Les Gilets Jaunes et la répression

Devant l’intensité de la répression et ses graves conséquences, les Gilets Jaunes devaient trouver une réponse autre que la persistance dans les Actes hebdomadaires bien que, toujours soutenus par la population d’après les sondages (1), ils montrent leur détermination – des Gilets Jaunes et de la population – à obtenir un changement de politique. Lors de l’Acte XII, ils ont rendu hommage à ceux des leurs qui ont été blessés, gueules cassées et autres victimes.
Depuis le début des événements, 1 796 condamnations ont été prononcées par la justice et 1 422 personnes sont encore en attente de jugement. Plus de 1 300 comparutions immédiates ont été organisées et 316 personnes ont été placées sous mandat de dépôt (Édouard Philippe).
Dans les différentes manifestations, certains ajoutent aux revendications de justice sociale, fiscale, démocratique, des mots d’ordre contre la répression de manifestation la plus violente depuis plus d’un demi-siècle.
La France est le seul pays de l'Union européenne à utiliser des grenades au gaz lacrymogènes GLI-F4 à coque dure lors des manifestations même les très controversées balles en caoutchouc dur du LBD 40 ne sont utilisées que dans deux autres pays européens, en Pologne et en Espagne, à des fins de démonstration (2).
Devant le nombre important de victimes, ne faut-il pas aller au-delà de ce face à face, Gilets Jaunes-gouvernement, et accepter une alliance, prudente peut-être mais une alliance, avec le mouvement syndical, comme le 12 février, pour augmenter la pression : On défend le même bifteck, autant se réunir a dit Jérôme Rodrigues, l’une des victimes emblématiques. La recherche d’autres moyens d’actions par Eric Drouet va dans le même sens. De même que l’Assemblée des Assemblées de Commercy dont les suites sont attendues.
Cette violence n’a cependant pas été sans effet. Sans elle, Emmanuel Macron aurait fait comme tous ces prédécesseurs, il aurait négligé de répondre à la colère. Ce qu’il a fait jusqu’au discours du 10 décembre. Il a vu que ce n’était pas suffisant et s’efforce de reprendre la main par le GrandDébatNational et l’annonce filtrée du référendum.
Même Christophe Castaner qui ne voit rien, n’entend rien et dit, dangereusement, n’importe quoi, a enfin reconnu qu’il y avait quelques problèmes. Son profond aveuglement n’était pas complètement irréversible, contrairement à certaines blessures infligées aux manifestants. Il commence à reconnaître, parcimonieusement, que sa vision du maintien de l’ordre est un facteur de désordre et a des effets collatéraux non négligeables et qu’il pourrait revoir les stratégies des forces de l'ordre. La fissure au sein de LREM lors du vote de la loi anticasseurs, 50 macronistes se sont abstenus à l’Assemblée nationale lors du vote de la loi anticasseurs et 15 étaient absents, n’est probablement pas étrangère à cette évolution et peut être considérée comme un effet de la lutte des gilets Jaunes.
Cette loi du gouvernement qui vise à faire peur aux Gilets Jaunes pacifiques et qui comporte un fort risque d’extension à diverses associations en fonction des circonstances.
Il a fallu plusieurs semaines pour que Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, consulte, partiellement, la presse indépendante, les signalements à l’IGPN et les rapports de police…
Car il déclarait, le 14 janvier, qu’il ne connaissait aucun policier ayant attaqué un Gilet Jaune. En cela, il ne faisait que suivre le silence du président de la République. Bien secondé par le secrétaire d’État Laurent Nuñez jugeant l’usage des armes intermédiaires (LBD40 ou grenades) proportionné. Tous se contentaient de s’informer auprès du Journal télévisé des grandes chaînes de du 20h de TF1 et de France 2 qui, comme l’a relevé le site Arrêt sur images, ont attendu huit semaines et le cas du commandant Andrieux, pour véritablement évoquer les violences policières. Ils n’avaient pas entendu parler du journaliste David Dufresne qui, depuis le 4 décembre dernier recense les personnes blessées par les forces de l‘ordre (un décompte pour recenser les personnes blessées ou par le journaliste David Dufresne sur son compte Twitter ou David Dufresne, la vigie des violences policières), lors des manifestations, qui atteint aujourd'hui plus de 400 signalements.
Le 10 février, Christophe Castaner s'est dit "prêt" à se pencher sur les réponses apportées par les forces de l'ordre aux violences lors des mouvements de protestation. Il a même émis un mot de regret. Reconnaissant des anomalies et des dérapages et des blessures graves, qu’il fallait travailler à la refonte de notre doctrine de maintien de l'ordre… Pour en arriver là, il a fallu cependant, suivant le collectif Désarmons les au moins 5 personnes à la main arrachée, 25 éborgnées….
Le ministre de l’Intérieur et les autres politiques, à cette occasion, pourraient se demander s’il n’y a pas un léger problème de conflit d’intérêt à confier à la police, fut-elle l’IGPN, les enquêtes sur la police. Comme les ordres traitent des conflits de leur corporation, l’Ordre des médecins pour les conflits médicaux... Ne pourrait-on banaliser ces questions et les confier à des juges indépendants, notamment, du gouvernement ? Pour veiller au respect par les fonctionnaires des lois et règlements et du code de déontologie de la police et de la gendarmerie.
S’agit-il d’une prise de conscience tardive ? Lâche-t-il du lest devant un début de contestation au sein de LREM ? Sent-il que son siège devient branlant ?
Quelques images recueillies lors de différentes manifestations à Paris. (3).
Le 15 décembre 2018, gare Saint Lazare
Le 12 janvier 2019, Avenue de Friedland
Le 19 janvier 2019
Le 2 février 2019, place de la République
Le 5 février 2019, rue de Rivoli
Le 9 février 2018, Champs Élysées
1 - Près de 65% des Français continuent à soutenir le mouvement selon le baromètre YouGov pour Le HuffPost et Cnews 07/02/19
2 - Die Welt, cité par Courrier international 7-13/02/19
3 - Nulle image d’affrontements n’est présentée ici, largement diffusées par ailleurs, mais qui tendent à faire passer au second plan les revendications. Pour certains, les affrontements sont devenus un spectacle avec des dizaines de personnes qui s’approchent aussi près que possible pour photographier avec leur téléphone
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