours, le 14 janvier 2007, un lycée de la Sarthe vient à nouveau d’être le lieu d’un tel acte. Une réflexion sur le sujet s’impose.

Environnement ou hérédité ?

Depuis toujours, les sociologues se sont posés l’éternelle question : l’homme est-il le produit de la société ou son comportement est héréditaire et insusceptible de changement ? Sigmund Freud le père de la psychanalyse moderne est le premier à avoir pris en compte l’environnement et l’hérédité comme deux composantes agissant de paires, cependant sa tendance principale fut l’hérédité. A l’inverse, Bruce Perdrix Skinner, un des pères de la psychologie du comportement explique que l’environnement extérieur est le seul facteur qui décide du comportement de l’homme. D’après sa méthode, dans certaines conditions environnementales, un enfant peut devenir n’importe quoi - avocat ou assassin. Alfred Adler, fondateur de la psychologie individualiste explique également que seule la société façonne la personnalité de l’homme.

Comme Skinner et Adler, Yéhouda Ashlag, penseur de la première moitié du XXe siècle, a aussi vu dans la société un moyen déterminant de la construction de l’homme. Il ne remet pas en cause le poids de l’héritage génétique avec lequel naît l’enfant, mais il insiste sur le fait que, dès la naissance de l’enfant, celui-ci est uniquement influencé par l’environnement.

« Je m’assois, je m’habille, je parle, je mange », explique Ashlag dans son article « La Liberté » : « Tout ceci non pas parce que je veux m’asseoir ainsi, m’habiller de cette façon, parler comme cela et manger comme ceci, mais parce que les autres veulent que je m’asseye ainsi, que je m’habille, je parle et je mange de cette façon. Tout cela est en fonction des désirs et goûts de la société et non de ma propre volonté. »

Exposé à une réalité violente

En fait, il s’avère que l’environnement est le facteur central qui influe sur l’enfant et, de nos jours, le principal environnement qui agit sur lui est les médias. Des programmes violents - en partant des dessins animés jusqu’aux journaux télévisés quotidiens - exposent les jeunes à une réalité des plus violentes.

Cette réalité conduit l’enfant à se comporter de façon agressive. Nous n’avons pas à blâmer l’enfant, il ne sait pas comment se comporter dans une situation ou une autre. Dans chaque cas, il applique tout simplement et ce inconsciemment ses souvenirs, « en tire » un certain comportement - et l’adopte tel un robot.

Ashlag explique que le principal problème de notre société moderne est que l’égoïsme ne va qu’en s’accroissant, ce qui est le mouvement naturel de l’évolution de nos désirs. Il en résulte que les hommes se séparent les uns des autres et les valeurs sociales d’amour et le respect d’autrui disparaissent. Chacun commence à focaliser d’avantage sur soi-même, et ne pense qu’à satisfaire ses propres besoins, et ce également même si cela doit être au détriment des autres, d’où notamment le phénomène de violence. L’intensification de ce phénomène est flagrante en particulier dans les médias de masse. Par exemple, lors d’une étude réalisée par des chercheurs de l’université Laval, ils ont découvert que, de 1993 à 2001, les épisodes de violence physique avaient augmenté de 378 %. En 2001, on en retrouve en moyenne 40 par heure. Le contenu médiatique, à l’image de ces producteurs, est conçu pour vendre et faire progresser des produits et idées basés sur la valorisation de l’égoïsme et de la réussite au détriment de l’autre. Or, par la force des choses, le système en coulisses qui impose la personnalité des médias est la baby-sitter de la future génération.

Cependant même si nous éteignions la télévision et n’achetions plus le journal, nous ne pourrions pas éviter la violence. Il suffit de descendre dans la rue pour voir des gens prêts à tout faire pour disposer de plus. Les enfants apprennent par l’exemple. Si tel est l’exemple que leur propose notre société, il n’y a rien de surprenant qu’ils méprisent les valeurs que nous leur offrons, nous n’avons pas à nous étonner du résultat.

Une question d’éducation

Autrement dit, la société actuelle ne laisse pas le choix aux enfants que de donner raison au proverbe « L’homme est un loup pour l’homme ». Dès l’enfance, nos enfants sont marqués par des exemples négatifs de la société, c’est pourquoi, il n’y a pas de quoi être surpris qu’en grandissant, la violence devienne leur norme de référence. Les adultes tentent d’apprendre aux enfants d’être prévenants, soucieux des autres, mais les enfants regardent les adultes et voient qu’ils se conduisent autrement. Même si nous expliquons encore et encore à un enfant ce qu’il est préférable de faire, comment parler et se comporter, cela ne sera pas d’une grande utilité tant que nous ne lui servirons pas d’exemple pratique, sans avoir besoin d’explication.

A la lumière des derniers événements, nous n’avons pas le choix. Pour engendrer un vrai changement chez nos enfants, nous, les adultes, devons changer notre attitude égoïste envers autrui. En fait, c’est la meilleure chose que nous ayons à faire, pour nos enfants et pour nous-mêmes. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons assurer à nos enfants une véritable éducation et des valeurs et de leur éviter, ainsi qu’à nous-mêmes, la prochaine altercation de violence.


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5 réactions à cet article    


  • Piotrek Piotrek 17 janvier 2008 13:26

    Je ne crois pas que l’exemple que pourraient donner les parents soit la solution.

    - Cela impliquerait que les parents s’impliquent (c’est nettement plus difficile qu’il n’y parait)

    - Cela impliquerait que les parents delivrent le bon exemple de maniere adequate, c’est a dire en etant honnetes, efficaces... et en permanence sous peine de voir tout le travail s’effondrer a cause d’un soupcon d’hypocrisie.

    - Cela impliquerait que l’enfant comprenne, accepte l’exemple, et la crise d’adolescence c’est pas rien ! :)

    Bref une idee louable, mais beaucoup trop d’obstacles pour que cela fonctionnea tous les coups.

    Mon opinion c’est de donner a l’enfant la faculte d’analyser un choix, d’utiliser son imagination pour anticiper les differents denouments, de remettre en cause les denouments en fonction de ce qui est plausible, bref de reflechir. Cela peut etre nettement plus ludique, plus naturel, nettement moins exigent pour les parents, applicable autant de fois que l’on veut dans une journee. De plus les parents et les enfants se connaiteront plus

     

    Vous avez a juste titre evoque la violence qui nous entoure, mais vous l’avez juste evoque. Il est important, je pense de’analyser en detail comment la violence apelle la violence. A mon avis la violence de la tele donne de la matiere a l’esprit en colere.


    • Brif 17 janvier 2008 15:16

      Nous sommes responsables de nos actes.


      • aurelien aurelien 17 janvier 2008 23:06

        Effectivement, la société a un rôle très important dès le plus jeune âge sur la formation des comportements de violence : l’environnement familial, scolaire, le lieu de vie, tout cela influe sur les jeunes enfants.

        La compartimentation des élèves dans des classes d’âges, sans aucun lien entre eux, la comparaison entre les élèves comme mode de fonctionnement de la motivation, la compétition résultant de l’imitation et de la hiérarchisation des élèves entre eux selon leurs notes scolaires, les systèmes de notation eux-mêmes, tout cela ne favorise pas le développement des personnes, mais l’acceptation très jeune d’un conformisme normalisateur, dont beaucoup d’éducateurs se font le relais, n’ayant pas été éduqués à voir en eux-mêmes les conséquences et les implications de leur propre éducation et propre parcours personnel.

        C’est cette tendance à la normalisation mais aussi à la communautarisation (effet inverse) qui poussent les individus à grandir psychologiquement dans la division et dans le conflit, entre groupes, entre personnes, mais aussi entre l’individu et la société dans son ensemble. Le culte de l’individualisme participe de cette éducation et est l’un des moteurs du conformisme : la réussite personnelle, associée à la compétition, se retrouve à toutes les échelles de la société, dont la "morale" établit l’existence de gagnants et de perdants, de riches et de pauvres, de travailleurs, et de rentiers...etc Mais c’est au niveau psychologique que la violence prend sa source, dans le déni de l’autre, par l’établissement de rôles sociaux, et d’images associées selon des standards véhiculés par des médias centralisateurs et créateurs d’une certain perception du monde et du quotidien. L’être humain est évacué au profit d’une certaine catégorisation sociale, et la souffrance engendrée par cette surimpression de la société sur l’humain trouve compensation et résolution parmi d’autres lieux de création d’images que sont les cabinets de soins. Vous n’êtes plus alors boulanger ou maçon, architecte ou ingénieur, mais patient sous l’autorité d’un autre masque social : le psychologue ou le psychiatre. Ou alors vous pouvez vous rendre à l’église et vous retrouvez d’autres images encore plus prégnantes, conditionnantes et moralisatrices. La violence prend sa source dans la formation des images et elle fait partie intégrante de la société, car la société est créatrice d’images et ne vit que dans l’image. Pas seulement l’image médiatique, publicitaire, mais l’image sociale et celle que nous formons de nous-même dès nos premiers pas dans la vie. L’image du moi et de ce qui n’est pas moi, la séparation entre le moi et l’autre, par l’identification et l’adhésion à des dogmes de pensée, des croyances, des philosophies, des idéologies... Lorsqu’il y a image consciente d’une identité, il y a violence, et lorsque nous cultivons une identité, nous cultivons la violence. Aussi, la violence n’est pas quelque chose d’extérieur à soi, existant uniquement dans la société, elle se situe dans les mécanismes même faisant de nous des individus vivant dans cette société. Aussi l’histoire de la violence, c’est notre propre histoire à chacun d’entre nous, et en même temps celle de la société et de l’humanité toute entière.


        • biztoback 18 janvier 2008 12:54

          Quand on revient en arrière on remarque que souvent une seule personne travaillait dans le foyer, alors que le conjoint restait au foyer en permanence.

          Evidemment cela n’est plus possible de nos jours (du moins dans les familles modeste et moins modeste), mais peut-être peut-on voir un rapport (comme le fait remarquer brinb666) entre la montée de la violence et la temps majoritaire que passe les parents au boulot.

          Après, il faut savoir choisir entre l’éducation de ses enfants et son travail, personellement je suis plus : "gagner ce dont j’ai besoin pour vivre" et pas plus. Sans oublier que les parents ont aussi besoin de loisirs et de temps à eux.


          • illana31 3 février 2008 00:22

            Bonjour,

            Je me permet d’intervenir dans cet espace de commentaires car il n’y a apparemment aucun moyen de contact privé.

            Je suis étudiante en Master de communication à Marne-la Vallée et je réalise un mémoire ayant pour thème le journalisme sur Internet. Je me pose notamment la question de la représentation que le internautes-journalistes se font d’eux-mêmes. De la place, du rôle qu’il s’octroie au sein de la profession journalistique.

            Je serais donc très intéressée d’en discuter avec vous. Si vous êtes disponible pour un entretien, contactez-moi sur ma messagerie [email protected]

            Merci par avance

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