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Accueil du site > Actualités > Société > Les racines du mal…

Les racines du mal…

“L’insensibilisation induite par l’organisation mondiale de la consommation,…, produit une immense souffrance à la limite du supportable, une quasi-insensibilité extraordinairement dangereuse, une misère du sens, une impossibilité d’exister” B. Stiegler in “Aimer, s’aimer, nous aimer” ed. Galilée 2003

Sonder l’insondable, se figurer l’infigurable de la barbarie pour rendre les choses qui traversent le réel plus supportables. L’explication des atrocités commises soulève chez les “normaux” d’innombrables questions. On espère comprendre et résoudre. Pourtant, il se pourrait que nous passions, en l’occurrence et au vu des détours du débat, sur la seule et essentielle interrogation. Pourquoi les sociétés humaines contemporaines et civilisées engendrent-elles des individus, en leurs seins, capables de tels actes ? L’objectivation grâce aux faits collectés sur l’assassin, ses croyances, son fanatisme ouvre des chemins de compréhension, mais il n’est pas impossible que les ferments puissent déjà être là, tapis.

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Francis Bacon

Au-delà de la simple question de la critique d’un système dans ses conséquences globales, sociales et macroéconomiques, B. Stiegler s’est intéressé aux dégâts de pouvaient provoquer le lessivage progressif du narcissisme. À la suite de l’affaire R. Durn, il pointe l’agonie d’un système qui vide les individus de leur propre existence. Parmi les raisons qui motivèrent le tueur de Nanterre, émerge l’envie “pour une fois d’exister” selon ses propres mots. Le philosophe met en exergue l’immense capacité des sociétés modernes à priver l’individu de son narcisse primordial, “structure psyché indispensable à son fonctionnement, cette part d’amour de soi qui peut devenir parfois pathologique, mais sans laquelle aucune capacité d’amour ne serait possible”. Qui fait exister et reconnaitre le “je” dans le “nous”, par ce qu’il appelle l’individuation. Qui sit l’individu dans la collectivité, la société. Par ce biais il vit, se reconnaît, reconnaît et trouve une place, d’Homme spécifique et unique.

Or selon B. Stiegler tout est mis en œuvre dans les stratégies globales de l’industrie culturelle, rouleaux compresseurs de la mercatique, pour désindividuer les êtres. Un unique objectif qui consiste à standardiser les goûts et synchroniser les attentions (les temps de cerveaux). À terme il prive l’Humain de cette individuation essentielle, transformant le “je” et le “nous” en un “on”, sujet indéterminé. Or loin de ce qui est communément affirmé, le système dit “d’individualisme” engendre des comportements grégaires, et non individuels, ceux d’une société troupeau. Même si ce n’est pas le cas du réel tous les jours tout le temps, la finalité de cette structure, par la pesanteur et le conditionnement de l’industrie culturelle, si elle touchait son terme dans sa logique la plus efficiente conduirait les Hommes à se comporter de façon identique dans des cycles réguliers de travail/consommation. À la fin des fins, comme pour R. Durn, devant le miroir, l’indigence et la contemplation du néant d’une existence. Et c’est peut être vers celà que les sociétés modernes tendent. Pour B. Stiegler, dans le drame de Nanterre, l’assassin “voyait dans le conseil municipal la réalité d’une altérité qui le faisait souffrir, qui ne lui renvoyait aucune image, et il l’a massacré”.

Ce parallèle n’est surement pas suffisant pour expliquer le carnage d’Utøya, d’ailleurs tenter une explication totalement pertinente ici serait plus que présomptueux. Mais au-delà des causes religieuses et politiques du terroriste norvégien, on pointe le passage à l’acte d’un individu parce qu’il appartient à une frange mal assumée de la société, les extrémistes. Dans cette optique le véhicule idéologique s’avère un prétexte commode pour extraire les causes intrinsèques au système. L’objet ici n’est pas la critique du capitalisme, en l’amalgamant aux causes du fanatisme religieux et du fascisme. Bien que de manière plus générale on puisse se poser la question de la tolérance et des accointances du politique et et de l’économique avec ces roides légions. Mais tenter de comprendre comment des Hommes sensés provenant du même berceau de civilisation peuvent en conscience faire exploser le crâne d’un enfant de quinze ans ?


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7 réactions à cet article    


  • Nolimé Nolimé 27 juillet 2011 11:32

    Merci pour cet article, très bien écrit et intéressant !

    Des individus « lessivés » et surtout standardisés à outrance, est-ce le terreau pour des actes explosifs et insensés ?

    Il faudrait prendre le mal à la racine, c’est à dire par l’éducation... La société est une chose, les moyens que l’on a de la remettre en cause en est une autre.

    Puisque l’Education Nationale ne remplit pas son rôle et préfère produire des travailleurs efficaces plutôt que des personnes « pensantes », ce sont aux parents de développer l’esprit critique, la réflexion, la culture générale, l’autonomie intellectuelle... malheureusement beaucoup n’ont pas cette capacité !


    • BisonHeureux BisonHeureux 27 juillet 2011 13:25

      Il faut changer de société !
      Osons la révolution avec Eva Joly !
      Hasta la libertad
      Salut et fraternité


      • Hermes Hermes 27 juillet 2011 15:01

        Bonjour,

        Le refuge dans des interprétations outrancières du fonctionnement de la société ne reflète que la souffrance des individus, bien évidemment. Quand il ne reste plus de barrière pour le passage à l’acte barbare, c’est la symptôme dramatique d’une perte totale de contact avec la réalité.

        Cette souffrance, ce n’est pas « la société » prise comme entité abstraite qui la génère. Cherchez dans plutot la maltraitance dans la vie de ces personnes qui perpétuent l’extrème de la maltraitance.

        Un père qui n’a plus de contact avec son fils depuis plus de 10 ans, une femme qui ne sait même pas que cet homme a un fils (négation totale), un couple qui n’a aucune existence sociale dans le village où ils habitent, un père qui souhaite la mort de son fils après que ce dernier ait exprimé toute sa folie.... autant de symptômes d’un environnement familial extrèmement pathogène.

        Les idéologies politiques ou religieuses extrèmes ne servent que de soupapes cathartiques à ces psychismes détruits.

        La violence qui génère ces monstres c’est dans le quotidien d’une vie familiale où le sentiment d’humanité n’existe plus qu’elle se perpétue. Notre propre violence sans atteindre ces extrèmes prend aussi sa source au quotidien dans des erreurs de comportement, des manques d’attention indispensables, des paroles qui dépassent le seuil de l’acceptable (les petites phrases qui tuent), un mal être que l’on décharge sur l’autre en voulant l’éduquer (soit-disant)...

        Balayons d’abord devant notre porte, sinon changer la société n’est qu’un slogan pour véhiculer toute la violence. Après tout, c’est aussi ce qu’ils veulent les extrémistes : changer la société !

        Mais le bien-être ne saurait être conditionné par la seule et unique capacité à réfléchir, celà se saurait. La pensée humainement « juste » est en fait une chose naturelle quand on se sent en paix avec soi-même, et émotionellement disponible.

        C’est la disparition de cet état et le sommeil qui s’ensuit qui génère toute la violence... d’abord auprès des proches ! L’enjeu est là : ne plus cultiver le sommeil et ses chimères et traquer la source de nos contradictions sans s’attarder aux justifications de nos actes et de nos paroles, toutes meilleures les unes que les autres.

        L’information qui nous gave et nous anesthésie émotionnellement est certes un facteur aggravant du sommeil dans lequel les émotions se chargent au gré des rêves et des cauchemards éveillés, mais quel pouvoir lui reste-t’il si peut en sortir  ?

         Et arriver à dire : « Yes you are » sans se sentir aucunement diminué, au contraire !

        Bonne fin de journée.


        • BOBW BOBW 27 juillet 2011 20:34

           "Balayons d’abord devant notre porte, sinon changer la société n’est qu’un slogan pour véhiculer toute la violence. Après tout, c’est aussi ce qu’ils veulent les extrémistes : changer la société  !"  ??

           Quel paradoxe : En apparence ,vous semblez en harmonie avec le souhait des oligarchies libérales esclavagistes conservatrices qui poussent et encouragent ces extrémismes, et qui ainsi surtout sont prêtes à tout, la violence et la guère comprises, pour éviter que change leur systême opressif. !


        • Hermes Hermes 27 juillet 2011 22:16

          Je ne pense pas dire quelque chose de différent de vous, bien que je n’ai pas abordé cet aspect dans mon commentaire.

          Bonne soirée.


        • Gargantua 27 juillet 2011 19:47

          Les racines du Mal est du à incompréhension que veux dire AMOUR.
          Nous avons eux deux guerres mondiales, qui a été un avertissement sérieux adresser à l’humanité, comme nous avons dormis, il n’est pas étonnant que tous les ingrédients sont à nouveaux là dans une puissance dénultipliér. 


          • storm storm 28 juillet 2011 01:29

            le postulat adopté par Breivik, c’est que c’est un individu ou un groupe d’individu motivé et agissant change la société, ce que ne peut faire la masse, la foule

            j’avais déja entendu ça dans la bouche d’une femme nord-américaine qui s’est battue (en justice), avec d’autres citoyen(ne)s contre le pompage de l’eau de leur rivière par une entreprise agro-ali., qui leur revendait ensuite en bouteille (en asséchant la rivière au passage)

            sinon tout le monde ne souffre pas, certains sont heureux d’êtres des abeilles butineuses, mêmes s’ils (elles) râlent parfois. Moralité : faites une révolution, prenez le pouvoir, imposez une dictature (soft), le peuple lui-même ne se rebellera pas tant qu’il aura ) manger (et de la bière au frigo)

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