Non à la toute puissance des experts « lanceurs d’alerte » !
La France est un pays curieux. Dès qu’il s’agit de lutter contre des moulins à vent, nous avons la capacité à sortir des experts de nulle part. Et qui n’ont jamais rien dit.
Les professeurs Debré et Even en guerre contre l’abus de médicaments, Irène Frachon en croisade contre les laboratoires Servier, le professeur Séralini et son étude démontrant la nuisance des OGM, plus anciennement André Cicollela et son combat contre les effets des ethers de glycol, Pierre Meneton attaqué en justice parce qu’il avait dénoncé le poids des lobbies dans le domaine de la santé : la liste est très longue. Et très curieusement, - mais n’est-ce pas une spécificité française ?, tous ces lanceurs d’alerte, ont été, à un moment ou à un autre, déboutés, condamnés, exilés ou ostracisés. Pourquoi ?
L’une des premières explications est que ces lanceurs sont à considérer comme des trublions de l’ordre établi. Parce qu’ils savent trouver des relais médiatiques (Debré et Even et l’hyper médiatisation de leur livre sur les médicaments inutiles ou dangereux), parce qu’ils savent trouver des relais politiques (Irène Frachon et le soutien constant du député Gérard Bapt), parce qu’ils répondent à une demande récurrente de la société (Séralini et les interrogations sur les OGM), ces lanceurs d’alerte occupent un terrain délaissé par la puissance publique. Notons à ce titre les errances successives des autorités de santé et les multiples crises sanitaires depuis les années 70, de l’hormone de croissance à l’affaire du sang contaminé en passant par les effets de l’amiante. Faire bouger les lignes, remettre en question des principes et des structures établies apparaissent comme des missions dont ces experts se sentent investis. Or les Français aiment les trublions parce que nous sommes des râleurs nés, critiquant toute forme d’autorité.
La seconde explication est la capacité de ses lanceurs d’alerte de jouer la provocation pour « agiter les consciences ». Irène Frachon et son « Mediator : combien de morts ? » s’inscrit parfaitement dans ce registre tout comme les professeurs Debré et Even et leurs 4000 médicaments inutiles et dangereux. Ce sont aussi ces rats atrophiés par des tumeurs monstrueuses exhibés sur tous les écrans de télévision qui semblent réveillés les consciences affaiblies et endormies de nos concitoyens. La provocation s’accompagne ainsi toujours du spectaculaire : souvenons-nous de tous ces témoignages de victimes du Mediator (combien au juste ? : 200 selon les premières études, 500, 1500, 2000 selon le Figaro, personne n’en sait rien) qui se sont retrouvées malgré eux dans les colonnes de nos quotidiens. Cette provocation est donc un élément évident d’hypermédiatisation qui fait vendre des journaux, écouter la radio et regarder la télévision. Un bruit par ailleurs sans cesse relayé dans les médias sociaux.
On pourrait objecter à tout cela que les lanceurs d’alerte sont des contre-pouvoirs. Certes. Néanmoins, compte tenu des différentes polémiques qui ont suivi ces « révélations », chacun devrait sans doute faire preuve de davantage d’esprit critique, les médias en premier lieu. En effet avec un peu d’analyse et de recul sur l’actualité, chacun devrait pouvoir prendre le temps de réfléchir. Comment Messieurs Debré et Even ont-ils pu rédiger en si peu de temps un ouvrage si conséquent sur ces 4000 médicaments inutiles ? N’ont-ils pas été aidés par quelques nègres besogneux auxquels ils ont tenu la main ? N’ont-ils pas été forcément guidés par des intérêts bien supérieurs (ou terriblement quotidiens) en assurant une promotion hollywoodienne de leur livre comme le rappelle Le Monde ? Comment expliquer que le professeur député UMP Debré conserve son poste de chef d’urologie à Shanghaï ?
Lorsque le Haut Conseil des Biotechnologies retoque l’étude Séralini, ce n’est pas pour défendre Monsanto, mais c’est bien pour « qu’une étude de long terme, indépendante, contradictoire et transparente, soit entreprise sous l’égide des pouvoirs publics quant à la sécurité sanitaire du maïs NK603. »
Lorsque l’ONIAM déboute 86% des dossiers des plaignants dans l’affaire du Mediator, c’est parce que le rapport de cause à effet n’est pas démontré. Et sur le même sujet, comment expliquer le terrible silence des cardiologues depuis les années 70 ?
A l’évidence, il faut des lanceurs d’alerte mais, pitié, permettez nous de juger sur pièce. L’argument d’autorité ne suffit plus à convaincre les consciences. Et le doute est toujours salutaire, que l’on s’appelle Debré, Even, Frachon, Séralini...
PS : quel sera le lanceur d’alerte pour l’affaire Eternit et le scandale de l’amiante ?
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