La marche des Veilleurs à la Concorde : prélude à une révolution ?
Pour la dernière étape de leur périple en France, les « Veilleurs » avaient rendez-vous samedi place de la Concorde à Paris, malgré les interdictions de Valls et mises en garde des autorités.
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Le bras de fer a duré plusieurs heures samedi 31 août. Les adversaires ? D'un côté, les « Veilleurs », mobilisés contre la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, de l'autre la préfecture de police de Paris. L'enjeu ? Une « marche », sur le trottoir, du parvis de la Défense à la place de la Concorde en clôture symbolique d'une action de plusieurs semaines cet été. La préfecture y voyant une manifestation non déclarée avait interdit l'opération.
Une trentaine de « veilleurs » avait donné rendez-vous en fin d'après-midi à leurs camarades de contestation et leurs soutiens au pied de la Grande arche de la Défense, dans les Hauts-de-Seine. Des retrouvailles sous les yeux de nombreux CRS, aux aguets du moindre débordement et de la moindre preuve du fait que, contrairement aux formules parfois alambiquées - « chaque marcheur marche individuellement » -, le projet est bien de manifester.
Sur les réseaux sociaux, les messages de mise en garde avaient fleuri, conseillant d'éviter les signes distinctifs, les banderoles et drapeaux, les rassemblements durables. Au pied de l'arche, la préfecture de police avait dépêché le commissaire divisionnaire Alexis Marsan pour tenter une dernière fois de décourager les « Veilleurs » de se rendre place de la Concorde. Rien n'y a fait, et le policier d'expérience n'a pu que proposer de « trouver un terrain d'entente », un « modus operandi » pour déterminer un autre itinéraire. Sous des caméras amateurs de « veilleurs », le commissaire a été enjoint, entre autres, d'« aller en banlieue plutôt », de s'occuper des « camps de Roms ». Il est aussi questionné d'un ton bravache : « Allez-vous faire des sommations avant de disperser ? Est-ce que vous allez respecter la légalité ? »
« On nous prend pour des personnes dangereuses » François, samedi soir à Paris.
Puis, les participants étant de plus en plus nombreux, le mouvement a été lancé, vers la capitale, l'avenue des Champs-Elysées, la Concorde. Et comme promis, les marcheurs se sont fondus dans le paysage, les promeneurs de la Seine et les flâneurs du samedi. Jusqu'à la place de la Concorde où les policiers avaient vu les choses en grand : des dizaines de camions de police, des ambulances, des barrières de sécurité. Leur premier mouvement a été d'évacuer, les touristes comme les « veilleurs », le terre-plein central, au pied de l'obélisque. Rapidement, les « veilleurs » se sont vus cantonnés au bas des Champs-Elysées, au pied de l'hôtel Crillon. Pour beaucoup, l'essentiel était d'être là, pour papoter, pique-niquer ou chanter. Le moindre mouvement des policiers est filmé, moqué, discuté. François, venu de Savigny-le-Temple en Seine-et-Marne, juge ce déploiement « minable, scandaleux, on nous prend pour des personnes dangereuses ». Michel, venu malgré son besoin d'une canne, est là « pour la liberté de circuler ».
Vers 20h50, les véhicules de police forment un complexe couloir pour faire traverser la place aux « veilleurs » en toute sécurité sur cet endroit très fréquenté par les véhicules, et leur permettre de tenir leur veillée devant les grilles des jardins des Tuileries. « Les veilleurs, ce soir, veilleront bien place de la Concorde », lance l'un des meneurs du mouvement, acclamé par des centaines de personnes. Dès lors, les banderoles agrémentées de citations de Victor Hugo, Robert Desnos, Jean Anouilh, Aristote ou Thomas Jefferson sont déployées, la sono est installé, le violoncelle est déballé, des bougies sont allumées. En quelques mots, on moque l'Agence France Presse qui n'a compter que 200 personnes, un « déni de réalité ». Les organisateurs annoncent près de 5000 personnes sur Twitter. La police, qui a compté environ 600 individus, est raillée : « On a dit qu'il fallait interdire cette marche, parce que nous serions une menace. Mais qui a bloqué le métro ? Qui a fermé des rues ? » Les veilleurs ont gagné, se disent-ils. Aucun incident n'a été relevé.
Voici le témoignage d'un Veilleur attaché à son pays et à ses valeurs :
"Nous voulions nous joindre à la veillée clôturant la dernière étape de la marche des veilleurs, veillée qui se tenait sur la place de la concorde. Afin de nous rendre à Paris, nous avions décidé de prendre le train. Hélas, de nos jours, en France, se rendre à une manifestation contre le mariage gay devient de plus en plus compliqué. Par un mystérieux hasard que nous ne qualifierons pas de coïncidence, de nombreux trains depuis Versailles à destination de Paris étaient supprimés.
Nous sommes finalement parvenus jusqu’à la place de la Concorde, où nous avons assisté à un spectacle hallucinant. La place fourmillait de fourgons et de voiture de CRS. Certes, nous avons participé à de nombreux rassemblements afin de montrer notre attachement au modèle familial traditionnel. Certes nous connaissions la paranoïa du gouvernement vis-à-vis des opposants au mariage gay. Mais nous n’imaginions cependant pas qu’un tel dispositif serait déployé pour surveiller le rassemblement d’un mouvement qui n’a jamais causé de violence ou de casse. Après avoir pris des photos pour garder une preuve du ridicule de la situation nous avons tenté de rentrer dans le périmètre de la place dans lequel se trouvaient les veilleurs. Mais un barrage de CRS nous en a interdit l’accès. Il nous fallut faire le tour pour qu’un autre barrage de CRS nous indique la marche à suivre afin de rentrer dans le groupe. En nous indiquant le chemin à prendre les CRS ne faisaient que sélectionner l’endroit le plus propice pour nous encercler. En effet, brusquement les CRS se mirent à encercler le rassemblement, empêchant quiconque de sortir.
Au bout de quelques temps, nous avons cherché à quitter la veillée car nous devions nous rendre place de l’Etoile. Nous étions parfaitement conscients que nous aurions du mal à quitter la veillée mais nous ignorions les proportions que cela allait prendre. Le cordon de CRS, extrêmement resserré nous barre la route. Nous parlementons avec eux, nous manifestons notre étonnement. Ils opposent à cela leur seul argument qu’ils répètent machinalement : « on a des ordres ». Un groupe de touriste réussit à s’extraire hors du cordon, nous protestons, nous sommes pressés. Rien n’y fait. Nous affirmons alors être nous aussi des touristes. Ils nous suggèrent d’aller voir la commissaire dont ils dressent un portrait peu flatteur. La redoutable organisation de leurs unités ne leur permet pas de nous indiquer où se trouve cette commissaire. Nous tentons notre chance avec d’autres CRS. Parlementations. Refus. Nous sommes éconduits et renvoyés vers les CRS avec qui nous avons discuté premièrement. Ils ne savent plus quoi dire et semblent embêtés de dispenser pareilles consignes. Ils nous proposent à nouveau d’aller voir la commissaire dont ils nous indiquent cette fois-ci l’emplacement. Peu confiants quant à la réaction de la commissaire, nous décidons de tenter une dernière fois notre chance auprès d’un grand CRS, qui nous laisse passer, croyant que nous étions des touristes.
Nous dressons alors un bilan hâtif de cette soirée : beaucoup de policiers, beaucoup de négociations, peu de libertés et peu de médias. Certes, ces manœuvres policières ne constituaient que de l’intimidation, mais ces procédés sont révélateurs d’un esprit. Nous ne nous révoltons pas contre notre pays, mais contre ce gouvernement qui déshonore la France. Alors même que la garde des Sceaux présente un projet de réforme pénale ultra laxiste, la préfecture de police, sur ordre du gouvernement, surveille étroitement quelques milliers de manifestants silencieux, en essayant tout pour les décourager, les intimider, tandis que les braquages et les règlements de compte deviennent monnaie courante dans le sud de la France. Notre président, qui prétend être l’héritier de la révolution française n’a fait que perpétuer les arrestations arbitraires qui s’effectuaient à cette époque, tout en omettant d’instaurer la liberté l’égalité et la fraternité dont le peuple a besoin."
Sources :
http://infocomnet.wordpress.com/2013/08/31/les-veilleurs-marchent-sur-la-concorde/
http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/
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