Lettre ouverte aux artistes citoyens
Artistes réjouissez-vous car vous êtes téléchargés ! Vous êtes écoutés, vous êtes vus, votre art est apprécié. Quelle plus grande satisfaction pour un véritable amoureux de son art, pour un passionné dont le plus grand plaisir est d’abord de faire ce qu’il aime ?
Trouvères et troubadours, bateleurs et saltimbanques du XXIème siècle, grâce à Internet, même vos admirateurs les moins fortunés peuvent enfin connaître la joie de vous voir et de vous écouter. Votre art n’est plus réservé à ceux qui peuvent payer. Pour ces derniers, c’est la longue tradition populaire des concerts et des tournées que vous allez pouvoir perpétrer. Car en multipliant les concerts dans des salles à taille humaine, c’est en proximité avec votre public, qui vous aime tant et qui vous fait vivre, que vous allez gagner.
Gratuité d’une partie de vos œuvres ne signifie donc pas que vous êtes piratés. Personne ne vous vole votre talent ou ne s’attribue la paternité de vos créations. Et même téléchargé – d’ailleurs surtout téléchargé – vous gagnez en notoriété. Finalement pour l’internaute ce n’est jamais complètement gratuit, puisqu’en vous téléchargeant il reconnait votre talent. Ne mériterait-il pas un petit « merci » ?
Le prix d’un CD ou d’un DVD est aujourd’hui trop élevé pour qu’un érémiste ou un smicard ou un étudiant fauché puisse raisonnablement avoir accès à ses artistes préférés. Alors plutôt que de soutenir une loi liberticide qui s’en prend aux plus faibles, à ceux qui peuvent le moins payer, pourquoi, par exemple, ne pas militer pour une TVA réduite sur les CD et les DVD ? Ou faire pression sur des producteurs trop gourmands pour qu’ils réduisent leurs marges bénéficiaires ?
Il est étonnant de voir que certains des artistes qui s’engagent à récolter des fonds pour les plus démunis, sont les même qui tirent à vu sur ces moins fortunés parce qu’ils ont eu accès à leurs œuvres gratuitement sur Internet. D’ailleurs, il suffit d’y regarder de plus près, et de voir les fastes de leurs tournées « caritatives », les palaces, la haute couture et la gastronomie, pour comprendre où se situe leur véritable intérêt.
Malheureusement, beaucoup des nababs du show-biz ne sont pas un exemple de dévouement à leur art, ni un exemple de proximité avec leur public. D’ailleurs ce qu’ils aiment ce n’est pas le public, mais le public qui paye !
Est-ce si grave pour un artiste de devoir multiplier les dates de concert pour mieux gagner sa vie, plutôt que de s’assoir à vie sur les confortables revenus de leurs droits d’auteurs ? S’il peut vivre de son art, c’est un idéal. Sinon, pour faire de l’argent, comme la grande majorité des gens, il peut toujours trouver un travail qui lui laissera le temps de vivre sa passion. Car toutes les passions ne se monnayent pas, et les artistes les plus doués ne sont pas toujours les plus médiatisés.
Dans une « Lettre ouverte aux spectateurs citoyens », de nombreux artistes de renom se sont déjà engagés contre le projet de loi « Création et Internet » – comme si Internet pouvait limiter la créativité d’un artiste – et il est important de saluer ce message courageux de compréhension et d’ouverture vers l’avenir qu’ils viennent de signer.
Les supports CD et DVD sont déjà démodés. La façon de consommer du cinéma ou de la musique à changé. Aux artistes et à leurs producteurs de trouver des solutions pur s’adapter à la modernité plutôt que de se crisper autour de vieux acquis et d’intérêts déplacés. Tout comme les journaux gratuits n’ont pas tué la presse payante, l’accès gratuit aux œuvres d’auteurs ne tuera pas les œuvres payantes.
Pour tous ceux qui en ont assez d’essuyer la poussière de leurs boîtes à CD, qu’un seul maître mot : s’adapter.
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