Il ne faut plus avoir peur ni honte de s’avouer surendetté, cela arrive à des gens très bien ...
Le surendettement. Pourquoi on en arrive là, comment on prend la décision de s’en apercevoir, puis de réagir. Le travail des proches. La rédemption. La situation de surendettement est traitée dans le Code de la Consommation dans ses articles L 331-1 à L 333-8.
Le surendetté est désigné sous le l’appellation de "débiteur" et les sociétés de crédit ou banques à qui le débiteur doit de l’argent sont appelées "créanciers". Un déséquilibre entre les ressources et les dépenses qui va en s’accentuant. Si le traitement des situations de surendettement est convenablement défini dans le Code de la Consommation, le législateur n’a pas, semble-t-il suffisamment travaillé sur la prévention du surendettement. De telle sorte qu’on laisse le patient-débiteur s’enfoncer jour après jour dans un état de plus en plus critique jusqu’à l’asphyxie alors que tous les signes de perdition sont clairement visibles compte tenu des moyens d’information dont disposent les établissements de crédit et les banques du candidat au surendettement, le débiteur.
Aucun système d’alerte n’est mis en place alors que plusieurs données pertinentes sont aisément repérables et que si, pour l’instant on ne peut contraindre un futur surendetté à interrompre sa chute on pourrait, du moins, le mettre en garde de façon sérieuse et mettre en place les mesures qui ne lui permettront pas d’aggraver sa situation. Car dans la plupart des cas, le débiteur surendetté n’est pas clairement conscient de sa situation financière. Il a dépassé le stade de l’auto contrôle de ses finances personnelles ou familiales. Ce qui l’empêche de comprendre sa situation c’est souvent la peur de se rendre compte de "où il en est" et surtout, de ne pas disposer de solution pour s’en sortir sauf à s’enfoncer encore un peu plus. Souvent, cette situation est dissimulée aux proches, conjoint, enfants, amis.
Elle entraîne évidemment des rapports faussés basés sur le devoir de paraître ce que l’on est pas ou plus. Il s’en suit une sorte d’abandon à la providence, un blocage. Les origines : Elles sont multiples. Citons en une très fréquente et très simple : le passage de la situation de salarié à celle de retraité. Voici un salarié cadre, disposant d’une voiture de fonction, d’un téléphone portable voire d’un ordinateur professionnels, de tickets restaurant, de 14 mois de salaire plus quelques petites primes par-ci, par là et qui aurait atteint, et peut-être un peu dépassé le pourcentage supportable d’emprunts. Mettez-le à la retraite, le voici avec 30% de revenus en moins mais face aux mêmes charges. Et pourtant, ce candidat n’a rien commis de répréhensible. Ajoutez à cela un petit accident de la vie tel qu’il en arrive toujours d’imprévisibles au mauvais moment ... et voilà. Et que dire de celui qui bien malgré lui devient chômeur. Ceux qui ne franchissent pas le pas en faisant sérieusement leurs comptes et en réduisant la voilure de leur train de vie sont potentiellement candidats au surendettement. Car il est très facile de se surendetter en quelques semaines.
Et le pire, c’est que dès que l’on met le pied dans une société de crédit, revolving ou carte pass des grandes surfaces on peut emprunter 50 ou 60 000 euros en quelques jours. Dès qu’un crédit est ouvert quelque part, il faut croire "qu’ils" se passent le mot car ça y est, la meute se jette à vos trousses. Au téléphone, dans la boite aux lettres, "ils" affluent. Tous veulent vous proposer du crédit à un taux exceptionnel (pendant trois mois) - remboursement après les vacances, remboursement à la rentrée, ne payez rien tout de suite ...le piège est tentant. Maintenant qu’on est à la retraite on va se payer un abonnement à une chaîne foot et un bel écran HD. Danger !!!
Les fournisseurs de crédit l’ont bien compris ; exploiter l’oisiveté en la remplissant par des besoins onéreux qu’ils financeront. Et à Dieu va ... A mon sens,il y a là un travail législatif à faire pour contraindre la banque principale du futur surendetté (celle qui reçoit les salaires ou les retraites et pensions sur lesquels seront remboursés les emprunts)- car tout le monde est un surendetté en puissance - à tenir à jour une sorte de "ligne de flottaison préventive" en dessous de laquelle il ne faut pas sombrer. Dans le cas que j’expose, par exemple, la banque principale savait pertinemment que 87% des revenus étaient employés à rembourser des crédits à la consommation. Les outils informatiques existent. Et pourtant cette banque n’a rien fait pour alerter son client sur l’aggravation progressive de son cas. La prise de conscience : Elle vient rarement du surendetté lui-même, seul. Il faut un incident grave, coercitif. Cet incident, il l’espère, il le souhaite mais n’a ni le courage ni la volonté de le provoquer lui-même. Il ne viendra pas non plus d’une des société de crédit. Car celles-ci sont longues à la détente, en cas d’impayé, elles ménageront le débiteur le plus longtemps possible, quitte à proposer un re-étalement de la dette, un arrangement, voire une rallonge. Mais pas la rupture, pas la déclaration à la BdF car là, c’est le clash. C’est un client perdu pour 10 ans. Pour que la prise de conscience se produise il faut la conjonction de deux faits. Un gros coup au moral du débiteur (le sentiment d’être vraiment coincé) et l’intervention au bon moment d’un tiers de confiance, un proche qui va aider le débiteur à enfin réaliser, sortir sa calculette, les feuilles de paye ou de retraite, le relevé de la banque. Il faudra du tact, du temps et de la persévérance au tiers de confiance et une minute de vérité au débiteur.
Dès lors que ces deux conditions sont réunies on peut passer du virtuel au réel. Le ressenti d’un surendetté virtuel est beaucoup plus insupportable que celui d’un surendetté réel. Il se levait tourmenté et se couchait inquiet, maintenant, il y a l’impression positive de la faute avouée et s’il s’engage dans des contraintes nouvelles c’est en même temps un grand soulagement. Constitution du dossier : Le travail consiste maintenant à réunir les documents, état et nature des crédits, impôts et toutes les charges incompressibles du ménage. La BdF fourni des imprimés et vérifie toutes les données transmises. Il faut aller jusqu’au bout sans rien omettre des dettes et impayés en cours. La BdF adopte, à l’égard des surendettés, une attitude à la fois stricte et bienveillante. Pas de reproches ni commisération. Il est également demandé de rédiger un texte court expliquant les raisons pour lesquelles le surendetté en est arrivé là.
Il est conseillé de ne pas tricher dans l’exposé des raisons invoquées car la Commission de surendettement évaluera la sincérité du demandeur, saura lire entre les lignes et renseigner les créanciers sur la crédibilité de l’engagement que le débiteur se propose de prendre. Lorsque le dossier est constitué et déposé à la BdF celle-ci défini une mensualité maximale supportable en fonction des charges fixes et des revenus de l’impétrant et propose aux créanciers une répartition d’une partie des ressources du créancier affectée aux remboursements des crédits en fonction des montants des prêts restant à rembourser, de la durée de ceux-ci. La Bdf envoie alors au débiteur une "Notification de recevabilité". Cette pièce est très importante. Elle reprend et fixe sous forme de tableau joint l’état exhaustif des créances ainsi que le futur montant de la mensualité globale à prévoir pour l’ensemble des crédits en cours.
Certains créanciers acceptent d’abandonner les intérêts sur le re-étalement de la dette, d’autres, plus rapaces, se servent encore un peu. Entre le jour de la prise de conscience du surendetté, retrait du dossier à la BdF et cette lettre de recevabilité, il s’est écoulé environ 6 mois. Que faire pendant ces six mois. Mon conseil est de bloquer tout en intervenant auprès de sa banque perso. Suspension de tout les prélèvements en prévenant les créanciers qu’une procédure de surendettement a été lancée auprès de la BdF. Ne pas s’étonner du fait que la plupart de créanciers ne tiendront pas compte des courriers que vous leur ferez parvenir et continueront à vous relancer et à vous menacer. C’est normal, ils font leur travail qui consiste à sauvegarder leurs intérêts. Et surtout ne pas succomber aux menaces plus virulentes d’un créancier plutôt qu’un autre. Puisque l’option choisie est de suspendre TOUS les règlements, ne pas favoriser un créancier aux dépends d’un autre.
Empilez soigneusement les lettres de relance sans états d’âme. A noter que certains créanciers sont assez abjects pour vous proposer encore des crédits pendant cette période, histoire de vous enfoncer un peu plus. Surtout n’acceptez rien qui n’aggrave votre situation et vous rendrait incrédible aux yeux de la BdF. Après vérification du tableau joint à la lettre de notification de recevabilité, il faut renvoyer rapidement votre accord à la BdF. Environ un mois après, la BdF vous envoie un plan conventionnel de redressement approuvé par les créanciers. Ce plan fixe la durée et le montant de chaque créance. Vous pouvez alors reprendre les paiements en donnant les instructions nécessaires à votre banque habituelle (optez pour des virements).
Enfin, une Commission se réunit pour approbation et le plan définitif est mis en place. Vous ne pouvez plus prétendre à aucun crédit pendant la durée du plan. Vous avez droit à un chéquier normal ainsi qu’à une carte bleue à effet immédiat. Vous allez vous sentir mieux dans vos baskets. Vous allez apprendre à bien gérer vos comptes. A noter encore que la satisfaction ressentie après tout ce travail compense largement l’angoisse éprouvée au moment de la décision de la prise de conscience. Il n’est pas écrit sur votre figure que vous êtes "surendetté" car vous ne l’êtes plus. Vous l’étiez, vous vous êtes soigné, vous êtes guéri.